L'EXPIATION. -
« En sa
mort », en hébreu, est au pluriel,
« en ses morts » ; c'est
probablement « le pluriel de
majesté », qui signifie
« sa grande mort », cette
grande mort expiatoire qui fut un sacrifice pour le
péché. Ou bien, cette expression
préfigure-t-elle la vérité que
« si l'un est mort pour tous, tous donc
sont morts ». Dans sa mort, Il
représentait les grandes multitudes pour
lesquelles Il mourut. Depuis ce moment, dans
l'évolution. prophétique, le chant du
triomphe a commencé, comme nous le discernons au psaume
22, tout aussi bien que dans Philip.
2 ; Il est tout
d'abord
descendu, degré par degré, dans
l'humiliation, jusqu'à la mort, même
la mort de la croix ; et tout à coup,
Il s'élève dans un crescendo toujours
ascendant et triomphal, jusqu'à
« la gloire de Dieu le
Père ». Ainsi en est-il dans ce
chapitre. Le triomphe à venir est
révélé : la joie de
l'âme du Rédempteur à la vue du
butin qu'Il a conquis ; la grande multitude
rachetée, par sa mort, pour la vie
éternelle.
Le chapitre suivant éclate de
nouveau en une description du glorieux avenir.
Puis, vient l'invitation évangélique
du chapitre
55. - « Vous tous
qui avez soif, venez aux eaux », - dans
laquelle nous voyons notre Sauveur, debout, le
dernier et grand jour de la fête, et
s'écriant : « Si quelqu'un a
soif, qu'il vienne à moi et qu'il
boive ».
(Jean
7 : 37-39.)
LE RÈGNE DU CHRIST. - Les
chapitres qui terminent le livre d'Esaïe sont
pleins de la note victorieuse, mais ils
évoquent aussi l'heure du jugement qui
précédera l'inauguration du glorieux
règne millénaire du Christ.
Israël ayant été
rassemblé dans sa patrie dans l'incroyance,
doit passer par un temps de tribulation
épouvantable ; mais quand ils verront
« Celui qu'ils ont
percé »
(Zach.
12 : 10), revenant en
puissance et en grande gloire, accompagné de
son Église, pour exécuter ses
jugements sur la terre
(Jude
14, 15), le voile de
l'incrédulité sera ôté
(2
Cor. 3 : 15, 16) ;
ils
le recevront comme leur Messie, et Il
régnera sur eux, sur le trône de David
son père
(Esaïe
9 : 7 ; 16 :
5). Et Jérusalem
« sera rendue glorieuse sur la
terre ».
(Esaïe
62 : 7). Pendant ce
règne, Satan sera lié,
(Esaïe
24 : 21, 22 ; Apoc.
20 : 1, 3) ; la
paix
universelle sera établie parmi les nations
(Esaïe
2 : 4) ;
même la férocité de la
création animale sera complètement
domptée
(Esaïe
65 : 25 ; 11 :
6-9). La vie humaine sera
prolongée comme aux jours d'avant le
déluge (65 :
20-22) ; les eaux
seront de nouveau abondantes dans la terre de
Palestine
(30 :
23, 25 ; 41 :
18) et ses déserts
deviendront fertiles comme le jardin de
l'Éternel
(51 :
3 ; 43 :
19, 20 ; 41 :
18, 19 ; 35 :
1, 2, 7). Tout Israël
sera sauvé d'un salut éternel
(45 :
17) et le plan de Dieu de
bénir le monde entier par le moyen de son
peuple élu sera réalisé.
(Genèse
12 : 2, 3 ; Romains
11 : 15 ; Esaïe
2: 2, 3 ; 66 :
12, 19 ;
60,
61
et 62).
ACCOMPLISSEMENT DES PROPHÉTIES
RELATIVES A BABYLONE. - Les prédictions
du prophète Esaïe concernant Babylone
ont été réalisées d'une
façon remarquable, tant en ce qui concerne
sa chute que sa désolation
subséquente. L'armée qui doit la
détruire est appelée des montagnes,
d'une terre éloignée : la Perse,
sans doute
(13 :
17). Mais la Perse ne
doit
pas agir seule ; la Médie doit se
joindre aux escadrons déjà
réunis
(13 :
17). L'Éternel des
armées les appelle pour exécuter ses
jugements sur la ville coupable
(13 :
2,
3 ; 11,
19)
et la terre tremble sous les pas
des soldats qui accourent à l'appel. Au
chapitre 21 :
2, il nous est dit que
c'est l'armée Médo-Perse qui doit
prendre la capitale chaldéenne. L'avance
continuelle de l'armée ennemie avec ses
bataillons de chevaux, d'ânes et de chameaux,
passe dans la vision de la sentinelle
(21 :
7). Hérodote nous
dit que l'armée perse avait exactement les
auxiliaires ici mentionnés.
La chute de la ville doit prendre place
au temps d'une fête
(21 :
5 ; Daniel
5.) Il est
déclaré que la crainte s'emparera de
la cité condamnée à
périr ; dans sa panique, elle ne se
défendra même pas
(13 :
8). Ceci s'est
réalisé à la lettre, comme
nous l'assure Daniel. Nous lisons dans le chapitre
5, verset 6 de ce
prophète, que la nuit de l'assaut de
Babylone, le roi fut saisi de terreur.
« Ses genoux se heurtèrent l'un
contre l'autre. » - « Cette
nuit-là, Belschatsar, roi des
Chaldéens, fut tué. » - Les portes de
Babylone devaient
s'ouvrir devant Cyrus
(45 :
1). L'histoire nous
raconte que la nuit de la prise de la ville, ceci
s'accomplit. S'avançant jusqu'au coeur de la
cité par le lit du fleuve qui avait
été mis à sec, Cyrus trouva la
porte qui conduisait des rues au fleuve
laissée providentiellement ouverte, dans le
désarroi général causé
par la grande fête. Autrement, l'armée
aurait été bloquée dans le lit
du fleuve, comme dans une trappe, et
détruite. Enfin retentit le cri soudain de
la conquête et de la capture :
« Babylone est tombée, est
tombée ! » et ses principaux
dieux, Bel, Nébo et Mérodach, sont
pour toujours discrédités.
(21 :
9 ; 46 :
1-2).
L'authenticité absolue de la
prédiction est pleinement attestée
par l'histoire de la chute de Babylone. Elle
s'accomplit comme elle avait été
prophétisée.
L'avenir de Babylone fut
également prédit. « Elle ne
sera jamais habitée ; elle ne sera plus
jamais peuplée. L'Arabe n'y dressera plus sa
tente, et les bergers d'y parqueront plus leur
troupeaux. Les animaux du désert y prendront
leur gîte ; les hiboux rempliront ses
maisons, les autruches en feront leur demeure et
les boucs y sauteront. Les chacals hurleront dans
ses palais, et les chiens sauvages dans ses maisons
de plaisance. »
(13 :
19, 22). Ceci
dépeint exactement l'état
d'indescriptible désolation de Babylone.
Aucun être humain n'habite sur l'emplacement
de l'antique cité. Le Bédouin,
pendant qu'il paît ses troupeaux dans ses
alentours, en regarde les ruines avec un effroi
superstitieux. Les tentes arabes sont nombreuses
dans les plaines chaldéennes, mais pas une
seule n'est dressée dans les ruines de
Babylone. D'autres villes anciennes ont disparu,
mais presque toujours, il reste, pour marquer le
site, un village, un groupe de huttes ou une
bergerie. Seule, Babylone fait exception et
connaît l'absolue solitude.
Au quatorzième siècle,
Maundeville écrivait :
« C'est le désert plein de dragons
et de grands serpents ». Ainsi en est-il
encore
aujourd'hui.
Les hiboux sortent des maigres buissons, les lions
font leurs antres dans les anciennes demeures
ensevelies, les chacals hideux se glissent
furtivement entre les ondulations du terrain.
Celui-ci est couvert de monticules informes et le
pied s'enfonce dans une poussière molle,
faite de toute sorte de détritus ; et
ainsi s'accomplissent ces prédictions
« Babylone sera un monceau de
ruines ».
(Jérémie
51 37).
« Descends, et assieds-toi dans la
poussière, vierge, fille de
Babylone ! »
(Esaïe
47 : 1). Les
richesses de la cité semblaient
défier tous les pillages, en accord avec
cette parole : « Tous ceux qui la
pilleront seront rassasiés ».
(Jérémie
50 - 10).
« Ses villes seront ravagées, la
terre est aride et déserte ; c'est un
pays où personne n'habite, où ne
passe aucun homme. »
(Jér.
51 : 43). Au temps
de sa gloire, le pays qui entourait la grande ville
avait été drainé et
irrigué au prix d'une dépense
énorme, jusqu'à ce que sa
fertilité devint incomparable. Maintenant,
après des siècles d'abandon, il est
retombé dans sa première condition,
« une steppe sans
végétation, un marais
puant » ; un vaste désert
aride, où rien, sauf, parfois, une tente
noire de Bédouin ou un chameau errant, ne
vient révéler l'existence de quelque
être vivant.
ANALYSE: Le Livre d'Esaïe peut se
diviser en trois parties. La première et la
troisième sont d'une composition
poétique des plus magnifiques.
Ces deux parties sont, pour ainsi dire,
enchaînées l'une à l'autre par
la seconde partie qui est historique et presque
entièrement écrite en prose. Deux
chapitres se relient avec la première partie
du livre et racontent l'histoire de l'invasion
assyrienne et ses résultats. Deux autres
chapitres se relient à la troisième
partie du livre et parlent de la maladie
d'Ézéchias, de sa guérison et
de l'incident des ambassadeurs babyloniens.
PREMIÈRE PARTIE. CHAPITRES 1
À 35
1. Chapitre 1 à 12. Reproches principalement adressés à Juda et à Jérusalem. La gloire à venir, chap. 11 et 12.
2. Chapitres 13 à 23. Jugements sur les nations hostiles à Juda : Babylone, la Syrie, l'Égypte, Tyr.
3. Chapitres 24 à 35. Jugements sur le monde, sur Samarie et sur Juda. Ses péchés qui attirent le jugement. L'invasion assyrienne et la destruction de Jérusalem. La gloire à venir, chap. 35.
DEUXIÈME PARTIE. CHAPITRE 36 À 39
1. Chapitres 36 et 37. L'invasion assyrienne et ses résultats. (Étroitement liée à la première partie).
2. Chapitres 38 à 39. La maladie et la guérison d'Ézéchias. Les ambassadeurs babyloniens. La captivité babylonienne prédite. (Étroitement liée à la troisième partie).
TROISIÈME PARTIE. CHAPITRE 40 À 66
1. Chapitres 40 à 48. Consolation. Antithèse de Jéhova et des idoles, d'Israël et des nations. Cette partie se termine avec le glas du jugement. « Il n'y a pas de paix pour le méchant ». dit l'Éternel.
2. Chapitres 49 à 57. Le Serviteur de Jéhova. Antithèse entre les hypocrites et les fidèles : entre le péché et la douleur du présent et la sainteté et la félicité de l'avenir. Cette partie se termine par une note encore plus sévère de jugement. (66 : 24).
LA CROIX AU CENTRE. - Les vingt-sept
chapitres de la troisième partie constituent
un poème messianique grandiose,
subdivisé en trois livres. Chaque livre
consiste en trois sections de trois chapitres
chacune, correspondant à peu près aux
divisions de nos versions modernes.
Le chapitre
53 (avec les trois derniers
versets du 52),
est le chapitre du milieu de la
partie centrale de ce grand poème
prophétique, le coeur des écrits
prophétiques de l'Ancien Testament. Et le
verset central de ce chapitre central contient,
comme un écrin contient un joyau, la
vérité centrale de
l'Évangile :
- Il était blessé pour nos péchés,
- Brisé pour nos iniquités ;
- Le châtiment qui nous donne la paix est tombé sur Lui,
- Et c'est par ses meurtrissures que nous avons la guérison.
L'UNITÉ D'ESAÏE. - Un résumé du livre d'Esaïe serait incomplet sans une allusion à la question soulevée depuis quelques années quant à la dualité ou à la pluralité des auteurs. On demande : « Quelle différence cela peut-il faire, que la prophétie soit l'oeuvre d'un seul homme, ou de deux, ou de vingt ? » - Superficiellement, en effet, la différence est nulle, à la condition, toutefois, que son inspiration soit établie. Si nous sommes certains que l'Esprit de Dieu parle, le canal humain importe peu. Mais c'est justement parce que cette question d'inspiration est doublement en cause, que nous sentons que la question est importante.
- 1. Tout d'abord, la négation de l'unité d'Esaïe a sa racine dans le refus de reconnaître la valeur surnaturelle des prédictions prophétiques.
- 2. En second lieu, maintenir la négation de son unité affaiblit l'autorité du Nouveau-Testament.
En considérant cette question, nous
écarterons pour le moment la division du
livre en trois parties, et parlerons d'Esaïe 1
(chapitres 1 à 39), et d'Esaïe Il
(chapitres 40 à 46). Le premier aurait
été écrit par Esaïe, fils
d'Amos ; le dernier, aurait pour auteur
quelque grand prophète inconnu, du temps de
la captivité babylonienne.
LA LANGUE. - Une prétendue
différence de langage est la première
raison qu'on donne pour justifier les doutes sur
l'unité du livre. Mais, d'après les
grands hébraïsants presque sans
exception, il est prouvé qu'il n'existe
aucune nécessité linguistique qu'il y
ait deux ou plusieurs auteurs. En
vérité, la ressemblance de style
entre Esaïe I et Il, nous dit-on, est plus
prononcée qu'entre chacun d'eux et les
autres livres de l'Ancien Testament. La
similarité entre les deux parties du livre
est si frappante que certaines personnes, tout en
penchant vers la théorie des deux auteurs,
en sont venues à croire que le second
Esaïe a imité le style du
premier !
Lorsque nous considérons la
longue période pendant laquelle Esaïe
lui-même nous dit qu'il posséda le don
prophétique (depuis les jours d'Osias
à ceux d'Ézéchias,
probablement soixante ans), et les sujets
très variés sur lesquels il
écrivit, il est plus que raisonnable
d'admettre n'importe quelle différence de
style. « Le second Esaïe emploie des
mots connus seulement du premier Esaïe, et
dont la signification était tombée en
désuétude au temps de
Jérémie. Le second Esaïe se
montre, d'ailleurs, maître d'un vocabulaire
technique et scientifique que seul le premier
Esaïe partageait avec lui »
(1).
Le professeur Birk, en étudiant
les mots qui se trouvent dans Esaïe I et Il et
nulle autre part dans, les anciens
prophètes, en trouve des exemples si
nombreux qu'il en limite la liste à ceux qui
commencent avec la première lettre de
l'alphabet hébreu - la lettre aleph. - Il en
cite quarante.
LES PRÉDICTIONS. - La raison que
l'on donne pour nier l'unité du livre
d'Esaïe, est plus qu'une question de langue ;
elle a sa
source
dans le caractère surnaturel des
prédictions, caractère qu'on ne veut
pas admettre. « Écartez cette
pierre d'achoppement : le fait de la
prophétie, et tout est en faveur de son
authenticité. » (Dr Payne
Smith).
Que le prophète ait prédit
la chute de Babylone, lorsqu'elle n'était
pas même encore une grande puissance
mondiale, et que l'Assyrie était alors
l'ennemi redouté de la nation juive ;
qu'il ait prédit la délivrance de la
captivité avant que le peuple ait
été emmené captif ; qu'il
est prévu que la délivrance viendrait
des Médo-Perses lorsque ces deux nations
étaient encore séparées et
insignifiantes ; qu'il ait appelé le
libérateur par son nom - Cyrus - plus de
cent ans avant sa naissance, - ces choses ne sont
des pierres d'achoppement que pour ceux qui ne
voient dans la prophétie que l'intuition
d'un homme sage qui ne possède que
l'intelligence de son temps. Mais pour le croyant
fervent, c'est une confirmation de sa foi en un
Dieu tout-puissant qui a vraiment inspiré
ses prophètes par le Saint-Esprit.
Dans Esaïe II, Dieu Lui-même,
par son prophète, en appelle à
l'accomplissement des premières
prédictions pour attester la
réalisation des dernières.
(Esaïe
48 : 3, 5). Cette
preuve n'aurait aucune raison d'être, si ces
premières prédictions n'existaient
pas. Parmi celles d'Esaïe 1, étaient
l'invasion et la destruction de Samarie par
Sanchérib, sa menace d'invasion, la
délivrance de Jérusalem et la
prolongation de la vie
d'Ézéchias.
Et maintenant, Dieu en appelle à
son peuple d'Israël pour qu'il soit son
témoin dans l'accomplissement des
prophéties des chapitres 40 à 46.
(Voyez
43 : 9-10). Il
défie les idoles, les dieux des nations, de
prouver leur droit à un culte, en
prédisant les événements
à venir.
(41 :
23 ; 42 :
7-9).
La mention de Cyrus par son nom est
expressément déclarée
être un miracle, en vue de montrer au monde
entier, de l'est à l'ouest, que
Jéhova seul est Dieu.
(45:
4-6).
C'est là exactement l'effet qui
fut produit sur le grand conquérant
lui-même et sur le peuple
d'Israël.
Josèphe nous dit que ce fut la
lecture de la prophétie d'Esaïe le
concernant, qui amena Cyrus à publier le
décret suivant : « Ainsi
parle Cyrus, roi de Perse : L'Éternel,
le Dieu des cieux, m'a donné tous les
royaumes de la terre et il m'a commandé de
lui bâtir une maison à
Jérusalem ».
(2
Chron. 36 : 23). Si la
prophétie avait été
écrite quelques années seulement
auparavant à Babylone, lorsque son nom
était bien connu, et par un contemporain,
est-il admissible qu'elle eût
impressionné le grand conquérant, au
point de lui faire prendre une pareille
décision ?
Nous avons déjà
parlé de l'effet de la prophétie
d'Esaïe sur les Juifs. Quand ils
allèrent à Babylone, ce fut avec ce
qui apparaissait comme une tendance
indéracinable à l'idolâtrie.
Ils en revinrent ce qu'ils sont restés
jusqu'à aujourd'hui : la plus
monothéiste des nations. Aucun peuple ne
peut subir un pareil changement sans avoir acquis
une conviction inébranlable. Et cette
conviction a été acquise à
mesure qu'ils constataient, graduellement, la
réalisation des prophéties
d'Esaïe, à la lettre et concluaient que
Dieu avait connu d'avance les
événements et les avait
déclarés dès le commencement
(41 :
21) ; ainsi le
coeur
de la nation se détourna pour toujours des
idoles pour reconnaître comme seul Dieu le
Saint d'Israël.
L'HISTOIRE. - L'histoire attribue
uniformément la seconde partie du livre
à Esaïe. Historiquement, il n'a jamais
existé sous une forme séparée.
La conjonction des deux parties a certainement
été hors de contestation dès
les jours d'Esdras. Si la seconde partie avait
été écrite par un
contemporain, ou par un prophète de
l'époque immédiatement
précédente, Esdras en aurait eu
connaissance. Accuser Esdras d'insouciance ou de
fausseté serait contraire
à tout ce que nous savons de son
caractère. La traduction des Septante, faite
280 ans avant Jésus-Christ, contient le
livre entier sous le titre de Livre d'Esaïe.
Le livre apocryphe de l'Ecclésiastique (200
ans avant Jésus-Christ) dit :
« Il (Esaïe) vit par un bon esprit
ce qui viendrait à passer et il consola ceux
qui pleuraient à Sion ; il leur montra
les choses à venir et
secrètes ».
En face du témoignage universel
de l'Histoire, l'obligation de fournir des preuves
repose sur ceux qui nient l'origine
« Esaïnique » de la
seconde partie. « Les règles de la
critique ordinaire nous demandent d'accepter
Esaïe comme auteur unique jusqu'à ce
qu'on nous donne des preuves suffisantes du
contraire. » (Sir Edward
Strachey).
LE NOUVEAU TESTAMENT. - Le
témoignage du Nouveau Testament est
explicite et plus que suffisant. Esaïe est
appelé par son nom comme auteur de cette
prophétie, vingt-et-une fois. Dix se
rapportent à des passages contenus dans la
première partie de la prophétie, et
onze à des citations de la seconde.
D'après Wescott et Hort, le livre entier
d'Esaïe est cité ou mentionné
plus de 210 fois ; les chapitres 40-46, plus
de 100 fois.
Pour les écrivains du Nouveau
Testament, le livre contient « les
paroles du prophète Esaïe, qui parla
par le Saint-Esprit ». Matthieu
déclare que l'écrivain du chapitre 42
était Esaïe
(Matth.
12 : 17, 18). Luc
assure
que le chapitre 53 fut écrit par Esaïe
(Actes
8 : 28-35), ainsi que le
chapitre 66. Jean, dans le même paragraphe,
attribue à ce prophète les chapitres
53 et 65.
(Rom.
10 : 16-20).
UNITÉ DE PLAN ET DE BUT. -
L'unité de pensée et de but qui
distingue ce recueil est un témoignage
définitif à l'unité d'auteur.
Le professeur Margoliouth, citant
Aristote, nous dit qu'une oeuvre d'art doit
être construite de façon à ce
que la suppression de l'une de ses parties cause la
chute de l'oeuvre tout entière. Il ajoute
que si cette règle est appliquée
à Esaïe, nous serons disposés
à trouver brillamment prouvée
l'unité des travaux attribués
à ce prophète. Il a été
impossible à ceux qui voudraient diviser
Esaïe en deux parties de s'en tenir
logiquement à une date antérieure
pour Esaïe I et à une date plus
récente ou babylonienne pour Esaïe II.
La chute de Babylone est prédite dans
Esaïe 13 et 14 ; il a donc fallu admettre
que ces chapitres dataient, eux aussi, d'une
époque plus récente.
La forme d'idolâtrie dont la
nation juive est accusée au chapitre 57,
comme celle qui est décrite dans la
première partie du livre, est
particulière à Israël, dans son
propre pays, avant la Captivité. Le cadre de
ce chapitre est également celui de la
Palestine : les hautes montagnes, les lits
rocailleux des torrents, les pierres polies des
ruisseaux, sont des traits étrangers aux
plaines d'alluvion de Babylone, et une date
antérieure doit être, pour les besoins
de cette argumentation, assignée à
ces passages et à d'autres d'Esaïe II.
Ces procédés réduisent les
deux parties de cette magnifique prophétie
à une oeuvre de rapiéçage
littéraire.
D'aucuns prétendent que le livre
d'Esaïe est une collection d'auteurs divers,
réunis pour la commodité du lecteur.
Mais dans le cas parallèle des petits
Prophètes, leur nom précède
toujours soigneusement leurs écrits,
même pour ceux qui n'ont composé qu'un
seul chapitre. L'unité de pensée et
de style est un argument considérable contre
la pluralité des auteurs, et l'éclat
et la puissance du langage du prophète rend
la supposition qu'il n'aurait pas été
connu, même de nom, tout à fait
invraisemblable. C'était la coutume des
prophètes hébreux de donner leur nom
au commencement de leurs écrits, et Esaïe ne fait
pas exception
à cette règle
(voyez
chap.1: 1). Il est
évident, de par l'énumération
des quatre rois sous le règne desquels il a
vécu, que ce verset n'est pas la
préface de la première partie ou
d'une fraction quelconque du livre. Il est certain
que ce verset est comme le sceau de l'auteur
apposé au volume entier.
On aura observé qu'en
étudiant le livre d'Esaïe, nous avons
suivi une ligne de pensée ininterrompue et
que nos références ont
été prises dans toutes les parties du
recueil. La vision d'Esaïe dans le Temple,
quand il reçut son appel à la
vocation de prophète, forme une introduction
appropriée à la prophétie
entière. Nous avons vu comment l'influence
de cette vision se distingue tout au travers, dans
l'impression qu'il reçut de la
sainteté et de la majesté de Dieu,
gravant le nom du Saint d'Israël sur toutes
ses prophéties, comme s'il avait pressenti
les difficultés qui sont maintenant devant
nous. L'influence de cette vision se remarque
encore dans l'universalité du plan divin
envers le monde entier, telle qu'elle
apparaît à travers tout ce
livre.
Par dessus tout, l'unité du livre
peut être observée dans la figure
centrale, la personne du Messie, dans son oeuvre
glorieuse de Rédemption, puis dans son
règne universel de Justice, de Salut et de
Jugement. La Paix, conséquence de la
Justice, la puissance et la majesté de Dieu
dans la création, en contraste avec les
idoles, oeuvres de mains humaines, sont des sujets
qui complètent les grands thèmes du
prophète Esaïe. On les trouve, dans une
harmonie ininterrompue, d'un bout à l'autre
du volume qu'il a écrit.
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