Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

L'ENSEIGNEMENT DE JÉSUS-CHRIST

ET

L'ENSEIGNEMENT DU SAINT-ESPRIT.

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C'est lui (l'Esprit de vérité) qui me glorifiera, parce qu'il prendra de ce qui est à moi et qu'il vous l'annoncera. (Jean XVI, 14.)

La veille de sa mort, dans son dernier entretien avec ses disciples, Jésus, les voyant abattus et consternés par la perspective de son prochain départ, à laquelle ils ne peuvent plus se dérober, s'efforce de les relever et de les fortifier en leur promettant la venue prochaine d'un autre lui-même, dont la présence et l'assistance seront plus bienfaisantes encore (ô miracle !) que ne l'ont été celles mêmes de Jésus. Vous le savez, il s'agit du Saint-Esprit, appelé dans le passage auquel appartient notre texte : Esprit de vérité. Cependant, les disciples ne se détacheront pas de Jésus ; au contraire, ils l'aimeront et le serviront mieux que jamais. Ils auront donc, désormais, deux Maîtres, l'un extérieur et historique, Jésus-Christ, l'autre intérieur et invisible, le Saint-Esprit. Quel est le rapport de ces deux Maîtres et de ces deux enseignements ? Comment ces deux services se concilient-ils, ou plutôt se confondent-ils ? car telle est visiblement la pensée de Jésus.

La question est importante et plus difficile qu'il ne paraît au premier abord ; elle a été résolue et l'est encore aujourd'hui de diverses manières. Jésus-Christ en donne la vraie solution dans notre texte : « L'Esprit de vérité me glorifiera, parce qu'il prendra de ce qui est à moi et qu'il vous l'annoncera. » Notre Seigneur me parait répondre ici en même temps à une question fort analogue et fort actuelle, à savoir l'éternelle antithèse de l'ancien et du nouveau. Nous voulons tous être chrétiens ; mais quel christianisme nous faut-il, un ancien ou un nouveau ? Si c'est un christianisme ancien, comment correspondra-t-il à nos circonstances et à nos besoins modernes ? Si c'est un christianisme nouveau, comment justifiera-t-il sa qualité de chrétien ? Je pense, mes frères, que le vrai christianisme est toujours à la fois ancien et nouveau : ancien, parce que c'est le christianisme de Jésus-Christ ; nouveau, parce que c'est celui du Saint-Esprit. Mais il faut expliquer et appuyer cette assertion par une étude attentive de notre texte.


I


« Il n'y a rien de pire, dit un proverbe, que l'abus de ce qu'il y a de meilleur. » En faisant à son Église de tous les temps cette magnifique promesse du Saint-Esprit, Jésus prévoit qu'on en tirera de fausses conséquences, qu'on attribuera au Saint-Esprit des idées, des doctrines, des tendances auxquelles il est complètement étranger. Pour prémunir ses disciples contre ces périls et ces séductions, il prononce cette parole étonnante : « L'Esprit de vérité ne parlera pas de lui-même. » Il en aurait le droit et le pouvoir, puisqu'il est l'Esprit de Dieu ; il s'en abstiendra, parce qu'il est l'Esprit de Christ. Il n'y aura de sa part nulle innovation absolue, nulle parole prétendue divine sans rapport et sans lien avec la Parole éternelle qui a habité en Jésus-Christ et qui s'est exprimée par sa bouche. Tout ce qu'il dira, tout ce qu'il donnera, sera puisé, non seulement dans la plénitude du Père, mais dans ; la plénitude du Fils. Il en résulte que la conformité avec l'enseignement de Jésus-Christ est la pierre de touche de tout enseignement authentique du Saint-Esprit : « L'Esprit prendra « de ce qui est à moi », et il vous l'annoncera. ?
Mais à quoi se reconnaîtra cette conformité ?

Comment s'exercera ce contrôle ? Y aura-t-il en tout temps, comme le veut l'Eglise romaine, un magistère de la vérité, un vicaire de Jésus-Christ qui discernera et prononcera souverainement entre les vraies et les fausses inspirations ? Certes, si Jésus avait pensé cela, c'était le moment de le dire. Or, il n'a rien dit de semblable, ni ici, ni ailleurs ; il a même dit expressément le contraire, puisqu'il a interdit à ses disciples d'avoir un autre maître que lui. Mais à ses apôtres, en tant que témoins fidèles de sa vie et de s'on oeuvre, il a dit : « Qui vous écoute, m'écoute ; qui vous rejette, me rejette. » Quand donc, pour savoir quelle est la pensée de Jésus-Christ, je consulte, non le pape, mais les apôtres, je ne fais qu'obéir à Jésus-Christ lui-même. Outre l'infaillibilité du pape, à laquelle je viens de faire allusion, il y a d'autres dogmes que Rome a apportés et inventés, tels que l'immaculée conception de la vierge et la vertu magique des sacrements. Il y a aussi des préceptes nouveaux, tels que l'abstinence des viandes à certains jours, et le célibat des prêtres. Ces innovations, que Rome prétend imposer à l'univers, de qui les a-t-elle apprises ? Est-ce de Jésus-Christ ? - Non, puisqu'il n'y en a pas un traître mot dans les Évangiles, ni dans les Épîtres, qui ne font allusion à quelques-unes de ces idées et de ces tendances que pour les combattre. J'en conclus que l'esprit qui inspira les doctrines et les prescriptions ajoutées à l'Évangile par l'Eglise romaine n'est pas le Saint-Esprit que Jésus a promis à ses apôtres, car ce n'est pas l'Esprit qui « prend de ce qui est à Christ pour l'annoncer aux hommes. »

Mais il y a aussi des innovations protestantes, ou en tout cas non-catholiques, qui doivent être écartées d'après la même règle. Le spiritisme a parmi nous des adhérents et des complaisants. Qu'y a-t-il de commun pourtant entre ces superstitions d'origine païenne, formellement condamnées par la loi et les prophètes (Deutér. XVIII, 11 ; Es. VIII, 19-20), souvent entachées et convaincues de supercherie, et la glorieuse révélation de Dieu en Jésus-Christ ? Entre les esprits et le Saint-Esprit, il faut choisir.

Le mormonisme a essayé de dresser ici sa tente. La polygamie, que cette communauté a ouvertement professée, et qu'elle pratiquerait encore si la loi civile ne s'y opposait, est-elle compatible avec la foi en Celui qui a proclamé avec tant de netteté et de rigueur la sainteté et l'inviolabilité du mariage ?

Nous avons vu de nos jours naître, grandir et mourir d'étranges sectes, occupées surtout d'exalter leurs fondateurs, dont l'un prétendait être le roi Salomon et l'autre le prophète Elie ; n'est-ce pas assez, pour juger de telles fantaisies, de constater qu'elles n'ont aucun fondement dans les Écritures ? Et n'y a-t-il pas lieu de déplorer cette aveugle soif de nouveautés qui entraîne tant d'âmes pieuses loin de la simplicité de l'Évangile ?

N'oublions pas toutefois qu'il est possible de s'en écarter, non seulement par voie d'addition, mais aussi par voie de retranchement. « L'Esprit de vérité me glorifiera », dit Jésus dans notre texte. S'il y a une direction de la pensée et de l'enseignement religieux qui semble avoir pris à tâche, moins de glorifier Jésus-Christ que de le diminuer, contestant ou obscurcissant tantôt la divinité de sa personne, tantôt la vertu de son sacrifice, tantôt l'autorité de sa parole, tantôt la vérité de sa résurrection, il n'est pas possible qu'elle procède du Saint-Esprit.

C'est d'un tout autre côté que nous discernons la trace et l'action de l'Esprit divin. C'est aux apôtres avant tout que s'adressait la promesse de mon texte, et c'est en eux et pour eux qu'elle s'est le plus admirablement réalisée. Leur témoignage au sujet de la personne et de l'oeuvre de Jésus-Christ, n'est pas un simple écho des paroles du Maître, mais il est avec celles-ci dans un accord profond qui me frappe tous les jours davantage, depuis soixante ans et plus que j'étudie le Nouveau Testament. Vous savez s'ils ont glorifié Jésus-Christ, on le leur reproche assez ! Qui leur a appris à le faire, si ce n'est le Saint-Esprit ? Je ne suis pas prêt à endosser pour mon propre compte, encore moins a imposer à qui que ce soit, les définitions théologiques, parfois si subtiles, arrêtées par les conciles des quatrième et cinquième siècles. Mais je ne puis méconnaître qu'à la base de tout ce travail de la pensée religieuse, il y avait un besoin de glorifier Jésus-Christ, qui venait certainement du Saint-Esprit.

Depuis lors, il y a eu, hélas ! il y a encore dans la vie de l'Eglise de longues périodes de sécheresse, de langueur, de sommeil. Mais toutes les fois que le Saint-Esprit la visite, la réveille et la vivifie, comme aux jours de la Réformation, ou à ceux de Wesley, en Angleterre, ou de nos jours encore, dans mainte contrée de l'Europe et dans tel champ de mission parmi les païens ; toutes les fois, dis-je, que le Saint-Esprit agit avec puissance, il remet en lumière les vérités qui constituent le fond commun de l'enseignement de Jésus-Christ et de celui des apôtres : la relation filiale de l'homme avec Dieu, le péché, le jugement, le pardon, la rédemption par Jésus-Christ, la vie éternelle. Il arme ces vieilles vérités d'une puissance nouvelle, et c'est par leur moyen qu'il convertit les âmes par milliers. 0 vous donc qui avec moi soupirez après un Réveil, ne l'attendez pas d'une autre source ni par une autre voie que celle-ci : le Saint-Esprit glorifiant Jésus-Christ ; le Saint-Esprit prenant de ce qui est à lui et nous l'annonçant ; le Saint-Esprit nous rappelant le vieil Évangile et l'appliquant à nos coeurs et à nos consciences avec la clarté et la vigueur des temps apostoliques.


II


Ainsi, tout enseignement qui nous est donné comme procédant du Saint-Esprit, s'il n'est pas d'accord avec l'enseignement de Jésus-Christ tel qu'il est écrit dans l'Évangile, est dépourvu de vérité. Mais, d'autre part (seconde vérité, seconde application de mon texte, qui complète la première), l'enseignement même de Jésus-Christ, sans le concours et l'intervention du Saint-Esprit, est dépourvu d'efficacité. Oui, si divines que soient la personne, la parole et l'oeuvre du Rédempteur, elles ne persuadent pas, elles ne sauvent pas, si elles ne sont pas interprétées et communiquées aux hommes par un témoignage divin comme elles, celui de l'esprit de vérité et de vie. « C'est lui qui prendra de ce qui est à moi et qui vous l'annoncera. » L'action du Saint-Esprit est donc indispensable.

Cette action s'exerce, tant sur le prédicateur de l'Évangile que sur ses auditeurs. À quel point le don du Saint-Esprit est nécessaire aux témoins de Jésus-Christ, c'est ce qu'on peut inférer de ce fait si remarquable, que Jésus, en quittant la terre, ordonna à ses disciples de ne pas s'éloigner de Jérusalem, mais d'y attendre, dans une inaction relative, ou plutôt en se livrant à la seule et féconde activité de la prière, qu'ils fussent « revêtus de la vertu d'en-haut. » Ces hommes, depuis la résurrection de Jésus-Christ, étaient établis pour toujours dans la foi ; leur coeur était plein du souvenir de leur Maître ; vraisemblablement, ils brûlaient de l'annoncer au monde et de le glorifier devant les hommes ; n'importe ! ils doivent garder le silence jusqu'à ce qu'ils aient reçu le Saint-Esprit. L'événement justifia cette suprême recommandation du Maître.

Avant la Pentecôte, les apôtres avaient déjà rendu témoignage à Jésus, mais il n'est pas question d'une seule conversion produite par leur parole ; le jour de la Pentecôte, il y en eut trois mille ! L'explication de cette différence, c'est d'un côté l'absence, de l'autre côté la présence du Saint-Esprit. Certainement, ce don divin n'est pas moins nécessaire aux prédicateurs actuels de l'Évangile qu'il ne l'était aux apôtres. Les connaissances et les talents qu'ils peuvent posséder, leur culture intellectuelle, littéraire et religieuse, leur bonne volonté, leurs efforts, leur orthodoxie, tout cela est insuffisant, tout cela est vain, s'ils n'ont pas le Saint-Esprit. Hélas ! faut-il chercher ailleurs la cause de la stérilité relative de notre ministère, de l'énorme disproportion qui existe entre le travail religieux accompli chaque dimanche et les résultats obtenus ? 0 Dieu, aie pitié de nous, tes pauvres et indignes serviteurs ! Et vous, mes frères, je vous en conjure, dans votre intérêt aussi bien que dans le nôtre, pour l'honneur de l'Évangile et pour l'avancement du règne de Dieu, priez notre Père céleste avec beaucoup plus de diligence, d'ardeur et de foi que vous ne l'avez fait jusqu'à ce jour, pour qu'il daigne baptiser vos pasteurs de son Saint-Esprit !

Mais demandez aussi le Saint-Esprit pour vous-mêmes, car il vous est nécessaire, et il vous est promis tout autant qu'aux apôtres et aux prédicateurs de l'Évangile, même s'il ne vous confère pas exactement les mêmes dons. Il est digne de remarque que, dans notre texte, Jésus s'adresse à ses disciples moins comme futurs prédicateurs que comme auditeurs ; car il ne leur dit pas : « Le Saint-Esprit annoncera « par vous » la vérité », mais : « Il « vous » l'annoncera. » Ainsi, ces hommes, qui avaient vécu trois ans dans l'intimité du Sauveur et qui savaient par coeur ses paroles, avaient encore besoin que tout cela leur fût rappelé, interprété, approprié, enseigné à nouveau par le Saint-Esprit. À plus forte raison cet enseignement intérieur nous est-il indispensable, à nous qui ne connaissons Jésus-Christ que par leur témoignage.

Aucune des vérités fondamentales de l'Évangile ne prend vraiment possession de nos âmes, jusqu'à ce que le Saint-Esprit nous l'ait personnellement appliquée et l'ait fait entrer en nous. S'agit-il de péché ? Tant que nous ne connaissons notre état de péché que par la lettre de la loi et même par celle de l'Évangile, nous nous reconnaissons, tant qu'on voudra, de pauvres pécheurs, mais nous en prenons assez facilement notre parti ; lorsque le Saint-Esprit nous convainc de péché, il nous jette tremblants, brisés, avides de grâce, au pied de la croix. - S'agit-il de la grâce de Jésus-Christ et du pardon qu'il nous apporte ? Nous pouvons admettre depuis longtemps que le Fils de l'Homme est venu chercher et sauver ce qui était perdu, tout en restant personnellement étrangers au salut ; le Saint-Esprit seul glorifie Jésus-Christ dans nos coeurs et nous approprie son amour et sa grâce, en sorte qu' « étant justifiés par la foi, nous avons la paix avec Dieu. » Il en est de même des autres vérités chrétiennes, par exemple des préceptes et des promesses de l'Évangile.
Tout cela, sans le Saint-Esprit, c'est comme un beau tableau que nous contemplons d'assez loin, non sans un mélancolique retour sur nous-mêmes. Par le Saint-Esprit, tout cela devient une réalité qui nous empoigne, une puissance qui nous affranchit, un idéal qui nous élève au-dessus de nous-mêmes. Le Saint-Esprit, et le Saint-Esprit seul, fait de la croyance traditionnelle une vivante certitude, de l'espérance vague une possession anticipée, du devoir un attrait, du renoncement une joie ; par lui, Dieu devient pour nous un Père dont l'amour nous environne et nous pénètre, Jésus-Christ un Sauveur toujours présent et qui sauve toujours. 0 Père ! tu as promis ton Esprit à ceux qui t'implorent ; tu vois que sans lui tous tes autres dons, même celui de ton Fils, seraient vains, qu'ils aggraveraient même notre responsabilité et notre jugement : donne-nous ton Saint-Esprit !


III


Toutefois, le Saint-Esprit ne se contente pas de rappeler et de vivifier des vérités anciennes ; il découvre aussi des vérités nouvelles, étroitement liées et apparentées aux anciennes, mais nouvelles en ce sens qu'elles n'étaient pas encore aperçues. C'est ce qui m'a permis de vous dire, au début de ce discours, que le vrai christianisme est à la fois ancien et nouveau. « J'ai encore plusieurs choses à vous dire, » dit Jésus à ses disciples, « mais elles sont présentement au-dessus de votre portée ; quand l'Esprit sera venu, il vous conduira dans la vérité tout entière. » Ces nouveautés, que le Saint-Esprit devait révéler ou plutôt découvrir aux apôtres, ce sont sans doute en première ligne la vocation des païens au salut et l'abrogation de la loi de Moïse : vérités qui nous paraissent aujourd'hui clairement contenues dans l'enseignement du Sauveur, mais, que les apôtres, en raison de leur éducation juive, n'ont pu comprendre et accepter qu'à la longue, sous la direction et la discipline du Saint-Esprit. Ainsi chaque époque a sa leçon à apprendre et ses découvertes à faire. Si le christianisme est la religion de l'humanité, il faut qu'à mesure que celle-ci s'instruit et progresse, il reçoive des applications plus étendues, il tire de son sein (et non pas d'ailleurs) des réponses nouvelles aux nouvelles questions qui surgissent.

Faut-il indiquer quelques-unes de ces nouveautés relatives et légitimes de notre époque, qui me paraissent procéder du Saint-Esprit et qui se justifient par leur harmonie avec l'Évangile ancien et écrit ?

On insiste aujourd'hui avec raison pour que les doctrines ou les croyances ne soient pas seulement appuyées par une autorité extérieure, mais brillent de leur propre lumière et surtout se recommandent par leur vertu et leur efficacité morale. On a appelé cela le pragmatisme : système vrai, s'il est bien compris, excellente pierre de touche, enseignement du Saint-Esprit par conséquent, mais qui n'est qu'un écho de la maxime de Jésus : « Vous connaîtrez l'arbre à ses fruits. »

On veut un christianisme large, compréhensif, qui ne soit pas inféodé à une secte particulière ni a un credo étroit ; qui soit ouvert à tous les hommes de bonne volonté ayant franchement accepté Jésus pour leur Maître. C'est bien le Saint-Esprit, je crois, qui nous pousse dans cette voie ; mais il ne fait que tendre à la réalisation du voeu et de la prière suprêmes de Jésus-Christ : « Qu'ils soient un, comme nous sommes un. »

Nouvelle extension de la même tendance : on est plus que jamais préoccupé, passionné de solidarité humaine ; on ne peut se faire à l'idée que la majorité de notre race resterait à jamais exclue du royaume de Dieu ; on aspire au salut de l'humanité ; n'est-ce pas l'Esprit de Jésus-Christ qui nous inspire ces généreuses ambitions ? Jésus n'a-t-il pas solennellement déclaré que Dieu n'a pas envoyé son Fils pour juger le monde, mais pour le sauver ?

Surtout, (c'est la grande nouveauté contemporaine) on parle beaucoup de christianisme social ; on ne consent pas à ce que tout l'effet de la rédemption et tout l'accomplissement des promesses divines soit renvoyé à une économie future. On demande que, comme aux jours où Jésus était sur la terre, les corps aussi bien que les âmes bénéficient de son salut ; que chacun ait désormais le droit et la possibilité de vivre d'une vie complètement humaine et par conséquent d'une vie chrétienne; que l'aurore d'un jour nouveau et meilleur se lève pour les déshérités et pour les souffrants; en un mot que le royaume de Dieu commence ici-bas. Qui a dicté ce programme, qui insiste sur ces revendications, si ce n'est l'Esprit de Celui qui annonçait la bonne nouvelle aux pauvres, qui nous a appris que la vraie grandeur consiste à servir; qui nous a commandé de prier avant tout pour que le règne de Dieu vienne et pour que sa volonté soit faite sur la terre? Livrons donc nos âmes à ces souffles de l'Esprit; recevons, non seulement avec docilité, mais avec enthousiasme, ce qu'il nous annonce et nous apporte de nouveau de la part du Fils.

Tous les trésors de la sagesse étant caché en Jésus-Christ, l'Esprit de vérité pourra y puiser jusqu'à la fin des temps sans les épuiser. L'Eglise fidèle est semblable à un arbre planté dans le sol et qui y plonge toujours plus avant ses racines; la sève qu'il en reçoit lui permet de s'élever vers le ciel, d'étendre au loin ses rameaux, de se couvrir de fruits en leur saison. Le sol qui porte l'arbre, c'est la révélation de Dieu en Jésus-Christ; son accroissement en hauteur et en largeur, c'est l'avancement du règne de Dieu; ces fruits, ce sont les oeuvres chrétiennes, individuelles et collectives; ce sont les progrès intellectuels, moraux et sociaux ; la sève qui monte du sol et qui circule dans les branches, c'est le Saint-Esprit.

Amen.

Nîmes, Grand-Temple, 19 mai 1912.

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