Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE  (Jean 17.17)
Cela me suffit...
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Il est écrit:
TA PAROLE EST LA VERITE
(Jean 17.17)
Cela me suffit...



LA MÉDITATION DU CHRÉTIEN,
ou
SERMON
Sur le Ps. XIX. v. 15.


Pierre Butini
Ministre du Saint Évangile.
 1786

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Que les paroles de ma bouche et la médition de mon coeur te soient agréables, ô Éternel mon Rocher et mon Rédempteur.

Reçois favorablement les paroles de ma bouche Et les sentiments de mon coeur, O Éternel, mon rocher et mon libérateur ! (Ps. XIX. 15)

 

Mes Frères,
Le coeur de l'homme est trompeur et désespérément malin par-dessus toutes choses ; qui le connaîtra ? Je suis l'Éternel qui sonde les coeurs et qui éprouve les reins, pour donner à chacun selon sa voie et selon le fruit de ses oeuvres. (Jérém. Ch. XVII. v. 9. 10) Tout est nu et à découvert devant les yeux pénétrants de celui à qui nous avons à faire ici.

Auprès des hommes, il suffit presque de ménager les apparences ; Ils ne jugent des pensées, des affections de l'âme, que par la conduite extérieure, et il est facile de les tromper par une artificieuse hypocrisie. Mais notre souverain Juge ne tient compte de nos bonnes oeuvres, qu'autant qu'elles ont pour principe des motifs saints et louables et qu'autant qu'elles ont pour but l'avancement de sa gloire et l'édification de nos frères. Il ne fait pas moins d'attention aux mouvements de nôtre coeur, qu'à nos actions et à nos démarches, et ce n'est qu'à ceux qui sont nets de coeur qu'il fera voir sa face en justice.
Nôtre Prophète paraît pleinement convaincu de cette vérité ; non content de demander à Dieu, qu'il le soutienne dans la pratique de ses devoirs, il implore encore le secours de sa grâce, afin qu'elle règle ses pensées mêmes et ses inclinations les plus secrètes. Que la méditation de mon coeur, dit-il, te soit agréable, ô Éternel, mon rocher et mon Rédempteur !

Ces paroles peuvent regarder l'excellent Cantique même, dont elles sont la clôture. Elles font l'effet d'une humble défiance (méfiance) qu'a l'Auteur sacré, tant sur les mouvements de son coeur, que sur les expressions de sa bouche.
Il prie son Dieu de supporter avec indulgence les défauts et les imperfections qui peuvent s'y être mêlées. Ce Psaume à des beautés incomparables. On nous y donne les idées les plus nobles et les plus majestueuses de la Divinité, et de ses perfections. On nous y fait une peinture de ses ouvrages tout à fait propre à exalter la profonde sagesse et son infinie puissance. Quels traits n'y emploie pas le Prophète pour nous faire concevoir l'équité et les douceurs des Lois Divines ? Il en fait un portrait qui charme, et qui nous porterait à les pratiquer pour elles-mêmes, quand elles ne seraient pas appuyées d'ailleurs, par de ravissantes promesses. Il y trouve les lumières les plus sûres et les plus épurées, des consolations vives et touchantes ; et il s'exprime là-dessus en des termes qui marquent qu'il est pénétré jusqu'au fond de l'âme de sentiments qu'il fait paraître ; II préfère la connaissance, et surtout l'observation des lois de Dieu, a tout ce que le monde a de plus attrayant, de plus exquis et de plus rare ; et bien loin qu'il y ait rien de contraint et de forcé dans son obéissance, il témoigne qu'il en fait toute sa joie, et qu'il ne goûte de satisfaction, qu'à pratiquer les ordres de son grand Maître.

Ensuite il fait une confession humble et sincère de ses fautes ; II ne se contente pas d'implorer la miséricorde de Dieu sur les péchés les plus criants, les plus grossiers, sur ceux qui avaient laissé dans sa conscience des plaies cuisantes et profondes ; II y demande encore le pardon de ses fautes les plus légères, de celles qu'il pouvait avoir commises par inadvertance, de celles qui lui étaient échappées malgré lui, et par une faiblesse presque invincible, de celles dont à peine avait-il conservé la mémoire, ou qui s'étaient entièrement effacées de son souvenir, tant elles semblaient petites.

Enfin il reconnaît combien il est incapable de s'acquitter de ses devoirs par ses propres forces, il implore le secours d'en-haut, afin de pouvoir se garantir de nouvelles chutes ; II fait éclater une ardeur vive et empressée pour la sanctification et pour la réformation entière de sa conduite ; mais il fait et il avoue en même temps, que ce grand, que ce pénible ouvrage est beaucoup au-dessus et de ses forces et de sa constance, que sans l’assistance de Dieu il ne saurait s'arracher avec efficace au monde et à ses délices.

Voilà les sentiments qui règnent dans tout ce Cantique, mais exprimés d’une manière tout à fait propre à les inspirer aux autres. Cependant telle est l’humilité de notre Prophète, qu'il croit avoir besoin d'indulgence et de support, par rapport à cet acte même de sa piété et de sa reconnaissance : il craint que son amour n'ait pas été assez tendre, que sa gratitude n'ait pas été assez vive, que ses transports n'aient pas été assez animés, que son attention n'ait pas été assez soutenue, que d'importunes distractions ne soient venues troubler le sacrifice de ses lèvres, qu'une languissante froideur n'ait ralenti les mouvements de son zèle, que ses expressions n'aient pas été assez respectueuses assez conformes à la suprême grandeur de celui dont il célébrait les louanges, et que les sentiments de son coeur n'aient pas entièrement répondu aux paroles de sa bouche ; II craint qu'il ne fut pas dans le fond aussi rempli de la grandeur, des bontés et des perfections infinies de Dieu, qu'il le fait paraître, qu'il n'y eut dans ses expressions plus de vivacité, que dans les sentiments de son âme. Que la méditation de mon coeur, s'écrie-t-il, dans cette appréhension ; Que la méditation de mon coeur, que les paroles de ma bouche te soient agréables, o Éternel, mon rocher et mon Rédempteur.

Quelle prodigieuse différence entre les dispositions où se trouve nôtre Prophète, et celle de la plupart des Chrétiens !
On regarde le devoir de la prière, comme une tâche désagréable et gênante, on s'en dispenserait presque, si ce n'était pas se plonger dans une indévotion entière ; on tâche de s'en tirer le plus promptement qu'il est possible, et bien loin de faire de sérieuses réflexions sur la manière dont on s'est acquitté de cette obligation feinte, on est toujours assez content de soi-même, pourvu qu'on ne l'ait pas entièrement négligée. On prie avec langueur, avec ennui, avec nonchalance ; on prie presque sans application à ce qu'on dit, on ne se présente devant Dieu qu’en apparence, pendant que le coeur est tout rempli, tout occupé de pensées mondaines ; point de zèle, point de ferveur, point de respect dans cet exercice ; et cependant on ne daigne pas s'en faire le moindre reproche, et finir au moins ses prières par un aveu ingénu et humble de son indignité, en gémissant amèrement sur sa stupidité, sur sa profane indifférence et en demandant à Dieu avec larmes, qu'il lui plaise d'exaucer nos voeux malgré les défauts si essentiels qui les accompagnent, et qu'il nous fasse la grâce de nous présenter dans la suite devant lui avec des dispositions plus respectueuses et plus Chrétiennes ; il faut dire avec David ; Que la méditation de mon coeur te soit agréable.

C'est par là que devraient commencer toutes nos prières, afin d'obtenir cet esprit de supplication qui prie dans le coeur des fidèles par des soupirs inénarrables (inexprimables).

Souvent nous demandons à Dieu de faux biens, que nôtre aveuglement nous fait regarder comme véritables et solides, mais qui sont en effet des maux très réels et très funestes ; et ce Suprême Arbitre de toutes choses ne saurait nous donner des marques plus accablantes de son indignation, qu'en exauçant des prières si téméraires.
Au lieu de lui abandonner entièrement le soin de ce qui nous concerne, nous prétendons faire la loi à sa sagesse et à sa providence.
L'un demande des richesses, et peut-être les emploiera-t-il pour satisfaire ses désirs déréglés, peut-être rempliront-elles son coeur d'une présomption excessive.
L'autre demande la santé avec des mouvements d'inquiétude et d'impatience, et peut-être en ferait-il un pernicieux et criminel usage.
Plusieurs demandent des dignités, un rang distingué dans le monde, et peut-être ne s'en serviront-ils que pour satisfaire leur ambition et leur vanité. Mais pour les biens précieux de la grâce, à peine daigne-t-on les rechercher par ses prières, ou on ne le fait au moins que par manière d'acquit (par devoir, par obligation), avec la dernière indolence.

Ces biens exquis et inestimables, on ne les juge presque pas dignes de ses empressements et on abandonne avec une stupidité aveugle le capital, l'essentiel, ce qui peut seul nous procurer un bonheur solide et durable, pour s'appliquer uniquement à l'acquisition des biens de la terre, qui sont si trompeurs, si vains, si fragiles.
Des prières de ce caractère ne font qu'irriter la Divinité contre ceux qui les lui adressent, bien loin de leur procurer les effets de sa faveur et de sa bienveillance.
L'Évangile n'a presque en vue que de nous détacher de ce monde : et nous ne présentons à Dieu dans nos prières, que des coeurs tout remplis des convoitises mondaines ; et pour ce qui est des richesses de la grâce, dont la parole de Dieu nous fait des peintures si attrayantes, on n'en connaît pas du tout le prix, et l'on y est entièrement insensible.
Jugez après cela s'il n'est pas absolument nécessaire que nous demandions à Dieu avant que de commencer nos prières, qu'il nous inspire lui-même ce qui doit en faire l'objet, afin que nous n'ayons ni désirs, ni inclinations qui ne lui soient agréables. Mais ce n'est pas encore assez, et il faut que nos prières soient accompagnées de plusieurs saintes dispositions, pour être exaucées. Nous devons être tout pénétrés de la Majesté suprême de l'Être que nous adorons, et que nous invoquons dans nos nécessités ; nous devons nous anéantir en sa présence par l'humiliation la plus profonde. Nôtre respect, nôtre vénération ne doivent avoir aucunes bornes.

C'est le Maître souverain du monde, c'est le sage, le puissant Auteur de ces ouvrages si grands, si merveilleux qui nous environnent. C'est le suprême dispensateur de tous les biens, de toutes les grâces temporelles et spirituelles. Il possède dans un degré sublime toutes les perfections imaginables ; il est élevé par-dessus tous les Cieux et il habite une lumière inaccessible. Nous sommes à son égard dans une entière dépendance ; sans sa bénédiction, tous nos soins sont inutiles, tous nos projets s'évanouissent, nos entreprises les mieux concertées, les mieux conduites échouent ; nôtre chair, nos passions, triomphent de nôtre faiblesse ; ils nous tiennent opprimés sous leur joug, et dans un honteux esclavage.
Voilà les réflexions qui doivent nous occuper, avant que de faire nôtre prière.
Voilà les sentiments de respect et d'humiliation, que nous devons demander à Dieu qu'il nous inspire, afin que la méditation de notre coeur lui soit agréable, au lieu que pour l'ordinaire, nous paraissons en sa présence redoutable, sans la moindre préparation, sans réfléchir tant soit peu, et sur ce qu'il est, et sur ce que nous sommes, l’esprit encore tout rempli de pensées frivoles, et quelquefois même de pensées vicieuses et criminelles.

Enfin nôtre zèle, nôtre ardeur doit être proportionnée à l'excellence des biens précieux, qui sont l'objet de nos voeux et de nos prières, C'est la grâce de la sainteté qui fait nôtre première gloire, qui nous rend agréables à Dieu, qui nous procure la protection, son amour, qui retrace en nous son image, qui nous transforme à sa ressemblance. C'est le pardon de nos fautes qui nous fait approcher avec confiance du trône de la grâce, qui comble nôtre âme, d'une douceur, d'une paix, et d'une joie ineffable, qui dissipe nos frayeurs, nôtre désespoir, nos alarmes, qui nous fait trouver en Dieu, non pas un Juge sévère et terrible, mais un Père tendre et propice ; qui nous rend héritiers de Dieu et cohéritiers du Seigneur Jésus ; qui nous donne de légitimes prétentions sur la béatitude céleste, qui nous en procure dès cette vie et les avant-goûts et les arrhes, et qui ne manquera pas de nous en faire posséder un jour la plénitude pendant toute l'étendue des siècles. Nos transports sauraient-ils être assez vifs, nôtre ardeur assez empressée, nôtre zèle assez animé, nos désirs assez véhéments, nôtre coeur assez enflammé, nos prières assez ferventes ?
Mais le malheur est que tout précieux, tout immenses que sont les biens de la grâce et de la gloire, nous ne sommes à leur égard que tiédeur et qu'indifférence : nous ne les demandons presque que pour la forme, mais sans une intention sincère de les ravir par une importunité pieuse, par une sainte violence. Les délices du présent siècle, ses amusements, nous tiennent lieu de tout, nous y bornons nôtre félicité, et travaillant uniquement pour cette vie, ne soupirant qu'après ce qui peut flatter nos sens, nôtre vanité, nos passions vicieuses, à peine pensons-nous qu'il y ait des biens plus relevés, plus dignes de nos empressements, et des joies plus vives, et plus solides.

Il n'y à que l'Esprit Saint qui puisse enflammer nos désirs, et animer nos prières ; II n'y a que le charbon pris de dessus l'Autel, qui puisse allumer dans nos coeurs les flammes d'une dévotion fervente ; II n'y a que Dieu lui-même qui puisse sanctifier nos voeux, et y imprimer les caractères qui seuls les rendent efficaces. Que la méditation de mon coeur te soit agréable, ô Éternel, mon rocher et mon Rédempteur, doit dire le fidèle, avec l'homme selon le coeur de Dieu.
Mais étendons plus loin, Mes Frères, les vues de ce saint Prophète ; il vient de confesser ses péchés commis par erreur, et ses fautes cachées, il vient de demander à Dieu qu'il le préserve de ces péchés que l’on commet par un principe d'obstination dans le crime, et contre les lumières les plus distinctes de sa conscience

N'y a-t-il pas beaucoup d'apparence, quand il implore sa grâce dans nôtre texte ; afin qu'elle l'empêche aussi de tomber dans les fautes même les plus légères afin qu'elle sanctifie en général ses pensées et ses paroles, en sorte qu'il ne lui en échappe aucune qui ne contribue à l'édification du prochain et à la gloire de son grand Maître ?
Il serait à souhaiter qu'il ne s'élevât dans nos coeurs, ni désir, ni pensée, qui ne fut bien réglée, et toute Chrétienne ; mais telle est nôtre faiblesse et le dérèglement naturel de nôtre esprit, que nous ne saurions sans témérité prétendre à une pureté si parfaite. Nous ne sommes pas les maîtres d'empêcher que mille pensées soudaines et imprévues ne naissent malgré nous, dans nôtre âme : souvent nous ne pouvons pas les en bannir aussitôt que nous souhaiterions, elles y laissent des traces qui ne s'effacent pas dans un moment, il faut que le temps les dissipe, ou qu'elles s'évanouissent d'elles-mêmes. Nôtre condition à cet égard est bien triste, et doit nous rendre à nos propres yeux bien vils et méprisables, Que l'on prenne l'homme en apparence le plus grave et le plus sage, de ces gens qui semblent ne s'occuper que de choses ou pieuses, ou au moins importantes et solides ; de ces gens qui regardent avec dédain tout ce qui sent la bagatelle, et qui n'est d'aucune conséquence : Qu'il nous soit permis de pénétrer au travers de cet extérieur vénérable, et qui nous fait concevoir des idées si avantageuses de la situation de leur âme. Combien de pensées absurdes, combien de désirs ridicules et vicieux peut-être, combien de projets extravagants, combien de mouvements de vanité, mais dune vanité pleine de petitesse et mal entendue, ne verrions nous pas se succéder en foule les uns aux autres dans son coeur ?
Qui est-ce qui pourrait soutenir un examen de cette nature, et sans être comme accablé de confusion et de honte ?

Ainsi, Mes Frères, avouons qu'à cet égard nous sommes très faibles et qu'il n'y a que Dieu qui puisse réformer un dérèglement si étrange. Demandons lui avec ardeur qu'il nous corrige, qu'il nous change ; Car enfin aucune de nos passions honteuses, aucune de nos pensées ridicules ne lui échappent. Et quel spectacle pour cet Être suprême, que de voir des créatures qu'il n'a tirées du néant qu'afin qu'elles soutinssent avec dignité l'excellence de leur nature, et la grandeur de leur destinée, ramper pourtant avec tant de bassesse, se faire une occupation presque continuelle de choses frivoles, former nuls desseins fous et nuisibles, et qui ne sauraient à la fin manquer de les perdre ?

Mais le principal et ce que nous devons demander avec le plus d'empressement et d'instance, c'est que nous n'attachions pas au moins nôtre esprit à des pensées de cette nature, c'est que nous n'en fassions pas le sujet de nos méditations les plus appliquées ; que nous ne négligions rien pour les étouffer dès leur naissance même ; que nous ne nous plaisions pas à les entretenir par des réflexions pernicieuses ; que bien loin de les exciter ou de les nourrir dans nos coeurs, nous gémissions de ne pouvoir pas l'épurer entièrement de ces pensées ou criminelles ou extravagantes.

Rien ne nous attache plus vivement à ce qui frappe nos sens et qui les flatte. Nous ne connaissons presque de biens réels, que ceux que nos sens et que le monde nous procure.
Voilà les funestes douceurs qui nous ravissent et qui nous enchantent ! Voilà ce qui enflamme nos désirs et qui réveille nos convoitises !
Voilà ce qui fait le sujet de nos rêveries les plus agréables ! et voilà après quoi nous soupirons avec la passion la plus emportée !

Si nous ne jouissons pas actuellement de ce que nôtre âme souhaite, nous nous faisons au moins un amusement plein de charmes de nous en occuper, de nous le promettre.
Nos passions souvent rebutées s'évanouiraient d'elles-mêmes ; mais les espérances flatteuses dont nous nous repaissons, les entretiennent et les fortifient. Les impressions dangereuses que les objets sensibles peuvent avoir faites dans nos coeurs, deviennent tous les jours plus profondes, et à là fin entièrement ineffaçables.
Un homme esclave de ses plaisirs ne roule dans son esprit d'autres pensées, que celles que lui inspirent ses passions honteuses, ses voluptés passées, ou celles qu'il se promet dans la suite.

Est-il possible que Dieu jette sur une âme si dépravée, de favorables regards ? Les soucis, les inquiétudes du siècle, n'obsèdent pas moins l'Esprit. Non seulement elles font passer les journées presque entières, sans songer sérieusement à ce que Dieu a fait pour nous, et à ce que nous sommes obligés de faire pour lui, afin de lui témoigner nôtre reconnaissance : Mais ne dérobent-elles pas même à la dévotion les moments si courts et si rares qu'on lui destine ? N'en est-elle pas troublée et interrompue ? N'y répandent-elles pas de la distraction, de la langueur et de la négligence ? Nos prières n'en sont-elles pas plus froides et moins appliquées si ce n'est quand il s'agit de demander au Ciel, ou le succès de nos desseins, ou un remède à nos inquiétudes ?

On assiste bien souvent aux saintes Assemblées, comme n'y étant point ; on y porte ses sollicitudes mondaines, et on s'en occupe tout entiers, en la présence de Dieu même. Ce ne sont chez bien des gens, que projets nouveaux pour avancer sa fortune, ce n'est qu'une continuelle application à profiter des conjonctures, ou à en faire naître de favorables, ce ne sont que profondes réflexions sur les voies les plus sures et les plus propres à réussir dans ses entreprises. Nous ne prétendons pas condamner les soins que l’on se donne pour pourvoir à ses nécessités, et à celles de sa famille, après que l'on s'est acquitté avec toute l'exactitude dont on est capable de ses devoirs envers Dieu : Ces soins sont légitimes et indispensables.
Mais ce qui nous semble peu conforme aux maximes de l'Évangile, ce sont ces vues si ambitieuses, si vastes, qui font que l’on ne fait donner aucunes bornes à ses convoitises, que l'on voudrait tout engloutir par une avidité démesurée et insatiable ; que l'on cherche plus à satisfaire la vanité, son amour pour l'éclat et pour la pompe, qu'à se mettre en état de soulager les misérables, et de donner à ses enfants une éducation avantageuse. Et plut à Dieu que l'on s'en tint encore à ne pas régler ses vues et ses desseins avec assez de modération et de retenue !
Ce qu'il y a de pis, c'est qu'on se permet tout pour réussir dans ses entreprises ; on n'examine pas si les moyens que l'on emploie sont légitimes, on se contente qu'ils soient sûrs et immanquables.

Combien de supercheries ne met-on pas en oeuvre pour se tromper les uns les autres, pour établir sa fortune, ou pour la soutenir, pour se tirer d'embarras, au préjudice de son prochain ?
Tel est le sujet et le fruit des méditations les plus sérieuses et les plus ordinaires d'un très grand nombre de personnes. Pourvu que le larcin ne soit pas grossier et qu'il se puisse pallier (se dissimuler) en quelque manière, combien de gens qui s'en font peu de scrupule ?

Vous diriez que c’est un privilège attaché à la profession que l'on exerce. Et ces gens qui ont les mains pleines d'extorsion et de rapine, ne sont pas moins contents de leur conduite, ne sont pas moins remplis de présomption et de confiance, que s'ils s'étaient enrichis ou maintenus par les voies du monde les plus équitables.
Un vindicatif qui croit avoir reçu quelque injure, se donne-t-il le moindre repos jusqu'à ce qu'il ait donné effort à son ressentiment et à sa rage ; Ne met-il pas toute son application, toute son industrie à imaginer les moyens de satisfaire sa passion dans toute son étendue et sans courir aucun risque ? N'a-t-il pas le coeur déchiré par le plus violent dépit lors qu'il ne saurait venir à bout d'exécuter ses desseins funestes ? En un mot, nous ne méditons la plupart du temps que sur ce qui a du rapport à nos faiblesses et à nos affections dominantes ; nos pensées sont toujours terrestres, souvent même elles sont vicieuses : Et nôtre vie n'est qu'un tissu continuel ou de vues intéressées ou de desseins criminels, ou de projets illégitimes.
Ah ! que nous avons bien besoin que la grâce nous sanctifie, qu'elle nous détache du monde, qu'elle réprime nos convoitises, qu'elle efface les impressions si vives, que font dans nos coeurs les objets sensibles, qu'elle nous les fasse regarder avec dédain, ou au moins avec indifférence, qu'elle nous en découvre la fausseté, l'inconstance, les pièges ; qu'elle nous donne du goût et du zèle pour les biens spirituels, qui sont les seuls qui nous puissent procurer une félicité solide.
De nous-mêmes nous ne saurions avoir une bonne pensée ; II n'y a que l'Auteur de tout don parfait qui puisse nous inspirer des dispositions Chrétiennes et saintes ! c'est à lui que nous devons nous adresser avec d'ardents soupirs, et par des voeux sincères pour lui dire ; Que la méditation de notre coeur te soit agréable !

Il ne suffit par d’écarter de notre esprit ces pensées vicieuses que l'Évangile condamne ; II ne suffit pas de n'avoir pas le coeur pénétré et toujours rempli ou d'un sordide intérêt, ou d'une sensualité grossière ; mais il faut lui donner des objets dignes de la qualité d'enfants de Dieu que nous possédons, et d'héritiers du Royaume céleste. Ce serait une stupidité criminelle que de ne s'occuper de rien.
La Religion et la Nature nous fournissent des sujets de méditation relevés, importants et sublimes. Un Être éternel, tout parfait, immense, les merveilles étonnantes de ses bontés infinies et de sa profonde sagesse, l'incomparable beauté qui éclate dans tous ses ouvrages, cet artifice sans égal, qui paraît dans leur structure, la conduite de sa Providence, la durée de cet Univers qu'il soutient depuis tant de siècles, dans un état si uniforme ; le cours si réglé, si invariable de ces corps lumineux, qui roulent sur nos têtes ; la pluie et la chaleur qu'il dispense successivement avec un soin si utile pour les hommes ; tout ce qui peut servir à nos besoins, qu'il tire du sein de la terre avec abondance, les douceurs mêmes qu'il nous fait goûter dans tout ce qu'il a créé pour nôtre usage.
Tous cela mérite bien que nous y fassions de temps en temps des réflexions sérieuses, pour rendre au Sage Auteur de la Nature, au Suprême Arbitre de toutes choses, les actions de grâces, et les louanges qui lui sont dues.

Mais ce qui doit nous occuper surtout, et ne sortir jamais de nôtre pensée, ce sont les faveurs signalées, les richesses inépuisables qu'il nous procure par son Évangile. Cette bonté incompréhensible avec laquelle il nous supporte, la longue attente de ses compassions, qui nous invite tous les jours à la repentance ; le pardon qu'il nous offre de nos fautes même les plus criantes, de nos habitudes les plus invétérées, pourvu que nous y renoncions par une conversion sincère ; le sang de son Fils unique qu'il a répandu pour nous, afin qu'il fit l'expiation de nos offenses.
Alors que tous ces prodiges de tendresse ne nous touchent presque point, ou ne le font que d’une manière très faible, alors que nous n'y pensons presque jamais, ou que nous ne le faisons le plus souvent qu'en passant et avec nonchalance :
- c'est ce qui devrait nous ravir hors de nous,
- c'est ce qui devrait nous remplir tout entiers et nous occuper sans cesse,
- c'est ce qui devrait exciter dans nos coeurs de saints transports et une reconnaissance sans bornes,
- c'est ce qui devrait nous inspirer pour un si bon maître, un dévouement sans réserve, et nous faire surmonter avec joie les plus grandes difficultés, pour lui témoigner que rien ne nous coûte quand il s'agit de lui obéir et de lui plaire.

Ce n'est pas assez de nous occuper des grands et nobles objets de la nature et de la grâce, nous devons aussi méditer sur le péché. Mais il faut prendre garde car cet objet a deux côtés, l'un agréable, et propre à nous corrompre ; et l'autre hideux et propre à nous sanctifier ; Bien loin de le regarder par ce qu'il a de propre à nous séduire, il faut méditer. sérieusement sur les horreurs du vice, sur tout ce qu'il a de bas, de honteux et de détestable ; il faut s'en faire des peintures affreuses, et propres à le faire rejeter arrière de nous avec une indignation toute sainte ; II n'y a point d'horreur qu'il ne cache sous des apparences flatteuses.

Pécher, c'est insulter la Divinité elle-même,
- c'est mépriser ses lois ; les plus inviolables,
- c'est renoncer à son amour, c'est le renverser de dessus son trône, pour y placer nos passions et nos convoitises, pour nous y placer nous-mêmes avec une impiété audacieuse,
- c'est ne faire, aucun cas des glorieuses récompenses qu'il nous propose,
- c'est regarder les menaces de son Évangile comme une fiction, comme de pures chimères,
- c'est préférer la faveur du monde à la sienne,
- c'est s'endurcir, se soulever contre les exhortations les plus pressantes, les plus vives,
- c'est payer les bienfaits les plus inestimables, de l'ingratitude la plus odieuse,
- c'est crucifier de nouveau le Seigneur de gloire,
- c'est tenir pour une chose profane le précieux sang de son alliance.

Voilà les caractères du péché et de la persévérance dans le vice ; Voilà ce que nous devrions toujours avoir devant les yeux, afin que la seule idée du crime nous soulevât, et nous rendit incapables de le commettre, afin que nous ne fussions pas le dupe des artifices du Diable, qui a soin de nous présenter les actions les plus criminelles sous une face riante et perfide, et de nous en cacher la noirceur.
Ce ferait là un préservatif assuré contre le venin de la convoitise, et un bouclier impénétrable à tous les traits de nos ennemis les plus malins.

Il nous arrive souvent de méditer sur les défauts d'autrui, et de gémir sur les désordres, que l'on voit régner dans le monde : mais nous évitons avec soin de nous étudier, et de nous connaître nous-mêmes.
Nous ne pouvons presque faire à cet égard que des découvertes mortifiantes, nôtre amour propre ne nous permet pas d'entrer dans le détail de nos imperfections et de nos faiblesses. La vanité les couvre d'un voile pour l'ordinaire impénétrable, elle les déguise, elle les fait disparaître, elle les adoucit, elle les excuse, elle les revêt presque toutes d'un caractère d'innocence ; Elle les justifie sur l'exemple des autres hommes, dont les sentiments ne sont pas plus Chrétiens, ni la conduite mieux réglée.
Elle les rejette sur l'infirmité de nôtre nature qui les rend inévitables, quoi qu'avec une sérieuse application l'on pût enfin venir à bout de les surmonter, et de les vaincre.
Elle érige souvent en vertus nos défauts les moins pardonnables. L'avarice perd à nos yeux ce qu'elle a de honteux et de bas ; on a soin de l'appeler une sage prudence, une économie louable. Le ressentiment, la vengeance sont, dit-on, les sentiments du monde les plus légitimes, les effets d'un coeur bien placé, d'une âme grande et généreuse. Les voluptés les plus criminelles ne sont, dans le discours de ces gens-là, qu’un amusement nécessaire, pour passer ses jours d’une manière moins languissante.
Mais l'on ne croit jamais porter ces désordres à un excès qui soit condamnable, on se flatte toujours d'observer assez de modération et de retenue ; et ce qu'on blâme le plus dans les autres, on le souffre tranquillement chez soi, on s'en applaudit même par une prévention tout à fait aveugle. C'est là ce qui devrait faire le sujet de nos méditations les plus sérieuses et les plus fréquentes.

Nous croyons être riches, et nous sommes dans une étrange disette de vertus et de bonnes oeuvres ; c'est là ce qui nous perd, c'est là ce qui nous plonge dans une sécurité funeste.
Nous croyons être nets de tout péché, et nôtre âme se trouve infectée par les souillures les plus honteuses ! Voilà ce qui précipite les pécheurs en foule dans le fond de l'abîme !
Ouvrons enfin les yeux sur nous-mêmes ; cette pénétration qui nous rend si clairvoyants sur les défauts du prochain, appliquons-la à découvrir les nôtres ; ne nous flattons, ne nous ménageons en aucune manière : c'est là l'unique moyen de nous reformer, de nous changer en de nouvelles créatures :
Levons le voile trompeur, qui nous déguise, qui nous cache nos faiblesses, et qui nous empêche de connaître à fond nôtre corruption et nos vices. Nos méditations là dessus ne sauraient qu'être très agréables à Dieu, nôtre Père, et notre Juge.

Mais il ne suffit pas qu'aucun de nos défauts n'échappe à nôtre application et à nos recherches, il faut encore nous instruire avec soin des moyens de nous en défaire. C'est ce que faisait nôtre Prophète ; il méditait jour et nuit la Loi du Seigneur ; il faisait de cette salutaire étude, toute sa joie et toutes ses délices.  Tes témoignages sont mes plaisirs, dit-il, lui-même, 0 combien j’aime ta Loi, j’ai pris pour héritage tes témoignages, car ils sont la joie de mon coeur ; tes témoignages sont des choses merveilleuses.

II en fait sans cesse l'éloge, mais d'une manière à montrer qu'il en sentait vivement la beauté et l'excellence. La Loi de l’Éternel est parfaite, restaurant l’âme, le témoignage de l’Éternel est assuré, donnant la sagesse aux impies, les commandements de l'Éternel sont droits, réjouissants le coeur, le commandement de l’Éternel est pur, faisant que les yeux voient.
Voilà un exemple qui doit nous servir et d'aiguillon et de modèle ; c'est dans les saintes lettres que nous devons chercher les paroles de la vie éternelle ; c'est là où nous devons puiser comme dans une source abondante et pure, les eaux de salut et de grâce. C'est de cette sainte pâture que nous devons nourrir nos âmes dans l'espérance de la béatitude céleste ; c'est l'Évangile qui doit servir de lampe à nos pieds et de lumière à nos sentiers, en méditant ses préceptes avec une application assidue, en sorte qu'ils fassent dans nos coeurs des impressions profondes et ineffaçables, qu'ils soient toujours présents à notre mémoire, et que nous ne les perdions jamais de vue.

Nous ne manquons guère de lumières, mais elles sont faibles et presque éteintes à cause du peu de soin que nous prenons à les entretenir, le trouble de nos passions nous empêche facilement de les rallumer dans le temps que nous en aurions le plus de besoin pour éclairer nos pas et pour soutenir nôtre constance.
Nous cherchons avec empressement à nous instruire des vérités de spéculation qui satisfont notre curiosité, qui sont la matière de nos controverses, qui ne gênent point nos inclinations (inclinaisons), et qui n'ont aucune influence dans nôtre conduite.
Nous méditons aussi avec joie les vérités qui nous consolent, qui répandent la paix dans nos consciences, qui nous rassurent contre nos alarmes.

Combien de pécheurs qui semblent avoir fondé toutes les profondeurs de la miséricorde Divine, qui ne donnent aucunes bornes à la confiance qu'ils ont en la bonté de Dieu, et en la mort de son Fils Unique, et qui quand on leur parle et de la tempérance, et du désintéressement, et du pardon des injures, sont tout aussi surpris que si on leur prêchait un nouvel Évangile, tant il est vrai que nos lumières à l'égard de la Morale sont très confuses et imparfaites, et que rien n'est plus essentiel, que de faire de sérieuses réflexions sur tous nos devoirs, afin que nôtre ignorance et nos erreurs ne nous fassent pas tomber dans le piège.

Enfin, Mes Frères, les promesses et les menaces de l'Évangile devraient nous occuper sans cesse. Oh ! si nous avions bien devant les yeux l'Enfer et toutes ses horreurs, ce ver rongeur qui ne meurt point, ce feu qui ne s'éteint point et dont la fumée monte aux siècles des siècles
Si nous avions soin de nous dire, que telle est la portion de ceux qui vivent dans le crime, et qui meurent dans l'impénitence, que la mort les saisira peut-être dans le plus fort de leurs désordres, qu'elle les traînera devant le Tribunal de leur Juge, que leur repentance, si elle est tardive, sera rejetée comme contrainte, intéressée et servile ; que leurs peines seront affreuses, qu'elles dureront sans espoir, sans consolation, sans adoucissement pendant une éternité entière !

Qui est-ce qui serait assez stupide ; assez furieux, assez ennemi de lui-même, pour ne pas éviter avec toute Implication possible des péchés dont la punition doit être si épouvantable ?
Mais le malheur est qu'on ne réfléchit pas assez souvent et assez sérieusement sur les supplices, qui sont réservez à l’impénitence ; c’est que cette voix terrible, morts sortez de vos tombeaux pour comparaître en jugement, ne retentit pas sans cesse à nos oreilles, c'est que nous passions nos jours à cet égard dans un oubli entier, dans une indolence inconcevable.
Disons la même chose des récompenses glorieuses, dont la vertu sera couronnée. De bonne foi, si nous avions soin de nous faire fréquemment de vives peintures de la Jérusalem d'en-haut, de son éclat, de sa pompe, de toutes ses merveilles, de ces délices ineffables dont nous serons comblez aux siècles des siècles ; en un mot de tous ces biens si relevés, si exquis, qui seront à jamais le partage des fidèles : quel cas ferions-nous alors du monde et de ses vanités frivoles ?
Ne le regarderions nous pas avec un généreux mépris, avec une noble indifférence ? Tout ce qu'il a de plus précieux ne nous semblerait-il pas indigne de notre attachement, et de nos recherches ?
Ne serait-ce pas là une source inépuisable de consolations dans nos disgrâces les plus affligeantes ? Quand nous aurions à être exposés à toutes les rigueurs de la souffrance pendant cette vie si courte, si incertaine, ne compterions nous pas toutes ces épreuves pour rien, et ne les soutiendrions-nous pas avec une tranquillité inaltérable dans la vue du bonheur éternel, immense, qui nous est réservé aux lieux célestes ?

Avouons encore une fois, mes Frères, que nôtre grand défaut, c'est de nous contenter de connaître et de croire ce que l'Écriture nous dit de ces merveilles augustes, et de ne pas prendre soin ne les graver dans le fond de nos coeursdes méditations sérieuses et très souvent réitérées.
D'où peut venir, je vous prie, cette négligence si incompréhensible ?
Quoi de plus délicieux pour nous, que de tourner sans cesse nos regards du côté du Ciel, que de contempler le Seigneur Jésus assit à la droite de Dieu son Père, nous préparant des Couronnes incorruptibles, pour honorer nôtre triomphe ? que de pénétrer au travers du voile par les transports d'une foi vive ? que de jouir déjà en quelque manière dès cette vie de la félicité suprême, qui nous est destinée dans l'autre ?

Mais les biens, les plaisirs terrestres épuisent toutes nos affections, et remplissent nos coeurs dans toute leur étendue ; il ne nous reste aucun goût pour la béatitude céleste ; tournés et rampants du côté de la terre par nôtre sensualité, par nôtre pente vicieuse, nous n'avons pas la force d'élever nôtre vue vers le Sanctuaire.

Réparons nôtre stupide nonchalance par des réflexions salutaires et fréquentes sur les biens du Ciel afin de modérer enfin cette passion si déréglée que nous avons pour ceux de la terre. Faisons, faisons, mes Frères, que la méditation de notre coeur, à tous ces égards, soit agréable au Seigneur, nôtre Rocher et nôtre Rédempteur.

Remarquez, Fidèles, que le Prophète parle de la méditation de son coeur. Souvent nôtre esprit pense, réfléchit, raisonne, sans que nôtre coeur soit touché, et sans qu'il sorte de sa langueur ordinaire. Nous faisons de saintes lectures et des méditations pieuses, nous calculons nos fautes, nous les pesons à la balance, nous étalons devant nos yeux les faveurs de Dieu les plus signalées, nous contemplons les grandeurs du Maître du monde, nous avouons que les promesses de son Évangile surpassent infiniment tout ce que nous avons pu désirer et comprendre, que les menaces sont capables de faire frémir les âmes les plus fières : Mais toutes ces réflexions s'arrêtent à la superficie ; elles ne pénètrent pas jusqu'au fond de l'âme, elles n'y excitent pas des émotions vives. Nous sentons bien que nous sommes tous coupables, nous convenons bien, que si Dieu nous traitait à la rigueur, nous ne saurions subsister un seul moment devant sa face. Il ne faut, pour se convaincre de ces vérités humiliantes, que comparer nôtre conduite avec les Lois de nôtre grand Maître.

Mais nos coeurs sont-ils déchirés dans la vue de nos désobéissances ?
Mais nos âmes sont-elles remplies d'une douloureuse amertume ?
Mais répandons-nous des larmes abondantes et sincères ?
Mais nous détestons-nous en quelque façon nous-mêmes ?
Mais nous accablons-nous des plus mortifiants reproches ?
Mais sommes-nous au désespoir d'avoir avec une persévérance opiniâtre, offensé un si bon Père, et à qui nous devions être dévoués sans réserve pour tant de raisons si pressantes ?

Reconnaissons à nôtre honte que nôtre repentir, que nos regrets n'ont point ce caractère, et qu'ils font faibles et de peu de durée. Quand nous nous sommes instruits des préceptes que nous devons pratiquer dans nôtre conduite, sortons-nous de cette sainte étude avec un zèle empressé, avec une vive ardeur, avec une résolution sérieuse et inébranlable de les observer, quoiqu'il nous en coûte ?

Nous disons-nous à nous-mêmes, charmés de leur équité et de leur excellence ; Oui le monde entier avec tous ses attraits, le Démon, avec tous ses artifices, entreprendraient en vain de me détourner de la bonne voie ; je ne vivrai plus maintenant moi, mais Christ vivra en moi, je suivrai ses inspirations, j'imiterai son exemple, j'exécuterai ses ordres avec une constance inviolable, et rien ne me séparera de sa dilection avec des traits ineffaçables, et par (son affection) et de son obéissance.

Quand on nous parle du bonheur céleste, quand on ramasse tous les traits les plus propres à nous en donner une grande idée, nos coeurs défaillent-ils après les parvis de l'Éternel, après le Tabernacle de sa gloire ?
Ressentons-nous ces vives faillies (manques) d'une joie inénarrable, à la vue de nos grandes destinées ?
Souhaitons-nous avec ardeur de déloger, pour être avec nôtre Sauveur y pour partager avec lui sa félicité et son trône ?

Ha ! Mes Frères, nous écoutons et nous lisons les descriptions les plus touchantes de la Jérusalem céleste, avec un sang-froid inconcevable et l’espérance d'une joie très médiocre, ou un léger plaisir, nous animent plus que la possession de Dieu lui-même, de son amour. et de toutes ses grâces. Endurcissement étrange que les exhortations les plus fortes ne sauraient vaincre, si l'Esprit saint ne les rend efficaces !
Implorons avec ardeur un secours qui nous est si nécessaire. Nous avons bien besoin de sagesse. Demandons-là à Dieu, qui la donne libéralement, et elle nous sera accordée : Mais demandons-la avec un zèle proportionné à son prix, à son excellence. Celui qui plante et celui qui arrose ne sont rien, c'est Dieu qui donne l’accroissement :

Convaincus de nôtre faiblesse, confus du peu de succès de nos résolutions, ..... dans l'humiliation de nôtre âme, joignons nos voeux afin que le Dieu de notre Seigneur Jésus-Christ, le Père de gloire nous donne l'esprit de sagesse, qu'il rende les yeux de notre entendement illuminés, pour comprendre quelle est l’espérance de sa vocation, et quelles sont les richesses de la gloire de son héritage ! Que nous soyons puissamment fortifiés par son esprit en l'homme intérieur, de sorte que Christ habite en nos coeurs par la foi, jusqu'à ce que nous soyons réunis au Ciel, où il sera tout en tous et où nous serons tout en lui, comblez de gloire, et jouissant d'un bonheur qui ne finira jamais.
Amen.


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