Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE  (Jean 17.17)
Cela me suffit...
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Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE
(Jean 17.17)
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LES SEPT PAROLES JÉSUS-CHRIST SUR LA CROIX




PREMIÈRE MÉDITATION.

  Jésus disait : Père pardonne-leur, car ils ne savent ce qu'ils font.Luc XXIII, 34.

  Si les paroles des mourants ont quelque chose de solennel, et de propre à produire une impression sérieuse sur ceux qui les entendent, cela est surtout vrai des dernières paroles des enfants de Dieu. C'est pour cela sans doute que le Saint-Esprit nous a conservé, dans l'Ancien Testament, celles d'un Jacob, d'un Moïse, d'un Josué, d'un David, et dans le Nouveau, les dernières d'Étienne, le premier martyr, les dernières peut-être de Siméon, et quelques-unes des dernières qu'écrivit Saint-Paul. Les paroles aussi de nos amis mourants nous sont chères et précieuses, et, s'imprimant profondément dans notre mémoire, elles restent gravées dans notre coeur.
Combien, à ce double titre, combien sont vénérables, et combien doivent nous être chères les dernières paroles de celui qui est le Fils unique de Dieu et qui fut notre frère. Il en a prononcé sept sur la croix, qui nous ont été rapportées, chacune par un ou deux des Évangélistes, paroles aussi frappantes par leur brièveté, que fécondes en instructions salutaires.

Nous avons le dessein, chers et bien-aimés au Seigneur, d'appeler, sur ces sept paroles successivement, votre attention et vos pensées.

Celle de ces paroles que le Seigneur paraît avoir prononcée la première de toutes, et qui doit nous occuper à cette heure, déclare de la manière la plus forte la puissance et la bonté de celui qui se laissa clouer sur une croix, et en qui habitait personnellement la plénitude de la Divinité. Si tu es le Roi des Juifs, lui disent ses ennemis, descends de la croix, et c'est précisément sur cette croix, dont il n'est pas descendu qu'il accomplit ces paroles de David, duquel il est le fils selon la chair, et qui fut en tant de choses, et en cela même, la figure de Jésus : Au lieu que je les aimais, ils ont été mes ennemis ; mais je n'ai fait que prier pour eux. C'est sur cette croix dont il n'est pas descendu, qu'il prononce cette prière bien digne du Roi promis à Israël, roi débonnaire et plein de douceur : Père ! pardonne-leur, car ils ne savent ce qu'ils font.

Méditons ensemble, chers frères, cette belle parole, et veuille celui qui l'a prononcée, nous en faire sentir lui-même toute la force et toute la douceur, et pénétrer nos coeurs par son Saint-Esprit d'une vraie repentance et d'une sincère charité. Amen.

I.

  Et Jésus disait : Père pardonne-leur.
Qui sont ceux en faveur desquels il fait monter vers le ciel cette prière ? Ce sont les principaux des Juifs, qui l'ont condamné injustement ; et la multitude qui a demandé sa mort, qui a poussé ces cris sanguinaires ôte, ôte, crucifie ; et Pilate, qui, convaincu de l'innocence de Jésus l'a livré néanmoins, pour qu'il fût crucifié ; et les soldats romains, qui exécutent la sentence, en ajoutant l'insulte, la raillerie et la cruauté. C'est pour eux tous, qu'il prie sur cette croix, sur laquelle tous, plus ou moins, ont contribué à l'attacher.

Père, dit-il. Il appelle Dieu de ce nom, le plus doux et le plus tendre, comme pour mieux émouvoir en leur faveur celui à qui il pouvait dire : Père... je sais que tu m'exauces toujours. Mais que demande-t-il à son Père pour ces cruels ennemis ?
Pour eux, il sollicite la première des grâces que peut et que doit désirer l'homme pécheur ; le pardon et par là même toutes les dispositions qu'il requiert, et tous les fruits qu'il produit, la foi, la repentance, la conversion, la paix, le salut. Il demande à son Père non seulement de ne pas les punir, de ne pas faire peser sur leurs têtes la malédiction de son sang, mais de leur faire sentir l'efficace de ce sang versé pour les pécheurs, de leur ouvrir les yeux, de les amener à lui. Père, pardonne-leur.... Car ils ne savent ce qu'ils font, ajoute-t-il.

O qui ne craindrait d'affaiblir en les commentant, tout ce qu'il y a de grandeur, de dignité, tout ce qu'il y a de miséricorde, tout ce qu'il y a de cette science qui sonde les coeurs et les reins dans ce peu de paroles : ils ne savent ce qu'ils font !
Les Chefs ; ils ne se doutent pas de la grandeur du péché qu'ils commettent. Dans leur aveuglement, ils croient avoir condamné un imposteur, un faux Messie. Ils auraient pu et dû regarder à ses oeuvres auxquelles il en avait constamment appelé, et qui n'étaient pas celles d'un imposteur. Mais enfin, ils ne l'ont pas reconnu. S'ils l'eussent connu, dit un Apôtre, ils n'auraient pas crucifié le Seigneur de gloire.
Le peuple, non plus, en demandant sa mort, ne savait pas quel crime ils allaient commettre. Je sais, leur dit dans la suite St.-Pierre, je sais, mes frères, que vous l'avez fait par ignorance, ignorance toutefois, qui n'était pas involontaire, et qui par conséquent ne pouvait être une excuse qu'auprès d'une miséricorde infinie.

Mais s'ils ne savent pas tout le mal qu'ils font ils savent encore moins le bien qu'ils font, c'est-à-dire dont ils seront les instruments, le bien que Dieu va tirer de ce qu'ils ont pensé en mal. Ils ne savent pas que ce sang qu'ils font couler, sera une source de purification ouverte pour la souillure de la maison de Jacob, une source où plusieurs même d'entr'eux puiseront avec joie des eaux de délivrance.

Oui, mes frères, il est doux, et il est permis de penser, que cette intercession mystérieuse de la miséricorde divine auprès de la justice divine ne fut pas sans effet pour tous ceux pour qui Jésus avait prié, et qu'en faveur de plusieurs d'entr'eux s'accomplirent ces oracles : Ils regarderont à celui qu'ils ont percé. Tu es monté au haut des cieux, emmenant une multitude de captifs. Tu as pris des dons pour les distribuer entre les hommes et même entre les fils des rebelles, afin qu'ils habitent avec l'Éternel leur Dieu. Quand j'aurai été élevé de la terre, j'attirerai les hommes à moi.

Elle s'accomplit, cette promesse de Jésus, pour plusieurs de ceux à qui St.-Pierre dit le jour de la Pentecôte : Vous l'avez fait mourir par les mains des méchants ; mais Dieu l'a ressuscité, de quoi nous sommes tous témoins ; qui touchés de componction répondirent : Hommes frères que faut-il que nous fassions ? à qui St.-Pierre répartit : Convertissez-vous, et que chacun de vous soit baptisé en rémission de ses péchés, et qui étant sauvés furent ajoutés à l'Église.

Elle s'accomplit, cette promesse, dans la personne de Saul de Tarse. Cette même voix de miséricorde, qui avait prononcé cette prière sur la croix, lui dit sur le chemin de Damas : Saul ! Saul ! pourquoi me persécutes-tu ? ouvre son coeur à l'Évangile, et fait de Saul un St.-Paul, du persécuteur un Apôtre de Jésus-Christ, qui ne veut plus savoir que Jésus-Christ et Jésus-Christ crucifié, et dont la plume trace avec actions de grâces : J'ai obtenu miséricorde, en sorte que Jésus-Christ a fait voir en moi une parfaite clémence.

Elle s'accomplit, cette promesse, en plusieurs membres de ce peuple malheureux, dispersé sur toute la terre, qui, journellement, dans ce siècle renoncent à l'incrédulité de leurs pères, et reconnaissent pour Sauveur, et pour Christ celui qui a prié pour eux, celui qu'ils ont maudit dans le temps de leur ignorance.

Elle s'accomplit en quelques-uns d'entr'eux qui, comme Saul converti sur le chemin de Damas, deviennent de puissants et zélés serviteurs de Jésus-Christ, pour édifier les chrétiens, pour annoncer à leurs frères Juifs et aux Païens, celui que Dieu a donné pour qu'il soit la lumière des Gentils, et la gloire de son peuple d'Israël.

Elle s'accomplira à la fin, cette promesse, dans la nation en masse, que Dieu aime encore, à cause de ses pères, que Dieu tient en réserve, pour traiter avec eux une nouvelle alliance, selon ses promesses publiées par Saint-Paul. Tout Israël sera sauvé.

O puissent-elles aussi s'accomplir cette prière et cette promesse de la miséricorde de Christ en faveur de tant de gens qui, au sein de la chrétienté, rejettent l'Évangile, dont ils sont entourés de toutes parts. Eux non plus, ne savent ce qu'ils font ; ils ne savent pas que ce qu'ils méprisent, ce qu'ils repoussent, ce qu'ils raillent, ce qu'ils maudissent, c'est ce qui seul peut les rendre heureux eux-mêmes, ce qui seul peut faire prospérer réellement les familles et les peuples, et faire cesser tant de scandales et de désordres, contre lesquels eux-mêmes souvent ne sont pas les derniers à élever la voix.

Puissent-elles s'accomplir aussi en faveur de tant de gens, qui, au milieu de nous, croupissent dans une grossière ignorance sur ce qu'il importe le plus à l'homme de savoir, ne savent ni ce qu'ils font, ni ce qu'ils doivent faire, parce qu'ils ne se soucient pas de connaître, eux qui portent le nom de chrétiens, le seul vrai Dieu et Jésus-Christ qu'il a envoyé !

Puissent-elles s'accomplir enfin en faveur de tant de gens, qui prétendent recevoir l'Évangile de Jésus-Christ, mais qui veulent l'arranger à leur manière, le rapetisser à l'étroite mesure de leur intelligence, en ôter tout ce qu'ils ne comprennent pas, tout ce qu'ils ne peuvent expliquer. Eux non plus, ne savent ce qu'ils font ; ils veulent, disent-ils, l'Évangile, et ils veulent en ôter ce qui en fait la vie et la force, quand ils travaillent à anéantir le mystère de piété, Dieu manifesté en chair, le mystère de charité accompli a Golgotha, le mérite et l'efficace de cette croix qui fut de tout temps scandale et folie, à ceux dont le Dieu de ce siècle a aveuglé l'entendement, de cette croix du haut de laquelle Jésus a prononcé cette prière. "Père pardonne-leur".
Oui, Père pardonne-leur aussi, car c'est toi qu'ils offensent ; toi qui dans ton amour nous as donné ton Fils, pour notre seule espérance de salut, ton Évangile pour notre seule règle de foi et de vie. Éclaire leurs yeux, amène leurs âmes captives à l'obéissance de Christ. Père pardonne-leur ; car ils ne savent ce qu'ils font.

Mais, mes frères, est-il aucun de nous, qui puisse croire que cette prière lui est étrangère ?
Ne savons-nous pas que nous avons tous besoin de pardon, que bronchant tous en plusieurs choses, faisant tous ce qui déplaît aux yeux de l'Éternel, nous ne pouvons être heureux, être sauvés, si nos péchés ne nous sont pardonnés.
Ne savons-nous pas que c'est pour nous que Christ a souffert, qu'il a été attaché à la croix, que c'est pour satisfaire à la fois, la majesté des lois de Dieu, la sainteté et la justice de celui qui a donné ces lois, et sa miséricorde qui veut pardonner ; que c'est pour cela que ce grand sacrifice a été offert ; que les Juifs, dont la méchanceté le consomma, n'ont été que des instruments dans la main de Dieu, et qu'ils n'ont fait qu'exécuter ce que dans son conseil il avait déterminé pour notre salut.

En priant pour ces malheureux qui l'ont attaché à la croix, c'est pour nous aussi, pour nos péchés qui l'ont amené sur la croix, c'est pour notre pardon que Jésus a prié, qu'il a dit à son Père : Pardonne-leur ; et en conséquence, nous qui croyons en lui, nous avons la rédemption en son sang, savoir la rémission de nos péchés selon les richesses de sa grâce.

Et sans doute, mes chers frères, plusieurs d'entre nous, nous pourrions dire à la louange et à la gloire de sa grâce : cette prière a été prononcée pour nous, et non seulement cela, elle a été exaucée pour nous.

C'est en vertu de cette prière de Jésus, que nous avons senti nos misères, que nous avons été attirés au Seigneur, que nous avons entendu dans nos coeurs cette parole consolante : Va-t'en en paix tes péchés te sont pardonnés ; et que dès lors tranquilles et heureux au fond, quoiqu'au milieu de bien des misères encore, si nous travaillons à notre salut avec crainte et tremblement, nous sentons que Dieu nous donne de vouloir et de faire, et nous savons que notre travail ne sera pas vain auprès du Seigneur.
O grâces lui soient rendues à jamais pour son don ineffable ! Oui nous publierons à jamais les richesses de sa grâce, et nous répéterons avec St.-Paul : Au roi des siècles, immortel, invisible, à Dieu seul sage soit honneur et gloire aux siècles des siècles.

Mais est-ce tout, chers frères, et cette prière offerte pour nous aussi, exaucée pour nous aussi, ne nous impose-t-elle aucune obligation, ou plutôt dans cette obligation de reconnaissance n'en est-il pas compris une aussi étroite, aussi sacrée ?

II.

   Oui, mes frères, si nous croyons véritablement en Christ, si nous pensons qu'il a prié pour nous, nous nous souviendrons aussi qu'il a souffert pour nous, nous laissant un exemple afin que nous suivions ses traces, nous saurons voir dans cette prière du Sauveur pour ses ennemis, pour lesquels il implore le pardon de son Père, nous saurons, dis-je, voir le modèle de la manière dont nous devons pardonner nous-mêmes ; la réfutation de tous les prétextes, de toutes les excuses qu'on allègue pour se dispenser de pardonner ; le plus beau commentaire le commentaire vivant de ces paroles prononcées sur la montagne de Galilée, et mises en action sur Golgotha : Aimez vos ennemis ; bénissez ceux qui vous maudissent ; priez pour ceux qui vous outragent et qui vous persécutent, afin que vous soyez enfants de votre Père céleste.

Et qui pourrait nous en dispenser ? Serait-ce la grandeur de l'offense, la méchanceté de l'offenseur ?
Mais Jésus pardonne à ceux qui lui ont fait mal sur mal, qui l'ont injustement condamné, qui l'ont traité comme le plus vil des malfaiteurs, qui ont violé à son égard toutes les règles de la justice et de l'humanité, et qui l'ont fait mourir sur une croix ; et nous, pour des offenses qui ne sauraient être mises en comparaison avec celles qui furent faites à notre Maître ; pour des offenses souvent telles que nous n'oserions les qualifier de ce nom, devant tout autre tribunal que celui de notre égoïsme, de notre orgueil, de nos prétentions exagérées, de notre susceptibilité, de notre imagination ombrageuse ; pour des offenses qui nous furent faites quelquefois sans intention, que quelquefois nous nous sommes attirées en tout ou en partie par notre imprudence, par nos hauteurs, nos dédains, notre humeur difficile, nos empiétements sur les droits d'autrui ; pour de telles offenses, nous refuserions de pardonner !

Mais fussions-nous entièrement innocents à l'égard de ceux qui nous offensent, ne nous souviendrons-nous pas que nous ne le sommes jamais devant Dieu, et si celui qui n'a pas connu le péché a bien voulu souffrir une si grande contradiction de la part des pécheurs, nous, ne continuerons-nous pas de souffrir patiemment, jusqu'au bout, jusqu'à ce que tout soit accompli, et en attendant, ne bannirons-nous pas de notre coeur et de nos lèvres, toute aigreur, toute irritation, toute parole dure ou amère, si nous voulons être les imitateurs pour être vraiment les disciples de celui qui s'est écrié sur la croix : Père pardonne-leur ?

Puis, mes frères, ne nous souviendrons-nous pas que ceux qui nous ont offensés, quelle que soit la nature de nos relations avec eux, quelle que soit leur position vis-à-vis de nous sur cette terre, sont au fond et toujours nos égaux, vis-à-vis de cette Majesté divine devant laquelle rentrent dans le néant toutes les supériorités terrestres et sociales.
Mais ici, c'est celui en qui réside cette majesté divine, celui que les Anges de Dieu adorent, celui par qui et pour qui toutes choses ont été faites. C'est le Fils unique de Dieu, qui pardonne, à qui ? aux enfants d'Adam, à des êtres d'un jour, à des créatures qui trembleraient, à des vers de terre qui ramperaient à ses pieds dans la poudre, si sa divinité ne s'était voilée à leurs faibles yeux en s'associant à l'humanité infirme pour sauver l'humanité pécheresse ; et ces vers de terre se dresseraient orgueilleusement pour refuser de pardonner à d'autres vers de terre ! Qui sommes-nous ? mes frères, et qu'était celui qui a dit sur la croix : Père pardonne-leur ! Voulons-nous pardonner, oui ou non, quand le Fils de Dieu pardonne ?

Et jusqu'où doit aller notre pardon ? Jusqu'où va celui du Seigneur Jésus ? Il ouvre la bouche, pour parler de ses ennemis. Écoutons.
Va-t-il se soulager par des imprécations ou au moins par des reproches ou des plaintes ? Il prie pour eux.
Va-t-il exagérer leurs torts, ou seulement faire ressortir ce qu'il y a de réellement odieux dans leurs procédés ? Il les excuse autant que cela se peut. Ils ne savent, dit-il, ils ne savent ce qu'ils font.
Leur souhaite-t-il du mal ? Il demande pour eux le plus grand de tous les biens, la grâce de Dieu, son pardon, qui comprend toutes les bénédictions spirituelles en Jésus-Christ, quand c'est Jésus-Christ qui le demande pour nous.

Voilà la leçon ; voilà l'exemple. Voilà le Maître, et nous, disciples du crucifié : Bénissons aussi ceux qui nous maudissent ; prions pour ceux qui nous maltraitent et qui nous persécutent. Pardonnons-nous l'un à l'autre, et si quelqu'un a sujet de se plaindre d'un autre, comme Christ a pardonné, nous aussi, faisons de même.

Ceux qui refusent de pardonner ainsi, ont-ils cru vraiment et du coeur à l'Évangile ?
Certes il est permis au moins, d'en douter.
Il est permis de douter qu'ils aient senti pour eux-mêmes le poids du péché, et ensuite la douceur du pardon ; qu'ils aient embrassé réellement et fortement la croix de Christ, comme leur seule ancre de salut.
Il est permis de douter qu'ils aient l'esprit de Christ et par conséquent qu'ils appartiennent à Christ ; car parmi tous les préceptes qu'il nous a donnés, il n'en est aucun qui soit si clairement exprimé, qui laisse moins de prise au doute, aux prétextes, aux fausses interprétations, aucun sur lequel lui-même et ses Apôtres aient plus souvent et plus fortement insisté, que celui du pardon des offenses, précepte que le Seigneur lui-même a voulu mettre dans notre bouche, en nous faisant dire tous les jours dans la prière modèle, dans l'Oraison Dominicale : Notre Père qui es aux cieux..... pardonne-nous nos péchés, comme nous pardonnons à ceux qui nous ont offensés.
Y aurait-il quelqu'un parmi nous, qui ne voulût pas pardonner de bon coeur, absolument et sans réserve ? alors il doit s'éloigner de tout ce qui rappelle et représente la croix du Seigneur Jésus. Qu'il s'éloigne donc de la Cène, à laquelle la miséricorde de Christ appelle ceux qui croient en Lui.
Qu'est-il dit de ce sacrement de la Cène dans lequel nous annonçons la mort du Seigneur jusqu'à ce qu'il vienne ? Que chacun s'éprouve soi-même, et qu'ainsi il mange de ce pain, et boive de cette coupe ; car quiconque en mange et en boit indignement, mange et boit une condamnation.

Il me semble que je puis dire à quiconque ne veut pas pardonner : II est inutile de vous éprouver vous-même. À cela vous pouvez déjà connaître que vous iriez a la table du Seigneur manger et boire une condamnation puisque vous êtes résolu à désobéir au commandement exprès de Jésus-Christ, commandement qu'il a répété la veille de sa mort, le soir même et dans la chambre haute où il a institué la Cène, et en nous conjurant par tout ce qu'il allait faire pour nous : C'est ici mon commandement que vous vous aimiez les uns les autres, comme je vous ai aimés. Personne n'a un plus grand amour que celui-ci, si quelqu'un donne sa vie pour ses amis. Vous serez mes amis, si vous faites tout ce que je vous commande.

Ceci, mes frères, nous concerne tous jusqu'à un certain point. Plusieurs d'entre nous ne gardent pas peut-être dans leur coeur ce qu'on appelle dans le monde une haine implacable, une haine mortelle, de ces haines qui s'exhalent en injures, en médisances, en calomnies, ou qui produisent de cruelles vengeances.
Mais aussi, il en est bien peu d'entre nous, qui n'aient gardé trop longtemps, qui n'aient peut-être en ce moment sur le coeur de ces petites offenses, qui résultent si facilement, si fréquemment de tant de conflits d'amour propre et d'intérêt, dans une société toute composée d'êtres imparfaits, de pécheurs.
O si ces temps solennels pouvaient être des temps de réconciliation, d'oubli, de pardon, de prévenances affectueuses et sincères, préparation et fruits d'une Pâque que nous sommes invités à célébrer, en ôtant le vieux levain !
O si nous pouvions savoir (et comme nous nous en réjouirions, comme les Anges de Dieu s'en réjouiraient !) si nous pouvions apprendre que des ennemis, peut-être d'anciens amis, des parents, des frères, des époux divisés, se sont tendu la main, qu'ils ont écouté, qu'ils ont compris l'exhortation du Sauveur : Avant d'aller à l'autel, s'il te souvient que ton frère a quelque chose contre toi, .... va premièrement te réconcilier avec ton frère.

Mais nous avons déjà fait des avances ; elles ont été repoussées, elles le seraient encore. Eh ! le Seigneur ne vous a-t-il pas fait plus d'une fois des avances, ne vous a-t-il pas plus d'une fois pressés, invités, appelés ? et n'avez-vous jamais repoussé ses avances et ses appels ? Eh bien, vous aussi, essayez encore, appelez encore, et si c'est en vain, faites encore comme le Seigneur, priez, mais priez bien sincèrement celui qui tient les coeurs en sa main ; priez-le tout d'abord pour vous-même, pour votre propre coeur, qui de lui-même et par sa nature, est si prompt à la colère et si lent à pardonner.
Priez-le qu'il vous ôte le coeur de pierre, qu'il vous donne le coeur de chair, et qu'avant tout, il vous fasse sentir réellement et profondément la grandeur du pardon qu'il offre aux pécheurs en Jésus-Christ.

Oui, mes frères, qui que nous soyons, qui devons tous nous sentir convaincus de péché, et de bien d'autres péchés, que celui de ne pas vouloir pardonner, si celui-là n'est pas le nôtre, cherchons, pauvres pécheurs que nous sommes, cherchons le pardon et la miséricorde auprès de celui, et par celui qui dit à son Père pour de grands pécheurs : Père pardonne-leur, car ils ne savent ce qu'ils font. Oui, ô Jésus, notre Avocat auprès du Père, notre Souverain sacrificateur, prie pour nous.

Père céleste exauce sa prière et pardonne-nous ! Nous sommes tous des transgresseurs de tes saintes lois, et en cela, aussi insensés que coupables, nous ne savons ce que nous faisons ; et nous ne le disons pas pour nous excuser ; car nous devrions bien savoir ce que nous faisons, si nous écoutions la voix de notre conscience et les enseignements de ta Parole. Hélas non ! nous ne savons ce que nous faisons ; nous ne sentons pas assez le mal que nous nous faisons par nos péchés, de quels biens nous nous privons, à quoi nous nous exposons, si n'écoutant qu'une juste colère, tu nous abandonnais à nous-mêmes.

Nous ne savons ce que nous faisons ; nous ne sentons jamais assez vivement combien nous sommes ingrats envers toi, ô notre Père, qui nous combles de tes biens, envers toi qui n'as pas épargné ton propre Fils, mais qui l'as livré pour nous, et qui veux nous donner toutes choses avec lui !
Au moins quand nous méditons sur sa croix, nous devons bien voir combien tu as en horreur le péché, qui n'a pu être expié que par son sang ; nous devons sentir la grandeur de notre misère, la grandeur de ton amour, et, quelle serait, si nous rejetions ton amour, la grandeur de ton courroux ; nous devons sentir aussi plus fortement l'obligation de nous pardonner les uns aux autres, comme Christ nous a pardonné.
Rends plus brillant ce rayon de lumière qui apparaît à nos faibles yeux. Rends durable et féconde une émotion qui tant de fois fut stérile et passagère. Change-la par ta grâce en une vraie componction de coeur, et qu'une sincère repentance, une foi réelle et vivante en ton Fils, produise en nous par ton Esprit, la charité, la paix, la patience, la bonté, la bénignité, la douceur, tout ce qui t'est agréable en Jésus-Christ, auquel soit gloire aux siècles des siècles.
Amen.


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