Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

CHAPITRE XV.

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 Nous sommes arrivés maintenant à une division nouvelle du livre.
Les trois derniers chapitres (XII, XIII, XIV) en forment à eux seuls une portion très importante: ils nous présentent le tableau des voies finales de Dieu et des dernières machinations de Satan, pour autant qu'il s'agit de la dispensation actuelle; et même avant que les voies de Dieu et les plans de l'ennemi s'y déroulent, ils nous révèlent la source cachée des unes et des autres.

Nous avons vu dans le chap. XII la naissance du fils mâle victorieux, et Satan et ses anges précipités du ciel; ensuite, les deux grands partis avec leurs chefs respectifs sont en présence sur la scène et comme face à face, pour ainsi dire. Mais quels que puissent être les instruments de la puissance de Satan ici-bas comme le chap. XIII nous les montre, et quelles que soient les voies de Dieu dans l'exercice de sa grâce ou de ses jugements dans le chap. XIV, tout découle de ce fils mâle, l'objet de la terreur et de la haine de Satan.

Maintenant nous en venons à un sujet nouveau. Il avait été fait mention au chap. XII, vers. 1, d'un grand prodige ou signe. Il est dit ici: «Et je vis dans le ciel un autre signe, grand et merveilleux, sept anges ayant sept plaies, les dernières; car en elles, la colère de Dieu est consommée.»
Nous reprenons une fois de plus le fil des événements historiques. Vous pouvez vous rappeler que sous la dernière trompette a été prononcée cette parole: «Les nations se sont irritées, et ta colère est venue.» Or, je pense que ce qui doit naturellement frapper tout le monde, c'est qu'ici la colère de Dieu est venue, et que les nations ne sont pas seulement irritées, mais blasphèment au dernier point.
Aussi, chaque nouveau coup que Dieu frappe, au lieu d'amener l'homme à quelque sentiment d'humiliation, ne fait-il qu'accroître son inimitié contre le Seigneur. La septième trompette nous a conduits d'une manière générale jusqu'à la fin, et ici ce sont quelques détails, mais non pas tous, qui nous sont présentés. Ce n'est que plus bas que nous trouvons plus particulièrement deux des sujets décrits sous les coupes: le chap. XVII traite de Babylone et de la Bête dans leurs rapports mutuels; le chap, XVIII, de la destruction de Babylone, et le chap. XIX, du jugement de la Bête.

Il est donc une autre remarque que je dois aussi ajouter. Tous ces événements nous sont aussi présentés ensemble dans le chap. XIV. Nous avons eu là ce que je puis appeler l'action religieuse de Dieu: Dieu en agissant avec l'homme sur la terre comme responsable de l'usage où de l'abus qu'il a fait de la lumière de la révélation, et comme, placé sous la responsabilité de reconnaître et d'adorer Dieu seul.
Ces coupes prennent plutôt l'histoire civile extérieure ou la condition séculière de l'homme, quoique la même chose puisse en certains cas avoir en même temps une portée religieuse et une portée séculière. Telle est, par exemple, Babylone: elle est évidemment la grande chose corrompue et corruptrice en matière de religion; mais cela n'empêche pas Babylone d'avoir une large part aux affaires du monde. Et de fait, c'est là un des maux qui constituent Babylone -l'introduction des choses du monde, même dans les choses spirituelles, et la confusion qui en résulte et qui est odieuse à Dieu et pleine de séduction pour les hommes. De là vient que nous trouvons Babylone dans le chap. XIV aussi bien que dans le chap. XVI.
Le chap. XIV nous donne un sommaire des voies de Dieu à la fin du siècle relativement aux choses religieuses, qu'elles soient d'un aspect brillant ou d'un aspect sombre: grâce, témoignage et jugement. Il nous est ainsi extrêmement utile pour ranger les derniers événements dans l'ordre dans lequel ils se passent.
La chute de Babylone, par exemple, est la troisième chose dans la série des événements du chap. XIV.
D'abord, il y a le résidu complet des Juifs pieux sous la souffrance -résidu saint, associé par grâce avec l'Agneau, c'est-à-dire, sur la montagne de Sion.
Vient ensuite le témoignage de l'évangile éternel à la terre et à toutes les nations, et, troisièmement, la chute de Babylone.
Mais d'un autre côté, dans la série des coupes, la chute de Babylone est la dernière des sept.
Nous en concluons que les jugements représentés par les six premières coupes doivent précéder la chute de Babylone: c'est-à-dire, que les six premières coupes peuvent être successivement accomplies, tandis que le résidu juif se forme, et que l'évangile éternel est publié parmi les Gentils. La dernière coupe implique la chute de Babylone, qui correspond au troisième anneau, et est elle-même cet anneau de la chaîne des événements énoncés dans le chap. XIV. Cela est important à remarquer pour prévenir toute confusion. L'avertissement touchant le culte de la bête, la déclaration relative au bonheur de ceux qui meurent au Seigneur, la moisson, et la vendange de la terre, sont tout autant de faits évidemment postérieurs à la chute de Babylone.

Le tableau général et régulier des voies de Dieu, tant en miséricorde qu'en jugement, ayant donc passé d'abord sous nos yeux, nous apprenons maintenant par le chap. XVI une partie de ces voies, les détails de quelques-unes desquelles se rattachent au vers. 8 du chap. XIV, et peut-être s'accomplissent simultanément avec ce qui précède ce verset. Il ne faut donc pas supposer que les coupes sont postérieures au chap. XIV; il est possible que les premières ont lieu pendant que le résidu dont il est parlé est en voie de formation, et que le témoignage sort vers les Gentils. Il se pourrait aussi qu'elles s'accomplissent rapidement après ces choses et avant la chute de Babylone. Mais, certainement, la dernière coupe renferme la chute de Babylone, et cette chute précède d'une manière non moins évidente les événements solennels qui suivent l'annonce qui en est faite dans la dernière partie du chap. XIV.

Mais à présent, considérons la scène qui sert d'introduction aux coupes. «Et je vis comme une mer de verre, mêlée de feu.»
C'est là un type emprunté du temple, quoique avec certains changements. Le tabernacle avait la cuve d'airain, et le temple sa mer de fonte -vaisseau plus grand, mais de même nature, dans lequel les sacrificateurs avaient coutume de laver leurs pieds et leurs mains lorsqu'ils entraient pour faire le service de l'Éternel. Ici c'est une mer de verre, et en conséquence, elle ne sert point à la purification. Ce n'était pas une mer d'eau, mais elle était solide. Le fait qu'elle est de verre indique un état de pureté ferme et permanente. Ce n'était point ce qui sert à purifier, mais ''image d'une pureté que rien ne peut souiller. Les saints dont il s'agit ne se trouvent plus dans des circonstances à avoir besoin d'être purifiés par le lavage d'eau par la parole. Cet état de choses n'était plus.
Maintenant c'était «une mer mêlée de feu»; ce qui montrait clairement par quelles circonstances avaient passé ceux qui étaient en rapport avec cette mer. Ils avaient éprouvé l'ardente tribulation, ils avaient glorifié Dieu dans les flammes. Cela évidemment n'a pas trait à l'église. «Vous aurez de l'affliction dans le monde», est une parole vraie de nous. Mais ce que nous avons ici est relatif à une tribulation spéciale -«la tribulation», dont l'Écriture fait mention fréquemment. «Je vis comme une mer, de verre mêlée de feu, et ceux qui avaient remporté la victoire sur la Bête et sur son image» (ils sont donc évidemment contemporains de la Bête), et sur le nombre de son nom, se tenant sur la mer de verre, et ayant des harpes de Dieu.»

Ainsi la circonstance signalée ici, c'est, non pas qu'ils se lavent dans la mer, mais qu'ils se tiennent sur elle. Les circonstances terrestres par lesquelles ils ont passé leur donnent leur caractère, mais la scène de la lutte est désormais passée. L'Esprit de Dieu signale par anticipation tout ce qui caractérise ceux qui avaient été persécutés par la bête, mais qui sont considérés comme l'ayant vaincue. C'étaient des personnes qui déjà avaient été purifiées; elles en avaient fini avec toute la scène présente, et en étaient tout à fait dehors. Elles se tenaient sur la mer de verre. Et non-seulement cela, mais elles avaient «des harpes de Dieu,»: c'est-à-dire, que leur occupation consiste dans la joie parfaite et la parfaite louange --le contraste de tout ce à travers quoi elles avaient passé.

Je désire faire, remarquer ici, quoique ce, ne soit pas d'une grande importance, que les éditions ordinaires ont dans le verset deuxième de ce chapitre une petite clause qui doit être laissée de côté. Ce verset s'y trouve ainsi conçu: «Et ceux qui avaient vaincu la bête, et son image, et sa marque, et le nombre de son nom.» Or, la clause; «et sa marque» n'a absolument rien à faire ici. La même chose se présente chap. XIII, 17, (éditions ordinaires): «Et personne ne pouvait rien vendre, que celui qui avait la marque ou le nom de la bête, ou le nombre de nom.»
Ici encore la vérité est que le petit mot «ou», inséré là devant la clause «le nom de la bête;», doit être supprimé.
La différence dans le sens est que «la marque» serait, soit le nom de la bête, soit le nombre de son nom. Il n'y a pas une troisième chose distincte de ces deux, comme le ferait supposer le texte ordinaire. La. Bête avait deux manière de marquer ses partisans; dans l'une, elle les marquait par son nom, et dans par le nombre de son nom: mais celan'aurait pas de sens que de dire, «la marque, ou le nom de la Bête, ou le nombre de son nom.»
Le nombre constituait sa marque, quoique ce ne fût pas la seule; il y avait en outre son nom -celle qui était, je suppose, plus intime et plus personnelle que l'autre. C'étaient donc ceux qui avaient remporté la victoire sur la Bête, et sur son image, et sur le nombre de son nom. Dans la Bible anglaise, le mot «et sur le nombre» est même imprimé en italique, ce qui ne fait qu'ajouter à la confusion avec les mots «sur sa marque».

Je n'y fais allusion que pour montrer que l'introduction par l'homme dans l'Écriture même d'un tout petit mot comme «ou» en altère le sens. Dans la langue dont l'Esprit se sert, la différence n'est que d'une seule lettre; mais vous ne sauriez introduire même une lettre dans la parole de Dieu sans porter atteinte dans cette mesure à sa beauté et à sa perfection. Il se peut que, par la bonté de Dieu, ses enfants ne reçoivent que peu de mal de taches pareilles, mais c'est en partie, parce qu'ils n'en sont pas assez occupés: s'ils devaient en déduire un système, ils tomberaient en certains cas dans des erreurs sérieuses. Mais heureusement (c'est ainsi que Dieu les garantit miséricordieusement), ils ne reçoivent pas la fausse doctrine; ils ne savent pas ce qu'elle signifie, et en conséquence ils la laissent. Mais évidemment, l'intention de Dieu n'est pas qu'on échappe à l'erreur simplement par la raison qu'on ne la comprend pas.
Lorsque les siens sont préservés du mal de cette manière, c'est un effet miséricordieux du gouvernement suprême de sa main plutôt que de l'intelligence de la direction de l'Esprit.

Le Livre de l'Apocalypse a souffert plus qu'aucun autre de la négligence de l'homme, et comme c'est de son contenu que nous sommes occupés et qu'il est si désirable pour les enfants de Dieu d'avoir de saines pensées relativement à sa parole, j'ai pensé qu'il valait mieux faire cette remarque, quelque peu importante, qu'elle puisse paraître. Je me souviens avoir été moi-même dans un grand embarras pour découvrir la différence entre la marque de la bête, et son nom et son nombre. Mais ayant examiné la question de plus près, je trouvai qu'il n'y avait réellement rien à décider. Un petit renard était entré et avait gâté la vigne. En un mot, la marque n'était pas une chose différente du nom ou de son nombre, mais bien un terme général qui s'appliquait également à l'un et à l'autre -le nom exprimant probablement une soumission intime et plus entière à la Bête, que le nombre de son nom.

Ceux qui avaient remporté la victoire sur la Bête, n'étaient pas ses créatures ou ses esclaves; ils étaient les serviteurs de Dieu. On les voit ici conscients de leur victoire, en dehors de la scène de leurs combats, ayant les harpes de Dieu. Et ils chantent: c'est la louange intelligente. «Ils, chantent le cantique de Moïse, esclave de Dieu, et le cantique de l'Agneau.»
Leur louange a un double caractère tout à fait différent du cantique des anciens. Elle est très bénie, mais, ce n'est pas la même chose.
Le chant des anciens avait beaucoup plus de profondeur. Il n'est point fait mention de ces saints comme sacrificateurs, bien moins encore comme chefs de la sacrificature céleste; ils ne portent pas non plus les emblèmes de la dignité royale. Ils chantent le cantique de Moïse. C'étaient de véritables saints, mais incontestablement d'un caractère juif. Ils chantent aussi le cantique de l'Agneau. S'ils n'avaient à aucun degré la connaissance du Sauveur, ils ne sauraient être des saints.
Mais en même temps ils chantent le cantique de Moïse. Ils ne seront pas exactement dans la position chrétienne dont nous jouissons aujourd'hui. Ils se trouveront au milieu des circonstances de l'épreuve, quand l'Église aura passé de la scène d'ici-bas dans le ciel. Mais il y aura encore pourtant des saints qui souffriront pour le Seigneur même jusqu'à la.mort, car la bête a le pouvoir de tuer, et cela peut-être afin qu'ils aient la victoire sur elle par leur propre sang. aussi bien que par le sang de l'Agneau (1).

En conséquence, ils apparaissant ici dans un état parfait de repos, comme autrefois Israël chantant en triomphe de l'autre côté de la Mer-Rouge à la quelle il semble qu'il est fait allusion, comme évidemment les  plaies du chapitre suivant en contiennent une à celles dont fut frappée l'Égypte.

«Ils chantent le cantique de Moïse, esclave de Dieu, et le cantique de l'Agneau, disant: Grandes et merveilleuses sont tes oeuvres, Seigneur Dieu tout-puissant! justes et véritables sont tes voies, roi des nations» (vers: 3).
Maintenant- si nous ouvrons le Ps. CIII, vers; 7, nous trouvons que le Saint-Esprit fait ressortir en première ligne ces deux choses -les voies de Jéhovah et ses exploits. «Il a fait connaître ses voies à Moïse, et ses exploits aux enfants d'Israël.»
Les voies profondes, cachées, de l'Éternel qui furent connues de Moïse, sont distinguées des actes publics qui furent opérés aux yeux de tout Israël. Ici, les saints dont il est question ne prennent pas d'abord pour sujet les voies de Dieu, mais les oeuvres qu'il a accomplies: «Grandes et merveilleuses sont tes oeuvres, Seigneur, Dieu tout-puissant.» Et ils s'élèvent ensuite à la célébration de ses voies: «justes et véritables sont tes voies, roi des nations».

C'est bien ainsi qu'il faut lire ce verset, car l'expression, Roi des saints, que contiennent les éditions ordinaires, est chose entièrement inconnue à quelque portion que ce soit de la Bible. Mais l'expression, Roi des nations, est authentique et très vraie. C'est une allusion à Jérémie X, 6: «Tu es grand, et ton nom est grand en force. Qui ne te craindrait, Roi des nations?»
Et précisément, pour faire voir comment cela est d'accord avec l'enseignement général de l'Écriture, je ferai remarquer que, quoique Christ soit Roi, bien plus Roi des rois et Seigneur des seigneurs, et quoique ce soit notre bonheur de reconnaître cela (car les chrétiens sont certainement les seules personnes aujourd'hui qui reconnaissent comme il faut que le Seigneur Jésus-Christ est Roi), ce n'est pas moins une chose remarquable que le Saint-Esprit évite de l'appeler Roi en rapport avec l'Église.
L'Écriture qui l'appelle fréquemment Roi, ne lui donne jamais ce titre dans sa relation avec nous. Naturellement le but de la parole de Dieu n'est pas d'affaiblir notre soumission à Christ. Tout ce qui tend à l'affaiblir ne procède pas de l'Esprit, mais de Satan. Mais n'est-il pas évident que la relation de roi à peuple n'est pas aussi étroite, aussi intime, n'embrasse pas aussi pleinement toute chose dans son autorité, et n'implique pas non plus autant d'affection que la relation d'Époux à épouse, ou de Tête à corps? Et telle est la relation dans laquelle l'Écriture envisage l'Église. Il y a la soumission la plus profonde et la plus constante, mais c'est celle des membres à leur Tête, de l'épouse,à l'Époux. C'est ainsi que l'Église est soumise à Christ.

Il est vrai que nous sommes transportés dans le royaume du Fils bien-aimé de Dieu, mais dans quelle capacité? Il nous a fait rois dans son royaume. Voici dans quels termes le premier chapitre de cette même prophétie nous représente chantant: «A lui qui nous aime, et qui nous a lavés de nos péchés dans son sang, et.nous a faits un royaume de sacrificateurs pour son Dieu et Père.» Quoiqu'il soit donc parfaitement certain que nous sommes dans le royaume, nous n'y sommes pas pourtant comme sujets, tout en étant assurément sujets. Nous reconnaissons joyeusement comme notre Seigneur, Christ, dont la grâce nous a faits rois avec lui, et non pas simplement comme un peuple tenu sous lui à distance. Cela ne diminue en aucune manière la responsabilité sous laquelle nous sommes de lui obéir, pas plus que cela ne lui ôte de sa gloire. Cela nous met à même de nous montrer obéissants en vertu d'un principe plus ferme et de motifs plus élevés; ce n'est pas la faiblesse de la chair sous la loi, mais le coeur purifié par la foi et fortifié par la grâce. Christ nous remplit du sentiment de la gloire dont nous sommes cohéritiers avec lui. Il nous élève par l'espérance jusqu'au trône, mais l'effet en est que, même dans le ciel, nous nous prosternerons et nous jetterons nos couronnes devant lui. Il aime que notre obéissante prenne, pour ainsi dire, la forme de l'adoration.

Nous voyons par là comment le Seigneur maintint intactes ces deux choses. D'un côté, il prend son plaisir à ce que nous sachions et que nous considérions que le Seigneur Jésus est toujours immensément au-dessus de nous; mais ensuite, d'un autre côté, Christ nous a placés, dès à présent par les gages de l'Esprit, et bientôt par une possession effective, sur des trônes afin de faire voir que ce n'est pas simplement comme serviteurs, ni comme peuple, que nous sommes sujets, mais comme ceux que son parfait et divin amour a associés avec lui-même; car nous sommes un avec lui.
Il veut nous placer sur des trônes autour de lui --sur son propre trône; mais même dans cette position la soumission à Christ ne saurait jamais disparaître: il n'y aura jamais autre chose, soit dans le royaume soit dans l'état éternel. Où que ce soit que vous regardiez, jamais l'Église ne saurait oublier ce dont elle est redevable à son Seigneur, à son Époux, au point de désirer qu'il en fût autrement. Ce serait abuser de sa grâce, le dépouiller de sa gloire; et l'Église ressentirait vivement cela. Si les anciens, dès qu'ils le voient seulement prendre le livre, se prosternent devant l'Agneau et rendent culte, à combien plus forte raison, la pensée de quelque indignité qui lui serait faite exciterait-elle leurs sentiments les plus vifs d'horreur et d'indignation. L'Église peut être aimée, et est aimée de Christ: mais prétendre d'une manière quelconque à une égalité de position avec lui, serait manifester cet esprit de l'antichrist, «duquel nous avons ouï dire qu'il vient, et déjà maintenant il est dans le monde.»

«Justes et véritables sont les voies, roi des nations.»
Si je comprends bien, la raison pour laquelle les «nations» sont introduites ici, c'est que ces coupes allaient être versées très particulièrement sur les Gentils. Sous les trompettes, et dans les chap. XII-XIV les Juifs, ou au moins le résidu juif, nous sont apparus comme étant d'une façon spéciale l'objet de la miséricorde de Dieu selon l'alliance. La phrase même (chap. XI), «l'arche de son alliance» se rattache à cette nation, car c'est avec elle que l'alliance avait été faite. C'est pourquoi nous avons vu aussi que, dans le chapitre suivant (chap. XII), la femme représentait Israël. Ensuite nous avons eu le résidu juif fidèle (chap. XIV). Mais à présent ces saints célèbrent les voies justes de Dieu envers les Gentils ou nations. Il est Roi des nations -et non pas seulement des Juifs. Les relations juives apparaissent dans les deux cas, mais ce sont des visions distinctes, introduites par un signe très différent.

«Seigneur, qui ne te craindra, et qui ne glorifiera ton nom? Car tu es saint, toi seul; car toutes les nations viendront et se prosterneront devant toi, parce que tes jugements ont été manifestés»
Le terme employé ici pour «saint», n'est pas le terme ordinairement en usage. C'est celui dont l'Écriture se sert là où elle parle des gratuités de David, et dont le terme correspondant en Hébreu est fréquemment employé dans les Psaumes.
L'une et l'autre de ces langues ont en effet deux mots pour exprimer l'idée de sainteté. Il y a le terme ordinaire pour «saint», qui se trouve, par exemple, en Apoc. IV, «Saint, saint, saint Seigneur Dieu tout-puissant.» Il implique, toujours la séparation du mal -une séparation absolue.
La sainteté dont il est parlé ici (ch. XV), implique la miséricorde -ce qui est extrêmement doux.

Il va être question des coupes, et la première pensée serait aussitôt «Quelle chose terrible! la colère de Dieu va s'accomplir.» Mais qu'est-ce Dieu dont la colère va se consommer? C'est Celui dont la sainteté est pleine de miséricorde: «Tu es saint, toi seul.» C'est la sainteté de miséricorde. «Car toutes les nations viendront et se prosterneront devant toi; parce que tes jugements ont été manifestés.» Leur regard perce à travers les jugements, et ils voient la fin du Seigneur, et la fin est toujours que «l'Éternel est pitoyable et abondant en grâce.»

De sorte que, quoiqu'il en soit de cette tempête de jugement qui va éclater, ils contemplent la fin depuis le commencement, et en conséquence, célèbrent la sainteté de Celui qui, dans le jugement, se souvient d'avoir compassion. Sans aucun doute, il faut que la colère ait cours et Dieu devra la consommer, parce que sa première effusion ne fera qu'endurcir encore davantage les hommes. Mais vous remarquerez qu'il ne s'agit pas ici de Christ; il n'y a rien ici qui rappelle la colère de l'Agneau, pas même dans la pensée des hommes: c'est la colère de Dieu.
Dans le chap. XIV, celui qui fait la moisson est le Fils de l'Homme; mais ici Dieu agit conformément à sa propre pensée, avant que Christ vienne du ciel pour exécuter la colère. Cela prouve avec évidence que les coupes finissent avant que commencent les derniers jugements du chap. XIV, parce que la fin du chapitre nous montre le Fils de l'Homme venant lui-même exécuter le jugement.

Ils peuvent donc dire, en regardant en haut: «Seigneur, qui ne te craindra?... Car tu es saint, toi seul; car toutes les nations viendront et se prosterneront devant toi, parce que tes jugements ont été manifestés.» (vers. 4)

Autre vérité importante: car, comme nous le lisons en Ésaïe XXVI, aussi longtemps que Dieu agit en grâce, que fait l'homme? Il en prend avantage et refuse d'apprendre, la justice. Mais le temps vient où le Seigneur lèvera son bras en jugement; et quel effet en résultera-t-il? «Lorsque tes jugements sont en la terre, les habitants de la terre habitable apprennent la justice.» Il en est de même ici: «Toutes les nations viendront et se prosterneront devant toi, parce que tes jugements ont été manifestés.» Tel sera en définitive le résultat.

Le prophète regarde de nouveau, «et le temple (2) du tabernacle du témoignage dans le ciel fut ouvert» (vers. 5).
Remarquez la différence. Au vers. 19 du chap. XI (qui introduit la scène des chap. XII-XIV antérieurement aux coupes), le temple fut ouvert dans le ciel, et on y vit l'arche de l'alliance de Dieu, tandis qu'ici on ne voit pas d'arche. Là elle était le gage de la fidélité assurée de Dieu -de l'immutabilité de ses conseils à l'égard de son peuple d'Israël: mais ici c'est de ses ennemis qu'il est question, plutôt que de son peuple, et il n'y a rien que le tabernacle du témoignage, qui est inauguré, pour ainsi dire, par des jugements sur les hommes de la terre: il s'ouvre pour l'effusion de la colère, et non pour le triomphe de l'évangile, c'est le témoignage judiciaire de Dieu, sur la> condition de l'homme. L'homme est coupable: que pouvait-il donc en résulter? «Les sept anges sortirent du temple.» Et, chose terrible à dire, ils sortirent du lieu où maintenant on ne voyait point d'arche. A quoi donc pouvait-on s'attendre, sinon à la colère, et à une colère d'autant plus redoutable qu'elle procède du sanctuaire?
Ils «sortiront du temple ayant les sept plaies.» C'était là désormais tout ce que Dieu pouvait faire pour l'homme. «Vêtus d'un lin pur et éclatant et ceints sur leurs poitrines de ceintures d'or. Et l'un des quatre animaux -les principaux agents qui président à l'exécution des jugements de Dieu dans l'ordre de la providence -«donna aux sept anges sept coupes d'or.»

Le mot coupe est emprunté des vases qui servaient à répandre des aspersions devant le Seigneur. Hélas! il ne s'agit pas maintenant de sacrifices par aspersion, mais de colère descendant de Dieu: «Sept coupes d'or pleines de la colère de Dieu qui est vivant aux siècles des siècles. Et  le temple fut rempli de la fumée qui procédait de la gloire de Dieu et de sa puissance, et personne ne pouvait entrer dans le temple jusqu'à ce que les sept plaies des sept anges fussent consommées.»
Ainsi, il n'y avait plus possibilité maintenant de rendre culte à Dieu ou d'intercéder. C'eût été vainement qu'on aurait essayé d'entrer dans le temple, la fumée du feu de la colère le remplissant, la fumée qui prouvait que le feu était là: de sorte qu'il n'était possible à personne d'entrer, pas même à un sacrificateur. Nul ne pouvait approcher maintenant: la colère, la fumée du jugement remplissait le temple. Absolument comme à Sinaï, où la fumée est représentée comme montant de la montagne semblable à la fumée d'une fournaise; ou encore, comme dans le Psaume XVIII: «Une fumée montait de ses narines, et de sa bouche sortait un feu dévorant.» De même dans notre chapitre: c'est l'image de la majesté de Dieu offensée, contre le péché; il n'y avait rien dans tout ce que Dieu contemplait ici-bas qui fît appel à sa miséricorde en faveur des hommes. Le temps de l'intercession était passé. En conséquence, les jugements ont leur cours, et la colère de Dieu est consommée (vers. 6-8).


(1) II n'y a que le sang de l'Agneau seul, cela va sans dire, qui soit efficace pour le péché devant Dieu. 

(2) Toujours employé exclusivement dans l'Écriture pour désigner le temple intérieur, les lieux saints.
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