Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

CHAPITRE II.

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Le chapitre précédent se terminait par ces mots: «Les sept étoiles sont les anges des sept assemblées, et les sept chandeliers que tu as vus sont les sept assemblées.» Il résulte évidemment des versets 4 et 11 du chapitre I, et de ce qui suit, que c'est aux sept églises qui existaient alors dans la province d'Asie, que ceci s'appliquait originairement.
Mais tout en reconnaissant qu'il y avait des raisons particulières de s'adresser à ces églises locales, je n'ai pas le moindre doute qu'elles furent choisies dans le dessein, d'une portée plus vaste, de tracer le tableau des divers états dans lesquels l'Église en général se trouverait successivement, depuis les jours apostoliques jusqu'au terme de son existence sur la terre.
De là vient que la vision comprenait sept chandeliers, sept étant le symbole bien connu de quelque chose de complet dans l'ordre spirituel. Il pouvait y avoir d'autres églises aussi bien ou mieux connues, et le grand apôtre des Gentils s'était déjà expressément adressé à l'une de ces sept; mais Éphèse est prise de nouveau, et six autres églises lui sont associées de manière à présenter une esquisse mystique et parfaite des traits moraux les plus importants qui se trouvaient alors dans l'Église, et qui en même temps devaient se développer d'une manière successive dans l'histoire subséquente du corps professant sur la terre (1).

Bien des choses qui sembleraient fort importantes aux yeux des hommes et même des chrétiens sont laissées de côté, car le seigneur ne voit pas comme l'homme voit.
Mais on verra, je pense, qu'il a placé en première ligne, les traits, bons ou mauvais, qui devaient réapparaître, et qu'il a fait très-convenablement ressortir ce qu'il prévoyait devoir être de la plus haute importance pour celui qui aurait des oreilles pour entendre jusqu'au moment de son retour. Et cette application étendue me semble confirmée avec force par la clause relative à ces églises dans la triple division que donne le
chapitre I, verset 19. Elles sont désignées comme «les choses qui sont.» Sans doute, elles existaient alors au temps de Jean; mais si elles devaient continuer d'exister, et si les semences qui étaient alors semées, devaient germer encore plus dans la suite, et donner une signification encore plus grave aux paroles et aux avertissements de Notre-Seigneur, cette expression «les choses qui sont» était encore plus convenable pour désigner l'état de l'Église sur la terre tel qu'il existait alors.

C'est ainsi qu'Éphèse est le premier grand exemple de déclin par suite du relâchement ou abandon du premier amour. Mais n'était-ce pas là un fait notoire pour toute la chrétienté, considérée comme un tout, avant que le dernier apôtre eût délogé pour être avec le Seigneur? S'il s'est trouvé dans ces jours-là et plus encore dans les temps postérieurs, un pareil état moral, - quoi de plus convenable et de plus naturel que de faire tourner des circonstances morales au profit d'un enseignement général?
Ainsi encore, sans mettre en question que le message adressé à Smyrne s'appliquait parfaitement à ce temps-là, il est aisé de voir qu'il fait admirablement ressortir les grandes et réitérées persécutions qui éclatèrent sur les chrétiens de la part des païens. De même l'élément que Balaam figure se montrerait naturellement avec une netteté plus grande, lorsque, au lieu de persécuter l'Église, le monde la protégerait.
Vient ensuite Jésabel: elle constitue un immense progrès dans le mal; mais quoique dans les jours où l'Apocalypse fut écrite, il existât sans aucun doute des choses qui donnaient lieu à ces allusions, peut-on nier que l'esquisse fût remplie d'une manière bien frappante après que le trône du monde eut établi le Christianisme par ses édits, et que, à une époque plus avancée encore, l'église professante eut contracté une alliance coupable avec ce qui n'est, au fond, que paganisme et inimitié pour la vérité de Dieu?
Ce coup-d'oeil jeté sur le
chapitre II fera voir, tout rapide qu'il est, pourquoi je considère ces églises comme ayant une portée prophétique réelle, quoique indirecte, sur les diverses conditions subséquentes de l'Église, telles qu'elles se présentaient au jugement scrutateur du Seigneur. Il est clair, d'un autre côté, que la véritable position de l'Église, celle dans laquelle habituellement elle attend du ciel le Seigneur, eût été faussée, si ce rapport avait été marqué au point d'être apparent dès le principe, et de donner, si l'on peut s'exprimer ainsi, une histoire claire et chronologique; car le Seigneur n'a parlé nulle part à l'Église, ni à son sujet, de manière à lui faire nécessairement attendre des siècles sur la terre. Naturellement, le Seigneur savait qu'il en serait ainsi; mais. il n'a rien révélé qui fût de nature à mettre obstacle à la pleine jouissance de la bienheureuse espérance du retour du Seigneur comme perspective immédiate. Et il en est de même ici.

Quelques-uns ont pris avantage de ce manque de netteté pour nier que ces sept églises eussent ce caractère de succession et de prolongation de temps auquel j'ai fait allusion; mais l'évidence apparaîtra plus entière à mesure que nous examinerons chaque église en particulier.
Une autre considération qui doit avoir un grand poids, c'est qu'après ces deux chapitres, il n'est plus fait allusion nulle part à l'existence d'églises sur la terre.
Dans les remarques finales du livre (
XXII, 16), le Seigneur dit qu'il a envoyé son ange pour rendre témoignage de ces choses dans les assemblées; mais dans toute la série des visions et dans tout ce qui est donné à entendre de la condition des hommes ici-bas, après Apoc III, il est gardé, relativement à l'Église sur la terre, le silence le plus inexplicable si l'Église s'y trouve réellement: rien de plus simple si cet état de chose a pris fin. Tout cela s'accorde parfaitement avec chapitre I, 19: «Les choses qui sont, et les choses qui doivent arriver après celles-ci

Lorsque c'en est fini avec les églises, et qu'on ne les voit plus comme telles sur la terre, la partie proprement prophétique du livre commence à avoir son cours. Il semble, en outre, que l'introduction d'un nouvel état de choses n'implique pas nécessairement le rétablissement de ce qui avait existé avant lui. En un mot, après l'apparition de l'état de choses nouveau, il peut y avoir encore co-existence de l'ancien, et chacun d'eux peut continuer dans sa propre sphère. En voilà assez sur les Églises dans leur ensemble. La responsabilité sur la terre est le sujet dont il s'agit: non pas les privilèges de l'Église ou des saints en Christ, mais l'obligation sous laquelle les Églises se trouvent de Le représenter, et l'appréciation qu'Il fait de leur état.

Après cette courte préface, nous en viendrons plus particulièrement à Éphèse. Observons d'abord, qu'il est dit à Jean d'écrire à l'ange de l'Église qui se trouve là; ce n'est plus «aux saints et fidèles qui sont à Éphèse dans le Christ Jésus» que la lettre est adressée; ni aux saints avec les surveillants et les serviteurs, comme dans le cas de l'Église de Philippes. Pourquoi cela? Les voies du Seigneur sont toujours pleines de grâce, mais elles sont justes aussi, et l'Église était une chose en chute, de sorte qu'il ne pouvait plus s'adresser à elle avec la même familière tendresse qu'auparavant. C'est pourquoi, comme l'Église s'est éloignée de Dieu de la façon la plus sérieuse, Jean doit adresser sa lettre, non pas à l'Église, mais à son ange ou représentant. Les anges dont il s'agit dans ces épîtres étaient des hommes, et ne doivent pas être confondus avec les êtres d'une nature spirituelle qui sont appelés de ce nom (
2). L'apôtre Jean est employépar le Seigneur à leur envoyer un message, et Dieu agirait contrairement à toutes ses voies en employant un homme comme messager auprès des anges proprement dits. Les anges servaient souvent d'intermédiaires entre Dieu et l'homme, mais jamais les hommes entre Lui et les anges. Je crois, en outre, que l'ange à qui cette lettre est adressée, tout en étant un homme, n'occupe pas nécessairement une position officielle telle que celle d'un évoque, etc. Ce pouvait être un évêque, ou non. L'ange implique toujours l'idée de représentation.
Nous trouvons dans l'Ancien-Testament l'ange de Jéhovah, l'ange de l'alliance, etc., et il est fait mention en Daniel d'anges qui étaient identifiés avec Israël, etc.
Le Nouveau-Testament parle d'anges des petits enfants qui voient dans le ciel la face de leur Père, expression par laquelle il faut évidemment entendre leurs représentants. C'est ainsi qu'en
Actes XII, on disait de Pierre, que c'était son ange. J'en conclus donc qu'ici l'ange, tout en étant un homme, est d'une manière ou d'une, autre, le représentant de l'assemblée. En conséquence, il pouvait être dit, «j'ôterai ton chandelier,» etc. Voir sous ces mots une position officielle déterminée prêterait à beaucoup d'objections, non pas seulement parce que ce serait introduire une nouveauté, mais parce que cette nouveauté serait en opposition avec tout ce que l'Écriture enseigne ailleurs relativement à l'assemblée. Mais je n'ai aucun doute qu'il se trouve de fait dans les assemblées une ou plusieurs personnes que le Seigneur associe à l'assemblée d'une façon toute spéciale, et comme la caractérisant: cette personne est moralement identifiée avec l'assemblée, et reçoit du Seigneur soit louange, soit condamnation, selon l'état de l'assemblée. Ici l'état de l'assemblée est directement imputé à l'ange.

Le fait que c'est à lui que parle le Seigneur, et non à l'assemblée, place pour ainsi dire cette dernière, à une plus grande distance de lui. Qu'est-ce qu'un fait pareil ne nous dit pas de la terrible condition dans laquelle l'Église était tombée!
Le Seigneur ne pouvait plus s'adresser directement à ces assemblées. Il avait parlé sans intermédiaire même aux Corinthiens; car, quelque coupables qu'ils fussent, ils ne s'étaient pas ainsi détournés de lui. Mais ici le message consiste en ces paroles désolantes: «Tu as abandonné ton premier amour.» Pourtant, si Christ n'avait pas une église fidèle, au moins il avait un fidèle serviteur dans la personne de Jean: et c'est à lui qu'il est parlé en tout premier lieu. Et qu'on se souvienne toujours que depuis lors l'Église ne s'est jamais relevée de cette chute et de cette position relativement éloignée. L'Église, la maison de Dieu, est dans un état complet de ruine ici-bas; et dans un état pareil, la première chose qui nous convienne c'est de le sentir.

Ceci ne touche en aucune manière la question du salut éternel; mais c'est abuser de la certitude du salut que de s'en servir pour amoindrir nos obligations envers Dieu. De fait, il n'existe jamais, avant la conversion, de profond sentiment du péché; car s'il pouvait en exister alors, il serait accompagné d'un complet désespoir. Mais quand nous avons reçu notre pardon et que nous sommes dans une paix parfaite, nous pouvons regarder à notre péché et le juger pleinement. Un ange saint ne connaît pas Dieu comme nous devrions le connaître - je ne dis pas comme nous le connaissons, quoique ce soit vrai aussi. Un ange pénètre dans les merveilles de la puissance de Dieu «obéissant à la voix de sa parole;» mais les choses profondes de Dieu se montrent, chose merveilleuse à dire, au sujet de notre péché, et dans la personne de son Fils unique, «vu des anges» il est vrai, mais en relation vivante avec nous.

Le Seigneur se présente à Éphèse comme «celui qui tient les septs étoiles dans sa droite, qui marche au milieu des sept chandeliers d'or» (
vers. 1 ). Il est venu pour examiner, pour juger - non pas encore naturellement le monde des impies - mais l'assemblée qui est à Éphèse.Quelle différence entre l'aspect sous lequel il nous est présenté ici, et celui sous lequel nous le voyons et l'Église aussi en Eph.II. 6! Là, il est assis à la droite de Dieu dans les lieux célestes, et Dieu nous y a fait asseoir aussi ensemble dans les lieux célestes en Christ Jésus. Ici il marche au milieu des chandeliers. Sa main est indispensable, car personne que lui ne pourrait faire face aux difficultés. Mais n'est-ce pas quelque chose de solennel qu'il soit présenté de cette manière à cette même Église, à laquelle Paul avait ouvert la plénitude de sa grâce céleste, et la plénitude de la bénédiction qui lui appartenait en Christ? Et maintenant le voilà obligé, pour ainsi dire, de marcher et de revendiquer les droits de son autorité, non point parmi ceux qui ne l'ont pas connu, mais là où l'on avait jadis si bien connu son amour - maintenant, hélas! oublié et déshonoré.

«Je connais tes oeuvres, et ton travail, et ta patience, et que tu ne peux supporter les méchants, et que tu as éprouvé ceux qui se disent être apôtres et ne le sont pas, et tu les as trouvés menteurs, et tu as patience, et tu as supporté des afflictions pour mon nom, et tu as travaillé» (
vers. 2, 3). Ainsi, il se trouvait là plusieurs choses louables. Il y avait de la patience, et c'est le premier signe, si non le plus grand, que Paul donne de son propre apostolat. Il y avait plus encore: car rien n'est plus facile à lasser que la patience quand elle a soutenu beaucoup d'épreuves. Mais ici, à Éphèse, on persévérait dans la patience (comp vers. 2, 3). En outre, là où il y a de la patience, il peut y avoir tendance à passer par-dessus le mal, ou du moins à supporter les méchants. Mais ce ne fut pas le cas ici. Les Éphésiens avaient supporté des afflictions pour le nom de Jésus, mais ils ne pouvaient supporter les méchants, et ils avaient éprouvé ceux qui prétendaient à la position la plus élevée, celle d'apôtres, et les avaient trouvés menteurs; ils avaient continué de cette manière, et ne s'étaient point lassés.
Qu'il est doux de voir le Seigneur dans sa douleur, si nous pouvons parlé de la sorte dans le désappointement de son amour, commencer ainsi par tout ce qu'il y avait de bien! Mais tout en trouvant chez eux des choses qu'il pouvait louer, il avait contre eux qu'ils avaient perdu leur premier amour. Ils n'avaient plus la conscience de l'amour du Seigneur pour eux, et il en était résulté que leur propre amour pour Christ avait pâli. C'était leur appréciation de l'amour du Seigneur qui les rendait capables d'aimer.

Puis-je précisément faire remarquer, que le mot «quelque chose» ajouté dans les versions ordinaires au
verset 4 paraît affaiblir le sens? Il pourrait suggérer l'idée que le Seigneur n'avait que peu de chose contre eux, tandis que, dans la vérité, il était extrêmement affligé.
Ne pas sentir son amour, et par conséquent ne pas le lui rendre, était la chute la plus profonde, surtout chez ceux qui en avaient autrefois joui. Mais maintenant il s'était éteint, et qu'en résulterait-il avec le temps? «Souviens-toi donc d'où tu es déchu, et te repens, et fais tes premières oeuvres, autrement je viens à toi promptement et j'ôterai ton chandelier de son lieu à moins que tu ne te repentes.»

Il est beaucoup plus facile d'avoir du zèle pour agir que pour se repentir. Mais cela même ne saurait satisfaire le coeur de Jésus, à moins qu'ils ne revinssent à leur premier amour qui avait produit leurs premières oeuvres: sinon il faut que le chandelier soit ôté. Je doute, tant pour des raisons externes que pour des raisons internes, que le mot «promptement» doive se trouver dans le
verset 5. Car lorsque le Seigneur vient pour juger les voies des siens, peut-on dire que c'est ainsi qu'il vient? Quand il vient, soit pour combattre contre les Nicolaïtes, soit pour nous prendre avec lui, c'est promptement sans contredit (Apoc. II,16; III, 11; XXII, 7, 12, 20). Mais il donne du temps pour la repentance, même s'il s'agit de Jésabel, et combien plus à ses chers Éphésiens.

L'enlèvement du chandelier n'implique point que l'Église ne pourrait pas continuer en apparence comme auparavant, mais qu'elle perd sa place comme témoin pour le Seigneur digne de confiance. Rien ne saurait tenir lieu de la proximité avec le Seigneur, soit pour l'Église, soit pour l'âme. Et cette proximité était perdue désormais, non pas simplement pour l'assemblée d'Éphèse, mais même dès-lors, pouvons- nous dire, je pense, pour l'Église en général.
Le témoignage extérieur pouvait bien continuer, mais ce n'est pas là ce que le Seigneur apprécie le plus, quoiqu'il l'apprécie, en tant qu'il est simple, sincère et fidèle. Cependant il ne peut pas ne pas estimer avant tout dans les coeurs qui lui sont consacrés, le fruit de son propre amour, de son amour personnel, parfait, qui s'immole lui-même. Il a sur la terre une épouse qu'il désire voir sans autre objet que lui-même, et se conservant pour lui pure du monde et de ses voies. Dieu nous a appelés pour cela; il ne nous a pas appelés pour le salut seulement, ou pour lui être en témoignage par une vie de piété, quoique cela soit éminemment vrai et important, mais par-dessus tout, pour Christ - comme une épouse pour son Fils! Ce devrait être là certainement notre première et notre dernière pensée, notre pensée continuelle et la plus chère; car nous sommes fiancés à Christ, et il a, lui du moins, prouvé la plénitude et la fidélité de son amour pour nous. Mais que dire du nôtre?

En regardant à Christ l'Église apprend à se tenir dans la poussière, tout en se réjouissant toujours néanmoins dans le Seigneur. Le sentiment de la chute en nous-mêmes et dans les autres serait accablant, si ce n'était que nous avons le droit de trouver notre joie en Celui qui n'a jamais failli, et qui, malgré tout, nous aime, nous, qui avons rendu pour lui un si faible, si infidèle témoignage. Le vrai moyen de ne pas nous retirer sans avoir été bénis et fortifiés, c'est d'aller à lui, même pour de pénibles confessions. Nous lui devons de reconnaître et de sentir notre péché; mais être occupés de notre péché simplement ne donne jamais de la force. Christ doit posséder la gloire, et assurément Celui qui nous a délivrés de la colère à venir, qui peut nous sauver de l'enfer, a le pouvoir de nous délivrer tout bourbier, de toute faute sur la terre. Pour un chrétien, faire confession de son péché, s'attacher à Jésus, c'est maintenir le nom de Celui qui vient à son secours, et alors la victoire est sûre.

Mais quelle consolation et combien elle est propre à rassurer, de voir qu'à la suite du reproche qu'il a dû adresser, le Seigneur parle encore de choses qui peuvent avoir son approbation!«Mais tu as ceci, que tu hais les oeuvres des Nicolaïtes, lesquelles, moi aussi, je hais.» (
vers. 6.)
Le Nicolaïsme semble avoir consisté dans l'abus de la grâce. Les saints d'Éphèse avaient failli au devoir de demeurer attachés au bien, mais ils avaient communion avec le Seigneur dans l'horreur du mal. On dit souvent: «il n'y a pas d'église parfaite sur la terre.» Je voudrais demander en réponse, ce qu'on entend par «une église parfaite.» Se trouvera-t-il un chrétien qui ose me dire que nous ne devons pas viser à tout ce qui est conforme à la sainteté de Dieu? Je réclame précisément pour l'Église ce que l'on est tenu de m'accorder pour tout chrétien individuellement. Comme il se trouve sûrement des fautes dans l'individu, il y en aura aussi dans l'Église. Mais alors il y a cette bénédiction, que, comme le Saint-Esprit habite dans l'individu pour le guider et le bénir, ainsi le même Esprit habite dans l'Église, et Christ la purifie par le lavage d'eau, par la parole.

Il y a deux choses dans l'assemblée aussi bien que dans l'individu - le Saint-Esprit qui est la puissance du bien, et la chair qui convoite contre lui. De même que, dans un homme, on peut dire que l'âme est répandue dans tout le corps dont elle anime toutes les parties; ainsi en est-il de l'Esprit dans l'Église de Dieu. Lorsqu'on prétend qu'il faut tolérer le mal parce qu'il n'y a pas d'homme qui soit exempt de péché, c'est de l'antinomianisme; et je crois que c'est là le principe même des Nicolaïtes. De même que l'individu doit se tenir prêt à aller à la rencontre du Seigneur, sans laisser rien qui ne soit réglé au moment de sa venue, pareillement le Seigneur attend la même chose de l'assemblée, parce qu'il y a dans l'Église de Dieu une puissance divine contre le mal.

Vient ensuite la promesse précédée de l'avertissement. «Que celui qui a des oreilles écoute ce que l'Esprit dit aux assemblées: A celui qui vaincra, je lui donnerai à manger de l'arbre de vie qui est dans le paradis de mon Dieu.» (
vers. 7.)

Il y a eu le paradis de la création où l'homme fut placé et mis à l'épreuve; mais il tomba. Les églises étaient tombées aussi. Mais maintenant une nouvelle scène s'ouvre. Ce n'est plus le jardin d'Eden, mais le paradis de Dieu-«de mon Dieu» dit le Seigneur Jésus. Et il ne renferme pas d'arbre qui puisse introduire la douleur et la mort. L'arbre de vie seul y est.
L'Église d'Éphèse était déchue, il est vrai de son premier amour: mais quand même elle ne compterait qu'un seul membre qui sentît bien et profondément l'injure faite à la grâce du Seigneur, un seul membre qui vainquît, cette promesse était donnée à ce membre pour la consolation et pour la joie de son âme. Et la grâce du Seigneur est tout aussi parfaite aujourd'hui. Puisse-t-il n'y avoir ici personne qui n'ait des oreilles; et s'il y en a qui en aient, puissent- ils écouter et vaincre!

 
(1) Quiconque croit à l'inspiration de l'Apocalypse, admet naturellement l'application universelle des tableaux contenus dans Apoc. II, III, comme celle des Actes dans le Nouveau-Testament, ou celle des histoires de l'Ancien. Mais l'idée que les sept églises représentent toutes les églises, ou l'état et le caractère général des choses, aux jours de Jean, me semble pure confusion. Le fait est que chacune d'elle représente un état moral distinct, dans lequel le corps professant pouvait se trouver en tout ou en partie à un temps donné. En un mot, que les assemblées locales présentassent alors les traits spéciaux décrits ici, la chose est parfaitement vraie; mais elles ne pouvaient pas toutes caractériser l'état général de l'Église en ce moment-là, parce que ce sont des conditions morales différentes et même opposées qui ressortent dans chacune d'elles.

Si nous admettons par conséquent, comme nous devons le faire, que leur portée s'étend au-delà des assemblées locales, ou de la conduite des individus simplement, elles ne peuvent avoir trait naturellement qu'aux phases successives d'un état spirituel, bon ou mauvais; dans l'histoire de l'Église professante. Les partisans extrêmes de l'école protestante dans l'interprétation de l'Apocalypse, ne savent peut être pas généralement que leur savant chef, Mède, s'exprime ainsi dans ses plus mûres «Courtes observations sur l'apocalypse» (oeuvres, pag. 905): «Si nous faisons attention à leur nombre sept, nombre d'une révolution de temps, et qu'en conséquence, dans ce livre, les sceaux, les trompettes et les coupes sont au nombre de sept; si nous réfléchissons au choix que fait le Saint-Esprit, et par suite duquel il ne prend pas toutes les églises, ni l'église la plus célèbre du monde, comme Antioche, etc, et qui avaient sans doute autant besoin d'instruction que celles qui sont nommées ici, - si tout cela est considéré attentivement, ne semble-t-il pas qu'outre ce point de vue littéral, ces sept églises furent prises comme des modèles et des types des divers âges de l'Église catholique, à principio ad finem, de manière à être pour nous comme une esquisse prophétique de la septuple condition de toute l'Église visible, selon les âges divers, correspondant à la description de ces sept églises?
Et si on accorde ceci, savoir que l'intention du Seigneur était d'en faire autant de modèles d'un pareil nombre de conditions de l'Église se succédant dans un ordre semblable à celui dans lequel ces églises sont nommées, alors certainement la première église (l'état Éphésien) doit être la première, et la dernière être la dernière,» etc.

(2) Origène et Andréas adoptèrent le premier sens, mais Épiphane et d'autres le rejettent expressément. Plusieurs parmi les modernes supposent que ce terme est emprunté à la synagogue, et répond au chazan de celle-ci. Dans ce cas, l'ange de l'Église ne saurait être un ancien, bien moins encore le président des anciens, comme le prétend Vitringa, mais plutôt celui que l'on appelle le clerc ou le sacristain. Le terme employé par le Nouveau-Testament pour désigner ce chazan ou ange de la synagogue, paraît être hupérétès, celui qui prenait soin des livres, etc. (
Luc IV, 20); le chef de la synagogue était distinct, et il y en avait plusieurs.
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