Les hommes sont doués d'une grande force, ils peuvent faire beaucoup physiquement et intellectuellement ; aussi mènent-ils grand bruit dans le monde. Mais il n'est pas en leur pouvoir de devenir véritablement des hommes ; cela doit venir d'ailleurs. C'est à cette tâche que doit s'employer la communauté de Jésus-Christ. Car elle se compose d'hommes en qui la force de Dieu peut se manifester ; ces hommes renoncent à toute puissance purement humaine ; ils sont affligés d'épreuves, mais la force de Dieu empêche qu'ils soient écrasés ; ils ont les mêmes angoisses que les autres hommes, mais ils ne perdent pas courage. Ils portent sur eux l'empreinte divine du Christ, afin qu'ils soient des témoins vivants de la résurrection. Ils souffrent, mais seulement pour qu'une force inépuisable se répande dans le monde. C'est par eux que la Résurrection de Jésus-Christ peut se perpétuer.
Nous devons être ceux qui ouvrent les portes ; en quelque sorte, la clef du monde. Les Chrétiens ne sont que des précurseurs.
Nous devons être sur cette terre une
communauté dans l'attente, une
communauté qui sait que sa tâche est
de veiller toujours à ce que les forces
célestes pénètrent le
monde ; une communauté qui languit de
son Sauveur dans le Ciel. Étant ceux qui
attendent, le Sauveur nous a désignés
pour veiller aux portes. Nous ne sommes pas
appelés à de grandes tâches,
mais à rendre de modestes services à
notre Maître ; nous devons nous tenir
aux portes comme des valets et des servantes, et
nous remplissons notre simple et modeste devoir en
acceptant d'être des gardiens aux portes.
Déjà aujourd'hui, il y a des portes
ouvertes pour ceux qui font le guet ; le
Sauveur est déjà en chemin, il
répand dans nos coeurs et nos âmes
beaucoup de choses bonnes et douces afin que, dans
les épreuves et les douleurs de cette vie,
nous puissions entrevoir une
clarté céleste. Comme gardiens aux
portes, nous sommes déjà d'heureuses
gens, même si nous devons encore
attendre : nous attendons volontiers, et avec
patience, car nous savons que le Seigneur approche.
Veiller fait paraître le temps court et
béni.
Et comme nous veillons, nous devons de
même prier. On n'a pas le droit de nous
interdire de prier pour que le Seigneur
Jésus vienne. Beaucoup pensent qu'il est
insensé de prier pour la venue du Sauveur et
qu'il viendra à son heure, qui est inscrite
dans le ciel, et à laquelle nous ne pouvons
rien changer. Eh bien ! qu'on nous laisse
être insensés. Comme gardiens des
portes nous ne pouvons nous lasser de prier :
Seigneur Jésus, viens ! Ce n'est pas la
tâche de tous les chrétiens
d'être gardiens des portes. Mais celui que le
Sauveur a placé à ce poste, doit
prier jusqu'à ce que le Maître arrive.
L'Évangile n'est pas autre chose qu'une annonciation du Royaume de Dieu, c'est-à-dire de la pénétration de Dieu dans l'humanité. Cette pénétration de Dieu, qui commence aujourd'hui par, l'annonciation de l'Évangile, n'est pas encore une chose terminée, elle prédit l'achèvement. Mais cette nouvelle ère doit déjà commencer chez ceux qui portent l'Évangile dans leurs coeurs, et qui savent pertinemment que Dieu justifiera l'annonce de l'Évangile par l'apparition véritable du Royaume de Dieu, et non seulement en paroles, mais en actions ; l'Évangile doit être une annonciation des temps nouveaux. Il faut que nous ayons la preuve déjà aujourd'hui que des péchés peuvent être pardonnés et qu'aujourd'hui déjà des secours de toute espèce viennent aux hommes. Le présent dans les annonciateurs de l'Évangile doit représenter ce qui sera dans l'avenir et s'harmoniser avec lui. Les croyants et les compagnons de Jésus-Christ, sont ceux qui portent effectivement en eux l'avenir du Royaume de Dieu, ceux qui savent s'en porter garants par toute leur personne, ceux qui ne regardent plus ni en arrière, ni de côté, mais uniquement en avant, ceux qui ont toujours au coeur cette certitude : quand même nous ne savons pas du tout comment cela doit se faire, nous savons une chose : Jésus est le Maître.
Par rapport au but proprement dit de notre vie,
nous sommes pauvres. Beaucoup d'hommes ne se
préoccupent que de ce qui est à leur
portée immédiate : mangeons et
buvons, car demain nous mourrons ! Dans la
Bible cela s'appelle « être
riches ». Ces gens sont en
réalité aussi de pauvres
hères ; mais on les nomme à
première vue les riches, bien qu'en fait,
ils soient les plus pauvres d'entre les
pauvres.
Or, ils s'adonnent à toutes les
choses possibles et périssables qui sont
à portée de leurs mains ; et
voici, quand Dieu se présente avec sa
nourriture divine, ils sont déjà
repus. Les autres, eux, sont dits pauvres. Ils ont
en vue quelque chose de meilleur, de plus haut, et
dans leur effort, dans leur aspiration, ils
finissent par en conclure que les hommes ne peuvent
être aidés que par Dieu seulement.
Heureux sont ces pauvres, ces pauvres en esprit,
car le Royaume de Dieu est à eux.
Dieu n'oublie pas le cri de ces Pauvres.
Ils sont en réalité ses gens à
lui sur terre. Il n'est pas facile de nos jours de
se mettre du côté des pauvres ;
mais Dieu veille à ce qu'il y ait toujours
à nouveau des pauvres, et c'est là un
bonheur pour l'avenir du Royaume de Dieu. Quand
Dieu aperçoit une âme noble, il lui
prépare sa route pour qu'elle ne devienne pas
riche ; il lui donne de faire partie des
pauvres, dont le cri est nécessaire afin
qu'une liaison puisse s'établir entre Dieu
et les hommes. Il faut qu'il y ait chaque jour un
appel à Dieu. Il y a des chrétiens
légers qui ne veulent que planer sur la
hauteur ; mais ils n'y réussissent
qu'un temps. L'homme peut s'exalter, même par
la lecture de la Bible et avec des pratiques
religieuses mais cela ne dure pas.
Remercie Dieu si tu n'appartiens pas au
monde des riches. Seuls tes soupirs dans la foi te
rendront riche. Tes soupirs font ta richesse. Il
est nécessaire qu'il y ait des gens qui
crient comme s'il n'y avait aucun Dieu de par le
monde.
Un christianisme gai n'est pas à
sa place dans un monde où des millions de
nos frères et de nos soeurs vivent et
meurent de misère, dans le meurtre et
l'assassinat, la fausseté et la
cruauté, où l'avarice et l'envie
corrompent toute chose, où les peuples
s'entre-tuent et se ruinent. C'est alors que notre
cri doit être puissant ; nous devons
être de pauvres gens qui ont soif de la venue
de Dieu et de l'apparition du Sauveur, et faim du
Saint-Esprit qui doit nous enseigner et nous
guider. Le Sauveur lui-même s'est fait le
compagnon de ces pauvres, lui pourtant
comblé des dons de Dieu. Il a
été le plus pauvre d'entre les
pauvres, jusqu'à pousser ce cri : mon
Dieu, pourquoi m'as-tu
abandonné ?
C'est dans ce cri que se trouve notre
chemin vers Dieu et le chemin de Dieu vers nous.
Car tant que nous avons encore des attaches
capables de nous satisfaire selon les
circonstances, la force du Royaume des cieux qui
est nécessaire pour soumettre le monde ne
vient pas. Rien qu'un petit morceau du Royaume du
ciel ne suffit pas ; seulement une providence
générale au-dessus des hommes ne
l'emporte pas : il faut que le gouvernement
immédiat de Dieu soit amené tout
entier par « les pauvres ». Une
parcelle du christianisme ne
suffira pas non plus ; trop
d'à-côtés ont pris de
l'importance. Un enseignement dogmatique de Dieu
peut diriger pendant un certain temps, mais ce
n'est pas Dieu ; une institution religieuse
peut dominer, mais ce n'est pas Jésus ;
la science peut grandir et donner un soi-disant
esprit, mais ce n'est pas le Saint-Esprit. Pour
surmonter le monde, il faut la pauvreté
absolue, le cri : Dieu
seulement !
Beaucoup de gens aujourd'hui veulent
instaurer un ordre tout autre dans la
société ; ils s'y emploient
corps et âme et s'adonnent aux plus grands
espoirs. Mais quand même toutes les
conditions actuelles seraient
écartées qu'adviendrait-il ?
Est-ce que d'autres lois nous aideront ? Non,
notre progrès doit être : Dieu
toujours plus, et de plus en plus une direction qui
vienne d'en haut ici-bas !
Nous devons donc, pour ainsi dire, faire
concurrence aux hommes de progrès du monde
et prendre l'avantage sur eux, de telle
façon qu'à la fin le cri du monde
impie serve aussi la cause de Dieu. Car le cri
d'appel des pauvres doit être un cri pour le
monde entier. Nous devons attirer la direction de
Dieu si fort à nous que finalement le monde
entier ne puisse plus bouger sans qu'il en
résulte un bénéfice quelconque
pour le Royaume de Dieu. L'influence de ces pauvres
dans le monde doit être finalement plus
grande que celle des plus puissants du jour, parce
que ces Pauvres attirent sur terre le gouvernement
de Dieu.
Pour surmonter l'orgueil et la haine des Juifs, Dieu s'est servi de Paul. Dieu emploie un homme spécial, pour chaque tâche spéciale dans le Royaume de Dieu. Un païen ne pouvait pas remplir cette tâche, un juif authentique non plus, il fallait qu'elle échut à un juif brisé, non à une urne d'Israël, mais à un vase ébréché. Et c'est dans ce réceptacle brisé que Dieu a répandu son esprit.
Tout vrai serviteur de Dieu est issu de la misère des hommes. Tous les prophètes sont issus de la misère des hommes et représentent les malheureux. Mais c'est d'une façon toute spéciale, avec force et non pas seulement avec des paroles, que Jésus vient en chair parmi les hommes, pour habiter dans cette chair et pousser du fond de la misère le cri : mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m'as-tu abandonné ? C'est pourquoi le renoncement commence pour nous aussi lorsque nous nous tournons vers les misérables, et que nous suivons la voie du Sauveur qui, du sein de l'humanité la plus humble, soupire vers son Dieu afin que sa domination arrive aux âmes les plus basses et leur vienne en aide.
C'est dans la misère de ceux qui croient en Jésus-Christ que l'on doit s'apercevoir que Jésus vit. Paul sert le Seigneur qui surmonte la mort, avec ses liens. Les guérisons opérées par Jésus sont des « signes » qui peuvent exister, mais qui peuvent aussi ne pas exister, ils sont les conséquences d'une nouvelle vie spirituelle mais ils ne se produisent pas nécessairement ; celui qui possède la nouvelle vie spirituelle peut aussi souffrir, et mourir. Jésus a autre chose en vue que de rappeler seulement à la vie un corps déjà promis à la tombe. Il vise au « jour à venir », au jour idéal, à l'époque idéale. Mais au lieu de croire au Seigneur de ce jour, les gens veulent seulement être guéris. Or, si les miracles accomplis par Dieu sur nos corps ne sont point comme des flèches indiquant la venue du Royaume de Dieu, ils n'ont aucune valeur. Nous ne devons pas demander à Dieu des secours seulement pour la vie terrestre, car alors on n'a en vue que le jour présent, et non pas « le jour à venir ».
Souvent on ne voit sur terre aucune justice,
c'est alors que nous avons faim et soif de justice.
Mais avoir faim fait mal. On ne peut supporter
longtemps la faim et la soif ; l'homme
affamé qui n'a aucune perspective de
nourriture, retourne parfois à la
bête. Quand la justice fait défaut,
l'homme voit son esprit se paralyser, et il
abandonne Dieu. Souvent c'est là la cause de
ce qu'on appelle l'incrédulité :
les malheureux ne peuvent plus supporter la faim.
Les incroyants ne sont pas toujours les moins
nobles, mais souvent les plus nobles. On doit,
comme chrétien, avoir pitié de ces
incroyants ; ils se perdent par manque de
justice. Beaucoup ne voient que religion ou
piété, mais pas de justice. Alors ils
doutent de Dieu.
Or les gens pieux ne veulent souvent pas
voir qu'eux aussi devraient avoir faim de
justice ; ils le considèrent comme
acquis, et pensent que les gens doivent être
satisfaits d'eux, même s'ils ne sont pas
justes. Ils donnent ainsi l'impression de la
satiété, alors qu'ils sont des
affamés ; et cela choque les autres
hommes. Nous devons être des affamés,
aussi longtemps que chez nous les choses ne vont
pas tout à fait droit ; nous devons le
voir et le reconnaître en toute
simplicité, alors les gens ne pourront plus
nous mépriser. L'Eglise elle-même
devrait dire : venez dans le temple, nous
voulons pleurer ensemble, avoir faim ensemble,
implorer ensemble.
Le seul être qui puisse nous
rassasier est Jésus. Mais il vient comme le
Puissant,
et
c'est pour cela que nous devons également
accepter son jugement. Qui veut la justice doit
accepter le jugement. Jésus-Christ est
aujourd'hui déjà le juge des vivants
et des morts ; si je vis pour lui, je dois
accepter son châtiment, mais c'est un
châtiment bienfaisant.
Quand Jésus paraît, je
deviens encore plus pauvre, car c'est alors que mon
péché vient au jour. Il est la
lumière du monde ; avant son apparition
ce sont les ténèbres ; mais
quand il apparaît, on voit le mal. Quand nous
entrons en contact avec Jésus, le mal
apparaît d'abord. Avant on pouvait se faire
des illusions sur bien des choses ; maintenant
plus. Face à face avec ce qui est la vraie
vérité, nous devenons pauvres et non
riches. Le jugement accompagne la parole de
Dieu ; mais dans ce jugement, il y a de
l'amour.
Dieu soit loué que
l'impureté sorte ! Viens, ô
Seigneur Jésus et fais la lumière,
afin qu'aucune impureté ne puisse plus
demeurer cachée ! Car c'est seulement
quand le mal sort que le secours peut venir. Dans
toutes les situations l'aide peut venir,
Jésus ne considère personne comme
perdu. Mais d'abord, il faut que nous soyons
affamés, car on ne peut rassasier que les
affamés. Aussi réjouissez-vous, vous
qui êtes affamés, car vous pouvez
être secourus !
Or, celui qui veut être
rassasié, doit manger ; il doit ouvrir
la bouche et broyer les aliments. Tu dois donc
aussi faire un effort pour cela. Il est vrai que
tout ici est grâce c'est aussi une
grâce que j'aie une bouche et des dents mais
pourtant il faut que j'ouvre la bouche, et que mes
dents mordent les choses dures. Si nous n'avons
aucune énergie à vouloir être
rassasiés et à venir à Dieu en
surmontant l'iniquité, si nous sommes des
lâches, nous retombons vite de nouveau dans
le sommeil des injustes. Car les injustes sont
paresseux ; ils s'étendent et dorment
sur leurs coussins. Ceux qui cherchent la justice,
eux, ne dorment pas !
jour
et nuit il faut qu'ils se défendent, en eux
se meut une énergie pour le bien,
l'énergie de la foi. Le Sauveur veut nous
avoir à ses côtés en
collaborateurs énergiques. Il s'agit de
travailler, si l'on veut être
rassasié ; c'est là une loi qui
régit toute la création. Ayez de
l'énergie dans la faim, et vous verrez
bientôt ce qui est possible aux
côtés du Sauveur ; car
derrière cette énergie se tient le
Dieu Tout-Puissant. Et par lui et par sa
communauté, Jésus veut rassasier le
monde.
Les petits sont souvent nos bons anges, ceux que l'on méprise doivent nous aider ; souvent ceux qui n'ont pas beaucoup à dire dans le monde, doivent dire aux enfants de Dieu ce qui importe le plus. Le bon Dieu m'a souvent envoyé des hommes que l'on méprisait, et qui avaient quelque chose à me dire, par un simple petit mot, sans le savoir eux-mêmes. Si en pareil cas je pense : qu'est-ce que celui-là a à me dire ? je néglige d'écouter la voix de Dieu qui me parle par lui. Parfois, Dieu met des gens sur notre route afin d'éviter un malheur, ou aussi pour amener un progrès en nous-mêmes. Il est déjà arrivé que les maîtres ont été mis dans le plus grand embarras parce que leurs serviteurs n'osaient pas se faire entendre ; ces maîtres étaient trop fiers et ne laissaient pas arriver jusqu'à eux la parole dite à propos. Nous devons toujours être attentifs, et aucun orgueil humain ne doit nous empêcher d'écouter aussi les petits de ce monde.
Un jour, le Royaume de Dieu sera achevé par de petites gens, par des gens de peu d'apparence ou qu'on tient pour n'avoir pas voix au chapitre. Les puissants et les grands de ce monde viendront seulement après, comme un butin dans la main de Dieu, alors que tout sera accompli. Ceux-là ouvriront alors de grands yeux, quand l'oeuvre aura été achevée par de pauvres petites gens, qui ne faisaient aucun cas d'eux-mêmes, mais s'en tenaient à l'amour de Dieu en Jésus-Christ et à la révélation de Dieu telle qu'elle se manifeste directement dans les coeurs !
Même comme chrétien tu ne peux rien ; c'est Jésus qui agit. Tu dois seulement avoir la foi, et annoncer l'Évangile. Le Sauveur veillera au reste.
La Communauté de Jésus-Christ est
le temple de Dieu sur la terre. Dans ce temple tout
doit être sanctifié. Les hommes qui y
vivent ne peuvent pas tous être parfaits,
mais ils peuvent garder fidèlement dans
leurs coeurs la vérité de Dieu et le
droit de Dieu sur la terre.
À défaut de ce temple le
Royaume de Dieu ne viendra pas sur terre. C'est
pourquoi les prophètes et les apôtres
font preuve d'un tel zèle pour la
pureté de ce temple. Surtout il ne faut pas
prendre place dans ce temple avec un coeur
impur ! Surtout, il ne faut pas vouloir
enlever en secret l'acuité de la
volonté de Dieu (c'est-à-dire ce
qu'elle a de pénétrant) !
(1). Le
peuple
auquel il est réservé de faire
triompher la cause de Dieu, doit avoir. du mordant
en lui-même, pour lui-même et contre
lui-même. Il doit aimer le monde dans l'amour
de Dieu ; mais ne pas se laisser influencer
par le monde. Les apôtres luttent à la
vie et à la mort pour
cette pureté du Christ, pour qu'aucune autre
direction ne pénètre dans le cercle
des représentants de Dieu sur terre, afin
que Sa pointe ne soit pas émoussée.
Que pouvons-nous faire avec une communauté
de Jésus-Christ qui ne soit pas pure ?
La Communauté de Jésus-Christ ne doit se laisser pénétrer par aucune influence étrangère. Tant de choses veulent se faire valoir même sur le plan spirituel et pèsent sur nous : la science, l'art, l'habileté dans la vie de tous les jours, les usages, les coutumes, tout veut se faire valoir. Ces choses ne sont d'ailleurs pas mauvaises en elles-mêmes ; nous ne voulons pas nier l'utilité passagère de ce que sont les hommes sur la terre et de ce qu'ils ont acquis par leur travail. Mais, dans ces choses, l'esprit qui veut dominer doit être extirpé chez nous.
Ceux qui reconnaissent Jésus pour
Maître, doivent accepter d'être mis
dans une position analogue à celle où
le Seigneur a placé ses disciples. Ils
doivent pénétrer dans le monde de
Dieu, dans le monde de la vérité. Et
cette vérité est autre que celle des
hommes ; même ce qui est humainement bon
n'aboutit pas, cela empoisonne. C'est pourquoi les
disciples de Jésus doivent tout
dépouiller, pour pénétrer dans
le monde de Dieu. Jésus a besoin d'hommes
qui soient entièrement consacrés
à Dieu, entièrement immergés
dans la volonté divine.
Et pourtant ces hommes, tout en
étant intérieurement
complètement libérés du monde,
doivent se tenir entièrement dans le monde.
Ils ne doivent pas se séparer du
monde ; ils doivent, en tant qu'hommes de
Dieu, pénétrer
précisément là où tout
est plein de contradictions. L'amour de Dieu
embrasse le monde d'une sainte
étreinte ; et c'est pour cela que le
monde doit aller au jugement dans l'étreinte
des disciples de Jésus, afin que ce qui est
faux devienne manifeste. Mais ceux-ci ne doivent
pas délaisser le monde, au contraire, ils
doivent l'aimer de l'amour de Dieu, de cet amour
qui veut que le monde abandonne ses mensonges et
meure, afin de devenir un monde nouveau.
L'intérêt qu'un peuple porte au roi
et à la patrie en fait son peuple. Des
conceptions communes sur la Bible, sur Dieu et le
Christ, de communes idées sur cet
enseignement ne suffisent pas à faire de
nous un peuple de Dieu. Nous ne deviendrons un
peuple de Dieu que si nous portons
intérêt à Dieu, non à
nous. Or, nous autres chrétiens, nous
n'avons le plus souvent d'intérêt que
pour nous, et non pas pour Dieu ; nous voulons
que Dieu prenne intérêt à nous.
Or Dieu ne cherche pas seulement des hommes
à qui pardonner leurs péchés
pour en faire des bienheureux, mais Dieu recherche
pour lui-même une troupe solide capable de
combattre.
De nos jours il y a dans l'air quelque
chose comme la formation d'un peuple de Dieu, mais
il se mêle facilement en des temps pareils
quelque chose de faux dans cette
vérité qui flotte dans l'air. De
là vient que se forment tant de sectes
diverses. Aussi, ceux qui le comprennent doivent
s'en tenir d'autant plus entièrement
à Dieu, afin d'être un peuple
fidèle, capable de conquérir le monde
pour Dieu.
Il y a de bien braves chrétiens qui auront sûrement un jour une bonne petite place au ciel ; mais il ne leur reste pas un moment de libre pour le travail. Que de désirs de toutes sortes ne nourrissent-ils pas dans leur coeur ! On veut être bien portant, devenir riche, heureux, rester auprès de père et mère ; on lutte contre ses propres péchés, et on en cherche le pardon. Mais on n'arrive pas à une claire conception du Royaume de Dieu. C'est un amalgame de vie périssable et de vie éternelle ; un jour on suit Dieu, une autre fois ses propres chemins ; mais si nous voulons être vraiment des disciples de Jésus, notre vie en est l'enjeu !
Le mal absolu n'est pas à craindre, il
inspire le dégoût, et ainsi nous le
rejetons. Mais quand une parcelle de
vérité se cache dans quelque chose
qui n'est pas droit, cela devient dangereux. Le
serpent du jardin d'Eden parle comme s'il venait de
Dieu. Un esprit à craindre est celui qui se
présente sous l'habit d'un ange de
lumière.
Les esprits les plus dangereux sont ceux
qui ne s'intéressent pas en fait aux oeuvres
de Dieu, mais veulent faire leurs propres oeuvres.
Un pareil esprit devient un séducteur, un
Satan ; et si je l'écoute, j'appartiens
moi-même à Satan. Satan et les
démons ne sont rien en
réalité, mais ils renaissent toujours
et sont engendrés par une force de
création continue dont le fond est une masse
spirituelle, qui, à vrai dire, fait partie
de ce même esprit, issu originellement de
Dieu, mais qui s'est dévoyé depuis.
De cette source peut provenir toute une culture,
qui apparaît très acceptable ;
mais c'est précisément par une
culture de cette sorte que les
yeux se ferment à la création
véritable de Dieu et que les oreilles se
bouchent aux véritables paroles de Dieu.
Cette culture fleurit précisément
aujourd'hui chez beaucoup d'hommes, si bien que des
gens d'esprit noble et droit disent : je ne
puis comprendre Dieu, je ne sais ce que tu veux
dire. Beaucoup sont affamés de religion,
mais ils ne la comprennent pas ; aussi
préfèrent-ils s'en abstenir tout
à fait.
Aussi devons-nous, nous, demander
d'autant plus à Dieu qu'il nous ouvre les
yeux et les oreilles, afin que nous recevions
à nouveau la véritable parole de
Dieu, pour que nous apprenions à distinguer
le principal du secondaire, et qu'avec cette
véritable parole de Dieu nous apportions
quelque chose à ceux qui en sont
affamés.
Il nous faut une certaine fierté, non pas la fierté qui méprise autrui. Mais un maintien sacré, une réserve sacrée, qui fait que l'on reste ce que l'on est, et qu'on ne se mêle pas à toutes sortes de choses futiles et basses.
Quand nous comprenons ce que Jésus demande de nous, notre coeur se dit souvent : « Cela ne se peut pourtant pas ; aucun homme n'est capable de cela ! » Certes, nul homme ne fait cela. Mais si vous voulez être comme les autres vous n'arriverez jamais au Royaume de Dieu. C'est pourquoi appliquons-nous au Royaume de Dieu, afin d'être totalement différents des autres hommes.
Dès l'origine, un combat a pris naissance
au sein de la Communauté de
Jésus-Christ. jusqu'à nos jours, il
n'y a aucune Communauté de
Jésus-Christ dont les intentions aient
été entièrement pures. Ainsi
le combat pour le Royaume de Dieu s'est
transporté et enfermé au sein de la
Communauté de Jésus-Christ. Le combat
contre le monde, contre l'erreur et les
ténèbres est arrêté et
retardé ; il ne peut être
question d'arriver à une vraie victoire,
jusqu'à ce que la décision soit
intervenue au sein de la Communauté de
Jésus-Christ. C'est là que doit venir
la décision : qui est le
Maître ? Jésus, ou le
monde ?
Ce combat se déroule en chacun de
nous. C'est comme si dans chacun de nous il y avait
deux hommes, l'homme qui aspire à Dieu, et
celui qui aspire à ce qui est terrestre,
temporel, Remercions Dieu quand ce combat commence
dans un homme, quand il ne peut trouver aucun repos
dans son coeur ! Heureux l'homme qui a
à combattre ainsi !
Heureux l'homme en qui le jugement de
Dieu s'appesantit dans sa chair, afin que sa chair
ne connaisse plus de repos jusqu'à ce que le
combat soit mené à bonne fin et que
Jésus-Christ ait remporté en lui la
victoire ! Si Jésus l'a
remportée en lui en particulier, il l'aura
aussi dans sa communauté, et s'il l'a dans
sa communauté, il l'aura aussi dans le
monde, parmi les peuples. Alors la lumière
se lèvera dans le monde visible et dans le
monde invisible, sur les morts et sur les vivants.
Il est dans l'ordre divin que le suprême combat prenne naissance précisément au sein du peuple de Dieu et que les éléments impurs s'efforcent d'y pénétrer ; ceux-là doivent alors être repoussés par le petit noyau du peuple fidèle. Il ne faut pas s'imaginer que la tranquillité doive régner au sein de la Communauté de Jésus-Christ avant que le but soit atteint.
Judas avait reçu un petit emploi dans
l'entourage du Sauveur, celui de caissier.
Vraisemblablement il avait étendu la main
vers ce poste. Et c'est toujours une chose
dangereuse quand quelqu'un reçoit un petit
emploi, cela monte facilement à la
tête des gens. Aussi Judas s'installe-t-il
fermement dans son poste, et voici qu'au sein de la
Communauté de Jésus-Christ naît
un gouvernement à côté. Que
pouvait faire maintenant le Sauveur ? Pourquoi
ne lui a-t-il pas arraché la bourse des
mains ? Judas doit se l'arracher
lui-même de la main ; le Sauveur ne
force personne ; il ne peut forcer
personne ! Il faut que le mal se rende.
Frapper des gens, destituer, jeter dehors, tout
autre roi le peut. Le Sauveur ne le peut pas. Judas
doit se retirer de lui-même.
Remercions et louons Dieu que le Sauveur
n'écarte pas ces obstacles par la
violence ; autrement il ne serait plus un
Sauveur pour aucun pécheur. Ainsi, au
contraire, il reste encore le roi, même pour
ce Judas. Il ne le repousse pas loin de lui, il ne
laisse pas le fil se rompre. Même
après sa trahison, Judas est resté
dans la main de Jésus. S'il eût
été perdu à jamais, comme les
gens le croient, Jésus l'eût
rejeté loin de lui. Mais Jésus reste
son roi et son Sauveur.
Il est si difficile d'instituer l'unité
parmi les hommes, même dans la
chrétienté. Le peuple de
Jésus-Christ doit être un peuple uni sous un
seul roi. Mais il est si rarement possible que les
hommes réunis servent Dieu ensemble. Un tout
seul servirait bien son Dieu, et l'autre seul
aussi ; mais dès qu'ils sont plusieurs,
ils jettent les yeux l'un sur l'autre, et dans
l'envie et la jalousie tournent leurs
pensées autour d'eux-mêmes et de leurs
frères, et ils détournent leurs
regards du maître. Il en est malheureusement
de même aussi dans les Églises. Elles
s'occupent trop d'elles-mêmes, et de leurs
différentes controverses. Une fois la
division introduite, elle devient toujours plus
accentuée. Des coutumes différentes
s'établissent, et finalement on transforme
les coutumes en religion, on se sépare
encore plus et l'on oublie le Maître commun.
Quel poids de jalousie hypocrite alourdit la vie
même de nos institutions
chrétiennes ! Il faut avoir tant
d'égards et faire tant de
révérences, ne fût-ce que pour
éviter de choquer ici et là.
En présence de cet état de
choses c'est un véritable bienfait quand
Dieu pousse de nouveau le Sauveur au premier plan,
comme l'unique Souverain. Alors chacun doit
apprendre à dire : je sers le Roi, et
à penser de son voisin qu'il sert aussi le
Roi. Alors toutes les différences qui
existent dans nos coutumes religieuses, deviennent
choses accessoires ; chacun peut conserver ses
habitudes, pourvu que le roi seul lui tienne
à coeur et qu'il soit prêt à le
servir. Dieu veut que nous, chrétiens, nous
ayons maintenant la paix entre nous, la paix
confessionnelle aussi. Ouvrez les grilles qui vous
séparent, arrachez les barrières,
faites la paix et servez le Dieu unique et le seul
Seigneur !
C'est seulement parce que Jésus
est si haut au-dessus de nous, qu'il y a une
unité dans Jésus. Aucun homme, aucun parti ne peut
dire :
il est à moi. On ne peut pas non plus faire
l'unité, en sorte que tous pensent, sentent
et croient la même chose. Nous devenons unis
parce que nous sommes soumis à un seul
Maître. Ce maître unique appartient
à tous ; il appartient à toutes
les classes, à toutes les professions,
à toutes les races, et ainsi il est le plus
proche de chacun en particulier. Un peuple est uni
parce qu'il reconnaît un maître qui
gouverne et une loi ; tous ne peuvent pas
avoir les mêmes pensées et les
mêmes sentiments. De même nous ne
pouvons devenir un peuple de Dieu, qu'à la
condition que tous reconnaissent un seul Chef, qui
est bien haut au-dessus de nous tous.
Ce n'est que dans une adhésion totale à Jésus en tout ce qu'il est, dans une soumission totale à ce Jésus qui enseigne l'amour de Dieu sur terre et Le représente en personne, que nous pouvons être des collaborateurs. Nous sommes des serviteurs inutiles : Jésus, seul, est l'exécuteur suprême.
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