Vous me
chercherez et vous me trouverez si vous me cherchez
de tout votre coeur. Je me laisserai trouver par
vous, dit l'Éternel.
(Jér.
29 :
13.)
C'était dans la nuit du 11 février
1899, à 11 heures. J'étais encore
attablé à l'auberge du Bären
à Dürrgraben. Un homme venait d'entrer.
Il commanda une limonade et une saucisse. Voyant
cela, je pensai : « Voilà un
homme heureux ! » car moi,
j'étais en train de jouer aux cartes et
boire du vin. À la fin du jeu, un
désir ardent me saisit et je pensai :
« S'il y a possibilité qu'un homme soit sauvé
sur terre, eh
bien ! dès à présent, je
serai cet homme ! Maintenant, je veux croire
ce qui est écrit dans la Bible, je veux
faire ce qu'elle ordonne et laisser de
côté tout ce qu'elle prescrit de
laisser ! » Alors je sentis une
force descendre en moi, ainsi qu'une
félicité merveilleuse ; je
savais de façon certaine que j'avais
joué aux cartes pour la dernière
fois. Ensuite, j'entendis une voix disant que je
devais signer un engagement de la
« Croix-Bleue ». Ne sachant pas
ce que cela signifiait, je me rendis la nuit
même chez mon voisin, le notaire, pour
demander ce que signifiait le nom :
« Croix-Bleue ». Il m'expliqua
qu'il s'agissait ici d'une société
dont les membres se sont engagés à
s'abstenir de toute boisson alcoolique. Il ajouta
encore qu'il allait se renseigner au sujet d'une
société de ce genre et qu'il
viendrait avec moi pour signer aussi. Ce notaire
était un camarade de jeu et nous
signâmes tous deux.
Me rendant à la maison, j'eus
l'impression d'être enveloppé d'un
manteau de soie, et cette parole devint effective
pour moi : « Il prendra les agneaux
dans ses bras, il les portera dans son sein ;
il conduira les brebis qui allaitent. »
(Esaïe 40 : 11.) Je déclarai
à ma femme : « C'est la
dernière fois que j'arrive ainsi à la
maison ; dès à présent,
j'ai rompu définitivement avec la vie
d'auberge ! » Naturellement, et vu
que je l'avais trompée fréquemment,
elle n'y ajouta pas foi. Quant à moi,
j'étais certain de la victoire ! La
parole suivante prit de l'importance à mes
yeux : « Vous me chercherez, et vous
me trouverez, si vous me cherchez de tout votre
coeur ! » Il n'était plus
question de rompre avec cinq péchés
seulement ; je voulais commencer une vie
nouvelle. Le Seigneur Jésus dit
clairement : « Ainsi donc, quiconque
d'entre vous ne renonce pas à tout ce qu'il
possède ne peut être mon disciple et
celui qui aime quelque chose plus que moi, n'est
pas digne de moi. » Le fait d'user d'un
parlé pieux et d'obéir à Dieu
en certaines choses n'est nullement
suffisant. Celui qui se convertit est d'accord,
à l'instant même, d'obéir en toutes choses à Dieu et à sa
Parole.
Précédemment, j'avais honte
d'assister aux assemblées mais, dès
cet instant, la Parole de Dieu me réjouit
beaucoup. Souvent, rentrant de l'auberge, mes
camarades et moi nous promettions de nous rendre au
culte mais, lorsque le dimanche arrivait, je ne
manquais pas de leur faire dire :
« Je ne viens pas ! »
J'étais persuadé que
fréquenter les assemblées et devenir
un mômier était quelque chose de bien
triste, cela devait être la fin de toute
joie. Mais comme je fus agréablement
« trompé » et comme je
fus inondé de joie ! Jamais je n'avais
imaginé une telle
félicité ! C'est à cette
époque déjà que je modifiai le
couplet d'un chant disant :
Si les gens croyaient au Sauveur, leur vrai bien,
Certes, encore aujourd'hui, tous deviendraient chrétiens.
Tous, et non pas, comme il était
dit : « plusieurs ». Tout
de suite j'eus la victoire sur beaucoup de choses.
J'étais dans la louange en témoignant
comment Jésus m'avait délivré
du jeu decartes, du jeu de
quilles, des mensonges, ainsi que de l'emploi en
vain du saint nom de Dieu.
Six ans avant ma conversion, j'avais
rompu avec le braconnage, car Dieu m'avait
parlé de diverses manières, en sorte
que je n'eus plus le courage de continuer. Un soir,
à l'affût à l'angle d'une
forêt, un lièvre passa soudain
à portée de ma main. Pour ne pas trop
abîmer sa peau, je ne tirai pas
immédiatement. J'attendis qu'il fut à
vingt mètres environ et je fis feu. Une
longue flamme sortit de mon fusil. Lorsque je me
relevai, la grenaille sortait seulement du
canon ! Cela m'ébranla
énormément. Une autre fois,
j'étais aux aguets au coin d'une
forêt ; à l'opposé, le
terrain était en pente et en zone
découverte. Brusquement, quelque chose de
couleur rouge fit une courte apparition à
l'orée du bois. Me préparant à
tirer, je pensai : « Si c'est un
lièvre, il ne retournera pas dans la
forêt, mais il sortira ! » Je
ne tirai pas. Décidant ensuite de faire feu
j'y renonçai de nouveau. En fin de compte,
je me rendis sur les lieux pour voir ce que
c'était. C'était un buisson au
feuillage jaune et rouge sous lequel un de mes
collègues était à
l'affût. Il avait agité le feuillage
en s'y installant. Si j'avais tiré, je
serais devenu un meurtrier. Quelques instants
après, le temps s'était assombri, et
me trouvant sur le chemin du retour, j'entendis un
coup de fusil non loin de moi. Je vis la grenaille
entrer en terre ! La coupe était
pleine. Ces incidents me firent abandonner le
braconnage. À cette époque, je cessai
également de dérober.
On racontait qu'un
homme en vue de voler, était monté
sur un prunier situé près d'une
maison. Quelqu'un, ayant surveillé ses faits
et gestes, s'était rendu dans la grange,
puis, s'était muni d'un long tuyau et le
portant à sa bouche, avait crié par
un trou du toit : « Tu ne
déroberas point ! » Le voleur
eut l'impression que cette voix venait du ciel, et,
descendant prestement de l'arbre, il se
convertit ; les choses avaient certainement
été dirigées par le Seigneur
et le but fut atteint. Lorsque j'étais
tenté de m'approprier du bien d'autrui, ces
paroles me revenaient chaque fois en mémoire
« Tu ne déroberas
point ! » Je ne pus oublier cette
anecdote. Dieu se sert de moyens bien divers pour
nous aider !
Il était grand temps que je me
convertisse. Le jour suivant déjà, ma
femme accoucha et tomba malade, ce qui nous apporta
beaucoup de tribulations. Ma position à
l'égard de Dieu était maintenant tout
autre. J'étais content et
reconnaissant ! La maladie de ma femme empira,
devint très grave, et l'on ne pouvait,
à vues humaines, songer à une
guérison ; tout au plus pouvait-on
entrevoir comme seule issue la paralysie. Cette
maladie dura sept mois. D'abord, ma femme eut la
fièvre puerpérale, ensuite les seins
malades ; puis commença une
phlébite et finalement la goutte fit son
apparition. Une jambe s'était raccourcie de
30 centimètres environ. Le dos se
voûtait peu à peu. Tout ceci se
produisait dans d'atroces douleurs. Vu notre
situation, il m'était impossible de faire
appel à une garde-malade. À mon
travail, s'ajoutaient les soins à donner
à ma femme. Nos
enfantsétaient en bas
âge et ne pouvaient prêter aide ;
ainsi je devais m'occuper du ménage
également ; mais le Seigneur m'accorda
la grâce nécessaire. De temps à
autre, nous étions aidés par
quelqu'un mais, en général, la charge
totale m'incombait. On admirait ma patience, mais
il me semblait être un homme impatient ;
les autres ne pouvaient voir dans mon coeur.
Cependant, je ne me suis jamais plaint, bien que je
fusse tenté de le faire.
Un jour, ma femme reçut la visite
de deux hommes. Ils savaient si bien prier que
j'eus souvent cette pensée :
« Que ne donnerais-je pas pour savoir
prier ainsi ! » Ils prièrent
avec ma femme déclarant qu'elle était
bienheureuse, sauvée. Et pourtant, elle
n'était pas convertie et encore bien moins
en possession de la paix de Dieu. Elle resta malade
en dépit de ces belles prières !
Je me rendais assidûment chez le
médecin, pensant que si les apôtres
Pierre, Jacques ou Jean étaient encore sur
terre, j'irais auprès d'eux pour obtenir la
guérison de ma femme. Je me trouvais
être trop pécheur pour croire que Dieu
exaucerait ma prière. Selon l'usage, je
faisais appel au médecin, ne croyant pas
encore, à cette époque au pardon des
péchés tel qu'il peut être
obtenu par le sacrifice de Christ. Après
sept mois de traitement, environ, le docteur
déclara qu'il ne connaissait plus de
remèdes, ajoutant que l'estomac de ma femme
était malade par leur absorption et que,
d'ailleurs, il me faisait perdre mon argent. Il
termina par ces paroles :
« Aide-toi, le ciel
t'aidera ! » Je fis alors la
réflexion : « Tu mens, car
Dieu ne le peut aussi longtemps
que je puis encore m'aider
moi-même ! » Je me rendis
à la maison, ne songeant plus ni à
moi-même, ni à une belle
prière, et je dis : « Cher
Père céleste, je ne sais plus que
faire et je ne veux pas être un obstacle pour
toi. Maintenant, je te fais place pour aider ma
femme ! » Et il aida. La
constatation que Dieu est aussi médecin
était pour moi une découverte. Aucune
des personnes ayant visité ma femme n'avait
parlé de ce divin Médecin ni ne
l'avait rendue attentive au salut de son
âme.
J'étais alors pauvre et
misérable, mais jamais je ne souhaitai
recommencer ma vie d'autrefois ! Dieu eut
compassion de nous et fit un miracle à
l'égard de ma femme ; les grandes
douleurs se calmèrent et elle reprit
visiblement des forces. À nouveau, son dos
se redressa et elle put étendre les jambes,
mais l'une de celles-ci était encore environ
quinze centimètres plus courte que
l'autre ; cependant elle redevint normale au
bout de quelques jours. Après un laps de
temps très court, la santé de ma
femme fut rétablie à tel point qu'il
lui fut possible d'effectuer à nouveau des
travaux pénibles et même de piocher
des sillons tout le jour. Les personnes qui
l'avaient approchée durant sa maladie
pouvaient à peine ajouter foi à cette
guérison et bien des gens, venant de loin,
désirèrent constater ce miracle. Tous
ces événements m'encouragèrent
à me confier en Dieu à l'avenir,
même dans la maladie. Jusqu'à ce
moment-là, j'avais été
obsédé par l'idée que
j'étais par trop mauvais et que Dieu ne m'exaucerait
que si
j'étais un homme meilleur ; ainsi, je
ne pouvais concevoir un exaucement de prière
qu'après une amélioration de mon
état. Toutefois, combien n'ai-je pas
été réjoui par ces paroles
qui, aujourd'hui encore, me fortifient :
« Tu oses venir, tel que tu es tu
seras accepté par grâce ».
Dès lors je fus encouragé à
prier également pour les autres. Deux ou
trois personnes soi-disant incurables furent
guéries. Lorsque je rencontrais le
médecin, il ne manquait pas de me
dire : Veux-tu me faire à nouveau
concurrence ? » Néanmoins son
respect augmentait à mon
égard.
J'étais tellement rempli de ces
expériences que j'aurais
désiré fonder un second
« Rämismühle », mais
Dieu choisit un autre chemin pour moi.
Celui qui cache ses transgressions ne prospère point, mais celui qui les avoue et les délaisse obtient miséricorde.
(Prov. 28 : 13.)
Peu après ma conversion, je me rendis
à l'évidence que mes
péchés devaient être
confessés et réparés dans la
mesure du possible. Alors la honte m'envahit, et je
me dis : « Lorsque je devrai avouer
avoir dérobé du bois ou des cerises,
que diront les gens lorsqu'ils
m'entendront ? » J'avais volé
du bois à un voisin ; je me rendis chez
lui et heurtai en tremblant à la porte.
Personne ne vint ouvrir, ce qui
intensifia encore ma crainte. Je désirais
m'enfuir, mais je craignais qu'il ne me
vît ; c'est ce qui me retint. Enfin, la
porte s'ouvrit. Étant entré, je lui
indiquai le pourquoi de ma visite :
« Je veux vivre pour le Seigneur et je
veux être sauvé. Comme je t'ai
dérobé du bois, je viens en payer la
contre-valeur ! » Il
répondit : « N'y regarde pas
de si près et ne sois pas accablé
pareillement » - « Je veux me
défaire de ce fardeau
pesant ! » Alors il me
déclara qu'il aurait, lui aussi, bien des
choses à réparer s'il voulait agir
ainsi et que, d'ailleurs, il m'avait aussi
volé. Nous possédions un peu de
forêt et certains paysans, lorsqu'une perche
leur faisait défaut, ne
s'inquiétaient pas outre mesure lorsqu'ils
s'étaient servis chez le voisin. C'est ainsi
que ce voisin pardonna mon délit, et j'en
fis de même à son
égard.
Je fus obligé de me rendre
également chez d'autres paysans au sujet de
bois dérobé. Si je ne réparais
pas mes torts, je savais très bien que ces
faits seraient mis à découvert au
jour du jugement et que je serais condamné,
bien que j'aie eu soin de recouvrir les souches
avec de la mousse afin que l'on ne remarquât
rien. Je tenais à avoir une conscience
purifiée et c'est le motif pour lequel je
mis tout en ordre. Les cerises et les pommes
volées faisaient également partie de
ces méfaits, bien que leur poids
n'atteignît ni vingt, ni même dix
kilos ! Mais je savais que tout devait
être mis à découvert chez moi,
sinon je me voyais en pensée au jour du
jugement, perché sur l'arbre au pied duquel se
trouvait
le
propriétaire - et j'étais
condamné et damné. C'est la raison
pour laquelle je me rendis partout, confessant mes
fautes et payant ce que j'avais
dérobé. Si l'on agit ainsi, les gens
sont témoins d'une foi agissante. Tel a
été chez moi le début et je
crois que beaucoup réalisent
également les choses ainsi.
J'avais dérobé trois
choses différentes chez un paysan. Je
confessai mon premier vol, puis je revins pour le
deuxième, mais le courage me fit
défaut pour confesser le troisième.
Ce dernier se rapportait plus spécialement
à une pièce de cuir destinée
au ressemelage et ayant une valeur d'environ
septante centimes. L'affaire était minime et
je songeais que sa réparation n'était
nullement importante mais, sans cesse ce cuir me
revenait en mémoire. Je me disais :
« Que va dire cet homme, si je me rends
chez lui pour la troisième
fois ? » Sa réaction sera la
suivante : « Combien de fois
reviendras-tu et que m'as-tu encore
dérobé ? » Tout devait
être mis à découvert et je dus
me rendre encore une fois chez lui.
Un certain jour de marché,
j'avais volé un petit couteau valant vingt
centimes ; lorsque je me convertis, j'eus
souvenance de ce délit. Malgré les
recherches faites, je ne trouvai pas trace du
vendeur et je remis quatre-vingts centimes à
la Mission, soit donc le quadruple, selon les
Écritures. Plusieurs années
s'écoulèrent et, un beau jour,
j'aperçus mon marchand de couteaux dans le
train. À Langnau, nous sortîmes
ensemble ; quelques personnes me reconnurent.
Lorsque l'homme futsur la route
je courus jusqu'à lui, et comme il avait
l'oreille dure, je fus contraint de crier bien
fort : « Je t'ai
dérobé un couteau ! »
Les larmes commencèrent à couler sur
son visage, mais je fus fort soulagé lorsque
je lui eus remis quatre-vingts centimes.
Certaines cerises volées me
revenaient continuellement en mémoire.
J'entendis un jour un prédicateur
déclarer que si on oubliait le tort fait
après avoir prié, nul n'était
besoin de le réparer, et qu'il n'y avait
lieu de confesser que ce qui nous accablait. Ainsi
lorsque je pensais à ces cerises, je priais
et je les oubliais. Mais elles étaient
à nouveau présentes à mon
esprit lorsque quelqu'un parlait de vol de cerises.
Une telle chose non réparée vous
poursuit comme un chien et vous crie :
« Ce n'est pas bien, ce n'est pas
bien ! » Il n'est pas possible de
croire sur une telle négligence ! En ce
temps-là, un de mes garçons tomba
malade ; il respirait difficilement et
devenait bleu. Je voulais me rendre chez le
médecin, mais je savais que :
« Jésus est le
médecin » et je résolus de
me confier en lui.
Ouvrant la Bible, je tombai sur le texte
d'Ezéchiel
33 : 15:
« Si le méchant rend le
gage » s'il restitue ce qu'il a ravi,
s'il suit les préceptes qui donnent la vie,
sans commettre l'iniquité, il vivra, il ne
mourra pas. Tous les péchés qu'il a
commis seront oubliés ». Je me dis
qu'en ce qui me concernait, j'avais
réparé les torts que j'avais commis.
Après un moment, j'ouvris de
nouveau la Bible et je lus : « Celui
qui cache ses transgressions ne
prospère point. Mais celui qui les avoue et
les délaisse obtient
miséricorde ».
(Proverbes
28 : 13.)
Une troisième fois, j'ouvris la
Bible et voici ce que je lus :
« Lorsque tu as volé, tu dois le
restituer en y ajoutant un
cinquième ». Finalement, les
écailles tombèrent de mes yeux et je
vis qu'il n'est pas écrit :
« Confesse lorsque tu es accablé,
mais : lorsque tu as
« dérobé ». Il me
vint alors cette pensée :
« Que diront les gens ? À
l'assemblée, tu as raconté que tes
affaires avaient été mises en
ordre ; tu seras regardé comme
menteur ! » Mais ma décision
fut prise en pensant : « Advienne
que pourra ! Que les gens disent n'importe
quoi ! À présent je me rends
chez ce paysan ! » Lorsque j'arrivai
chez lui il battait le grain dans sa grange et
toute sa famille était là.
M'approchant de lui, (je ne dis pas à voix
basse : « Viens un peu de
côté, j'ai quelque chose à te
dire ! ») je confessai mon vol
à haute voix, en précisant comment
j'avais été enseigné par le
prédicateur, et ce qui m'avait
été révélé le
jour même en lisant la Bible, et je
conclus : « Donc, je suis venu pour
régler les
cerises ! »
Au cours de cette journée, je dus
encore me rendre à sept endroits
différents et écrire à une
huitième personne. Par la suite, on pouvait
parler de cerises sans que cela me touche,
j'étais tranquille ! Comme autre
résultat, mon garçon se
rétablit et, le lendemain, il put se rendre
à l'école. Je rendis grâces
à Dieu de m'avoir ouvert les yeux.
Auparavant, je lisais souvent sans
réfléchir à ce que je venais
de lire. Beaucoup de gens font naufrage ici,
préférant les tourments de l'enfer
à la confession du péché, mais
celui qui veut être sauvé
n'hésite pas longtemps ! Lorsque je
constatais : « La Parole dit
ainsi », je me hâtais de lui
obéir, sans remettre les choses au
lendemain.
Combien nombreux sont ceux qui pensent
qu'il est possible d'avoir une affaire nette, sans
confession des péchés ! Cela ne
revient pas à dire que chaque
péché doit être confessé
à un homme, mais il est grandement utile de
confesser précisément ce que l'on ne
voudrait pas dire. Une personne agissant ainsi peut
dire ensuite de tout coeur comment Jésus l'a
délivrée. La confession réelle
des péchés consiste à rompre
totalement avec le péché et ne plus
le servir dès l'instant même ! Si
quelqu'un n'est pas libéré du
péché, il est bon de prier avec lui,
selon cette parole : « Confessez
donc vos péchés les uns aux autres,
et priez les uns pour les autres, afin que vous
soyez guéris ».
(Jacques
5 : 16.) L'on dira
peut-être : « J'ai dit
à Dieu les choses que j'avais à
confesser ! » Cela est bien, mais
souvent cela ne suffit pas. L'homme doit en effet
se montrer une fois tel qu'il est et abandonner
ainsi sa propre vie. Nous lisons dans Matthieu 3 au
sujet de Jean-Baptiste : « Les
habitants de Jérusalem, de toute la
Judée et de tous les pays des environs du
Jourdain se rendaient auprès de lui et,
confessant leurs péchés, ils se
faisaient baptiser par lui dans le fleuve du
Jourdain ». Exhortant encore
spécialement les gens pieux, il leur
disait : « Produisez donc du fruit
digne de la repentance. Déjà la cognée est mise
à la racine des arbres : tout arbre qui
ne produit pas de bon fruit sera coupé et
jeté au feu ! »
Ayant ainsi mis tout en ordre, je
réalisai beaucoup de joie. Lorsque le poids
des péchés s'allège et qu'ils
éprouvent de la joie, beaucoup pensent que
c'est la paix de Dieu décrite dans la Bible.
Depuis l'époque de ma conversion
jusqu'à la nouvelle naissance, j'eus bien
des joies et les choses se passèrent comme
il est écrit : « Les
ordonnances de l'Éternel sont droites, elles
réjouissent le coeur ! »
(Psaume
19 : 9.) À
certaines occasions, je versais même des
larmes de joie mais je n'avais pas encore
réalisé la paix de Dieu. Je me
rendais assidûment à l'église,
de même qu'à l'assemblée, et je
ne voyais pas de frontière entre la vie et
la mort spirituelles ; selon ma conception,
partout s'annonçait la vérité,
et j'étais
« béni » en tout lieu.
Comme personne pieuse, on peut contrefaire de bien
des manières la véritable
piété, et il est aisé de
parler de bénédiction et de
joie ; mais celui qui a un bon
« odorat » sentira bien vite
« la petite odeur de vieux »
que répandent de tels chrétiens.
(Jérémie
48 : 11.)
Tel aurait été le cas chez moi
également, si un homme possédant le
discernement des esprits m'avait
parlé.
Tu as multiplié, Éternel, mon Dieu, tes merveilles et tes desseins en notre faveur : Nul n'est comparable à toi ; je voudrais les publier et les proclamer ! mais leur nombre est trop grand pour que je les raconte !
(Psaume 40 : 6.)
À compter du jour de ma conversion, j'eus
beaucoup de tentations et d'épreuves, mais,
toujours et à nouveau, il m'était
accordé de réaliser la
fidélité de Dieu d'une façon
merveilleuse selon ce texte : « Si
tu t'attaches à moi, je te
répondrai ! »
(Jérémie
15 :
19.)
Lorsque je me rendis à la
première assemblée de la Croix-Bleue
en vue de signer l'abstinence, on y chantait ce
chant : « Que la vie pour le
Seigneur est belle ! Qu'elle lui soit
donnée entièrement et
volontairement ! » J'en fus
ému à tel point que j'eus le
sentiment de ne plus toucher terre ! Dans
notre contrée, l'habitude de boire du vin ou
de l'eau-de-vie était ancrée
fortement, comme si cela devait faire partie de la
vie ; aussi, mon engagement d'abstinence
donna-t-il lieu à du scandale. L'usage du
thé était inconnu. Par
conséquent, on m'offrait partout soit du
vin, soit de l'eau-de-vie, en disant :
« Seulement un verre ! »
Je répondais alors : « Je
veux être sauvé et je veux vivre pour
le Sauveur ! Dieu m'a ordonné de ne
plus boire d'alcool ». Si l'on insistait
pour que je boive, je versais alors le contenu du
verresur le sol, que cela soit le
sol d'une chambre ou d'un chantier ! Les
choses se passèrent de façon
identique avec le tabac. Jamais on ne m'offrit
autant de cigares que depuis le jour où je
ne fumai plus ; même des
prédicateurs ! Je
répondais : « Je ne fume
plus, je suis
délivré ! » Mais on
rétorquait : « Seulement un
cigare cela ne fait rien ! » Alors,
prenant le cigare, je le brisais et le foulais aux
pieds. Ainsi, on cessa de m'en offrir.
À l'exception d'une seule fois,
je ne me rendis plus jamais à l'auberge. Aux
assemblées de la Croix-Bleue, j'entendais
déclarer que l'on pouvait très bien
s'y rendre pour boire une limonade, montrant ainsi
que l'on peut être heureux sans boissons
alcooliques. Donc, je m'y rendis une fois mais,
remarquant que l'on jouait aux cartes à mes
côtés, je fus tenté et me
dis : « À vrai dire, je
pourrais aussi me joindre au jeu, que je
comprendrais certainement mieux que
ceux-là ! » Me rendant compte
du danger, je pensai à cette parole :
« Heureux l'homme qui ne s'assied pas en
compagnie des moqueurs ! »
Commentant ce fait à l'assemblée
suivante, je déclarai : « Il
n'est pas convenable de se rendre à
l'auberge ; vous avez parlé
faussement ! » Alors commença
la haine à mon égard.
Je n'ignorais pas que j'avais
également à exhorter les
jureurs ; je tremblais, mais je savais que
Dieu exigerait leur sang de mes mains si je ne le
faisais pas.
(Ezéchiel
3 : 17-19.) Si
au cours d'une journée je n'avais pas repris
quelqu'un qui jurait, la nuit suivante le sommeil
me fuyait. Si je connaissais
cette personne, je cherchais à racheter ma
faute le jour suivant, car je savais que celui qui
ne reprend pas le jureur hait sa vie tout en
étant complice du péché.
(Proverbes
29 : 24 et Lévitique
5 : 1.) Dieu
nous a placés en qualité de gardiens
et si le jureur n'accepte pas l'exhortation, il en
supportera les conséquences, mais alors, de
notre côté, nous sommes
déliés d'une
responsabilité.
Après ma conversion, je savais
que le culte de famille m'incombait, mais je
n'avais pas encore lu dans la Bible que le
père de famille devait faire la lecture de
la Parole de Dieu le matin, à midi et le
soir : qu'il devait en inculquer les
éléments aux enfants, tout en
s'entretenant avec eux de ce qui s'y trouve
écrit lorsqu'ils se couchent, se
lèvent, ou encore s'ils sont en
chemin ; mais je fus conduit par l'Esprit de
Dieu. J'avais pour habitude de lire dans le livre
intitulé : « L'échelle
du ciel » et j'avais une grande opinion
de ce livre de prières que je croyais
être bon.
Inconverti, j'ai beaucoup
récité l'Oraison dominicale et,
depuis ma conversion, bien plus souvent encore. Au
commencement, je ne réfléchissais pas
à ce que je lisais dans ce livre de
prières. Mais un jour je me mis à y
penser. Un matin, je lus ceci : « En
me couchant, je pensais que l'eau montait
jusqu'à mon âme ! »
J'avais lu ce passage souvent mais la pensée
suivante m'assaillit : « En me
couchant hier soir, j'étais heureux et je
n'ai pas du tout songé à cela, c'est
un mensonge ! » Saisissant alors ce
livre de prières, je le
jetaisous le fourneau, aux yeux
de ma famille qui me regarda curieusement. Je pris
alors la Bible pour faire la lecture. Ensuite, pour
la première fois, je priai par coeur. Comme
je n'étais pas instruit, la chose me
paraissait pourtant impossible. Néanmoins,
je balbutiai quelques mots - je ne sais plus quoi -
et la présence de mes gens me fit
transpirer !
Le jour suivant, l'aubergiste, dont
j'avais été un fidèle client,
vint chez nous. C'était l'homme qui
m'inspirait le plus de crainte depuis ma
conversion ! Contrairement à son
habitude, il passa le seuil de la porte, entra dans
la chambre où nous étions en train de
prendre un repas, et prit place sur le fourneau. Le
dîner touchait à sa fin, mais
l'aubergiste ne faisait pas mine de partir.
« Il s'en ira peut-être avant la
fin du repas, si je mange
lentement ! » pensais-je. Mais il ne
bougea pas ! Le Père céleste le
tenait bien à sa place ! La peur
commença à me saisir :
« Comment un homme aussi ignorant que moi
pourrait-il lire et prier en présence de
l'aubergiste ? » Puis je pensai que
je pourrais avoir recours à l'oraison
dominicale - il n'y avait pas d'opprobre à
dire cette prière que chacun faisait sans
agir selon son enseignement - et faire la lecture
de la Bible plus tard, lorsque l'aubergiste aurait
enfin pris la décision de s'en aller !
Mais la parole suivante m'arrêta :
« Car quiconque aura honte de moi et de
mes paroles au milieu de cette
génération adultère et
pécheresse, le Fils de l'homme aura aussi
honte de lui, quand il viendra dans la gloire de
son
Père ! » Par
conséquent, il ne me restait qu'à
agir. La Bible était placée sur un
banc ; je la soulevai - Oh ! comme elle
me paraissait lourde - puis je l'ouvris et
j'articulai quelques versets. Des gouttes de sueur
tombaient sur les pages. Enfin je priai
brièvement. L'aubergiste s'en alla. La
« bataille » était
gagnée. J'étais content et me sentais
léger d'avoir confessé le nom du
Seigneur. Le soir, son beau-fils vint
également assister au culte, mais
déjà la lutte ne fut plus aussi
âpre. Il était évident qu'on
voulait savoir ce qui se passait chez
moi !
Il y a des instants dans la vie
où le dicton : « Oiselet,
mange ou meurs ! » se réalise
pleinement, et je ne sais comment les choses
auraient tourné si j'avais
capitulé ; peut-être aurais-je
connu ensuite la défaite si je n'avais pas
pris nettement position ! Nous avons un Dieu
merveilleux, qui conduit à bon port ceux qui
se sont vraiment livrés à lui de tout
leur coeur !
Avant ma conversion, lorsque nous
rentrions du restaurant nous prenions quelquefois
la décision de nous rendre à
l'assemblée le dimanche suivant, mais je
craignais terriblement de passer devant la laiterie
où quelques hommes prenaient
généralement place sur un banc ;
je faisais alors dire aux collègues, avant
que le dimanche fût là, que j'y
renonçais. Il en fut autrement après
ma conversion. Passant à cet endroit, je
m'approchai de ces hommes pour leur dire que je
m'étais converti à Dieu et que
j'avais réalisé le vrai bonheur, et
les inviter à assister aussi à l'assemblée. Ils
rougissaient et cherchaient des excuses ;
c'étaient là les hommes qui,
auparavant, m'avaient inspiré la
terreur ! Le dimanche suivant, ils
disparaissèrent lorsqu'ils
m'aperçurent de loin.
Lorsqu'on est assailli par la crainte,
il est bon de prendre un fortifiant, par exemple la
parole de la reine Esther : « Si je
dois périr, je
périrai ! » Mais,
jusqu'à ce jour, j'ai été
épargné.
Déjà à cette
époque, et sans ambages, je pouvais raconter
beaucoup de choses de ce Dieu bon,
témoignant que c'est auprès de lui
qu'est le bien-être. L'occasion de parler de
Dieu était toujours présente :
chez les paysans durant la semaine, à
l'assemblée le dimanche et lors des visites
que je faisais. J'attaquais le péché,
ne ménageant personne, qu'il s'agisse ou non
d'hommes importants. C'est aux grands qu'en
général je m'adressais
précisément, leur faisant sentir le
poids de leurs responsabilités. Beaucoup de
gens pieux furent saisis de crainte et se
convertirent. Au début de ma conversion, je
me mettais encore souvent en colère.
Oh ! cette colère ne me poussait pas
à saisir un bâton, mais elle
était cachée dans mon coeur ! Je
m'en rendais compte et je savais aussi que j'irais
en enfer si je m'adonnais à la
colère ! Car les enfants de
colère n'hériteront pas le royaume
des cieux, et cela m'inquiétait. Un jour, un
frère dans le Seigneur vint me rendre
visite ; nous étions à table,
mangeant, sans viande, des pommes de terre et du
légume avec appétit. Ayant ouvert la
porte, ce frère leva son bâton comme
s'il allait frapper et dit « Y a-t-il
encore des démons
ici ? » Je pensai :
« Si tu avais la possibilité de
chasser les démons avec un bâton, je
le pourrais certes aussi ! » Il
arrivait d'une autre maison où il avait
posé une question identique, et la femme
pieuse habitant là avait été
grandement indignée parce que
l'évangéliste s'était permis
de supposer qu'il y avait encore des démons
dans la maison.
Pour mon compte, j'avais maille à
partir avec le démon de la colère et
je répondis : « Oui, le
démon de la colère est
ici ! » - « Je m'en vais
le chasser à l'instant ! »
répondit-il, ajoutant : « Tu
es délivré, rends grâces parce
que tu es délivré de la
colère ! » Je me dis :
« Ce n'est pas la vérité,
je ne suis pas
délivré ! » Mais
ensuite, je fis la réflexion :
« J'ai lutté bien longtemps contre
cela et je n'ai pas eu la victoire ;
maintenant, je vais agir selon le conseil du
frère ! » Je rendis
grâces pour la délivrance et continuai
à faire de même lorsque j'étais
énervé. Toutefois, cette
pensée m'obsédait :
« Tu n'es pas délivré et de
plus, tu mens encore ! »
En écoutant ces propos, je
regardais en moi-même et non pas à
l'oeuvre de Christ. Néanmoins, je suivis le
conseil du frère. Un mois s'écoula
ainsi, lorsque je constatai tout à coup que
tout était transformé, trouvant ma
femme aimable et mes enfants transformés eux
aussi. Et mes voisins, quelle gentillesse ! Je
me souvins alors que depuis le matin je ne
m'étais pas mis en colère.
Les jours précédents,
lorsque personne ne bougeait dans la maison, me
levant très tôt, lisant la Bible et
priant dans la chambre, j'étais
obsédé par cette
pensée :
« Décidément, ils ne
veulent pas se lever ! » Cela me
fâchait. Je fermais alors la porte de la
chambre et celle de l'entrée à grand
bruit et je me rendais à l'atelier en
attendant que mes gens se réveillent enfin.
Mais tout restait calme dans la maison, et
l'obsession recommençait :
« Ils ne veulent pas se
lever ! » Je désirais
vivement me débarrasser de pareilles
pensées ; elles m'empêchaient de
prier, mais je m'armais de la hache et je frappais
sur le banc de menuisier comme si j'étais au
travail depuis longtemps, espérant que le
bruit réveillerait ces dormeurs. Mais tout
demeurait silencieux dans la maison ; Dieu
avait fait en sorte que tout restât
calme !
Donc, un certain matin je me rendis
compte subitement que j'avais pu faire ma
prière dans le calme, sans être
excité à la colère par des
pensées agaçantes ! Les jours
suivants, je pus constater de façon
évidente : « Je suis
délivré de la
colère ! » Je n'avais pas
encore réalisé la paix de Dieu je
n'étais délivré que de la
colère. Mais le laps de temps qui
s'écouta ensuite fut de courte durée,
et c'est au travers de nombreux combats que je
réalisai la paix de Dieu.
Après avoir été
délivré des péchés
grossiers, je commençai à me
considérer comme étant très
brave et intègre, meilleur que les autres.
Avec la meilleure volonté, j'en arrivai
à croire que je ne trouverais pas une
personne plus brave que moi et ainsi, je
commençai à faire une ascension sur
un chemin naturellement abrupt et parsemé
d'épines ! Ensuite vint la descente et
je descendis plus bas que je ne l'avais jamais
été auparavant. Lorsque je lisais la
Bible et que l'Esprit de Dieu éclairait mon
coeur, je constatais que beaucoup de choses, en mon
for intérieur, ne concordaient pas avec la
Parole de Dieu ; en fin de compte, je ne vis
que péchés sur péchés.
Si je lisais : « Aime ton prochain
comme toi-même ! » je me
trouvais être un transgresseur. J'arrivai
à cette conclusion : « Je
suis un homme chargé de soucis, un
païen, et ma confiance repose sur des choses
visibles ».
Lorsque les tiroirs de la table ou le
buffet de cuisine contenaient encore quelque chose,
j'étais plein d'assurance, mais quand tout
était vide, je me demandais :
« Que mangerons-nous ? Que
boirons-nous ? » Les saintes
Écritures me disaient que c'étaient
là les pensées des païens et que
c'était du péché. Regardant
autour de moi, je cherchais qui pourrait m'apporter
de l'aide, au lieu de tourner mes regards en haut.
De même, je constatais combien j'avais des
pensées terrestres, et combien
j'étais avare lorsque je voulais agir
conformément à la Parole de
Dieu : « Ne réclame pas ton
bien à celui qui s'en empare ! Donne
à celui qui te demande et ne te
détourne pas de celui qui veut emprunter de
toi ! » Lorsque les gens racontaient
contre moi, faussement, toute sorte de mal, j'en
étais blessé, tandis que j'aurais
dû me réjouir et bondir de joie !
Quand je voulais pardonner aux hommes et oublier,
selon les Écritures, je n'étais pas
non plus en mesure de le faire. En sondant mes
pensées, je constatais qu'elles étaient souvent
horribles et je devais conclure :
« Le Sauveur n'a pas eu de telles
pensées ! »
Les nombreuses paroles inutiles que
j'avais prononcées - celles dont il faudra
rendre compte - me revenaient en mémoire.
Souvent, je récitais l'oraison dominicale,
mais je devais constater que le malin était
mon père. Une fois, comme je rentrais chez
moi, je vis mon garçonnet de quatre ans
jouer avec des cartes qu'il avait
découpées. Me remémorant ma
misère d'autrefois, je songeai :
« Oui, voilà ce que mes enfants
ont appris de moi ! » Quand la
question se posait : « Pourrai-je
subsister lorsque Jésus
apparaîtra ? » je devais
reconnaître sur-le-champ :
« Je ne pourrai subsister, je suis
impur ! »
Selon la Parole de Dieu, je savais
pertinemment que seules les personnes
irrépréhensibles et sans taches
pourront partir avec Jésus lors de son
avènement. Alors, je voulais me consacrer
à Dieu mieux encore, mais c'était
insuffisant. Et si je cherchais de la consolation
dans le fait que j'avais tout mis en ordre dans ma
vie, je découvrais que malgré cela je
n'étais pas prêt. Bien que je parusse
être calme devant les gens, il n'en
était pas ainsi en moi. Tout cela me plongea
dans une angoisse immense. Je m'efforçais
d'obéir à la Parole de Dieu dans la
mesure où je la comprenais et pouvais la
mettre en pratique. Je pensais avoir la vie divine
et je croyais que ce que je faisais était
vraiment cette vie divine ! Cette parole du
prophète correspondait bien à mon
état : « Tu trouves encore de
la vigueur dans ta main et tu ne dis pas : J'y
renonce ! »
Celui qui pense de cette manière
là ne se sent pas fatigué et ne
cherche pas une autre vie. Je ne possédais
ni paix avec Dieu, ni victoire ;
j'étais délivré de la passion
du jeu de cartes et du jeu de boules, qui ne
présentaient plus aucun intérêt
pour moi ; cependant ma condamnation me pesait
toujours plus. « Car je ne fais pas le
bien que je veux, et je fais le mal que je ne veux
pas ! » Mon âme criait
aussi : « Misérable que je
suis, qui me délivrera de ce corps de
mort ? »
Souvent, je me rendais chez le
prédicateur, me lamentant au sujet de mes
angoisses et de mon état, déclarant
que je n'avais pas la victoire sur le
péché. Parfois, on me
répondait : « Nous sommes
tous sous l'empire du péché ! Il
n'y a point de juste, pas même un
seul ! » Les gens n'ignoraient pas
mon désir de consacrer ma vie à Dieu,
et ils voulaient me consoler ainsi.
À cette époque-là,
on entendait partout, dans les églises et
dans les assemblées, le refrain
suivant : « Nous sommes tous de
pauvres pécheurs. » Parfois on
disait : Tu ne veux tout de même pas
être supérieur à l'apôtre
Paul, qui s'est écrié :
« Car je ne fais pas le bien que je veux,
et je fais le mal que je ne veux
pas ! » Mais tout cela ne m'aidait
en aucune façon ! Lorsque Paul
écrivit ces paroles, sa vie était
déjà transformée, ce qui
ressort très clairement de Romains
8 ; mais ici encore on
voulait me consoler faussement. Beaucoup de gens
pieux ont la vaine manière de vivre qu'ils
ont apprise de leurs pères ; mais en
vivant ainsi ils ne plongent point leur regard dans
la loi parfaite de la
liberté. Ils cherchent à convaincre
les hommes qu'on doit rester pécheur sur
cette terre. Ils s'attachent fermement à
leur opinion et cela les empêche de voir la
sainteté de la Parole de Dieu.
Je savais très bien que les
paroles de ces prédicateurs ne pouvaient me
satisfaire et, d'ailleurs, ma conscience me rendait
témoignage que je ne pourrais pas
comparaître devant Dieu. Dans ma Bible, je
lisais cette parole : « Quoi
donc ! Pécherions-nous parce que nous
sommes non sous la loi, mais sous la
grâce ? Loin de
là ! »
(Romains
6 : 15) et
j'étais frappé spécialement
par cette parole de Jésus :
« Si donc le Fils vous affranchit, vous
serez réellement libres ! »
Je voyais nettement : « Il existe
une liberté qui peut être obtenue, que
l'on doit recevoir, et que je ne possède
pas ! » J'étais
assoiffé de cette liberté et voulais
croire que j'étais délivré,
mais je ne remarquais rien d'une telle
délivrance. Un combat violent se livrait en
moi et je puis dire qu'alors
s'élevèrent des puissances
terribles... Combien souvent cette pensée
m'accablait : « Oh ! si je
n'étais pas né ! Si seulement
mon père n'avait jamais
vécu ! » Je m'humiliais
devant Dieu à cause de ces pensées et
je m'exhortais en me disant que Dieu avait raison
et que c'était bien que mon père ait
vécu et que je sois né. Lors de ma
conversion j'ai reçu une force divine car,
auparavant, il m'aurait été
impossible de subsister dans un tel combat.
Trois ans passèrent ainsi dans de
grandes angoisses et alors la
parole écrite dans Romains 7 me sortit de
mon état de misère, et en même
temps d'un christianisme extérieur, sans vie
réelle. M'élevant enfin plus haut que
les brouillards, je m'écriai :
« Grâces soient rendues à
Dieu par Jésus-Christ, notre Seigneur !
C'est accompli ! Je suis
délivré, libre ! »
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