J'irai vers lui, mais il ne reviendra pas vers moi. (Il Samuel XII, 23.)
L'hiver qui, d'après l'almanach,
s'achève aujourd'hui, mais qui en
réalité se retire à pas lents
et comme à regret, laissera à
beaucoup d'entre nous de tristes souvenirs.
« Un vent venu de la tombe a
moissonné les vivants », pour
parler avec un poète. Ce n'est pas seulement
à Messine qu'on a pleuré. Quelquefois
c'étaient des jeunes qui s'en allaient, plus
souvent c'étaient des vétérans
de la vie, de ces êtres chers et
vénérés qui sont l'honneur et
le centre d'une famille et qu'on aurait tant
aimé retenir. J'ai donc pensé qu'une
parole de consolation et d'espérance
était particulièrement de
saison.
Tout récemment,
j'éprouvais le besoin d'adresser une telle parole
à une
famille juive plongée dans une très
grande affliction ; naturellement je ne
pouvais la chercher que dans l'Ancien Testament, et
je n'ai rien trouvé de mieux que cette
parole de David, qu'aujourd'hui j'ai choisie pour
texte. Il dit au sujet de l'enfant qu'il vient de
perdre : « J'irai vers lui, mais il
ne reviendra pas vers moi. »
Quel sens précis David
attachait-il à cette parole ? Avait-il
l'idée nette et l'attente positive d'une
réunion dans un monde meilleur ? On a
beaucoup discuté là-dessus. On s'est
trompé de deux manières, tantôt
en confondant les deux économies et en
oubliant que Jésus seul a mis en
évidence la vie et l'immortalité par
l'Évangile, tantôt en avançant
que la croyance à un avenir après la
mort, commune à presque toutes les religions
païennes, était étrangère
aux Hébreux et absente de l'Ancien
Testament, à part une sentence du plus
récent peut-être des livres qu'il
contient, celui de Daniel.
Au reste, cette recherche est
plus
intéressante au point vue historique
qu'importante au point de vue de la foi.
Ce qui nous concerne, ce qui
nous
touche, c'est moins la pensée de David ou
celle de l'auteur inconnu du
deuxième livre de Samuel, que la
pensée du Dieu qui les inspirait.
Comme Jésus a vu et a
montré dans un texte de l'Exode :
« Je suis le Dieu d'Abraham, d'Isaac et
de Jacob », beaucoup plus
assurément que n'y mettait
intentionnellement l'auteur de l'Exode ; comme
Saint Paul a sondé et
interprété plus profondément
qu'Habacuc lui-même, cette sentence
d'Habacuc : « Le juste vivra par la
foi », ainsi, il nous est certainement
permis de nous approprier et d'expliquer, au point
de vue chrétien, la parole de David que nous
méditons, sans nous préoccuper de
savoir si toutes les pensées qu'elle nous
suggère étaient distinctement
présentes à l'esprit de David. Pour
bien marquer cette intention, nous commencerons par
intervertir l'ordre des deux propositions de notre
texte, ce qui n'en change pas le sens, mais en
modifie l'accent. David, absorbé par sa
douleur paternelle, dit : « J'irai
vers lui, mais il ne reviendra pas vers
moi. » Pour nous, regardant en avant et
en haut, nous disons de
préférence : « Il ne
reviendra pas vers moi, mais j'irai vers
lui. » Car pour un chrétien, c'est
toujours l'espérance qui a le dernier mot.
L'épître aux Hébreux dit des
hommes en général, tels qu'ils
étaient avant Jésus-Christ et tels
qu'ils sont encore en dehors de la foi à son
Évangile, qu' « ils sont toute
leur vie tenus dans la servitude par la crainte de
la mort. » Amère, mais
incontestable vérité ! S'il y a
un sentiment commun à toutes les
époques, à tous les peuples, à
tous les individus, quoique souvent non
avoué, c'est celui-là. Qu'on ne
m'objecte pas le suicide, qui prouve seulement que
chez certaines natures, dans certains cas
exceptionnels, la peur de la mort peut être
momentanément surpassée par l'ennui
et le dégoût de la vie. En
général, rien ne nous répugne
et ne nous effraie autant que la mort. À de
certains moments, nous avons l'air de la
désirer, de l'appeler de loin ; mais,
dès qu'elle fait mine d'approcher, la
plupart font comme le bûcheron de la fable
qui, voyant la mort arriver à son appel, la
prie de l'aider à charger son faix de bois
et de passer son chemin.
Qu'est-ce qui nous porte surtout
à haïr et à craindre la mort ?
Est-ce
la perspective d'être séparés
de ceux que nous aimons ? Certes, cette
pensée est émouvante et douloureuse,
et nous y reviendrons tout-à-l'heure. Je ne
crois pourtant pas que ce soit là la pire
terreur de la mort, surtout lorsqu'il s'agit de la
nôtre. Il y a d'autres instincts plus
puissants encore que les affections naturelles.
Tout être tend à
persévérer dans son être, tout
vivant aime la vie ; or, la mort met fin
à tout ce que nous appelons aujourd'hui la
vie ; si elle n'est pas
l'anéantissement, elle en est du moins
l'image et l'apparence.
Nous sommes ainsi faits que nous
nous occupons constamment du lendemain, soit pour
nous le représenter en imagination, soit
pour le garantir et l'embellir par nos
précautions et nos provisions ; or, la
mort est le mystère absolu, elle est
l'entrée dans un mode d'existence dont
toutes les conditions nous échappent ;
par ce côté aussi, elle nous
effraie.
Mais le pire de tout, c'est que
cette nuit qui est au-delà du tombeau est
peuplée de fantômes et de spectres
enfantés par notre conscience. Nous sentons
en nous-mêmes, et nous lisons dans la Bible
qu'après la mort suit le
jugement.Saint Paul a bien
raison de dire que l'aiguillon de la mort,
aiguillon envenimé, c'est le
péché. C'est pourquoi
Jésus-Christ, étant le Sauveur du
péché, est aussi le seul qui nous
délivre demain de la mort elle-même,
aujourd'hui de ses terreurs.
Oui, voilà bien ce qui rend
surtout notre mort redoutable. Mais lorsqu'il
s'agit de la mort des autres, de ceux que nous
aimons, c'est bien la séparation qui nous
désole. Cette désolation qui nous
étreint le coeur, tient tout entière
dans ce mot bref et navrant de notre texte :
« Il ne reviendra pas vers
moi. » Quand on s'aime vraiment, quand
deux coeurs ne font qu'un coeur et deux vies qu'une
vie, déjà au cours de l'existence
terrestre, les départs lointains, les
absences prolongées ont quelque chose de
déchirant. Mais alors, nous avions le ferme
espoir que l'être aimé reviendrait.
Aujourd'hui que la mort est intervenue, nous savons
qu'il ne reviendra plus. Alors, nous communiquions
avec lui par correspondance ; aujourd'hui, nos
appels se perdent dans le vide sans éveiller
aucun écho ; un froid et complet
silence règne entre lui et nous. Alors nous
pouvions nous représenter où il
était, ce qu'il faisait ; aujourd'hui
nous l'ignorons. Une jeune veuve disait de celui qu'elle
avait
perdu :
« Autrefois, un jour sans lui
était un jour sans soleil ; maintenant
c'est pour toute la vie que mon soleil s'est
couché. » On a dit avec raison
qu'une joie non partagée n'est que la
moitié d'une joie, et qu'une douleur
partagée n'est que la moitié d'une
douleur ; désormais donc mes joies
seront bien pauvres et mes douleurs bien pesantes,
car il n'est plus là pour partager les unes
et les autres.
Cette séparation
complète a paru si cruelle à l'homme,
qu'il a cherché et imaginé des moyens
de jeter un pont sur le grand abîme. On a
prétendu faire parler les morts, les faire
écrire, apparaître même, pour
nous renseigner sur l'au-delà. Illusion
misérable ou dangereuse évocation de
puissances que nous ne connaissons pas !
Laissez la mort être la mort ; attendez
le jour de Dieu ; cherchez vos consolations en
haut et non pas en bas, dans les fermes promesses
de l'Évangile et non dans les creuses
imaginations du spiritisme. Avec la raison, avec
l'expérience, avec la piété
à la fois humble et éclairée
de nos pères, acceptez le mot de
David : « Il ne reviendra pas vers
moi. »
« Mais j'irai vers
lui ! » Voilà la consolation,
voilà l'espérance, voilà le
véritable rendez-vous et la réunion
définitive. À la
vérité, de même que je disais
tout-à-l'heure : « La
séparation d'avec ceux que nous aimons, si
amère qu'elle soit, n'est pas la plus grande
des terreurs de la mort », je dois dire
maintenant : « La réunion
avec eux, si douce qu'elle puisse et doive
être, n'est pas la première des
bénédictions et des joies de
l'éternité. »
L'Écriture sainte nous la promet, oui, mais
elle ne nous en parle qu'avec réserve et
sobriété, de peur sans doute que nous
ne cherchions la terre dans le ciel et l'homme plus
que Dieu, et que nous ne fassions descendre la
religion et la révélation au rang
d'un moyen destiné avant tout à
satisfaire nos affections terrestres.
L'espérance chrétienne
est plus haute que cela ; avant de dire :
« J'irai vers l'ami que j'ai
perdu », elle dit :
« J'irai vers Dieu. »
« Il m'est meilleur de déloger
pour être avec Christ », dit Saint
Paul. Est-ce que cela ne vous dit rien ? Voir
Dieu face à face, voir Jésus-Christ
tel qu'il est et, le
contemplant, être transformé à
son image ; être délivré
du péché, du nôtre et de celui
de nos semblables, est-ce que ce bonheur-là
vous laisse froids ? que dis-je ? est-ce
qu'il vous effraierait plutôt ?
Oh ! s'il en est ainsi, prenez garde ;
craignez pour les espérances mêmes qui
vous sont chères. À celui qui cherche
avant tout le royaume de Dieu, tout le reste, tout
ce qui est vraiment bon et désirable, sera
donné par surcroît ; mais celui
qui ne cherche pas premièrement ce royaume,
n'y entrera point ; et s'il n'y entre pas, que
lui restera-t-il ?
J'ajoute que l'expérience
chrétienne est plus vaste que cela. Elle ne
se contente pas de notre bonheur personnel, si
légitime, si pur, si spirituel que nous nous
le représentions. Son objet définitif
et suprême, c'est celui pour lequel
Jésus-Christ nous a appris à prier en
première ligne : le nom de Dieu
sanctifié, son règne arrivé,
sa volonté accomplie ; c'est par
conséquent la délivrance de
l'humanité, la victoire du bien sur le mal,
le soupir de la création exaucé, Dieu
tout en tous.
Dans ce salut du monde (c'est le
but, c'est le mot même de
Jésus-Christ), toutes les justes
satisfactions de nos coeurs seront comprises, comme
la goutte d'eau dans l'Océan.
Cette réserve
nécessaire faite, nous pouvons revenir
à l'affirmation de David :
« J'irai vers lui. » Elle ne
peut pas signifier seulement : Je reposerai
dans le même tombeau. Si
l'individualité consciente était
anéantie, il n'y aurait plus de
« je » ou de
« lui » ; et
qu'importerait alors le rapprochement des
ossements, qui eux-mêmes ne seront
bientôt plus qu'une poussière
confondue avec toute autre poussière ?
Pris au sérieux, notre texte implique la
permanence de la personnalité après
la mort, celle du souvenir, celle des affections,
et la réunion auprès de Dieu de ceux
qui se sont aimés en Lui. Tout cela se tient
et s'enchaîne, tout cela subsiste ou tombe
ensemble.
Sans mes affections, je ne suis
plus
moi-même ; sans le souvenir, la
rétribution, qui est la raison morale de la
vie à venir, n'existe plus, n'étant
plus morale, discernée et approuvée
par la conscience. Si nous ne devions pas retrouver
ceux que nous aimons, il ne faudrait plus parler de
ciel, parce que les aspirations légitimes de
nos coeurs ne seraient pas satisfaites ; Dieu
ne serait plus le fidèle
Créateur.
Comme Lamartine l'a dit en vers
éloquents :
- Vivre sans se revoir et sans se reconnaître,
- Ce serait remourir, Seigneur, et non renaître !
- Non ! ton ciel tout entier n'est dans ton sein, mon Dieu,
- Que l'éternel retour après le court adieu ;
- Que le revoir sans fin, que le long cri de joie
- Qu'en retrouvant sa soeur l'âme à l'âme renvoie
- Que l'asile ineffable où tout ce qui s'aima
- Retrouve les doux noms dont l'amour le nomma...
Sans doute on peut aller trop loin dans ces
rêves, et je l'ai déjà reconnu.
J'ai fait remarquer combien, en cette
matière, qui constitue toute la religion de
bien des gens, l'Écriture est sobre, et j'en
ai dit la raison. Mais sa sobriété
n'est pas indécision ni incertitude. Elle
nous en dit assez pour que nous sachions à
quoi nous en tenir. Elle enseigne moins
l'immortalité que la résurrection, et
la résurrection est le triomphe de
l'individualité. Elle nous montre,
s'entretenant avec Jésus sur la montagne de
la transfiguration, Moïse et Elie, les
mêmes qu'autrefois, si semblables à
eux-mêmes qu'ils sont reconnus tout de suite
par les disciples, qui ne les avaient jamais vus.
Elle nous parle des chrétiens de Philippes
et de Thessalonique comme devant être, lors
du second avènement de Jésus-Christ,
la joie et la récompense de Saint
Paul ; cela implique, sans contredit, que
l'apôtre et ceux qui ont été convertis par
son moyen, se reconnaîtront. Nous
serons », dit encore Saint Paul,
« avec le Seigneur et avec
eux. » (avec ceux qui nous ont
devancés). Il serait facile de multiplier
les citations. Je ne rappellerai plus que ce mot de
Paul à Philémon :
« Peut-être Onésime n'a-t-il
été séparé de toi pour
un peu de temps, qu'afin que (grâce à
sa conversion) tu le recouvrasses pour
toujours. » Ainsi, quand on s'aime en
Dieu, c'est pour toujours, qu'on s'aime et qu'on se
possède mutuellement.
De telles paroles
interprètent clairement et justifient
surabondamment le : « J'irai vers
lui » de David. L'instinct de nos coeurs,
qui proteste contre les séparations
déchirantes que fait la mort et qui
réclame l'éternité dans
l'amour, ne nous trompe pas ; le Dieu de la
création nous l'avait donné, le Dieu
de la révélation le sanctionne.
Mais voici la question pratique,
décisive, sérieuse entre
toutes : À quelles conditions est
liée la réalisation de cette belle et
chère espérance ? En d'autres termes :
Par quel
chemin pouvons-nous aller rejoindre ceux que nous
pleurons ?
À travers la mort, sans
doute ; mais non pas à travers
n'importe quelle mort, succédant à
n'importe quelle vie. Supposez que David
adultère et meurtrier ne se fût pas
repenti de son double crime ; supposez qu'il
fût demeuré en état de
révolte contre la loi divine, il n'aurait
sans doute pas pu prononcer, auprès de la
dépouille mortelle de son enfant, la parole
que nous méditons aujourd'hui, parole de
soumission religieuse et de confiance en Dieu. Car
la révélation divine, - ou, pour
parler au point de vue de nos lumières
actuelles, la révélation
chrétienne, - n'est pas un amas confus
d'idées où chacun soit libre de
prendre ce qui lui convient, par exemple
l'espérance d'un revoir après la
mort, en laissant de côté tout le
reste. L'Évangile est comme la robe du
Maître, il est sans couture ; il faut le
recevoir ou le laisser tout entier.
Sur quoi se fonde à vos yeux
l'espérance dont nous parlons ? Est-ce
uniquement sur le voeu de notre nature, sur le
caractère sacré de nos affections,
sur leur droit à l'immortalité ?
Je crains que ce fondement ne soit fragile, car nos
affections naturelles
elle-mêmes ne sont pas exemptes de la
souillure du péché qui a
infecté tout notre être, et le salaire
du péché, c'est la mort. Comme je
l'ai rappelé tout-à-l'heure, le vrai
fondement de notre espérance, c'est
Jésus-Christ, vainqueur de la mort parce
qu'il a été vainqueur du
péché. Voilà le Fils de David
vers qui nous allons, en qui et auprès de
qui nous espérons rejoindre un jour, par sa
grâce, ceux que, par la même
grâce, il a déjà sauvés
et recueillis.
Si c'est sur Jésus-Christ que
vous vous appuyez, attachez-vous tout-à-fait
à lui, comme à votre Seigneur et
Sauveur. N'essayez pas de vous approprier ses
promesses en laissant de côté ses
enseignements et ses préceptes. Si vous
accueillez avec joie et reconnaissance des
déclarations telles que celles-ci :
« Laissez venir à moi les petits
enfants, car le royaume des cieux est pour ceux qui
leur ressemblent... Aujourd'hui tu seras avec moi
dans le paradis », écoutez le
Maître avec la même foi et la
même docilité lorsqu'il dit :
« Le Fils de l'Homme est venu chercher et
sauver ce qui était perdu... Qui croit en
moi a la vie éternelle... Si quelqu'un n'est
né de nouveau, il ne peut voir le royaume de
Dieu. » Celui qui ne veut pas être
chrétien de cette façon là, chrétien en
toutes choses et jusqu'au bout, chrétien
pour obéir et pour servir comme pour
espérer ; chrétien pour
goûter la communion des souffrances de
Jésus-Christ comme pour éprouver la
vertu de sa résurrection ;
chrétien dans la vie comme dans la mort,
celui-là, dis-je, pourra sans doute
répéter de belles sentences de
l'Évangile et dire : « Nous
en avons bien besoin » mais il n'y
trouvera pas la force, la paix et la joie qui sont
le partage du fidèle, aujourd'hui dans les
grandes épreuves de la vie, demain en face
de l'éternité !
Prenons la même question par
un autre côté. Ces êtres
chéris que vous avez perdus et pour lesquels
vous professez une sorte de culte, comment vous les
représentez-vous ? Vous les voyez en
esprit, n'est-ce pas ? affranchis de toutes
les imperfections terrestres, selon la belle
description de l'Apocalypse, vêtus de robes
blanches et tenant des palmes à la main,
pareils enfin aux saints anges, ; et j'aime
à penser que vous ne vous trompez pas en ce
qui les concerne. S'ils sont tels, comment
pouvez-vous aller vers eux ? N'est-ce pas en
commençant dès ici-bas à leur
devenir semblables ? en fuyant le mal, en vous
attachant au bien, en aimant Dieu et les hommes, en
plaçant en haut votre
trésor et votre coeur ? Ce n'est pas,
en effet, en vous asservissant de plus en plus
à la chair, que vous vous préparerez
à une vie et à une
félicité toutes spirituelles ;
ce n'est pas en descendant vers l'abîme que
vous gravirez ce qu'un poète appelle :
« les bleus côteaux du
paradis ».
Ce n'est pas en péchant
volontairement que vous irez au ciel. S'il faut
être plus concret et plus précis, ce
n'est pas à travers l'immoralité et
l'inconduite qu'un mari ira rejoindre la femme
qu'il pleure, ce n'est pas en ne vivant que pour le
plaisir et pour l'argent, qu'un fils ira vers cette
mère pieuse dont le souvenir le poursuit non
seulement comme un regret, mais comme un reproche.
Chaque péché vous sépare
davantage de ces êtres aimables et bons qui
vous ont devancés ; chaque
prière vous rapproche d'eux, en vous
rapprochant de Dieu. Si, comme vous aimez à
vous le représenter, ils vous voient de
là-haut, votre indifférence
religieuse et votre endurcissement les contristent,
votre conversion les comblerait de joie.
Qui veut aujourd'hui accomplir
cet
acte de fidélité et de
réparation ? Qui veut, en recevant
Jésus-Christ comme son Sauveur, se mettre
résolument en route vers ce ciel où
habitent déjà ceux
qu'il a le plus aimés et
vénérés, vers ce ciel qui
s'enrichit tous les jours des dépouilles de
notre pauvre terre ?
Nîmes, Petit-Temple, 21 mars 1909.
Chapitre précédent | Table des matières | Chapitre suivant |