À l'époque de Jésus-Christ le monde se trouvait mûr pour la récolte parce qu'il y avait, dans le pays, des gens qui attendaient le Royaume de Dieu.
Jamais nous ne forcerons la venue du Royaume par des livres ou par des discours, ou par un enseignement quelconque. Nous devons être des individus placés dans la lumière de Jésus-Christ et dans sa force ; alors le monde s'éclairera. C'est pourquoi le mot d'ordre est : lève-toi, et deviens une lumière ! et non pas : écris tels ou tels livres sur telle ou telle prétendue vérité, mais deviens toi-même une lumière !
Quand la lumière de Dieu
pénètre dans notre monde, c'est par
des personnes. Aujourd'hui nous ne sommes que des
rats de bibliothèque et nous cherchons la
lumière dans les livres ; nous la
cherchons dans les opinions, dans les
enseignements, dans les
« vues » des hommes. Et nous
oublions pendant ce temps que quelqu'un peut avoir
une vue très intéressante et
être un homme mauvais, que quelqu'un peut
avoir le parler délicat et aimable, et
pourtant être grossier intérieurement.
Or nous devons apprendre à être à nouveau
attentifs
à la lumière de Dieu qui se manifeste
dans les personnes.
Mais, du fait que la lumière se
manifeste dans des personnes, le danger
d'être induit en erreur est aussi très
grand. Car Satan s'empare, lui aussi, des
personnes. C'est donc que les hommes jouent un
rôle, dans le domaine chrétien aussi.
Satan sait parfaitement qu'il faut que tout vienne
par les hommes. Alors on entend crier sur tous les
tons : c'est moi ! et des multitudes
répètent en choeur : c'est
lui ! Il est souvent très difficile de
distinguer les véritables lumières
des fausses ; car les fausses se
présentent également au nom de
Jésus-Christ.
Mais voici une pierre de touche :
si quelqu'un commande comme on le fait dans le
monde, cela ne produit pas de vraie lumière.
La vraie lumière éclaire autrui,
comme fait le soleil. La lumière de
Jésus fait resplendir autrui, alors que
soi-même on se fait oublier. Là
où l'on doit se gêner, où l'on
doit avoir peur, où, tremblant et
hésitant, on ne trouve pas le repos,
là est la fausse lumière. Mais
là où les hommes renaissent à
la vie, là où ils se sentent à
l'aise, où ils supportent l'épreuve
pleins de vie et avec courage, là où
ils envisagent leur ruine pleins d'espérance
et où ils s'élèvent d'un vol
comme l'aigle malgré toutes leurs
misères, là est la véritable
lumière. Là où il n'y a aucune
violence, aucune pression par la force, où
règne la liberté et l'amour de Dieu,
cet amour qui aime les pécheurs, qui ne
méprise personne, qui prend souci même
de l'ennemi, là est la vraie lumière
de Jésus-Christ. C'est pourquoi soyez
fidèles à l'Évangile, devenez
lumière !
Dieu place son serviteur comme
« alliance avec le peuple »
(1) afin
« qu'il relève le pays »
(Esaïe,
49-8). Mais ce serviteur peut penser qu'il
travaille en vain et se fatigue inutilement pour
Dieu. Aussi a-t-il besoin de la consolation de Dieu
qui lui dit : « je t'ai
protégé. »
D'aucuns contemplent avec orgueil les
fruits de leur travail ; ils font parade des
oeuvres de leurs mains, de leur esprit, de leur
talent d'organisateurs ! Mais il n'en
résulte en réalité rien pour
le relèvement du genre humain.
Or le serviteur de Dieu ne travaille pas
avec ses propres forces, il remet toutes choses
à Dieu, il ne peut pas s'en rapporter
à ses oeuvres personnelles ; mais
précisément il sera
protégé et placé pour traiter
alliance avec le peuple. Il est la preuve que Dieu
n'abandonne pas les hommes ; il est
véritablement la force, l'amour, la
compassion de Dieu pour son peuple ; sans lui
une alliance pour le redressement serait à
peine possible. Car ce que Dieu peut être en
général pour les hommes, et ce que
les hommes peuvent, généralement
parlant, avoir au coeur d'aspiration et de
désir d'une aide divine, cela ne suffit pas
pour le relèvement. C'est seulement. quand
Dieu est représenté par un
serviteur qu'il peut, par lui, répandre sur
terre une force toute puissante capable d'accomplir
ce redressement.
Ce serviteur c'est Jésus. Il n'a,
à proprement parler, rien
« fait » sur terre, il n'a
institué aucune organisation, il n'a rien
fondé politiquement, socialement,
ecclésiastiquement ; il n'a pas
fondé d'institutions. Mais il a vécu,
il était Là. et a agi en esprit pour
le peuple. Il n'a pas remué un doigt, il n'a
pas fait un pas pour changer quelque chose,
même contre les Romains, et pas même
contre le Temple. Et pourtant il a
été l'Homme, le seul
protégé, et de lui déborde
l'expérience que le monde pourra encore
être relevé.
Or, depuis qu'il est devenu invisible
sur la terre, il doit se perpétuer dans le
visible, dans ses apôtres, dans ses
serviteurs. Ainsi il y a, depuis
Jésus-Christ, une
sérieininterrompus de
serviteurs qui semblent également travailler
en vain. Ceux qui fondent des églises ou de
puissantes organisations, qui se haussent au
premier plan, politiquement ou socialement,
ceux-là proclament naturellement : nous
ne travaillons pas inutilement ; voyez nos
établissements, nos églises et notre
merveilleuse organisation : dans chaque
village une église, un pasteur, une
école ! mais le serviteur, qui ne voit,
dans tout cela, rien qui le relève, se
demande : ai-je donc travaillé en
vain ? Un tel serviteur doit être
là, qui à la place de
Jésus-Christ représente l'invisible
afin que lorsque le temps sera venu, la force de
Dieu puisse se manifester en un homme visible, en
un peuple visible, afin que Dieu, à travers
le visible, puisse « relever »
le genre humain.
Car il faut quelque chose qui nous
relève ! Nous sommes tombés et
corrompus. Mais toujours, au sein de
l'humanité se lève à nouveau
le cri : il faut que cela devienne meilleur.
Dans cet « à nouveau »
s'exprime un souvenir de notre patrie ; nous
descendons, en effet, de Dieu ; cela, nous ne
pouvons le nier. La hantise du paradis nous
poursuit la hantise de l'éternité
d'où nous sommes issus. C'est là
notre source originelle. Nous devons revenir
à cette source qui est la nôtre, alors
nous serons relevés. Quand nous
obéissons au péché, à
l'erreur, c'est quelque chose d'étranger qui
pèse sur notre âme et notre corps, et
obscurcit notre esprit. C'est cette chose
étrangère qui nous rend malheureux,
et non le moi personnel. Il doit y avoir une raison
pour que nous ayons glissé dans ce domaine
étranger ; nous devons surmonter cet
élément étranger, et nous y
arrivons quand nous tenons ferme à ce qui
nous est propre, originellement. Or le serviteur de
Dieu qui, sous l'influence étrangère
tient ferme à ce qui lui est propre, c'est
lui qui nous conduit à la victoire ;
c'est sa foi qui surmonte le monde.
Il faut qu'il y ait toujours des hommes pour
Sion. Sion n'est pas un lieu terrestre, c'est la
cité royale spirituelle, Et Sion ne porte
pas de fruits, aussi longtemps qu'il n'y a pas
d'hommes pour cette tâche. Car c'est par Sion
que Dieu veut secourir l'humanité. La terre,
il pouvait la créer à lui seul, mais
il ne veut pas secourir les hommes sans leur
participation ; les hommes sont d'un rang trop
haut pour que Dieu ait voulu leur venir en aide
sans leur coopération.
Le nombre est chose accessoire en ce qui
concerne les serviteurs de Sion. Il s'agit de
« qualité ». Ils doivent
être une phalange sacerdotale, à
l'âme assez forte pour que le monde entier
puisse se suspendre à eux. Ils doivent
être des hommes que la pensée
n'accapare pas, qui ne se forgent pas des
idées sur toutes choses, mais qui
simplement, dans une confiance bienheureuse, ne
s'en remettent qu'à leur Père au
ciel. Ils ne doivent pas être des
philosophes : ils ne sont point des sages et
des savants, mais bien ceux qui, munis de nerfs
forts et d'une âme inébranlable,
traversent toutes les épreuves du monde, et
toujours à nouveau tressaillent
d'allégresse en leur Dieu, et tous les jours
poursuivent leur tâche dans cette
Sion.
Ne voulez-vous pas vous adonner à
cette tâche ? Sion a grand besoin
d'hommes. Car Sion est magnifiquement.
organisée pour régner, mais elle a
besoin d'hommes, de caractères, d'hommes
véritables, et non de comparses ou de
« moitié d'hommes ».
Peut-être, en pensée, es-tu
déjà un tel homme ; mais pour
que tu le deviennes en action il faut encore du
temps. Celui qui est appelé à
l'oeuvre de Sion doit être ferme, sûr
jusqu'aux moelles, sinon on ne peut l'atteler au
char. Atteler au char quelqu'un qui le laissera en
plan est pire que de
n'atteler
personne. C'est pourquoi Dieu n'attelle souvent que
pendant des dizaines d'années. Au contraire,
dès que l'attelage est là, il y a de
la vie dans le monde. Et le jugement vient. Alors
toutes les conditions changent. Quand
apparaîtra le Royaume de Dieu, vos cheveux se
dresseront sur vos têtes. Il faudra, tout
accepter, dire adieu à ses plus
chères pensées, se faire un coeur
libre pour Dieu, ne point trembler et ne point
avoir peur. Et s'il faut marcher à travers
la boue, le feu et l'eau : Dieu est notre
roi !
Le moment approche où Sion aura
besoin d'hommes. Mais nul ne sera admis qui ne soit
chevillé et boulonné, sans cela le
Royaume de Dieu s'écroulerait à
nouveau. Alors on ne pourra plus transiger ni
patienter. Il faut que la place devienne enfin
propre et nette, et que la lumière brille.
Alors les nations se réjouiront qui
aspiraient à cette délivrance.
La prophétie « que les fleuves
ne te submergeront point et que les flammes ne te
brûleront pas » (Esaïe, 43-2)
n'est pas promise à tous. Beaucoup, dans
leur misère, périssent corporellement
et spirituellement. Mais parmi cette masse d'hommes
il en est quelques-uns qui jouissent d'une
protection spéciale ; la Bible les
nomme « serviteurs de Dieu ».
Ils courent les mêmes dangers que les autres,
mais cela les fortifie sans les blesser. Ils
entendent l'appel de Dieu : « Tu es
à moi », et s'ils tiennent ferme
à cet appel, ils restent sous la protection
de Dieu.
C'est seulement quand nous nous rendons
compte qu'il n'y a pas de plus grand bonheur que de
servir Dieu, que nous obtenons sa protection. Mais
si nous ne mettons pas le service de Dieu au-dessus
de tout, nous n'aurons pas les miracles qui sont
promis aux
serviteurs de Dieu. Rien n'est pire que la
demi-piété, la tiédeur,
l'à-côté ; aux
tièdes il a été dit qu'ils
seront vomis. Cela ne signifie pas qu'ils soient
à jamais perdus, mais ils sont
provisoirement exclus du Royaume de Dieu et du
travail pour le Royaume.
Il est très difficile
d'être appelé au service du Royaume de
Dieu. Tant de faux appels résonnent si fort,
que souvent l'on n'entend pas l'appel réel
de Dieu. Celui-là est si simple ! Il
réside uniquement en ce sens qu'il nous fait
appartenir désormais à Dieu : tu
es à moi ! Cet appel peut être
adressé à chacun, au maître et
au serviteur, au pasteur en chaire comme à
l'enfant au milieu de ses jeux. Chacun reste ce
qu'il est, et à la place où il est.
Le roi reste roi, et l'ouvrier reste ouvrier ;
il n'y a pas besoin de devenir pasteur ou
missionnaire, ou diaconesse. Ce qui vient de Dieu
convient à tous. La richesse, pas plus que
la pauvreté, ne peut te nuire ; mais tu
dois être un homme droit. La parole de Dieu
te rend simple et naturel ; toute
particularité disparaît,
aussitôt que la vraie parole de Dieu te
touche. Sois seulement joyeux et comme un
enfant ! Laisse ta vie appartenir à
Dieu ! Alors tu es sous la protection de Dieu
et tu pourras expérimenter les mêmes
miracles qu'un Abraham !
Quand un serviteur de Dieu meurt dans une assurance et une fermeté complète, une volonté entière au service de Dieu, la semence de sa vie lève après sa mort.
Dieu nous a élus en Jésus-Christ.
Cette expérience doit nous rendre forts.
Quand la tempête se lève dans ton
coeur et le bouleverse, quand
elle chavire ton esprit, quand le
péché et la folie te submergent et
que les griffes de la mort t'enserrent - le
péché ne te possède pas, la
mort ne t'a pas, c'est Dieu qui t'a ! Le
Sauveur t'a élu. Et si tu es élu,
alors tu ne deviens pas seulement
« pieux », mais tu peux
pénétrer dans le Royaume de Dieu,
dans le domaine où Dieu gouverne,
arraché aux puissances du monde et à
tes propres forces et plongé dans la
splendide et transfigurante force de Dieu.
Il ne faut pas prendre aussitôt
dans un sens étroit le mot
« être élu » et
dire : Dieu a élu ceux-ci et
ceux-là, moi il ne m'a pas élu. La
logique ne régit pas dans le Royaume de
Dieu ; nous ne devons pas rendre les gens
inquiets avec notre raison brutale. Il y a une
généralité qui concerne tous
les hommes dans le rapport que Dieu entretient avec
chaque homme en particulier. L'amour de Dieu
s'étend à tout homme qui vient dans
le voisinage de Jésus. D'abord on est
appelé ; mais chaque appelé peut
aussi devenir un élu. Considère-toi
comme élu ! Et si tu aspires à
Dieu, d'où crois-tu donc que te vienne cette
aspiration ? Si même tu dois passer par
l'enfer, si ton coeur tremble et hésite, tu
es pourtant élu ! Tu descends dans les
profondeurs et tu remontes vers les hauteurs. Il
t'a élu !
Dieu doit toujours avoir des élus, sinon
sa cause se perdrait. On s'effraye à divers
titres devant cette pensée qu'il y a des
élus. Car on ne peut arriver à
concevoir qu'il y ait des hommes qui ne dominent
pas quand ils sont quelque chose, et ne
dérobent pas quand ils possèdent
quelque chose. On s'effraye également
à la pensée d'une
« domination sacerdotale ».
Mais chez les élus il doit en être autrement ;
si l'un
est
quelque chose, il doit l'être pour
d'autres ; et si quelqu'un possède
quelque chose, il doit l'avoir pour d'autres.
Ainsi, Dieu est quelque chose et il l'est pour
d'autres, pour ses créatures, pour tout ce
qui vit ; et c'est ainsi que les
créatures lui appartiennent, parce qu'il les
nourrit, Ainsi nous sommes de race divine, si ce
que nous sommes profite à autrui, si ce que
nous possédons se transforme pour
autrui.
La disposition à agir ainsi est
le propre de l'homme, et le contraire est
péché, inhumanité. Là
où la culture s'introduit, le
péché règne ; et si cette
déformation envahit le Royaume de Dieu,
c'est terrible. Dans ce Royaume-là il doit y
avoir des prêtres, mais un prêtre n'est
pas un dominateur, il est au contraire celui qui
porte le fardeau, le délégué
de Dieu, lequel fait participer les autres à
sa nature, et à ce qu'il possède.
Où l'intérêt personnel domine,
tout se gâte dans le Royaume de Dieu.
Dieu ne se contente pas d'en avoir
quelques-uns ; au delà de ces
quelques-uns, il regarde à la multitude de
ceux qui sont perdus. Abraham ne doit pas
être satisfait aux dépens du monde,
mais il doit souffrir au profit du monde ; et
aux dépens d'Abraham, Dieu veille sur toutes
les créatures de la terre. Israël est
élu, afin que, par lui, Dieu atteigne
d'autres peuples, l'immense masse des hommes qu'Il
nomme ses brebis ; et c'est aux dépens
d'Israël que Dieu vient aux peuples. Aux
dépens de Jésus, Dieu va aux
peuples ; c'est aux dépens de la
communauté de Jésus que le monde doit
être transfiguré.
Nous devons donc nous dévouer et
être, pour ainsi dire, la réserve de
Dieu, quand il est à la recherche de ses brebis.
Nous recevrons le
bien
à la fin ; une fois que les autres
l'auront en partage, nous le recevrons aussi
seulement.
Il n'y a pas assez d'hommes aux
dépens de qui Dieu pourrait agir.
L'égoïsme des humains est trop grand,
et cet égoïsme s'est glissé
également dans la foi des
chrétiens ; ils cherchent en Dieu leur
propre intérêt, et à ce compte
ils perdent leur esprit combatif et leur
solidité de piliers ; ils chancellent,
et Dieu n'a plus de point d'appui. Il y en a tant
pourtant qui savent mourir pour leur pays, pourquoi
ne voulons-nous pas, nous chrétiens, mourir
pour notre cause, pour la volonté de Dieu,
qui est le père des peuples ? Pourquoi
les chrétiens sont-ils si
égoïstes ? Ils veulent bien, il
est vrai, faire une bonne action pour autrui ;
mais s'il s'agit de leur vie, ils
fléchissent. Or, il faut qu'il y ait des
hommes qui soient remplis d'un tel zèle pour
la cause de Dieu, pour les brebis du Seigneur, pour
les petits et les misérables, qu'ils ne
fassent plus aucun cas d'eux-mêmes.
On en appelle au sang de
Jésus-Christ pour sa propre
félicité. Mais la vertu du sang de
Jésus-Christ est précisément
de nous demander notre vie, afin que vienne le
Royaume de Dieu.
Les apôtres nous donnent le mot d'ordre.
Ils n'enseignent pas, ne dogmatisent pas ;
mais ils nous expliquent le combat auquel ils
prennent part.
Ils supposent qu'ils ont affaire
à des hommes intelligents ils ne parlent pas
à la masse. Certes, la Bible est aujourd'hui
devenue accessible à tous ; mais la
foule ne comprend cependant pas le programme ;
et elle n'est pas en état de le suivre. Les
instructions qui concernent les officiers et les
soldats ne s'adressent pas aux foules. Les ordres
que reçoivent les disciples de Jésus
ne sauraientd'aucune
manière être donnés à la
grande masse des hommes, sinon il faudrait exiger
d'elle ce qu'elle ne pourra jamais donner ; et
alors, pour lui avoir trop demandé, chacun
se trouvera naturellement perdu.
L'évangile qui convient à
la foule est très simple craignez Dieu et
rendez-lui hommage ; soyez, dans ce que vous
êtes, des créatures de Dieu ; la
grâce de Dieu est apparue pour tous les
hommes ; la lumière viendra ;
n'ayez point de peur ! L'Évangile
n'entend pas instituer une domination du peuple,
avec des parlements. Il vient annoncer ceci :
la cause est en bonnes mains, nous avons un
monarque suprême qui fait le
nécessaire pour tous les hommes. Vous
appartenez à Dieu ! La connaissance qui
doit se graver dans le coeur de nos foules se
réduit à cela : nous sommes
à Dieu ! Nul n'échappe à
Sa main.
Les chrétiens ont
été beaucoup trop lâches dans
leur foi en Dieu. Cette lâcheté est
venue de ce que l'on a trop présumé
des hommes ; il en est résulté
naturellement que toute une foule de gens s'est
rangée du côté opposé,
et cela fut le commencement de la condamnation.
Nous devons donc hardiment dire de nouveau au
monde : tu appartiens à Dieu et tu ne
sortiras pas de ses mains ! L'assurance en
Dieu, fondée sur la foi en la
révélation de Dieu en
Jésus-Christ, doit être totalement
différente de ce qu'elle était aux
temps de l'Ancien Testament. Où serait le
progrès si les uns devaient à nouveau
appartenir à Dieu, et les autres pas ?
Le progrès consiste à élargir
le champ d'action dans l'emprise totale d'un monde
éloigné de Dieu par le
péché. « Le monde est
à moi », déclare Dieu en
nous envoyant Jésus-Christ ; c'est
là la grâce libératrice de
Dieu, pour tous les hommes.
De cette masse se distingue donc un
petit nombre d'hommes, qui sont, pour ainsi dire,
les ministres de Dieu. Il
délivre un peuple de toute iniquité
et il en fait sa propriété. Il l'arme
de sagesse et de force, pour défendre sur
terre sa cause, naturellement pour le bien des
autres, et non pas contre eux. L'état-major
doit entrer en lice pour le peuple. C'est pourquoi
le peuple de Dieu doit toujours, tenir ferme
l'Évangile : désormais tout est
à Dieu !
Aucun homme ne peut appeler Jésus Maître s'il n'a pas l'esprit de Dieu. Ils ne le peuvent pas ; mais ils ne sont pas damnés ; ils sont seulement provisoirement écartés du combat qui doit être mené pour le Royaume de Dieu ; ils ne sont pas encore mûrs pour combattre, ils sont au nombre des malheureux.
En envoyant ses disciples dans le monde, le
Seigneur Jésus inaugure un nouveau monde.
L'embryon d'un monde divin entre dès lors en
lutte avec un monde humain fait de vieilles
habitudes. Cette humanité-là
subsistait depuis des millénaires, et
quelque lumière qu'il y eût en elle
sous le gouvernement de Dieu, les hommes n'avaient
pourtant aucune idée du mensonge sous lequel
ce monde était enterré. Même le
peuple que Dieu voulait éduquer pour lui, ne
parvenait pas à s'évader du manque de
sincérité des relations humaines.
Comme les vagues tumultueuses battent le rivage,
les coutumes et les idées nationales
pénétraient aussi dans
Israël.
Or, avec Jésus commence un monde
nouveau de Dieu, Jésus établit, pour
ainsi dire, une forteresse autour de lui contre les
vagues furieuses du monde. Cette forteresse ne peut
plus tomber. Hélas ! nous ne sommes pas
en droit de dire qu'elle ne tombe
pas parce qu'il y a là un peuple de Dieu qui
ne se laisse plus tromper. Des nations
chrétiennes elles-mêmes
périssent tout comme les païens ;
elles ne sont pas chrétiennes au sens de la
cité de Dieu, aussi n'ont-elles aucune
protection quand bien même elles se parent de
rayons de la lumière de Dieu pour s'en faire
gloire. Mais la forteresse de Dieu ne tombe pas,
parce que Jésus est là, parce que la
cité de Dieu, qui s'est établie
autour de lui sur terre, protège en
même temps sa personne. Déjà
les émeutes intérieures et
extérieures des peuples, la guerre, les
massacres, les courants sataniques dans les
esprits, tout s'était ligué pour se
débarrasser du Seigneur Jésus. Mais
rien n'a pu le vaincre, ni lui, ni la
communauté qui se tient à ses
côtés.
Il est fâcheux que durant des siècles le progrès de l'humanité n'ait pas été l'oeuvre des Chrétiens. Nous devons êtres reconnaissants à ceux qui ont travaillé au progrès de la civilisation, savants, naturalistes, médecins, hommes du peuple. S'ils ne s'étaient pas toujours mis de nouveau à la tête du progrès, où en serions-nous aujourd'hui ? Mais, à vrai dire, le progrès est incomplet. À quoi nous sert une civilisation qui finalement désespère de Dieu ? C'est pourquoi, il faut pourtant qu'à la fin les disciples de Jésus se mettent à la tête du progrès, eux, les ouvriers de Jésus-Christ, qui représentent la lumière du monde et le sel de la terre, afin que notre terre puisse devenir aussi un ciel.
Celui qui a une « couronne de
vie » a son mot à dire pour la
vie. Si la cause qu'un homme représente sur
terre est de Dieu, alors sa
couronne dure éternellement, mais si elle
n'est pas de Dieu, la couronne tombera un jour de
sa tête. Les hommes se forgent aussi des
couronnes dans des domaines moindres, mais avec le
temps ils perdent leur couronne. Aujourd'hui les
gens de guerre, par exemple, perdent leur
couronne ; il nous faut des héros de la
paix. De même les couronnes de la science et
de l'art perdent de leur éclat. Mais si nous
sommes des répondants de Dieu, de l'amour de
Dieu envers les hommes et de la vie divine qui doit
devenir le partage des hommes, alors nous gagnons
une couronne qui demeure éternellement. Les
témoignages des hommes de Dieu subsistent
pour l'éternité. Un Alexandre le
Grand perd peu à peu sa couronne ; un
Moïse, un Esaïe, un Pierre, non.
C'est cette couronne de vie que les
Chrétiens doivent conquérir ;
ils doivent se porter garants de ce qui est
l'apanage des hommes, la vie éternelle. Ils
doivent représenter le plus haut sommet du
progrès dans l'humanité, le
progrès de notre personnalité propre.
Ils doivent porter en eux le témoignage
d'une nouvelle éducation des hommes. Et
s'ils sont fidèles en cela, ils recevront la
couronne de vie, et ils auront aussi leur mot
à dire en ce qui regarde la vie.
Le Royaume de Dieu ne vient pas de façon catastrophique. Il vient peu à peu, car il arrive par des hommes qui reçoivent « des couronnes de vie ». Celui qui a quelque chose à dire pour les autres devant Dieu, quelque chose qui compte dans le ciel, celui-là possède une couronne de vie. Or, une couronne de vie, un homme ne la reçoit que s'il est franchement, librement à Dieu, s'il est bien une nouvelle créature en Jésus-Christ. Même s'il n'y a qu'un petit nombre d'hommes de ce genre, ils ont pourtant une influence sur le développement du monde. Le monde n'est pas mauvais en soi ; mais il est pareil à une matière brute, et cette matière brute doit être façonnée par l'esprit de Dieu. Pour cela il faut qu'il y ait des hommes qui aient quelque chose à dire relativement à la vie, et qui soient capables de la diriger vers le progrès.
Ce Jésus, qui est venu en chair, est la
lumière du monde ; on pourrait aussi
dire : la formation du monde. Il est le seul
qui, en toute circonstance, parmi les bons et les
mauvais, savait se conduire de façon divine.
Il vivait uniquement de Dieu ; il savait
parler et vivre de façon divine avec chacun,
même avec les impies.
Ainsi l'essentiel dans la formation de
son peuple devait être la vie. Les Grecs
étaient cultivés dans l'art et la
science ; les Romains dans la vie
civique ; mais ni les uns ni les autres ne
possédaient la véritable vie qui
donne la paix. Le peuple de Dieu, lui, doit
comprendre la vie, et pas seulement la vie de
l'individu, mais la vie de la communauté. Il
doit comprendre pourquoi l'homme est sur la terre,
et comment, dans ses occupations terrestres, il
atteint ce qui est droit et véridique. Il
doit aussi comprendre le monde, comprendre la
Création, afin que ce qui sur terre
appartient à la vie prenne un autre rythme,
que la vie devienne sensée sur
terre.
Aujourd'hui nous avons des millions de
Chrétiens. Mais ce ne sont pas des hommes de
vie ; ils n'en savent pas plus long que les
autres hommes ; tout au plus se
préparent-ils pour l'au-delà en
même temps qu'ils se retirent de la vie
terrestre, mais cela n'en fait pas des hommes qui
aient la lumière de vie.
On n'aperçoit pas en eux les
« vertus de Dieu qui les a appelés
à sa merveilleuse
lumière ». Ces vertus divines
étaient bien là, chez quelques-uns,
mais elles restaient cachées. Il y a bien,
sur le terrain du christianisme, une certaine
culture supérieure, mais elle ne
pénètre pas, à proprement
parler, dans la vie. Aujourd'hui on recherche des
Chrétiens qui aient en eux des vertus de
Dieu ; on ne demande plus ce qu'ils croient,
mais comment ils vivent.
Pouvons-nous trouver un nouveau style de
vie ? Ce n'est pas chose facile que de trouver
le style de Dieu aussi bien dans nos occupations
extérieures que dans les affaires. Et
pourtant, nous devons trouver cette manière
d'être, ce style selon Dieu, afin que nous ne
soyons pas liés à chaque centime, et
asservis comme des esclaves dans chaque travail. Il
nous faut travailler à affranchir les autres
aussi, afin qu'ils ne soient pas
éternellement dans la peine et qu'ils
deviennent, eux aussi, des créatures de
Dieu. Il faut que le jour vienne où tout
homme, dans chacune de ses actions, pourra rester
en harmonie avec le Père qui est au
ciel ; chacun devrait en quelque sorte
être une réduction en miniature de
Dieu.
Ainsi la victoire, remportée par
Jésus-Christ, brisera en nous la folie du
monde. Le temps doit venir où nous
chercherons notre félicité dans
l'application des vertus divines à la vie
pratique quotidienne.
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