Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

suite

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II.

Nous nous sommes d'abord tournés vers le Fils, et nous avons entendu le témoignage qu'il rend à l'Écriture. Maintenant nous nous tournons vers le Saint-Esprit, et nous demandons quel témoignage Celui qui est Dieu avec le Père et le Fils a rendu à cette Parole qui nous est conservée dans les oracles de Dieu.

Je sais, mes frères, que ce sujet est difficile ; je sais même que quelques protestants n'aiment pas à en entendre parler ; mais je n'hésite pas à dire que ce point a, à mes yeux, une grande importance dans l'Eglise évangélique, surtout pour la foi des petits. D'ailleurs, s'il faut maintenir les droits de l'Écriture, il faut aussi maintenir les droits de l'Esprit. On ne doit sacrifier ni l'un ni l'autre. Ceux qui attaquent le règne des Écritures ruinent par là même le règne de l'Esprit. Nous voulons que l'on désire et surtout que l'on possède le Paraclet qui formait le principe puissant de la communauté apostolique. Nous voulons qu'encore à cette heure. l'Esprit saint nous donne la lumière, la foi, la prière, la vie. Si, d'un côté, nous repoussons la tentative audacieuse de ceux qui, en disant : Esprit, Esprit ! rejettent l'autorité des Écritures de Dieu, de l'autre nous combattons la desséchante doctrine de ceux qui, tout en respectant l'inspiration des apôtres, ne savent pas que nul ne peut dire que Jésus est Seigneur, si ce n'est par le Saint-Esprit (I Cor., XII, 3)

Pour connaître le témoignage qui fut rendu à la Parole de Dieu par le Saint-Esprit dans les premiers temps du christianisme, je vous demanderai de m'accompagner dans quelques villes de l'Orient.

Venez donc, entrez avec moi dans cette ville de Philippes de Macédoine, près de laquelle eut lieu la bataille qui laissa dans Rome le parti républicain sans défenseur. Un homme chrétien, Paul de Tarse y adresse près d'une rivière, à des femmes assemblées, ces enseignements divins qu'il donnait alors de bouche et que nous avons maintenant dans ses écrits. Que fait le Saint-Esprit qui est aussi là ? Le Saint-Esprit rend témoignage dans l'esprit d'une marchande de pourpre aux paroles que Paul prononce. Il lui ouvre le coeur ; dès lors, cette femme croit que cette parole est une parole de Dieu, et elle est sauvée.

Allons Plus loin : entrons dans cette ville de Thessalonique, en Mygdonie, à laquelle la soeur d'Alexandre donna son nom. Voilà ce même Paul qui parle. Et que fait le Saint-Esprit dans ceux qui l'écoutent ? Le Saint-Esprit (I Thes., II, 12-13) leur rend témoignage que la parole qu'ils entendent est, non la parole des hommes, mais véritablement la Parole de Dieu ; il la fait agir en eux avec efficace ; et ces hommes croyant que, quand Paul parle, Dieu parle, ils sont sauvés.

Poursuivons notre course dans le Levant : allons jusqu'à cette ville de Corinthe, célèbre par son commerce, ses richesses, son luxe, ses Prytanes : voilà encore ce même Paul qui prêche. Et que fait le Saint-Esprit qui est aussi là ? Le Saint-Esprit (l Cor., II, 4, 5) fait que sa prédication ne consiste pas en paroles persuasives d'une sagesse humaine, mais en démonstration d'esprit et de puissance, en sorte que leur foi procède, non de la sagesse des hommes, mais de la puissance de Dieu.

O vous ! qui avez été enfantés par la Parole de vérité (Jacq., I, 18), il vous est facile de comprendre le témoignage que le Saint-Esprit rendait, au commencement, à cette Parole que nous a conservée l'Écriture, puisque ce même Esprit (si vous croyez) rend maintenant ce même témoignage dans vos coeurs.

Oui, mes frères, de même que le don de la sainte Écriture est un don de cette grâce de Dieu qui a pour but de sauver nos âmes, la foi à la sainte Écriture est une partie de la foi qui nous sauve. Ce ne sont pas des arguments qui peuvent nous tirer de l'état d'insensibilité spirituelle où l'homme naturel se trouve. Il faut que Dieu nous donne un nouveau coeur, un nouvel esprit. Cette même Parole qui dit au commencement, pour l'univers, que la lumière soit, et la lumière fut, se fait entendre à notre âme : elle crée en nous une lumière nouvelle, et nous sommes contraints à reconnaître la divinité, l'autorité de cette Parole créatrice. Tant que ce nouvel Esprit ne nous a pas été donné, l'Évangile, qui est pour le croyant la sagesse de Dieu, est pour nous une folie.

La conversion est la grande preuve de la divine autorité des Écritures. Nul ne peut reconnaître l'Esprit de Dieu dans les Écritures, si ce n'est celui auquel Dieu ouvre pour cela l'esprit. Toutes les fois qu'il s'agit de discerner un objet, il faut un oeil pour le voir. Or, c'est Dieu qui donne cet oeil, et Il nous le donne par l'Écriture même. C'est l'Écriture qui opère ce miracle de la régénération. Le Saint-Esprit, comprenez-le bien, mes chers auditeurs, ne se communique pas immédiatement à vous : c'est là la pensée des mystiques et des illuminés, mais ce n'est pas celle du Seigneur. Cet Esprit ne se communique au coeur de l'homme qu'avec et par la Parole de Dieu, parce que, dans cette Parole, dans cette Écriture, se trouve, comme dit saint Pierre, une semence incorruptible qui vit et demeure à toujours (I Pierre, I, 23).

Quoi ! mes frères, je reconnais Dieu dans la Parole qui a fait l'univers, que dis-je ? dans celle qui a créé un brin d'herbe ; je sais qu'aucune parole d'homme n'eût pu le faire, et je ne reconnaîtrai pas Dieu dans cette parole qui m'a créé de nouveau, qui m'a donné la paix de mon âme ?

« Comme la pluie et la neige descendent des cieux, dit Esaïe, et n'y retournent plus, mais qu'elles arrosent la terre, la font produire et la font germer tellement qu'elle donne la semence au semeur et le pain à celui qui mange, il en sera de même de ma Parole, qui sera sortie de ma bouche, dit l'Éternel ; elle ne retournera point à moi sans effet, mais elle aura son effet dans les choses pour lesquelles je l'aurai envoyée ; car vous sortirez avec allégresse et vous serez conduits en paix » (Esaïe, LV, 10-12).

Ainsi, comme les productions de la terre sont un témoignage rendu à la pluie venue du ciel, la paix et la joie du chrétien sont un témoignage rendu à la Parole venue de Dieu. Il y a plus : « La semence, dit le Seigneur, c'est la Parole de Dieu » (Luc, VIII, 4-15). La semence et la Parole ont également en elles une certaine puissance qui se manifeste dans les champs ou dans les coeurs par les fruits qu'elle produit, et ces fruits sont tels qu'il faut y reconnaître l'oeuvre même de Dieu.

O hommes inconvertis ! voulez-vous avoir la foi véritable ? Venez à l'école du Saint-Esprit ; ouvrez devant vous, dans votre cabinet, les Écritures, sans croire encore, si vous le voulez, qu'elles sont la Parole de Dieu. Lisez, cherchez, sondez, pesez attentivement dans votre coeur les paroles qui s'y trouvent, ligne après ligne, mot après mot. Attendez !... Quand, au milieu de votre lecture, le Saint-Esprit, qui a poussé les saints hommes de Dieu, fera tout à coup resplendir sa lumière dans votre coeur, comme parle Paul (2 Cor., IV, 6) ; quand ce Saint-Esprit rendra témoignage au dedans de vous que Jésus est le Fils de Dieu, le Sauveur ; quand ce Saint-Esprit vous convaincra que Dieu vous donne la vie éternelle, et que cette vie est en son Fils, - oh ! alors, mon frère, il naîtra en vous une foi toute autre et beaucoup plus élevée que celle que donnent les preuves humaines, une foi divine qui vous rendra parfaitement certain que l'Écriture qui vous annonce Christ est de Dieu.

La foi qui nous apportera le salut renfermera aussi la foi à cette Écriture, dans laquelle ce salut nous est présenté. Vous croirez à la grâce de Christ, mais vous croirez aussi à sa parole ; vous croirez à sa compassion, mais vous croirez aussi à sa vérité : Ta Parole est parfaitement pure ; je me suis assuré en elle (Ps. CXIX). O admirable mystère ! la Parole divine entre en nous, oui, dans notre pauvre coeur, et elle se démontre à nous comme le soleil démontre son existence, quand il s'élance hardiment dans les cieux. Il n'y a pas ici un simple degré de probabilité, comme des chrétiens inattentifs seraient disposés à le croire : il y a démonstration d'esprit et de puissance.

Quand vous éprouvez en vous la puissance vivifiante de la parole des prophètes et des apôtres, vous vous sentez poussés vers Jésus-Christ, que vous ne connaissiez point encore, entraînés vers lui comme par une affinité intime. Le Saint-Esprit vous fait sentir que la vie qui commence à se réveiller en vous, mais qui a encore tant besoin de croître, et la vie qui abonde dans les Écritures, avec une si admirable perfection, que ces deux vies sont de même nature et proviennent l'une et l'autre d'une action spéciale et merveilleuse de Dieu. Il y a entre ces deux vies (la vie éternelle de l'Écriture et la vie nouvelle de votre coeur) une identité qui vous frappe. Si vous avez vraiment reçu la vie de Dieu, vous devez me comprendre.

Le principe de vie éternelle qui est mis en vous quand vous êtes convertis, et qui est, hélas ! encore si imparfait, n'est certes pas d'origine humaine, c'est Dieu, oui, Dieu même, qui en est l'auteur.

Pour confesser que c'est Dieu et non l'homme qui vous a convertis, vous seriez prêts à donner votre vie. N'est-il pas vrai, enfants de Dieu ?... Comment donc ces Écritures, où se trouve une vie, divine, bien plus pure, bien plus parfaite, bien plus, originelle et primitive que celle qui est dans notre pauvre coeur, seraient-elles d'origine humaine ? Comment Dieu n'en serait-il pas l'auteur ?... Ah ! si, je reconnais la main de Dieu et l'Esprit de Dieu dans un petit coteau, à bien plus forte raison je les reconnais dans les masses blanches et gigantesques des Alpes. Si je reconnais la main de Dieu et l'Esprit de Dieu dans l'abeille qui bourdonne, à bien plus forte raison je les reconnais dans la face majestueuse de l'homme. Si je reconnais la main et l'Esprit de Dieu dans la lueur nouvelle qui paraît dans mon coeur, à bien plus forte raison je les reconnais. dans la lumière créatrice qui resplendit dans les saintes Écritures et qui fait que tout homme voit.

L'enfant nourri par sa mère connaît le sein de sa mère ; il sait que ce sein lui donne le lait, comme le chrétien sait que l'Écriture lui donne l'Esprit. Aussi l'enfant cherche-t-il le sein de sa mère ; comme la source de la vie. Lui enlever sa mère, c'est lui enlever son lait. O saintes Écritures ! ô saintes mamelles qui m'avez allaité ! je vous cherche ; je ne veux pas être séparé de vous, car vous, enlever à moi, c'est m'enlever la vie. je reconnais en vous la vie de Dieu et j'adore Celui qui a mis, en vous cette vie !

Ainsi donc, mes frères, cet Esprit saint, que l'on veut exalter en excluant l'autorité de l'Écriture, atteste lui-même, au contraire, cette divine autorité des oracles de Dieu.

On a dit récemment que, en cessant de reconnaître la Bible pour une autorité, on sera amené à rechercher plus ardemment le Saint-Esprit, que l'Écriture et l'Esprit s'excluent ; que là où est l'Écriture, l'Esprit disparaît.

Ces paroles sont étranges, mes frères ; elles seraient énormes de danger, si elles n'étaient énormes d'erreur. Le Saint-Esprit est communiqué à l'homme, mais par le canal des Écritures. La Parole nous déclare que les saintes Écritures sauvent par la foi en Jésus-Christ, que la foi vient de ce qu'on entend, et que l'on entend au moyen de la parole de Dieu. Voilà, l'enseignement de Dieu.

Ces paroles : « L'Esprit et l'Écriture s'excluent, » reviennent aux propositions suivantes, : un champ de blé et le pain qui nourrit l'homme s'excluent ; une source et l'eau qui désaltère l'homme s'excluent ; le soleil et la lumière qui éclaire l'homme s'excluent ; le sein, d'une mère et le lait qui fait vivre l'enfant s'excluent.
Non, il n'est pas vrai que là où est l'Écriture, l'Esprit disparaît. Tout au contraire, rien n'est uni aussi intimement que l'Esprit et l'Écriture. L'Écriture fait trouver le Saint-Esprit ; le Saint-Esprit donne la foi à l'Écriture.

Ce n'est pas l'autorité de l'Eglise qui nous donne la foi à la Parole, comme le prétendent les papes ; ce ne sont pas certains principes de la raison, comme le prétendent quelques théologiens protestants ; c'est Dieu qui crée lui-même cette foi en nous par sa Parole et par son Saint-Esprit. Nous avons de la divinité de l'Écriture une démonstration immédiate, provenant de la vie qui a été manifestée et qui est la lumière des hommes. Notre foi à la Parole de Dieu n'est pas une foi simplement historique, comme quelques-uns se l'imaginent, ni une foi simplement philosophique, comme d'autres le pensent ; non, c'est une foi divine, une foi qui a ainsi une certitude, une fermeté intime élevée, inébranlable, comme Dieu qui en est l'auteur.

Cette doctrine, mes frères (car c'est une doctrine), a été souvent combattue : d'abord par les catholiques romains, mais aussi par les arminiens, les sociniens, les rationalistes vulgaires et non vulgaires qui, quand il s'agit de s'opposer à la Parole de Dieu, font cause avec les papistes. Et pourquoi cette doctrine a-t-elle été ainsi attaquée ? - Parcequ'on a trop fait de la religion une affaire de connaissance, un intellectualisme mort. Pour plusieurs (peut-être pour plusieurs de ceux qui sont ici), le témoignage de l'Esprit n'a été autre chose qu'une certaine probabilité qui découle d'une certaine influence vague, mais bienfaisante, que le christianisme exerce sur notre coeur. On a, en conséquence, regardé ce témoignage comme insuffisant, et l'on a fait dépendre la foi à la divinité des Écritures des preuves de l'entendement.

Mais, mes frères, ne voit-on pas la philosophie elle-même, la meilleure la plus élevée, celle de Kant si vous le voulez, reconnaître que la conviction religieuse ne peut être démontrée par des arguments ? - La philosophie n'enseigne-t-elle pas, de nos jours, que cette conviction est le fruit d'une nouvelle vie, qu'elle doit être donnée par la foi ? et n'a-t-on pas remis en honneur l'ancien principe : Per fidem ad intellectum ?

Objecterez-vous qu'il est des âmes qu'on regarde comme converties et qui n'admettent pourtant pas la divine autorité des Écritures ? Je répondrai que le cas est tout au moins bien exceptionnel. Un nuage, il est vrai, peut passer sur l'Esprit d'un enfant de Dieu, sans qu'il soit pour cela déchu de la grâce ; mais si ce nuage ne passe pas, si la nuit s'étend au lieu de se dissiper, c'est une preuve que cette conversion n'était pas véritable. On verra cette âme redescendre peu à peu dans les ténèbres d'où elle avait paru sortir.

Direz-vous, de plus, que des paroles prononcées par des hommes ont aussi elles-mêmes converti ? Je ne m'arrêterai pas à une remarque qui a été faite, savoir : qu'une conversion opérée uniquement par l'Écriture a d'ordinaire plus de vérité et de profondeur que quand il se trouve entre l'âme et la Bible quelque intermédiaire humain. Mais je demanderai : Où a-t-elle été prise, cette parole prononcée ou écrite par un homme ? de quoi est-elle la répétition ? De la Parole de Dieu dans l'Écriture. Si une Parole ne vient de là, elle ne convertira jamais. L'eau que vous buvez vient sans doute des citernes ou des réservoirs que vous avez dans vos demeures ; ces réservoirs peuvent même lui avoir communiqué un goût qui ne lui est pas naturel ; mais si elle vous désaltère, si elle conserve votre vie, est-ce à ces réservoirs de pierre, de terre, de bois, que vous l'attribuerez ? Cette vertu ne provient-elle pas de la source dont primitivement cette eau jaillit ? Pour avoir séjourné quelque temps dans vos vases et y avoir perdu de sa pureté primitive, elle ne sort pourtant pas moins pure des montagnes de Dieu, et elle proclame son Créateur.

Ferez-vous encore une autre objection ? Direz-vous que cette démonstration du Saint-Esprit n'est pas nécessaire, qu'il y a des arguments par lesquels la théologie démontre la révélation et l'inspiration, et qu'il n'est pas permis de les affaiblir ? je réponds deux choses à cet égard : la première, que ces arguments ne sont pas inutiles ; la seconde, qu'ils ne sont pas suffisants.

Ils ne sont pas inutiles ; ils servent à nous conduire à l'Écriture, à nous rendre attentifs au sceau de divinité que Dieu a mis en elle.
Mais ils ne sont pas suffisants. Une conviction qui ne reposerait que sur ces preuves scientifiques ne serait pas de la bonne espèce. Ce ne serait qu'une foi humaine, et une foi humaine ne sauve pas.

Comprenons bien, mes frères, les rapports dans lesquels se trouve avec la foi, la science, dans ce moment trop exaltée par les uns et trop méprisée par les autres. La science ne peut pas donner la foi, mais elle peut la justifier. Et si la théologie ne justifie pas suffisamment notre foi, que sera-ce ? dira-ton. Ce que ce sera ? Il est très facile de vous le dire : ce sera une preuve de l'imperfection de la théologie, mais ce ne sera, en aucune manière, une preuve de l'incertitude de la foi. La foi est au-dessus des arguments de la science ; et, comme des arguments ne peuvent pas la donner, des arguments ne peuvent pas l'ôter. Les attaques des théologiens ou des incrédules contre la théologie ne font rien à la foi. Le christianisme est un fait, une vérité, une vie, une expérience. Un chrétien simple peut se sentir heureux et en parfaite sûreté dans le christianisme, sans se soucier en aucune manière des explications des théologiens.
Ceci est important à remarquer, en opposition à tous les adversaires, mais en particulier aux catholiques romains ; car leur argument contre les principes protestants repose essentiellement sur la difficulté que trouvent les simples fidèles à s'assurer de l'inspiration et de l'autorité des saintes Écritures (1). Ah ! quand ayant eu faim j'ai mangé, et qu'ayant mangé j'ai été rassasié et fortifié, je n'ai pas besoin, certes, que quelque naturaliste ou quelque chimiste viennent, par leurs dissertations savantes et leurs habiles analyses, me prouver que ce qui m'a nourri était bien de vrais aliments, créés par la main de Dieu même. La meilleure démonstration, c'est mon expérience.

La doctrine que nous défendons n'est pas seulement le témoignage des Écritures, c'est encore le témoignage du Saint-Esprit. Si nous maintenons l'Écriture contre ceux qui ne veulent que l'Esprit, nous maintenons l'Esprit contre ceux qui ne veulent que l'Écriture.

Peut-être le témoignage de l'Esprit est-il habituellement le premier. C'est ce témoignage qui ouvre le coeur à la foi, mais il ne peut rester isolé ; il faut entendre le témoignage du Fils, de l'Écriture même, et alors rien ne pourra ébranler en nous la foi à la divine autorité de la Parole de Dieu. On a trop séparé quelquefois le témoignage de l'Écriture du témoignage de l'Esprit.

Pour qu'un champ porte des fruits, il faut d'abord le travailler : c'est l'Esprit qui travaille le champ de nos coeurs ; mais il faut ensuite l'ensemencer : c'est la Parole de l'Écriture qui sème. Non, mes chers frères, vous qui êtes hors d'état d'examiner les preuves savantes de la divinité des Écritures, Dieu ne vous a pas laissés dans le doute. Il vous a mis sur un rocher que les petites vagues humaines n'ébranleront pas. Si l'Esprit de celui qui a ressuscité Jésus habite en vous (Rom., VIII, 11), vous dites avec l'Apôtre : Je vis, non plus moi, mais c'est Christ qui vit en moi (Gal., Il, 20). Je sais en qui j'ai cru (II Thim., I, 12). VOUS ne doutez pas plus alors de l'autorité des saintes Écritures, de la divinité de Celui auquel ces Écritures rendent témoignage, de la vie qu'il a mise en vous, que vous ne doutez de la vie naturelle de vos corps. Mais surtout, Dieu a ouvert vos yeux pour connaître les merveilles de sa loi. Il a ouvert vos oreilles et vos coeurs, pour entendre et comprendre le témoignage que l'Écriture rend à sa propre divinité. Vous croyez maintenant ce que Dieu dit dans sa sainte Parole. Vous avez ainsi en vous et en la Bible une double preuve que tous les savants ne peuvent vous donner ; mais aussi (sachez-le bien !) que tous les savants ne peuvent vous ôter.

Mais si nous ne pouvons pas vous ôter la sainte Écriture, ne pouvez-vous pas, vous, vous l'ôter à vous-mêmes ? O Timothée ! dit Paul, GARDE le dépôt, te détournant des objections d'une science faussement ainsi nommée, dont quelques-uns faisant profession se sont détournés de la foi (I Tim., VI, 21), lesquels heurtent contre la Parole, dit Pierre, et sont rebelles (I Pierre, II, 8). Prenez donc garde, reprend Paul, que personne ne se prive de la grâce de Dieu, comme Esaü, qui, en échange d'un mets, abandonna son droit d'aînesse (Héb., XII, 15).

Prenez donc garde, mes frères ; tremblez de perdre cette foi aux saintes Écritures que Dieu vous a données. « La sainte Écriture, c'est notre mère, disait Luther, c'est le sein, ce sont les flancs dans lesquels nous avons été formés pour la vie éternelle. » Je vous dis donc à tous : Mon frère, la sainte Écriture, c'est ta mère, car c'est elle qui t'a enfanté dans cette heure souveraine de cris, de douleurs, d'angoisses, où un homme nouveau est né pour le monde éternel. C'est ta mère, car c'est elle qui t'a nourri, comme un enfant nouvellement né, du lait spirituel et pur qui fait croître. C'est ta mère, car c'est elle qui a conduit tes premiers pas et a affermi ton corps chancelant. C'est ta mère, car c'est à ses pieds que tu t'es assis quand elle te racontait ces belles choses que Dieu a faites aux hommes. C'est ta mère, car c'est elle qui a apaisé les troubles de ton âme et qui a essuyé tes pleurs ! - Et tu pourrais douter de ta mère ! tu voudrais l'enlever à tes frères ! tu la poursuivrais de tes coups... - Malheureux !... veux-tu tuer ta mère ?...

Une personne pieuse ayant entendu ou lu des paroles dirigées contre l'autorité de l'Écriture, plaça aussitôt ses deux mains sur les Écritures qui étaient devant elle, et s'écria (je l'entendis) : « C'est ma Bible ! c'est ma Bible ! c'est mon Dieu qui me l'a donnée ! personne ne me l'ôtera ! »

Faites de même, mes frères, gardez les saintes Écritures et surtout obéissez aux saintes Écritures. Que votre obéissance à la Parole de Dieu soit absolue et vivante. Ce n'est pas seulement en théorie que l'on peut renverser l'autorité de la Parole de Dieu ; on le peut aussi bien en pratique ; et nous tous, hélas ! nous le faisons chaque jour. Oui, je m'accuse moi-même et je vous accuse comme prenant quelque part à cette funeste erreur. Hâtons-nous de nous décharger d'une responsabilité si redoutable. Ne restons pas dans le vague des généralités ; prenons la Parole à la lettre et accomplissons cette lettre par l'Esprit. Savez-vous ce qui vaincra cette erreur qui menace d'envahir les Églises ? Ce ne seront pas les réfutations des docteurs, mais ce sera la fidélité des disciples, par la vertu de Dieu.

Que l'Eglise se renouvelle dans l'obéissance à la Parole; que chaque fidèle l'accomplisse dans sa sphère, même dans la plus humble, avec une plus consciencieuse exactitude, une plus parfaite vérité; que nos voies soient plus constamment en accord avec cette règle souveraine : Voilà l'appel qu'adressent à toute l'Eglise les circonstances critiques et nouvelles où nous sommes. « Soyez observateurs de la Parole et non pas seulement auditeurs, vous séduisant vous-mêmes » par de faux raisonnements » (Jacq., I., 22).
Si nous le faisons, ne craignons rien.

La Parole ne nous manquera pas, si nous ne manquons pas la Parole. Les cieux et la terre passeront, mais mes paroles ne passeront pas.


1
Conférences sur les doctrines de l'Eglise catholique, par le docteur Wisemann. - Seconde conférence : De la règle de la foi des protestants.
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