Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

LE SERPENT D'AIRAIN.

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Comme Moïse éleva le serpent dans le désert, de même il faut que le Fils de l'homme soit élevé, afin que quiconque croit en lui ait la vie éternelle. (Jean III, 15 ; Nombres XXI, 4-9.)

Comme l'entretien de Jésus avec Nicodème appartient aux tout premiers temps de son ministère, la parole que nous allons méditer est la première, pour autant que nous le savons, où le Sauveur ait fait allusion à sa mort, en ait prédit la nature, en ait expliqué le but. Selon son habitude, il se sert de comparaisons, mais il sait toujours les approprier aux circonstances où il se trouve et à l'état d'esprit de ceux auxquels il s'adresse. Plus tard, à la fête des Tabernacles, en présence de la multitude, ayant peut-être sous les yeux des bergers qui rentraient des champs avec leurs troupeaux, il empruntera des images à ce métier, le plus ancien et le plus populaire de tous, en Israël, puisque Abraham, Moïse et David étaient des bergers : « Le bon berger donne sa vie pour ses brebis. » - Au lendemain de la multiplication des pains, il dira : « Je suis le pain de vie, ma chair est vraiment une nourriture, mon sang est vraiment un breuvage. » Et, au moment du dernier repas qu'il prendra avec ses disciples, il traduira cette même comparaison par un acte symbolique, l'institution de la Sainte Cène.

Aujourd'hui, c'est à un docteur en Israël qu'il parle, nourri des saintes lettres ; il aura donc recours à un type emprunté à l'Écriture, à l'histoire du peuple de Dieu, celui du Serpent d'airain. De cette diversité même des figures et des allégories, ressort avec force l'unité de la pensée qu'elles recouvrent : l'importance suprême que Jésus attache à sa mort, la relation directe et étroite qu'il établit entre cette mort et notre salut. C'est le sujet qui s'impose à nous en ce Vendredi-Saint. Dans l'intelligence d'une vérité à la fois si fondamentale et si haute, qui pourra mieux nous servir de guide que Jésus-Christ lui-même, Jésus-Christ qui se présente à nous, dans notre texte, comme étant tout ensemble le prophète et l'interprète de sa mort ?


I


Transportons-nous par la pensée au milieu des circonstances dont Jésus évoque le souvenir. Nous sommes à la quarantième année du voyage des enfants d'Israël dans le désert. La génération qui, à l'âge adulte, était sortie d'Égypte avec Moïse, achève de disparaître. Pourtant, c'est toujours le même peuple, je veux dire le même esprit, la même disposition au murmure et à la révolte. Obligés de faire un long circuit pour contourner le pays d'Edom avant d'entrer en Palestine, les Hébreux se plaignent des ennuis et des fatigues de la route ; ils sont dégoûtés de la manne, ils reprochent à l'Éternel jusqu'à ses bienfaits.

Soudain, un cri s'élève, non plus de colère, mais d'effroi. Des serpents ont envahi le camp. L'historien sacré les appelle « serpents brûlants » : allusion probable à l'inflammation causée par leur morsure. On essaie de se défendre, c'est inutile, ils sont trop ! Pour un reptile qu'on tue, il en surgit dix autres, et cela de toutes parts. Leur venin est mortel : beaucoup de blessés ont déjà succombé ; d'autres se tordent dans les affres de l'agonie. Si ce fléau dure, c'en est fait du peuple. Il n'y a plus qu'un espoir, qu'une ressource : la miséricorde de Dieu. Israël donc invoque avec des cris et des larmes ce Dieu contre lequel il blasphémait tout-à-l'heure : tel est le coeur de l'homme. Et Dieu se laisse fléchir ; Dieu offre à son peuple un moyen de salut : tel est le coeur de Dieu.

Avant d'aller plus loin, mes frères, faisons un retour sur nous-mêmes. Nous aussi, nous appartenons, par notre naissance et par notre baptême, au peuple de Dieu. Nous aussi, si l'on regarde aux desseins de Dieu à notre égard, aux promesses qu'il nous a faites et à celles que nous lui avons faites à notre tour, nous sommes sortis de cette Égypte qui s'appelle le monde et en route vers la terre promise, je veux dire vers le royaume de Dieu. Nous aussi, nous traversons plus d'un désert et, en chemin, nous avons été mordus par des serpents. Vous savez que Satan, l'ennemi de nos âmes, la personnification du mal, est souvent comparé dans l'Écriture à un serpent ; il en a la malice, l'approche insensible, la ruse et le venin. Et comme, au désert, il y avait beaucoup de serpents brûlants, ainsi il y a plusieurs tentations, plusieurs convoitises, plusieurs formes de péché qui nous ont assaillis et vaincus.

Il y a le serpent de la sensualité, qui s'insinue sans se faire craindre, qui séduit avec une habileté perfide et déguise sa morsure sous une caresse. Il y a le froid serpent de l'avarice, qui glace et paralyse le coeur. Il y a le serpent de la colère et de la haine, qui inocule aux veines de sa victime le feu de la géhenne. Il y a le serpent de l'incrédulité, qui oppose ses sifflements aux affirmations de la parole de Dieu.

Il n'y a personne parmi nous qui n'ait été mordu par quelqu'un de ces serpents ou par plusieurs. La lutte que nous essayons de soutenir contre eux par nos propres forces est, malgré tel succès partiel, sans espérance et sans issue, comme celle des Hébreux contre les reptiles du désert. Ils ont cela de commun que la blessure qu'ils infligent est mortelle.

Le péché attire même sur nous une double mort : la mort pénale, comme nous le confessons chaque dimanche, c'est-à-dire la condamnation de Dieu, et la mort morale, c'est-à-dire la corruption et la destruction de l'âme faite à son image. Et, comme les Israélites se sentaient responsables du malheur qui les frappait et qui le juste châtiment de leur révolte, ainsi le douloureux sentiment de notre misère et de notre impuissance morale est aggravé par la conviction de notre culpabilité. Oh ! si seulement cette conviction était plus générale et plus profonde ! Si nous soupirions après le pardon et l'affranchissement de l'âme aussi ardemment que nous désirons la guérison quand nous sommes malades ! Si nous étions, comme alors, empressés à suivre les avis du médecin, à nous soumettre à toutes les privations et à tous les renoncements qu'il juge nécessaires ! Si j'avais sous les yeux dans ce temple, comme Moïse au désert, une multitude éplorée, suppliante et altérée de grâce !

Réveillez-vous de votre sommeil, mes bien-aimés frères. Le chef-d'oeuvre de l'ennemi, c'est de vous mettre au point d'ignorer votre mal et même de l'aimer. Quand on est membre du peuple de Dieu, héritier de sa promesse, est-il un malheur plus grand que celui de mourir dans le désert et, par conséquent, comme s'exprime un apôtre, de ne jamais entrer dans le repos, de ne pas voir la terre promise, le pays du salut ? C'est le danger qui nous menace ; mais Dieu ne veut pas que nous y succombions, Dieu nous a donné un Sauveur. Écoutez la suite.


II


L'Éternel dit à Moïse : « Fais-toi un serpent brûlant et place-le sur la bannière. »
Il s'agit, je crois, de cette verge d'airain qui, tenue haut et ferme par la main de Moïse, avait fendu les eaux de la Mer Rouge et mis en déroute les Amorrhéens. « Quiconque aura été mordu et regardera au serpent conservera la vie. »

Moïse donc fit un serpent d'airain et le plaça sur la bannière, et la parole de Dieu s'accomplit. Nous nous représentons la nouvelle de l'ordre donné à Moïse se répandant avec la rapidité d'un télégramme, d'un bout à l'autre du camp. De tous côtés on accourt ; ceux qui ne peuvent pas courir se traînent ou sont portés par leurs amis. La bannière où est suspendu le serpent d'airain est placée au centre, en un lieu élevé, afin que tous puissent l'apercevoir. Le mourant réunit ses dernières forces pour contempler le signe du salut, la mère soulève dans ses bras son enfant blessé, ouvre sa paupière alourdie, dirige presque de force ses regards vers la bannière. Une vertu mystérieuse en émane : à mesure qu'ils regardent, les malades se sentent renaître ; leur sang, qui était comme figé, recommence à circuler librement dans leurs veines ; la chaleur de la vie succède au froid de la mort. Bientôt les reptiles s'enfuient et disparaissent comme par enchantement ; le serpent d'airain, le bon serpent, a vaincu ses malfaisants congénères ; une fois de plus, Dieu a délivré son peuple ; Israël est sauvé. En tout cela, Jésus voit une image de la mort qui l'attend, du salut qu'elle apporte, et de la foi par laquelle nous devenons participants de ce salut.

Qu'y a-t-il donc de commun entre Jésus crucifié et le serpent d'airain ? Notre texte ne relève expressément qu'un trait : l'un et l'autre sont élevés, l'un sur la bannière d'Israël, l'autre sur le bois de la croix. Le genre de mort que subit Jésus a donc quelque chose de providentiel, quelque chose qui intéresse directement notre foi. Il ne convenait pas qu'il fût lapidé, comme Étienne. D'autre part, une idée d'opprobre s'attachait à la croix. Chez les Romains, c'était un supplice réservé aux esclaves ; chez les Juifs, la loi qualifiait de maudit celui qui pend au bois. Il a fallu que Jésus, s'offrant en sacrifice pour le péché du monde, fût obéissant, non seulement jusqu'à la mort, mais jusqu'à une mort exceptionnellement cruelle et réputée infâme, celle de la croix. D'autre part, ce genre de mort exposait la sainte victime, suspendue entre le ciel et la terre, non seulement à la contemplation matérielle des témoins immédiats de son supplice, qui l'insultaient et se moquaient de lui, mais à la contemplation idéale de la postérité, qui l'admire et qui l'exalte, et des futurs croyants, qui l'adorent. Ainsi l'opprobre se change en gloire. Jésus l'attendait, Jésus l'a prédit. Quand il parle à plusieurs reprises de son élévation, on discerne aisément qu'il ne pense pas seulement à son élévation sur la croix, mais aussi à son élévation au ciel, et que la première est pour lui l'image, le moyen et comme le premier degré de la seconde.

D'autres analogies entre Jésus et le serpent d'airain se découvrent cependant à notre attention religieuse. Ce n'est pas sans dessein que Dieu proposa ce spectacle aux enfants d'Israël comme moyen de guérison, non pas une image quelconque, par exemple celle d'un ange libérateur ou d'un animal destructeur des serpents, mais un serpent qui est appelé, lui aussi, un serpent brûlant. Nous approcherons peut-être de la signification de ce symbole, en remarquant que Moïse aurait pu montrer aux Israélites, comme un trophée, le corps d'un serpent tué. Mais ce n'était pas la défaite et la destruction d'un seul serpent qu'il fallait attester ou prophétiser, c'était celle de toute la race. C'est pourquoi Moïse prend un serpent type, un serpent d'airain. Entre ce serpent-là et les reptiles venimeux, il y avait tout à la fois analogie et contraste : analogie quant à la forme, contraste pour le fond, car le serpent d'airain était un serpent sans venin, innocent, bienfaisant même, qui guérissait les blessures que faisaient les autres, et donnait la vie tandis que ceux-là donnaient la mort.

Il y a une relation du même genre entre Jésus et les pécheurs, que dis-je ? entre Jésus et le péché même. À le voir suspendu à la croix, abreuvé d'outrages qu'on épargne à tout autre supplicié, on pourrait croire que c'est le plus grand des criminels. Saint-Paul va plus loin, il déclare que Jésus a été fait péché et malédiction pour nous, c'est-à-dire traité à notre place et pour notre salut, comme s'il était le plus grand des pécheurs ou plutôt le péché même. Ainsi le serpent d'airain fut érigé en trophée, comme si c'était le corps d'un serpent tué et voici, c'était l'instrument du salut.

Plusieurs paroles de l'Écriture sainte confirment cette pensée et proclament, sans l'éclairer entièrement, ce mystère d'amour et de grâce ; par exemple celle-ci du second Esaïe : « L'Éternel a fait venir sur lui (le serviteur de l'Éternel) l'iniquité de nous tous », et celle-ci de l'épître de Pierre :
« Il a porté nos péchés en son corps sur le bois, afin qu'étant morts au péché, nous vivions à la Justice ». Mais, à côté des analogies que nous avons signalées entre Jésus et le serpent d'airain, quelle différence immense, quel contraste absolu nous frappe ! J'ai appelé le serpent d'airain un instrument de salut ; il l'était en vérité. Mais c'était un instrument inconscient, ce n'était, après tout, qu'un morceau de métal ; c'est à Dieu seul, qui avait trouvé bon de s'en servir, qu'appartenaient la louange et l'action de grâce. Certes, notre suprême reconnaissance remonte aussi au Dieu qui nous a donné son Fils ; mais elle s'attache également à Jésus-Christ lui-même. Car il est, lui, le Fils de l'homme, c'est le nom qu'il aimait à se donner et qu'il se donne dans notre texte même ; il avait, il a encore un coeur d'homme pour aimer et pour souffrir. Étant le Saint de Dieu, pouvant réclamer la félicité et la gloire qui sont le fruit et la récompense de la sainteté, c'est volontairement qu'il s'est assimilé à nous, qu'il a pris notre place pour nous donner la sienne, qu'il s'est chargé de nos péchés pour nous rendre participants de sa justice, qu'il a enduré en son corps des souffrances et en son âme des détresses que nous ne pouvons sonder, pour nous délivrer de la condamnation que nous, avions méritée et pour nous ouvrir le ciel. Israël conserva longtemps le serpent d'airain, probablement dans le lieu saint, et se laissa entraîner, comme si tout devait lui devenir une occasion de péché, à lui offrir un encens idolâtre ; mais nous, nous ne risquons pas d'aller trop loin en faisant à notre serpent d'airain, à notre Sauveur, une place d'honneur dans le sanctuaire de nos coeurs, en l'aimant et en le bénissant comme nous aimons et comme nous bénissons le Père qui nous l'a donné.


III


Il y a, entre le serpent d'airain et le Sauveur crucifié, un autre point de comparaison que notre texte suggère, dont nous avons déjà dit un mot, mais sur lequel il faut maintenant insister. Quiconque regardait le serpent d'airain était guéri ; quiconque croit en Jésus-Christ est sauvé. La foi est un regard du coeur. Jésus lui-même nous le fait entendre dans ce passage très semblable, au nôtre : « Quiconque contemple le Fils et croit en lui, a la vie éternelle ». En quoi consiste ce regard du coeur, quelle en est la nature et la vertu ? c'est ce que l'image contenue dans notre texte est merveilleusement propre à nous faire comprendre.

Transportons-nous une fois de plus dans le désert où périssent les Israélites. Y en avait-il qui se condamnaient à périr, en effet, en refusant de regarder ? Y avait-il des raisonneurs qui disaient : « Quand vous m'aurez expliqué le rapport qui existe entre la contemplation d'un morceau de métal et la guérison d'une blessure, je regarderai » ? Y avait-il des esprits abusés qui aimaient mieux croire les fausses promesses d'un sorcier ou d'un charlatan que la parole de Dieu ? Y avait-il des désespérés qui ne cessaient pas de regarder à eux-mêmes, de tenir leurs yeux baissés sur leurs plaies et de dire : « Mon cas est trop grave, c'est trop tard » ? - Je ne sais. En tous cas, dans l'application, lorsqu'il s'agit du salut de l'âme et des promesses de l'Évangile, toutes ces variétés morales existent, tous ces obstacles à la foi et à la conversion ne sont que trop réels.

Mais venons à ceux qui étaient plus raisonnables et plus heureux. Beaucoup d'Israélites regardaient. Il y avait de la diversité entre eux : les uns étaient loin et les autres étaient près ; les uns, plus valides, voyaient distinctement le signe du salut ; les autres, presque mourants, l'apercevaient à peine, comme une ombre flottant dans l'immensité des cieux. Pourtant, quant au fond, quant à l'esprit, tous ces regards se ressemblaient ; toute l'âme des pauvres blessés y passait, s'y exprimait ; je vois s'y peindre la douleur, la confusion du péché, la supplication, la confiance, l'espérance. Chacun de ces regards signifiait : « 0 Dieu ! sans toi je suis perdu, justement perdu ; mais, puisque tu as trouvé bon de faire grâce, puisque tu as mis devant nous un moyen de salut, permets que j'y aie part, moi aussi, le plus coupable et le plus misérable de tous ; vois, je viens à toi, je t'invoque, je regarde comme je peux ! »

O merveille ! le regard le plus languissant, aussi bien que le plus intense, attirait, obtenait la guérison et se fortifiait ainsi à mesure qu'il se prolongeait. Tel est le regard de la foi.

Peut-être, mes frères, plusieurs d'entre vous ne sont-ils pas au clair sur la doctrine de la rédemption et trouvent-ils que l'expiation des péchés de l'humanité par le sacrifice d'un juste est obscure et difficile à admettre. N'importe ! « Avec mes doutes et mes chutes, Jésus je viens à toi ! »

Plusieurs aussi ne trouvent en eux-mêmes que des sujets de tristesse et de découragement leur foi est si faible ! leur repentance si froide leur expérience religieuse si pauvre ! N'importe ! Quiconque regardait, était guéri. La gravité et la profondeur de notre mal ne sauraient constituer une bonne raison pour refuser de nous adresser au seul médecin infaillible, de recourir au seul remède efficace. Vos aveux le prouvent, mon frère, vous avez quelque sentiment, quelque connaissance du moins, de votre misère morale et de votre état de péché ; vous avez éprouvé que vous ne pouvez pas vous guérir vous-même, c'est-à-dire procurer la paix à votre conscience, la pureté à votre coeur, la force à votre volonté. Vous savez qu'il n'y a pas d'autre Sauveur, pas même de prétendu Sauveur, que Jésus-Christ, et que beaucoup d'âmes, dans le présent comme dans le passé, ont trouvé et trouvent tous les jours auprès de lui la guérison.

Vous n'ignorez pas, enfin, que l'essentiel de son oeuvre rédemptrice, la divine vertu, comme la divine folie de l'Évangile, réside dans la croix. Vous en savez donc assez pour regarder à lui, en ce jour anniversaire de sa mort, où sa croix est comme dressée au milieu de nous. Pauvres blessés du désert, pauvres victimes du serpent ancien, pauvres condamnés à mort, le serpent d'airain est là, devant vous, regardez ! Regardez comme regardaient les Israélites mordus par les serpents, avec humilité, avec supplication, avec larmes, avec persévérance aussi, jusqu'à ce que vous obteniez ou que vous retrouviez le pardon de vos péchés, jusqu'à ce que vous ayez la paix avec Dieu, jusqu'à ce que vous sentiez naître et se former en vous la vie nouvelle qui est le commencement de la vie éternelle.

Regarde, âme angoissée, au mourant du Calvaire, Regarde au Christ sur la croix élevé ; C'est là qu'est ton Sauveur. contemple-le, mon frère, Un seul regard, et sois sauvé !

Charles Spurgeon, le prédicateur anglais qui, au XIXme siècle, a joui de la plus grande célébrité, était un tout jeune homme ayant des habitudes religieuses, mais encore inconverti, lorsqu'un certain dimanche d'hiver il voulut se rendre à l'église, une église anglicane qu'il fréquentait. Le temps était si mauvais, la neige si abondante, qu'il ne put aller jusque-là. Passant devant une petite chapelle méthodiste, il eut l'idée d'entrer. Le pasteur était absent, les fidèles en fort petit nombre ; c'était un ancien qui présidait le culte. Il parlait sur un texte emprunté à la seconde partie d'Esaïe : "Vous tous les bouts de la terre, regardez à moi, et soyez sauvés ! » C'était l'Évangile que nous avons annoncé aujourd'hui, l'Évangile du serpent d'airain. Il n'y avait pas beaucoup de variété ou d'abondance dans les idées du prédicateur, mais il avait une voix de stentor, une conviction robuste, un coeur chaud : « Regardez ! s'écriait-il... C'est une chose simple, il n'y a pas d'enfant qui ne puisse le faire ». Tout-à-coup, frappé par l'expression de Spurgeon, il s'adresse à lui personnellement : « Jeune homme, vous n'avez pas l'air heureux, c'est sans doute que vous n'avez pas encore regardé au Sauveur. Regardez aujourd'hui, regardez ! » - « Et je regardai, raconte Spurgeon, et je rentrai chez moi, sauvé, converti. » Cette matinée de dimanche fut le point de départ, non seulement d'une vie chrétienne fidèle, mais d'un ministère merveilleusement fécond, qui gagna à Dieu bien des milliers d'âmes. Jeune homme ou jeune fille qui m'écoutez, qui sait ce que Dieu fera de vous, si en ce matin de Vendredi-Saint, vous regardez de tout votre coeur, comme Spurgeon, à celui qui a dû être élevé sur la croix, afin que quiconque croit en lui ait la vie éternelle !

Amen.

Nîmes, Oratoire, Vendredi Saint, 17 avril 1908.

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