Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

V. CHRIST DANS LES PROPHÈTES

III. JÉRÉMIE

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Dieu choisit, pour son oeuvre, des instruments imprévus. Il fit choix du timide et tremblant Jérémie pour ce qui paraissait une mission vouée à l'insuccès, par ces mots : « Ne dis pas : je ne suis qu'un enfant. Car tu iras vers tous ceux auprès de qui je t'enverrai et tu diras tout ce que je t'ordonnerai. Ne les crains point, car je suis avec toi pour te délivrer ». (Jér. 1 : 7-9). Et Jérémie se montra digne de cette confiance. Quoique son coeur fût brisé par les dures menaces qu'il eut à prononcer et par l'entêtement du peuple à les rejeter ; quoique, souvent, il criât sa plainte à Dieu et allât même jusqu'à dire qu'il ne parlerait plus en son Nom, cependant, nous ne le voyons jamais en dehors du chemin du devoir. Mis en prison, à maintes reprises, descendu par des cordes dans une citerne boueuse - raillé, méprisé (20 : 7), « un homme de dispute et de querelle dans tout le pays » (15 : 10), accusé de trahison envers son peuple (38 : 4), contredit par les prophètes (23 : 28), en face d'un peuple en colère qui en voulait à sa vie ; emmené contre son gré, par ses compagnons, en Égypte (43 : 1-7) - dans toutes ces épreuves, Jérémie persévéra à délivrer son message avec une fidélité inébranlable pendant plus de quarante ans.

Il prophétisa dix-huit ans sous le règne de Josias ; puis, sous celui de quatre rois de Juda, jusqu'après la prise de Jérusalem et la fin du royaume. Il vivait donc environ cent ans plus tard que le prophète Esaïe. Il habitait le village d'Anathoth, à quelques milles au nord de Jérusalem, et il était prêtre de naissance. Il est possible, quoique non certain, que son père, Hilkija, fut le grand Sacrificateur qui découvrit le Livre de la Loi dans le Temple, sous le règne de Josias. En tous cas, cette découverte eut un effet aussi marqué sur le ministère du jeune prophète, que sur la conduite du jeune roi. Sans doute Jérémie fortifia la décision de Josias dans l'accomplissement de son oeuvre de réforme et contre l'alliance égyptienne. Quoique Jérémie eût beaucoup d'ennemis, Dieu lui donna de véritables amis, depuis le roi Josias jusqu'à Ebed-Mélec, l'Éthiopien qui le délivra de la prison.

SON COURAGE.
- La hardiesse de Jérémie, en face du danger, est particulièrement évidente au chap. 26, où le Seigneur l'envoie délivrer son message dans le parvis du Temple et l'adjure de n'en pas retrancher un seul mot. Le peuple et les prêtres devinrent si furieux qu'ils le saisirent en disant : « Tu mourras ! ». « Pour moi », répliqua le prophète, « je suis entre vos mains ; traitez-moi comme il vous semblera bon et juste. Seulement, sachez que si vous me faites mourir, vous vous chargez du sang innocent, vous, cette ville et ses habitants ; car l'Éternel m'a véritablement envoyé vers vous pour prononcer à vos oreilles toutes ces paroles ».

TROIS GRANDS ÉVÉNEMENTS.
- Il y a trois grands événements dans la vie de ce prophète :

1) La bataille de Méguiddo, entre Juda et Pharaon Nécho, où le bon roi Josias fut tué ; il fut profondément regretté par son peuple ; Jérémie composa une Lamentation à son sujet.

2) La bataille de Carkémis, près du même endroit, quatre ans plus tard, sous le règne de Jéhojakim, qui était devenu vassal de l'Égypte. Dans cette bataille, les Égyptiens furent complètement défaits par les forces babyloniennes sous Nébuchadnetzar, et cette défaite fut suivie par la déportation des Juifs à Babylone.

3) Le troisième grand événement fut la prise de Jérusalem par Nébuchadnetzar, la destruction de la ville et du temple, et l'exil de la plus grande partie du reste du peuple à Babylone.

Ce fut dans des temps aussi troublés que. Jérémie vécut. La vie de la nation, depuis les jours de Manassé, le grand-père de Josias, était extrêmement corrompue. Les réformes de Josias semblaient n'avoir atteint que la surface des choses, et cela, même temporairement ; après sa mort, le peuple retomba dans les pires formes de l'idolâtrie et dans toutes sortes d'injustices. La mission de Jérémie avait pour but de les ramener à leur Dieu. Pendant le règne de Josias il commença à prophétiser l'épouvantable calamité qui les menaçait du côté du nord s'ils ne se repentaient pas. Le salut de Juda était encore possible, mais, chaque année, sa culpabilité devenait plus grave et sa perte plus certaine.

L'Éternel suscita Nébuchadnetzar pour exécuter son jugement sur Juda. Il lui donna un pouvoir universel et l'appela même « mon serviteur ». C'était parce que Dieu avait révélé ceci à Jérémie que nous le voyons recommander la soumission à Nébuchadnetzar, et c'est pour cela que son peuple l'accusa de trahison. Après la destruction de Jérusalem, Jérémie eut à choisir entre aller à Babylone ou demeurer avec la petite minorité encore dans le pays. Suivirent les jours d'obscurité. Jérémie exhorta le peuple à obéir à la voix de l'Éternel, à rester dans le pays, à ne pas fuir en Égypte. Mais ils refusèrent d'obéir et emmenèrent de force Jérémie avec eux en Égypte où, d'après la tradition, il mourut lapidé.

LA FABRICATION DES BRIQUES EN ÉGYPTE.
- Lorsque Johanan et le chef des capitaines refusèrent d'obéir à la voix de l'Éternel par Jérémie et s'entêtèrent à aller en Égypte avec le reste de Juda - hommes, femmes et enfants, y compris les filles du roi, - ils arrivèrent à Tachpanès. Sur l'ordre de l'Éternel, Jérémie prit de grandes pierres et les cacha dans l'argile du four à briques, qui était à l'entrée de la maison de Pharaon, et prophétisa que sur ces pierres, Nébuchadnetzar placerait un jour son trône et déploierait son pavillon royal. Le Dr Flinders Petrie a découvert « le palais de la fille du Juif » à Tachpanès. Cette ville semble avoir été une vieille forteresse sur la frontière syrienne, gardant la route d'Égypte et servant évidemment de refuge continuel aux Juifs. Devant le fort, on voit une grande plateforme, ou pavé en briques, pour des travaux extérieurs tels que le chargement des marchandises, l'établissement des tentes, etc., exactement ce qu'on appelle aujourd'hui une mastaba. Le Dr Petrie dit - « Jérémie parle de la « tuilerie » (v. S.) qui est à l'entrée de la maison de Pharaon à Tachpanès ; ce passage, qui est toujours resté inexpliqué et d'une difficulté insurmontable aux traducteurs jusqu'ici, est la description exacte de la mastaba que j'ai trouvée, et c'est bien là l'endroit le plus vraisemblable où Nébucadnetsar a pu vouloir planter sa tente royale, comme le dit Jérémie ». (1).

LE COEUR.
- « Jérémie fut, de tous les prophètes de l'Ancien Testament, le suprême messager de Dieu au coeur humain. En temps et hors de temps, toute sa vie il fit le siège du coeur de ses auditeurs. « Le remède à toutes vos famines », leur criait-il, « à toutes vos pestes, à toutes vos défaites, à toutes vos captivités - la cause et le remède de tout cela est dans votre propre coeur : dans le coeur de chaque habitant de Jérusalem et de chaque captif à Babylone ». (2).

C'est à Jérémie que fut confiée la tâche ingrate d'essayer à la onzième heure de ramener le peuple. Il prophétisa les soixante-dix ans de servitude des Juifs à Babylone, les suppliant de se résigner à vivre dans cette ville et à racheter sa paix. Il prophétisa avec une égale assurance la restauration de son peuple et l'inaltérable amour de Dieu à son égard. Au moment du siège de Jérusalem, et du fond de sa prison, Jérémie, sur l'ordre de l'Éternel, acheta un champ de son cousin Hananéel, comme preuve qu'Israël reviendrait dans sa patrie.

PRÉDICTION.
- Les chapitres 1 et 2 font un tableau de l'avenir de Babylone. Ceux qui nient le miracle de la prédiction prophétique nient, pour la même raison, que ces chapitres aient été écrits par Jérémie. Ils voient en eux l'oeuvre d'un disciple du prophète et habitué à sa phraséologie, oeuvre écrite, prétendent-ils, peu avant la chute de Babylone. Pour combattre cette théorie, nous avons les deux faits suivants :

1) Même ceux qui nient que Jérémie soit l'auteur, admettent que le style de ces deux chapitres présente tous les caractéristiques du style original de ce prophète.

2) Ces deux chapitres, en particulier, portent une marque authentique, plus personnelle que n'importe quelle autre portion du livre ; le chapitre 50 commence ainsi : « La parole que l'Éternel prononça sur Babylone par Jérémie, le prophète », et le chapitre 51 se termine par ces mots : « Jusqu'ici sont les paroles de Jérémie ». Or, suspecter l'identité de l'auteur, c'est suspecter la valeur morale de ces chapitres.

3) Le fait de placer la prophétie au temps où la prise de Babylone par Cyrus était prévue, n'annule pas le miracle de la prédiction, car un grand nombre des détails qu'elle contient ne s'accomplirent que cinq siècles plus tard. Au moment de la conquête, les murs ne furent pas renversés ; ni le semeur, ni le moissonneur ne furent retranchés de Babylone ; la ville ne fut pas évacuée par sa population ; et la désolation extrême décrite dans ces deux chapitres ne se réalisa pas alors, mais seulement longtemps après, et à la lettre.

SACRIFICES. - Dans Jérémie 7 : 22, 23, nous lisons : « Je n'ai point parlé avec vos pères et je ne leur ai donné aucun ordre, le jour où je les ai fait sortir du pays d'Égypte, au sujet des holocaustes et des sacrifices ; mais voici l'ordre que je leur ai donné : « Écoutez ma voix ». Ces paroles ne sont pas en opposition avec l'histoire, telle qu'elle nous est rapportée dans le Pentateuque, ni une preuve, comme quelques-uns le prétendent, que le « Code lévitique » n'existait pas aux jours de Jérémie. Cette phrase est une façon de parler, dont on trouve de fréquents exemples dans l'Ancien et le Nouveau Testament comme les savants l'ont fait remarquer à maintes reprises. Cette forme littéraire consiste grammaticalement en ceci : une négation, suivie généralement, quoique pas toujours, par une particule adversative, le plus souvent la conjonction « mais », cesse fréquemment d'être une négation et devient une forme de comparaison. Par exemple : « Car j'aime la piété et non les sacrifices, et la connaissance de Dieu plus que les holocaustes ». (Osée 6 : 6). « Ce n'est pas vous qui m'avez envoyé ici, mais Dieu. » (Genèse 45 : 8). Ces paroles de Joseph ne contredisent en aucune façon le fait historique que c'étaient ses frères qui l'avaient envoyé. « Ce n'est pas contre nous que vous murmurez, mais c'est contre l'Éternel. » (Exode 16 : 8). Ceci veut dire plus contre Jéhova que contre Moïse et Aaron. De même, « Ce n'est pas toi qu'ils rejettent, mais c'est moi » (1 Sam. 8 : 7), veut dire seulement que l'injure est faite plus à Jéhova qu'à Samuel. « Préférez mes instructions à l'argent, et la science à l'or le plus précieux » (c'est-à-dire plutôt que) (Prov. 8: 10) ; « Déchirez vos coeurs et non pas vos vêtements ».

Dans le Nouveau Testament, cette forme de langage se reproduit continuellement. « Travaillez, non pour la nourriture qui périt, mais pour celle qui subsiste pour la vie éternelle. » (Jean 6: 27). « Ne vous réjouissez pas de ce que les esprits vous sont soumis, mais réjouissez-vous de ce que vos noms sont écrits dans les cieux. » (Luc 10 - 20). « La parole que vous entendez n'est pas de moi, mais du Père qui m'a envoyé. » (Jean 14 : 24). (Voyez aussi Matthieu 6 : 19, 20 ; Jean 7 : 16 ; Col. 3 : 2, 22, 23, etc)., etc.) Dans tous ces passages, la négation n'est pas du tout une négation littérale, mais un terme frappant de comparaison. Cette figure n'exclut pas la chose à laquelle s'applique la négation, elle implique seulement la préférence qu'il faut accorder à la chose qui est mise en opposition avec l'autre. (Rév. James Neil).

Le principe même de l'alliance que Dieu fit au Sinaï était l'obéissance. « Si vous obéissez à ma voix et si vous gardez mon alliance, vous serez ma possession. » L'accomplissement de la loi lévitique était une partie de l'obéissance qui formait le principe de l'alliance.

UNE IMAGE DE CHRIST.
- Jérémie préfigurait véritablement le Christ. On s'étonne à peine que quelques-uns aient pris pour l'Homme de douleurs ce prophète au coeur brisé. (Matth. 16 : 14). Il pleura sur son peuple, comme Jésus (9 : 1). Sa courageuse dénonciation du péché lui valut d'être rejeté et de souffrir, comme ce fut le cas pour le Sauveur. Il se compare lui-même à un agneau que l'on mène à la boucherie. (11 : 19).

LE MESSIE.
- Jérémie ne nous révèle pas autant qu'Esaïe le Messie promis, mais nous avons des prophéties relatives au Christ dans : la Source d'eau vive (2 : 13), le grand Médecin (8 : 22), le Bon Berger (23 : 4), le Germe juste (23 : 5), David le Roi (30 : 9), le Rédempteur (50 : 34), dans l'Éternel notre Justice (23 : 6). Au temps même où le trône de David était en danger, où la justice et l'équité étaient presque inconnues, les prophètes annoncèrent la venue d'un Roi de la maison de David, d'un Germe juste qui régnerait et prospérerait, exécuterait les jugements et rendrait la justice sur la terre. « En son temps, Juda sera sauvé, Israël aura la sécurité dans sa demeure ; et voici le nom dont on l'appellera : L'ÉTERNEL NOTRE JUSTICE », Jéhova Tsidkenu. En ce nom majestueux, la divinité originelle de notre Sauveur est prédite, comme son humanité, en tant que descendant de David.

LA NOUVELLE ALLIANCE.
- Dieu dit par son serviteur qu'Il fera une alliance nouvelle avec la Maison d'Israël et avec la Maison de Juda (31 : 31, 37). Dans le Nouveau Testament, ceci est distinctement appliqué aux Juifs de l'avenir (Héb. 8 : 8-13). Christ est le Médiateur de cette meilleure alliance (Hébr. 12: 24). La prophétie nous montre de loin Son jour ; elle comprend non pas les Juifs seulement, mais tous ceux qui le reconnaissent comme leur Sauveur et leur Médiateur. Elle montre la nature spirituelle de son royaume, dans lequel ses lois seront inscrites sur nos esprits afin que nous les connaissions, sur nos coeurs afin que nous les aimions, et Il nous donnera Son Esprit pour nous rendre capables de les pratiquer.

RECUL. - La terrible famine du chapitre 14 : 18 peut être interprétée spirituellement comme l'image d'un coeur qui a connu le Sauveur et s'est détourné de Lui. C'est une terre aride. Pas d'eau, pas de pluie, pas d'herbe, pas de verdure. L'Éternel est « comme un étranger dans le pays », comme un héros, incapable de secourir ». Avec quelle intensité ceci décrit le coeur dont le péché et l'incrédulité « limitent le Saint d'Israël » ! Jérémie est le livre des croyants rétrogrades. Il révèle la tendresse du Seigneur et contient sa gracieuse invitation, puis la résolution qu'ils prennent de revenir à Lui. « Revenez, enfants rebelles et je pardonnerai vos infidélités. - Nous voici, nous, allons à toi, car tu es l'Éternel notre Dieu. » (3 : 22).

QUESTIONS. - Le livre contient des questions variées dont la réponse ne se trouve que dans l'Évangile de Notre Seigneur Jésus-Christ.

« Pourquoi te pardonnerais-je ? » (Jérémie 5: 7. - R. : Eph. 1 : 7.)
« Comment te mettrai-je parmi mes enfants ? » (3 - 19. - R. : Jean 1 : 12.)
« N'y a-t-il point de baume en Galaad , n'y il point de médecin? » (8 : 22. - R. : Matth. 9 - 12 .)
« Un Éthiopien peut-il changer sa peau, et un léopard ses taches ? » 13 : 23 - R. : Actes 8 : 37 et 2 Pierre 3 : 14.)
« Que feras-tu sur les rives orgueilleuses du Jourdain ? » - (R : 1 Cor. 15 : 55, 57.)
« Où est le troupeau qui t'avait été donné, le troupeau qui faisait ta gloire ? » - (R : Col. 1 : 28 ; Héb. 13: 17.)

TEXTES ÉVANGÉLIQUES.
- Ce livre contient également des textes variés qui fournissent des sujets pour des prédications de l'Évangile.

« Que diras-tu de ce qu'Il te châtie ? » (13 : 21).
« Le coeur est tortueux par-dessus tout, et il est méchant. » (17 : 9).
« Fuyez, sauvez votre vie, et soyez comme un misérable dans le désert ! » (48 : 6).
« Ma parole n'est-elle pas comme un feu, dit l'Éternel, et comme un marteau qui brise le roc ? » (23 : 29).
« Défrichez-vous un champ nouveau ? » (4 : 3).
« Son soleil se couche quand il est encore jour. » (15: 9).
« Je connais les projets que j'ai formés sur vous, dit l'Éternel, projets de paix et non de malheur. » (29 : 11).
« Je t'aime d'un amour éternel ; c'est pourquoi je te réserve ma bonté. » (31 : 3).
« Vous me chercherez et vous me trouverez si vous me cherchez de tout votre coeur. » (29 : 13).
« Demandez quels sont les anciens sentiers.... et vous trouverez le repos de vos âmes. » (6 : 16).
« Ils s'informeront du chemin de Sion, ils tourneront vers elle leurs regards. » (50 : 5).
« Mon peuple était un troupeau de brebis perdues... oubliant leur bercail. » (50 : 6).
« Le temps de leur visitation. » (8 : 7 à 12).
« La moisson est passée, l'été est fini, et nous ne sommes pas sauvés. » (8 : 20).
« Rien n'est étonnant de ta part. » (32 : 17).

LE CANIF.
- Le livre de Jérémie jette une vive lumière sur le sujet de l'inspiration. C'est une étude fructueuse que de prendre du commencement jusqu'à la fin toutes les expressions qui affirment ou sous-entendent que Dieu parla à Jérémie, telles que : « ainsi dit l'Éternel », « la parole de l'Éternel me fut adressée », « l'Éternel dit », etc. Ces expressions reviennent souvent douze fois dans un seul chapitre, et par elles il est évident que Jérémie, sans hésitation, affirme l'inspiration de ses paroles.

Au cours de notre lecture, une scène se dessine devant nous. Nous voyons Jérémie en prison. Les chefs ont fait de lui un esclave, afin de n'être plus troublés par la parole de l'Éternel. Dieu lui ordonne de prendre un livre (3) et d'y écrire toutes les paroles que l'Éternel avait prononcées devant lui, depuis les temps de Josias jusqu'à ce jour.

Nous pouvons nous représenter le prophète dans sa prison souterraine, mal éclairée, son fidèle ami Baruc à ses côtés, écrivant sous sa dictée toutes les paroles que l'Éternel lui avait dites. « Et Jérémie donna cet ordre à Baruc : « Je suis retenu, et je ne peux pas aller à la maison de l'Éternel. Tu iras toi-même, et tu liras dans le livre que tu as écrit sous ma dictée, les paroles de l'Éternel, aux oreilles du peuple, dans la maison de l'Éternel, le jour du jeûne. »

Donc, ce que Baruc tient dans sa main et ce qu'il va lire en présence des princes, des prêtres et du peuple, ce sont les « paroles de l'Éternel ». Le rouleau du livre est long. Il contient toutes les prophéties de Jérémie jusqu'à ce jour. Mais aucune de ces paroles n'est donnée comme sienne. Elles sont celles de Dieu.

Mais ce n'est pas tout. Après que Baruc eût lu le rouleau au peuple, il fut mandé par le Conseil royal qui le pria de le lire de nouveau en sa présence. Les grands chefs de Jérusalem dirent à Baruc : « Dis-nous comment tu as écrit toutes ces paroles sous la dictée de Jérémie ? »
Il leur répondit : « Il m'a dicté de sa bouche toutes ces paroles, et je les ai écrites dans ce livre avec de l'encre ».

Ils apportent plus tard le livre au roi. Ici, une autre scène se déroule devant nous. Nous ne sommes plus dans un obscur donjon, mais dans le palais d'hiver de Jojakim, au milieu du luxe magnifique d'une cour orientale. Lorsque le monarque eût entendu ou lu trois ou quatre feuilles du livre, il en eut assez. Il prit le rouleau, le coupa en morceaux au moyen d'un canif et le jeta dans le feu du brasier.
« C'était sa dernière chance, sa dernière offre de miséricorde : en jetant au feu les fragments du livre, il y jetait symboliquement sa maison royale, sa ville condamnée, le Temple, et tout le peuple du pays. » (Speaker).
Il fut ordonné d'arrêter Jérémie et Baruc, et ils auraient sans doute été traités avec férocité, mais « l'Éternel les cacha ».

Et maintenant, dans leur réclusion, une autre tâche leur est imposée. L'Éternel commande à Jérémie de prendre un autre rouleau et d'y écrire « toutes les paroles qui étaient dans le premier livre qu'a brûlé Jojakim, roi de Juda ; et beaucoup d'autres semblables y furent ajoutées ».
D'autres paroles y furent ajoutées, mais le corps du Livre sacré resta, mot pour mot, le même que la première fois. (4)

Les hommes peuvent déchiqueter la Parole de Dieu avec le canif de leur critique. Comme Jojakim, ils peuvent jeter au feu l'espérance de leur salut. Mais « la parole de Dieu demeure éternellement », et c'est par elle que les hommes seront jugés au dernier jour. 1 Pierre 1: 25 ; Jean 12: 48).

« MA PAROLE. - UN FEU ».
- Les messages sévères que Jérémie avait à délivrer étaient si étrangers à son tempérament de sensitif que ce n'est que par une conviction profonde qu'il fut capable de les prononcer. Comme Job, il déplore le jour où il est né. Il est seul ; la main de l'Éternel est sur lui. Il se plaint d'être quotidiennement un objet de dérision. On lui reproche la Parole de l'Éternel. À cause de Son nom, il subit l'outrage, la moquerie, la malédiction ; on le raille parce qu'il est boiteux. Souffrant de toutes ces choses, est-il vraisemblable que Jérémie aurait continué s'il n'avait pas été certain que l'Éternel l'avait chargé d'une mission ? Comme nous l'avons vu, il se propose de ne plus parler au nom de l'Éternel (20 : 9). « Mais - dit-il - il y a dans mon coeur comme un feu dévorant qui est enfermé dans mes os. Je m'efforce de le contenir, mais je ne le puis. »

Avec une telle flamme brûlant en lui, est-il étonnant que la promesse de l'Éternel s'accomplit : « Voici, je veux que ma parole dans ta bouche soit du feu ? » L'Éternel lui avait dit : « Si tu sépares ce qui est précieux de ce qui est vil, tu seras comme ma bouche ». - « J'ai recueilli tes paroles », dit-il à l'Éternel, « et je les ai dévorées. Tes paroles ont fait la joie et l'allégresse de mon coeur. »

Dans ses prières à Dieu, Jérémie révèle l'état intérieur et secret de son coeur. Il était par-dessus tout un homme de prière, un homme qui savait ce que c'est que de communier avec Dieu.




IV. LAMENTATIONS


LA CITÉ DU GRAND ROI. - « Eh quoi, elle est assise solitaire, cette ville si peuplée ! Elle est semblable à une veuve ! Grande entre les nations, souveraine parmi les États, elle est réduite à la servitude ! » Ainsi éclate la funèbre complainte, de laquelle la plus ancienne tradition juive nous parle en ces termes : « Après la captivité d'Israël et la désolation de Jérusalem, Jérémie s'assit et pleura, et répandit ses lamentations sur Jérusalem ».

« En face d'une colline rocheuse, sur le côté occidental de la ville, la légende locale a placé « la Grotte de Jérémie ». Là, dans cette attitude d'immobile douleur que Michel-Ange a immortalisée, le prophète est supposé avoir pleuré sur la chute de sa patrie. » (5)
L'aspect désolé de la ville après l'occupation chaldéenne est décrit par Jérémie dans le livre des Lamentations avec toute l'énergie et la précision d'un témoin oculaire.

Six cents ans ont passé ; et maintenant, du côté opposé et oriental de la ville, monte une procession d'enfants joyeux qui suivent un humble roi, jusqu'au Mont des Oliviers. Au brusque tournant de la route, on découvre en plein la vue de Jérusalem. Le spectacle de l'altière cité, en ce matin ensoleillé, avec des colonnes de marbre et les toits dorés du temple, remplit le coeur de notre Sauveur d'un tel flot de compassion qu'Il pleure à haute voix : « Si toi aussi, au moins en ce jour qui t'est donné, tu connaissais les choses qui appartiennent à ta paix !... » et ici, la douleur interrompt la phrase, et, lorsqu'Il retrouve la voix, c'est seulement pour ajouter... « Mais maintenant, elles sont cachées à les yeux... Il viendra sur toi des jours où tes ennemis t'environneront de tranchées... et ils ne laisseront pas en toi pierre sur pierre, parce que tu n'as pas connu le temps où tu as été visitée. » (6)

Le prophète qui sanglote était une image du Sauveur qui devait pleurer. Le premier prédit la destruction de la ville par les Chaldéens, le second par les Romains.

JUGEMENT SUR LE PÉCHÉ.
- Tout au travers du livre des Lamentations, Jérémie fait remarquer que le jugement qui est tombé sur la ville est la conséquence du péché. La note dominante est Destruction. Le livre contient cinq Lamentations, correspondant aux cinq chapitres. Chacune revêt la forme acrostiche, chaque vers commençant par une des vingt-deux lettres de l'alphabet hébreu, excepté dans la cinquième Lamentation ; celle-ci, quoique contenant le même nombre de vers, ne conserve pas la forme acrostiche. De plus, dans la troisième Lamentation (l'apogée du poème), chaque lettre initiale est répétée trois fois.

Première Lamentation. - Dans la première partie de cette division, le prophète compare la cité à une femme privée de son mari et de ses enfants. Dans la seconde, c'est Sion elle-même qui parle et gémit sur sa misère. Elle reconnaît que son châtiment vient de l'Éternel et elle confesse « qu'Il est juste » et qu'elle s'est rebellée.

Dans la Deuxième Lamentation, c'est le prophète qui fait la description remarquable de la ruine de Jérusalem.

Dans la Troisième, le prophète se met à la place du peuple et prend sur lui ses misères. Au milieu de son humiliation, il demeure assuré de la fidélité de l'Éternel et de sa compassion persévérante, et il déclare sans hésiter que « ce n'est pas volontiers qu'Il humilie et qu'il afflige les enfants des hommes ». (3 : 33).

Quatrième Lamentation. - De nouveau Jérémie décrit le terrible jugement tombé sur Jérusalem.

Cinquième Lamentation. - Le peuple juif parle, se confesse, et demande à Dieu son pardon et sa délivrance.

« PAS DE REPOS ».
- Dans le premier chapitre, nous avons la description de la désolation, Pas de repos, pas de verdure ; pas de Consolateur (versets 3, 6, 9). Tel est l'état aride de toute âme sans Christ.

Sans Christ.

Avec Christ.

Chap. 1 : 3. Pas de repos.

Matth. 11 : 28. Je vous donnerai du repos.

Chap. 1 : 6. Pas de verdure.

Ps. 23 : 2. De verts pâturages.

Chap. 1 : 9. Pas de Consolateur.

Jean 14: 16. Un autre Consolateur.

LE CALVAIRE. - Jérémie pleurant sur la ville nous rappelle notre Sauveur. De plus, plusieurs versets semblent préfigurer le Calvaire. « Vous tous qui passez ici, regardez et voyez s'il est une douleur pareille à ma douleur ! » (1: 12). Et encore : « Tous les passants battent des mains sur toi ; ils sifflent, ils secouent la tête » (2, 15: 16 ; Matth. 27, 39). De nouveau : « Tous tes ennemis ouvrent la bouche contre toi » (2: 16 ; Ps. 22: 13) ; « J'ai beau crier et implorer du secours, il ne laisse pas accès à ma prière » (3 : 8 ; Matth. 27 : 46) ; « Je suis pour tout mon peuple un objet de raillerie, chaque jour l'objet de ses chansons » (3: 14 ; Ps. 69: 12) ; « l'absinthe et le poison » (3 : 19 ; Ps. 69: 21) ; « il présentera la joue à celui qui le frappe, il se rassasiera d'opprobres » (3 : 30 ; Esaïe 50 : 6 ; Ps. 69 : 20).

Dans le verset : « Voilà le fruit des péchés de ses prophètes, des iniquités de ses prêtres, qui ont répandu dans son sein le sang des justes », les propres paroles de notre Sauveur nous reviennent à la mémoire :
« O Jérusalem, Jérusalem, qui tues les prophètes et qui lapides ceux qui te sont envoyés » ; puis les paroles de Pierre lorsqu'il accuse les gens de Jérusalem : « Vous avez renié le Saint et le Juste, et vous avez mis à mort le Prince de Vie ».


(1) Dix ans de fouilles en Égypte, p. 50-54 

(2) Caractères de la Bible, p. 153. Dr Alexandre Whyte.

(3) En hébreu, un rouleau de livre. (Segond, trad.). 

(4) L'Inspiration et l'Authenticité de l'Écriture Sainte, pp. 44-47 Urquhart. 

(5) Jewish Church (L'Eglise juive), par Stanley. 

(6) Voyez Life of Christ (Vie de Christ), par Farrar, vol. Il, p. 122.
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