Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

CHAPITRE XXV

Une paix non interrompue.

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« En marchant devant Lui dans la sainteté et la justice, tous les jours de votre vie. » (Luc I, 75).

Le Révérend John Fletcher que Wesley considérait comme l'homme le plus saint qui eût vécu depuis les jours de l'apôtre Jean, perdit cinq fois la bénédiction avant d'avoir obtenu définitivement la grâce de la sainteté, et Wesley d'après ses observations déclarait que beaucoup perdaient plusieurs fois cette bénédiction avant d'apprendre le secret de la garder. Si donc parmi ceux qui lisent cet ouvrage il en est qui ont perdu la bénédiction et sont en butte aux assauts de l'ennemi des âmes, si Satan cherche à leur représenter qu'ils n'arriveront jamais ni à posséder la sainteté ni à la garder, laissez-moi les supplier d'essayer encore et toujours.

Vous prouvez votre intention et votre réel désir d'être saint, non pas en rendant les armes en face de la défaite, mais en vous relevant de chutes nombreuses et en luttant de nouveau avec une foi et une consécration renouvelées. En le combattant ainsi, vous remporterez certainement le prix et serez à même de le garder jusqu'au bout.
La promesse est : « Cherchez et vous trouverez. »
- Mais combien de temps devrai-je chercher ?
- Jusqu'à ce que vous ayez trouvé.
- Mais si c'est pour le perdre ensuite
- Cherchez de nouveau jusqu'à ce que vous trouviez. Dieu vous étonnera un jour en vous donnant un baptême si puissant de son Esprit que toutes vos obscurités, vos doutes et vos incertitudes s'évanouiront pour toujours ; vous ne retomberez plus désormais, le sourire de Dieu ne se retirera plus de vous et votre soleil ne se couchera jamais.

O frère découragé, soeur abattue, laissez-moi vous presser de regarder à Jésus, de vous confier en Lui de continuer à chercher, vous souvenant que les retards du Seigneur ne sont point des refus.

Jésus est votre Josué qui vous introduira dans la Terre-Promise, et pourra terrasser tous vos ennemis devant vous. Ceux qui se rendent au milieu de la défaite ont encore beaucoup à apprendre tant sur la dureté et la perfidie de leur propre coeur que sur la tendre mansuétude, la longanimité et la merveilleuse puissance de Dieu pour sauver. Il n'est pas dans Sa volonté qu'aucun de ceux qui ont reçu la bénédiction vienne à la perdre ; il est possible de la garder à jamais.
Mais comment ?

Un de mes anciens condisciples de la faculté de théologie se rendait un jour à son champ de travail après avoir terminé ses études. Je l'accompagnai à la gare pour lui serrer encore la main et lui dire peut-être un dernier adieu. Il me regarda et me dit :
- Sam, donne-moi un texte qui devienne la devise de ma vie.

J'élevai aussitôt mon coeur vers Dieu pour qu'Il m'éclairât. Or, si vous voulez garder la bénédiction, - c'est une des choses que vous devez faire constamment - élever votre coeur vers Dieu et vous attendre à Lui pour avoir la lumière, non seulement dans les moments critiques et les grands événements de la vie, mais dans les petits et en apparence les plus insignifiants détails. Par la pratique, vous en acquerrez une telle habitude, que cela vous deviendra aussi naturel que de respirer, et ce sera pour votre vie spirituelle un acte aussi important que la respiration pour la vie matérielle. Restez en contact direct avec Dieu si vous voulez garder sa bénédiction. J'en fis l'expérience ce matin-là ; car aussitôt les onze premiers versets du premier chapitre de la deuxième épître de saint Pierre me vinrent à la pensée, non seulement comme devise à donner à mon ami, mais comme une règle tracée à tous par le Saint-Esprit. En la suivant, non seulement nous pourrons garder la bénédiction et être préservés de chute, mais aussi porter des fruits dans la connaissance de Dieu, et obtenir libre accès dans le Royaume de notre Seigneur et Sauveur Jésus-Christ.

Prenez-en note, vous tous qui désirez conserver la bénédiction de la sainteté. Vous verrez qu'au verset 4 l'apôtre déclare que pour devenir « participants de la nature divine », il faut fuir « la corruption qui existe dans le monde par la convoitise. » Voilà donc ce qu'est la sainteté : fuir la corruption de nos coeurs et recevoir en échange la nature divine. Or, l'apôtre presse ces saints de se hâter, de « faire tous leurs efforts ». Un homme paresseux et endormi ne peut conserver la bénédiction, ou plutôt, il ne peut l'obtenir. Pour l'obtenir il faut la chercher de tout son coeur. Vous devez creuser comme pour trouver un trésor caché et pour le garder « faire tous vos efforts ». Quelques-uns objecteront : "Une fois sauvée, on l'est pour toujours », mais Dieu ne dit rien de pareil. Il nous engage à veiller, à être sobres, car nous sommes sur le terrain de l'ennemi et ce monde n'est pas ami de la grâce. Si vous aviez pour cent mille francs de diamants dans un pays de brigands, vous veilleriez avec soin sur votre trésor. Or, vous êtes en pays ennemi si vous possédez un coeur pur et « les arrhes de l'esprit » qui sont votre passeport pour le Ciel, votre gage de vie éternelle : veillez donc pour le garder en sûreté.

L'apôtre dit : « Joignez à votre foi la vertu. » Vous avez dû faire acte de foi en « les plus grandes et les plus précieuses promesses » pour obtenir cette bénédiction, mais vous aurez encore autre chose à ajouter à votre foi pour la conserver. Le mot « vertu » vient d'un vieux mot latin qui signifie courage, et c'est probablement ce qu'il signifie dans ce cas. Il vous faut du courage pour conserver cette bénédiction.

Le diable rôdera autour de vous comme un lion rugissant, le monde vous tiendra rigueur, vous exclura, vous mettra à mort peut-être. Vos amis vous prendront en pitié ou vous maudiront, vous prédiront toutes sortes de calamités, et parfois votre propre chair criera en protestation. Alors, vous aurez besoin de courage. On prétendait autrefois que je perdais la raison, et cela semblait presque vrai, si intense était mon désir de connaître toute la volonté de Dieu à mon égard. On me disait que je me perdrais dans le fanatisme, que je finirais mes jours dans un asile, que je détruirais ma santé et resterais toute ma vie un invalide, inutile tourment à moi-même et fardeau pour mes amis ! L'évêque lui-même dont l'ouvrage sur la sainteté avait bouleversé mon âme jusqu'en ses profondeurs, après que j'eus obtenu cette bénédiction, me pressa de très peu parler de la chose, puisque cet enseignement devenait une cause de division et de trouble. (J'appris dans la suite qu'il avait lui-même perdu la grâce de la sanctification.) Le diable me tenta jour et nuit, avec mille tentations spirituelles auxquelles je n'avais point songé et à la fin excita contre moi un mauvais sujet qui me fit presque sauter la cervelle, si bien que pendant des mois entiers je demeurai dans un tel état de prostration physique que la rédaction d'une simple carte postale m'épouvantait et m'enlevait le repos de la nuit. Je m'aperçus alors qu'il fallait du courage pour conserver cette « Perle de grand prix », mais, - alléluia à jamais ! - « le Lion de la tribu de Juda », mon Seigneur et Sauveur est aussi plein de courage que de force, d'amour que de compassion. Dans le Livre d'encouragement et d'instruction qu'Il nous a laissé, Il a dit : « Fortifie-toi et prends courage. » Il le déclare ailleurs d'une manière plus énergique encore par ces mots : « Ne t'ai-je pas donné cet ordre : « Fortifie-toi et prends courage. » C'est donc un ordre positif auquel nous sommes tenus d'obéir. Souvent Il le répète, et soixante-douze fois, Il a dit : « Ne crains point », ajoutant pour nous montrer que nous n'avons rien à craindre « car je suis avec toi ». Gloire à Dieu ! S'Il est avec moi, pourquoi craindrais-je ? Et pourquoi craindrais-tu, toi aussi, mon camarade ?

Mon petit garçon a grand'peur des chiens ; la crainte semble innée chez lui ; mais quand il me tient la main, il passerait crânement à côté du plus gros chien du pays. Dieu a dit :

« Car je suis l'Éternel ton Dieu
Qui fortifie ta droite,
Qui te dis : Ne crains rien,
Je viens à ton secours.
Ne crains rien, car je suis avec toi.
Ne promène pas des regards inquiets, car je suis ton Dieu,
Je te fortifie, je viens à ton secours,
Je te soutiens de ma droite triomphante. »

Jésus, ce même Jésus qui est mort pour nous, dit : « Tout pouvoir m'a été donné dans le Ciel et sur la terre.... Et voici je suis toujours avec vous, tous les jours jusqu'à la fin du monde. » Pourquoi donc craindre encore ?

Le diable s'y connaît pour tromper et ruiner les âmes, mais rappelez-vous que Jésus est « l'Ancien des jours. » D'éternité en éternité Il est Dieu, et Il a mis toute Sa sagesse, toute Sa puissance, tout le courage de Sa divinité à la disposition de notre foi et de notre salut et certainement ceci devrait nous remplir de courage. Êtes-vous abattu et effrayé ? Prenez courage et dites hardiment avec le roi David qui plus qu'aucun de nous avait des raisons de s'inquiéter et de s'effrayer :

« Dieu est pour nous un refuge et un appui,
Un secours qui ne manque jamais dans la détresse ;
C'est pourquoi nous sommes sans crainte quand la terre est bouleversée
Et que les montagnes chancellent au coeur des mers. »

Une des expériences de David m'a été d'un grand secours. Il eut un jour à fuir loin de Saül qui le poursuivait pour lui ôter la vie. Il se retira au pays des Philistins où il demeura dans un village que le roi lui donna. Alors les Philistins prirent les armes contre Saül et David se joignit à eux. Mais les Philistins craignant que dans la mêlée, il ne se tournât contre eux, le renvoyèrent. Lorsque David et ses hommes retournèrent chez eux, ils trouvèrent que des ennemis étaient venus et avaient détruit et brûlé leur ville, emporté leurs biens, et emmené captifs leurs femmes et leurs enfants. Fous de douleur ces hommes parlèrent de lapider David. Il y avait certes de quoi s'effrayer, mais la Bible dit : « David reprit courage en s'appuyant sur l'Éternel, son Dieu. » Lisez vous-même ce récit et voyez de quelle manière merveilleuse Dieu l'aida à rentrer en possession de tout ce qu'il avait perdu. (1 Sam. XXX.)

Pour moi, je suis résolu à rester plein de courage. Dieu m'a délivré de toutes mes frayeurs, et de celles de mes amis. Il a mis en déroute mes ennemis. Il s'est montré plus fort que mes adversaires, et Il m'a mis à même par Sa puissance, par Sa bonté et Son amour infinis, de marcher devant Lui dans la sainteté depuis plus de vingt ans.




CHAPITRE XXVI

Sanctification et Consécration.


La femme d'un sénateur suivait régulièrement une série de nos réunions de sanctification et semblait y prendre un grand intérêt. Un jour, elle vint à moi et me dit :
- Frère Brengle, je voudrais que vous disiez « consécration » au lieu de « sanctification ». Nous serions alors tous d'accord.
- Mais je ne veux pas dire « consécration », ma soeur, je veux dire « sanctification », et il y a entre ces deux états une différence aussi grande qu'entre la terre et le ciel, entre l'oeuvre de l'homme et celle de Dieu, répondis-je.

L'erreur de cette personne est très répandue. Elle voulait enlever à la religion son élément surnaturel et en rester à ses propres oeuvres.

C'est tout à fait la mode maintenant d'être « consacré » et de parler beaucoup de « consécration ». Des dames charmantes, vêtues de soie, couvertes de bijoux, de plumes et de fleurs, des messieurs parfumés, aux mains et aux vêtements soignés, déclarent d'une voix douce et avec des paroles onctueuses être « consacrés » au Seigneur.

Je ne voudrais point les décourager; il faut cependant que j'élève la voix pour affirmer que la consécration telle que ces gens la comprennent est simplement l'oeuvre de l'homme et ne suffit pas au salut de l'âme.
Elie prépara son autel sur le mont Carmel, tua un taureau, le plaça sur l'autel et versa de l'eau sur le tout. C'était une consécration.
Mais les prêtres de Baal en avaient fait autant, à l'exception de l'eau versée. Ils avaient préparé leur autel, tué leurs taureaux et passé la journée dans les dévotions les plus ardentes ; à vues humaines, leur zèle surpassait même celui d'Elie.
Qu'avait donc fait Elie de plus qu'eux ?
Rien, si ce n'est de verser quelques cruches d'eau sur son sacrifice, acte de foi des plus hardis. Néanmoins s'il en était resté là, le monde n'eût jamais entendu parler de lui ; mais il avait la certitude que Dieu se manifesterait. Il attendit et pria : les nuages s'ouvrirent et le feu de Dieu tomba, consumant l'holocauste, le bois, les pierres et la terre et absorbant l'eau qui était dans le fossé. C'était là la sanctification !

De froides pierres, de l'eau et un taureau mort ne pouvaient glorifier Dieu et convertir une nation apostate ? Cependant quand tout fut consumé par le feu du ciel, « le peuple tomba la face contre terre en s'écriant : C'est l'Éternel qui est Dieu, c'est l'Éternel qui est Dieu ! »

Que sont les plus grands dons, l'éloquence et une soi-disant consécration pour sauver le monde et glorifier Dieu ? « Et quand je distribuerais tous mes biens pour la nourriture des pauvres, quand je livrerais même mon corps pour être brûlé, si je n'ai pas la charité, cela ne me sert de rien. »

C'est Dieu en l'homme qui rend celui-ci capable de Le glorifier et de travailler avec Lui au salut du monde.

Il faut à Dieu des hommes sanctifiés. Sans doute, ils doivent d'abord être consacrés, c'est-à-dire s'être donnés à Dieu afin d'être sanctifiés. Mais quand ils se sont une fois abandonnés à Lui, qu'ils ont livré leur être entier, dans ses profondeurs les plus intimes, leurs souvenirs, leur esprit et leur volonté, leur langue, leurs mains, leurs pieds, leur réputation, non seulement parmi les pécheurs, mais aussi parmi les saints ; quand ils se sont livrés à Lui avec leurs doutes et leurs craintes, leurs sympathies et leurs antipathies, leur disposition à récriminer contre Lui et à s'apitoyer sur eux-mêmes, à murmurer et à se plaindre quand Il met leur consécration à l'épreuve ; quand ils ont réellement fait tout cela, puisqu'ils ont retiré leurs mains de l'autel pour laisser l'Eternel agir, comme Elie après avoir placé son taureau sur l'autel, s'éloigna de l'holocauste, alors ils doivent s'attendre à Dieu et crier à Lui avec une foi humble mais hardie et persistante, jusqu'à ce qu'Il les baptise du Saint-Esprit et de feu. Il l'a promis et Il le fera, mais il faut que les hommes sachent avoir confiance, prier, persévérer dans la foi et si la bénédiction tarde, demeurer dans l'attente. Un soldat, sortant d'une de nos réunions rentra chez lui et tomba à genoux disant : "Éternel, je ne me relèverai point que tu ne m'aies baptisé du Saint-Esprit. » Dieu vit que cet homme était sérieux, qu'il avait besoin du Seigneur plus que de tout autre chose, et Il lui accorda à l'instant même le baptême du Saint-Esprit.

Un capitaine et un lieutenant de ma connaissance trouvant que la « vision tardait », l'attendirent et durant trois semaines passèrent tout le temps dont ils pouvaient disposer à crier à Dieu de les remplir de son Esprit. Ils ne se découragèrent point, mais s'attendirent désespérément à Dieu, ne voulant pas Le laisser aller qu'ils n'eussent obtenu le désir de leurs coeurs. Quelque temps après, je revis le lieutenant et fus confondu des merveilles de la grâce de Dieu en lui. L'esprit des prophètes était descendu sur lui.

« Le Ciel tout entier peut être obtenu par le pillage de la foi, » dit un de mes amis.
Oh ! cette attente à Dieu ! Il est plus aisé de se plonger follement dans telle ou telle oeuvre et d'agir, d'agir, d'agir toujours jusqu'à ce que la vie et le coeur soient comme épuisés dans un travail sans joie et relativement vain, que de s'attendre à Dieu dans une foi patiente et ferme jusqu'à ce qu'Il vienne vous remplir de la force toute puissante du Saint-Esprit. Cette force vous communiquera une endurance, une sagesse et une puissance surnaturelles et vous rendra capables de faire en un jour ce que vous n'eussiez pu réaliser sans elle en mille ans, vous dépouillant en même temps de tout orgueil et vous amenant à donner toute la gloire à votre Seigneur.

S'attendre à Dieu nous dépouille de tout ce qui peut remplir nos coeurs. Peu d'âmes savent ainsi attendre jusqu'à ce qu'elles soient dépouillées entièrement et c'est pour cela qu'il en est si peu qui soient remplies de Dieu. Il en est peu qui sachent supporter l'examen de leur coeur, les humiliations, l'attente, les railleries de Satan qui leur demande : « Où est maintenant votre Dieu ? » Oh ! combien de murmures et d'insinuations du doute accompagnent l'attente du chrétien en son Dieu ! c'est là la vraie cause pour laquelle il y a si peu d'hommes et de femmes ancrés en Jésus-Christ et piliers du temple de Dieu.

Jésus ordonna à ses disciples de « demeurer à Jérusalem jusqu'à ce qu'ils fussent baptisés de la force d'En Haut. » Cet ordre dut paraître pénible à l'apôtre Pierre, si impulsif et si prompt ; il attendit pourtant avec ses frères et tous crièrent à Dieu, s'examinant eux-mêmes, oubliant leurs craintes, les gouverneurs irrités qui avaient fait mourir leur Seigneur, - leurs jalousies, leurs ambitions égoïstes et leurs puérils différends jusqu'à ce qu'ils fussent dépouillés de tout amour-propre, de toute propre justice et de toute confiance en eux-mêmes et qu'ils ne fussent plus qu'un coeur et qu'une âme consumés d'une soif dévorante de Dieu. Alors, soudainement, Dieu vint sur eux ; Il vint avec puissance, Il vint avec le feu, Il vint pour les purifier, les nettoyer et les sanctifier de part en part, pour habiter dans les coeurs, les rendre vaillants en présence de leurs ennemis, humbles dans le succès, patients dans les conflits et les persécutions, fermes et inébranlables en dépit des menaces, des coups, de la prison, joyeux dans la solitude malgré les calomnies, sans crainte et triomphants en face de la mort. Dieu leur donna la sagesse pour gagner des âmes et les remplit de l'esprit même de leur Maître jusqu'à ce que - pauvres et humbles comme ils l'étaient - ils bouleversèrent le monde, et ne s'en attribuèrent aucune gloire.

Ainsi la sanctification consiste non seulement à donner, mais encore à recevoir. Nous sommes par conséquent aussi soumis à l'obligation solennelle de recevoir le Saint-Esprit et d'en être remplis, que de nous donner à Dieu. Mais si nous n'en sommes pas remplis dès le début, gardons-nous de penser qu'Il ne soit pas pour nous. Surtout n'allons pas nous croiser les bras et, dans la subtile et railleuse humilité de l'incrédulité cesser de crier à Dieu. Crions au contraire d'autant plus fort, sondons d'autant mieux les Écritures dans la recherche de la lumière et de la vérité ; examinons-nous et humilions-nous : prenons le parti de Dieu contre l'incrédulité, contre le diable et contre notre propre coeur ; ne nous relâchons point, que nous n'ayons obtenu par violence le royaume des Cieux et qu'Il nous dise : « ô homme, ô femme, grande est ta foi, qu'il te soit fait selon ton désir. »

Dieu aime à être contraint, Il désire être contraint, Il veut l'être par la prière persévérante et la foi de ses enfants. Comme le prophète s'indigna contre l'homme qui ne lança que trois flèches quand il aurait dû en lancer six ou même davantage, le Seigneur doit souvent être affligé, désappointé et irrité contre nous, - en raison du peu que nous demandons parce que nous nous laissons si souvent détourner de Lui sans recevoir la bénédiction que nous faisons profession de désirer, et parce que nous nous contentons de si peu quand c'est le Consolateur lui-même qu'il nous faut.

La Cananéenne qui vint à Jésus pour Le prier de délivrer sa fille du démon est un exemple de foi qui fait honte à bon nombre de chrétiens par la hardiesse et la persistance de cette foi ; elle ne voulut pas s'éloigner sans la bénédiction qu'elle était venue chercher. Jésus d'abord ne lui répondit pas un mot ; Il le fait encore aujourd'hui fréquemment à notre égard. Nous prions et ne recevons pas de réponse ; Dieu reste silencieux. Puis Il la repoussa en disant qu'Il n'était point venu pour ceux de sa race, mais pour les brebis perdues de la maison d'Israël ; c'eût été assez de ces paroles pour faire de la plupart de ceux qui vivent au vingtième siècle de sceptiques blasphémateurs. Il n'en fut pas ainsi pour elle ; sa foi désespérée devint sublime et pourtant Jésus semblait ajouter l'insulte à l'injure quand il dit :
- « Il n'est pas bien de prendre le pain des enfants et de le jeter aux petits chiens. »

C'est alors que la foi de la femme Le vainquit, et Le contraignit par sa réponse.
- « Oui, Seigneur, mais les petits chiens mangent les miettes qui tombent de la table de leurs maîtres. »

Elle était prête à prendre la place du chien et à en recevoir la portion. Gloire à Dieu ! Sa foi triompha et Jésus, saisi d'étonnement, lui répondit :
- « Femme, ta foi est grande, qu'il te soit fait comme tu désires. »

Jésus, dès le commencement, voulait la bénir si sa foi persistait, et c'est ainsi qu'Il veut vous bénir.
Or, il existe deux classes de gens qui professent de se consacrer à Dieu, mais en y regardant de près on constate qu'ils sont consacrés à un travail spécial plutôt qu'à Dieu Lui-même. Ils sont des économes de la maison de Dieu plutôt que l'épouse de son Fils. Gens d'ordinaire très occupés, ils ont peu d'inclination pour une communion réelle avec Jésus. Une première catégorie pourrait être appelée des chercheurs de plaisir. Voyant le bonheur de ceux qui sont sanctifiés et s'imaginant que cette joie provient de ce que ceux-ci font et de ce qu'ils donnent, ils se mettent à les imiter, sans se douter du trésor infini qu'ont reçu ceux qui sont ainsi sanctifiés.

Le secret de celui qui a dit : « Dieu est la portion de mon âme » leur reste caché, et c'est ainsi qu'ils ne trouvent jamais Dieu. lis cherchent le bonheur, mais non la sainteté. Ils veulent à peine admettre leur besoin de sainteté - déclarant qu'ils ont, toujours fait le bien, - or Dieu n'est trouvé que par ceux qui, reconnaissant la profonde dépravation de leur coeur et leurs besoins recherchent la sainteté. « Heureux ceux qui ont faim et soif de la justice, car ils seront rassasiés. » Les gens de cette catégorie sont d'ordinaire de bons vivants, mangeant de bon appétit, très sociables, toujours vêtus à la dernière mode, - des épicuriens religieux.

La seconde classe comprend ceux qui peuvent être justement appelés amateurs de souffrances. Ils cherchent toujours à faire quelque chose de difficile, et croient qu'il est bon d'être perpétuellement à la torture. Semblables aux prêtres de Baal, ils se font des blessures, non pas il est vrai à leur corps, mais à leur âme et à leur esprit ; ils donnent leurs biens pour nourrir les pauvres, leur corps pour être brûlé, et cependant cela ne leur sert de rien. (Il Cor. XIII). Leur service ressemble à un esclavage. Ce n'est pas la joie qu'ils recherchent, mais la douleur. Ils jugent de leur état devant Dieu, non par la joie que produit en eux la présence du Consolateur, qui rend le joug aisé et le fardeau léger, mais plutôt par la souffrance qu'ils sont prêts à endurer ou qu'ils ont déjà endurée ; ils ne sont pas heureux et doutent de leur salut à moins qu'ils n'accomplissent quelque sacrifice qui produise un tourment intérieur. Ils sont morts de mille morts et ne sont pas cependant morts à eux-mêmes. Leur religion ne consiste point en « justice, en paix et joie par le Saint-Esprit », mais plutôt dans l'effort de la volonté et en actes de souffrance.

Ces gens-là ne font pas en réalité de plus grands sacrifices que ceux qui sont sanctifiés ; seulement ils en parlent davantage. N'étant pas morts spirituellement, ils souffrent d'avoir à se soumettre à Dieu, et l'obéissance leur pèse. Leurs épreuves ne surpassent pas non plus celles des chrétiens sanctifiés ; mais elles sont d'une nature différente et procèdent d'une autre source. Ils éprouvent de la tristesse en raison des sacrifices qu'ils ont à faire, tandis que l'homme sanctifié les considère comme une joie pour l'amour de Jésus ; cependant lui aussi souffre, car les tristesses et les malheurs de ce monde pèsent sur son coeur, et sans les consolations et la sympathie que lui prodigue son Sauveur, son coeur se briserait parfois.

Cependant, ces gens-là sont bons et font le bien. Que le Seigneur les bénisse ! Mais ce qui leur manque c'est une foi qui sanctifie (Actes XXVI, 18) qui, par l'opération du Saint-Esprit, les fasse mourir à eux-mêmes et les arrache à jamais à leur misère, apporte la joie et la paix à leurs coeurs fatigués, de sorte qu'en nouveauté de vie ils puissent s'abreuver à la source de la joie, ne plus souffrir de la soif et accomplir joyeusement toutes sortes de sacrifices pour l'amour de Jésus.

C'est donc la sanctification qui nous est nécessaire que Dieu veut que nous possédions et vers laquelle le Saint-Esprit nous presse. C'est une sorte de foi enfantine qui reçoit tout ce que Dieu veut donner, un amour parfait qui joyeusement rend à Dieu tout ce qu'il a reçu de Lui ; - qui préserve l'âme d'un côté de la paresse et de la langueur de l'église de Laodicée et de l'autre du froid esclavage pharisaïque - une foi qui donne la paix intérieure et une vie spirituelle joyeuse et abondante. L'âme qui possède cette foi est toujours vigilante, elle ne se laisse ni enorgueillir par le succès, ni abattre par les déceptions ; elle cesse de se mesurer, ou de se comparer aux autres ; elle regarde à Jésus, marche par la foi, et s'attend à Lui pour réaliser pleinement en temps voulu, les grandes et précieuses promesses de Son amour.

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