« Le
figuier ne fleurira
pas, et il n'y aura rien à récolter
dans les vignes. Le fruit de l'olivier manquera, et
les champs ne donneront point de nourriture ;
plus de brebis dans la bergerie, plus de boeufs
dans les étables ! Néanmoins, je
veux me réjouir en l'Éternel, et
tressaillir de joie dans le Dieu qui me
délivrera, L'Éternel, le Seigneur,
est ma force. Il rend mes pieds aussi agiles que
ceux des biches, et il me fait trouver un refuge
sur les hauteurs. »
Habac.
III,
17-19.
Avez-vous lu le prophète Habacuc ?
Si vous ne l'avez pas lu, lisez-le ; si vous
l'avez déjà lu, relisez-le, comme je
viens de le faire à l'occasion de cette
méditation même dont il nous fournit
le texte. Vous serez certainement frappés
comme moi de l'étonnante actualité de
son langage. Se peut-il que ces pages aient
été écrites il y a deux mille
cinq cents ans ? Ne sont-elles pas
d'hier ? Est-ce des Chaldéens qu'elles
nous parlent, est-ce des Allemands ? Que
pensez-vous de traits comme ceux-ci :
« Sa force - est-il dit de l'envahisseur
- sa force est son Dieu... Il se rit des
forteresses ; il construit des terrasses, et
il les prend... C'est pourquoi il sacrifie à
ses filets et il offre de l'encens à ses
rets »,
c'est-à-dire qu'il met toute sa confiance
dans les moyens de destruction qu'il a
inventés.
La suite des idées est claire et
correspond à la division en chapitres. Le
premier décrit la marche irrésistible
du conquérant et demande à Dieu
pourquoi il permet le triomphe de l'injustice.
Le second chapitre contient une
réponse de Dieu, qui est une
révélation et une justification de
ses voies. Instrument d'un châtiment divin,
l'oppresseur chaldéen sera brisé
à son tour et châtié de son
orgueil, tandis que le juste opprimé vivra
par la foi.
Le troisième chapitre est une
hymne. Le prophète, devenu un psalmiste,
loue l'Éternel ; en un langage plein
d'élévation et de poésie, il
nous fait assister à une apparition de Dieu
pour juger et pour sauver, à une
théophanie, comme on dit, analogue à
celle du Sinaï.
Le dernier met (c'est toujours le mot
important ; quel sera celui de la
présente guerre ?) est celui que nous
avons pris pour texte. Ce n'est pas, comme nous
nous y serions attendus, un cri de triomphe
à propos de la ruine de l'empire
chaldéen ou babylonien et de la
délivrance d'Israël. La pensée
du prophète s'arrête au contraire sur
des perspectives affligeantes au point de vue
terrestre : plus de fruits au figuier ni
à la vigne, plus de nourriture dans les
champs, plus de boeufs ni de brebis dans les
étables ; mais à cette disette,
à cette indigence visible, le chantre
inspiré oppose un victorieux :
« Quoiqu'il en
soit ». « Néanmoins, je
veux me réjouir en l'Éternel et
tressaillir de joie dans le Dieu qui me
délivrera » ; c'est ce
« quoi qu'il en soit » que je
vous apporte aujourd'hui, mes chers frères.
Il est impossible que nos coeurs ne soient pas
émus et comme ballottés par les
vicissitudes de la guerre ; mais il faut qu'il
y ait une région lumineuse où ils se
retirent, des biens supérieurs dont ils
s'emparent dès maintenant par la foi avec la
certitude de ne pouvoir les perdre. Que le Dieu
d'Israël, le Dieu des prophètes et des
apôtres, le Dieu de Jésus-Christ, nous
soit en aide !
« Pour moi, je veux me réjouir
en l'Éternel et tressaillir de joie dans le
Dieu qui me délivrera. Le privilège
du croyant ou du serviteur de Dieu comme tel n'est
pas d'être à l'abri des maux qu'il
décrit ; on sent au contraire qu'il les
partage avec son peuple. Ce n'est pas non plus
d'être insensible à ses misères
et à ses détresses : tout son
livre atteste l'intensité de sa souffrance
patriotique et l'énergie de son indignation
contre l'oppresseur ; mais, tout en
s'attristant de ces malheurs publics et
privés, Habacuc se réjouit en son
Dieu. Il n'est pas précisément au
pouvoir de l'homme de se réjouir ou de s'affliger
à
volonté, mais, grâce à la
faculté d'attention qu'il possède, il
peut diriger sa pensée vers tel objet ou
vers tel autre, et par là modifier
profondément le cours de ses sentiments.
C'est dans cette faculté d'attention que
résident en grande partie le secret et le
fond de la liberté humaine.
Or, c'est vers Dieu que se tourne, c'est
vers lui que se réfugie la pensée du
prophète ; ainsi, déjà au
chapitre 1er, après avoir dit du
conquérant chaldéen :
« Sa force est son dieu », il
oppose à ce dieu de chair, de boue et de
mensonge, le vrai Dieu qui est le sien et
s'écrie, dans un élan sublime, avec
une sainte passion, pour ainsi dire :
« N'es-tu pas de toute
éternité, ô Éternel, mon
Dieu, mon Saint ? » Voilà
comment, et voilà en qui le prophète
se réjouit quand même, lorsque tout
ici-bas semble propre à l'affliger. Nous
imiterons son exemple, dans la mesure où
nous partageons sa foi.
Pour Habacuc et pour nous, un premier
motif de confiance et de joie, c'est ce que Dieu
est : « Mon Dieu, mon
Saint. » Ici-bas, le dieu insolent du
Chaldéen, qui, au fond, n'est autre que
lui-même, peut avoir son heure de
triomphe ; là-haut règne le Dieu
d'Israël, le vrai Dieu, le seul. Ici-bas, trop
souvent l'injustice triomphe ; là-haut,
habite la justice éternelle et
parfaite ; ses yeux sont trop purs pour voir
le mal. Ici-bas, le méchant opprime le
faible ; la violence homicide se donne
carrière ;
là-haut, vers Dieu, résident la
bonté et la miséricorde, dans sa
colère même il se souvient d'avoir
compassion. Les imperfections et les
péchés de l'homme ne peuvent pas plus
obscurcir les perfections de Dieu que les nuages de
notre atmosphère ne peuvent altérer
réellement la clarté du soleil ;
tout ce qu'ils peuvent faire, c'est de la voiler
momentanément.
Or, la région supérieure,
celle de la lumière, est à la
région inférieure, celle des
ténèbres, ce qu'est à notre
terre le soleil, qui est un million de fois plus
grand qu'elle, que dis-je ? ce que lui est
l'immensité sereine des cieux
étoilés, peuplés de soleils
sans nombre. Le ciel, qui enveloppe de toutes parts
la terre dans l'espace, l'enveloppe aussi dans le
temps, puisque, au commencement il y avait Dieu
seul, le Créateur antérieur à
la Création, et puisque, à la fin,
Dieu sera tout en tous. À ce point de vue,
le mal, dont l'énormité nous fascine
et nous accable, n'est pourtant, si nous le
comparons au bien, qu'un accident, une
parenthèse, un désordre passager dans
l'univers de Dieu, un ennemi déjà en
voie d'être vaincu. Celui qui croit cela,
comment ne se réjouirait-il pas en Dieu,
surtout si, comme Habacuc, il a appris à
l'appeler : mon Dieu, mon Saint, ou, comme
nous, chrétiens : mon Père et
notre Père ?
Si vous pouvez, dans la
sincérité de votre coeur, donner ces
noms à Dieu, mon frère ou ma soeur,
vous pouvez aussi, en tout
temps, même dans les larmes, dans
l'anxiété et dans le
dénuement, même « quand il
n'y a ni fruits à la vigne. ni boeufs dans
les étables », vous réjouir
en Lui.
Ceci nous amène à un second sujet
de confiance et de joie, étroitement
lié avec le premier, c'est ce que Dieu a
fait pour nous dans le passé. Le Dieu en qui
l'on se réjouit est le Dieu
révélé. Les partisans d'une
religion purement naturelle ou philosophique
peuvent avoir une croyance raisonnable et
raisonnée en leur dieu ; ils ne se
réjouissent pas en lui ;
généralement ils ne le prient pas et
ne chantent guère des cantiques à sa
louange. Pour que Dieu devienne pour nous un sujet
et une source de joie, il faut que nous le
connaissions par expérience, comme nous
connaissons un ami et un bienfaiteur humain ;
Il faut donc qu'il ait agi et qu'il ait
parlé. Tel est le Dieu d'Habacuc, le Dieu
d'Israël. Nous avons vu que le prophète
se rappelle l'apparition de ce Dieu sur le mont
Sinaï ; il en fait en quelque sorte une
peinture renouvelée. Comment ce Dieu de la
loi, ce Dieu qui veut être seul adoré
et toujours obéi, qui condamne avec tant de
sévérité toute injustice commise envers le
prochain,
pourrait-il considérer avec
indifférence les crimes du Chaldéen,
et les laisser impunis ? Aussi le
prophète l'appelle-t-il le Saint, et il
ajoute : mon Saint, car Dieu est le Saint
d'Israël, et de tout Israélite
fidèle. Le prophète songe aux
promesses immuables que Dieu a faites à
Abraham, au choix qu'il a fait du peuple
d'Israël, aux délivrances magnifiques
qu'il a accordées à ce peuple par
Moïse et Josué, par les juges, les rois
et les prophètes. Certes, Habacuc n'ignore
pas qu'en raison de l'ingratitude et des
infidélités d'Israël, ses
prophètes ont dû lui annoncer de
terribles jugements de Dieu,
précisément ceux qui sont en train de
s'accomplir. Mais il sait aussi qu'à leurs
plus sévères menaces les
envoyés de Dieu ont toujours
mêlé des promesses et que leur dernier
mot n'est pas le jugement, mais, après et
à travers le jugement, le salut. C'est
pourquoi il se réjouit en Dieu, en Dieu qui
le délivrera et qui délivrera son
peuple.
Si tel est le Dieu de l'ancienne
Alliance, que dire de celui de la nouvelle ?
Si nous ne savons pas trouver en lui une source
inépuisable de confiance et de joie,
où est et que signifie notre foi ? La
vôtre, mon frère, est troublée
par les événements actuels ;
vous vous étonnez, vous vous scandalisez de
ce qu'un Dieu juste et bon les ait permis, mais
vous savez bien que Dieu n'est pas l'auteur du mal.
Si dans cette guerre il faut laisser à sa
Providence une
action qu'il ne nous est pas possible de
préciser ni de définir, il faut faire
la part plus grande encore aux passions, aux
ambitions, aux crimes des hommes. Est-il surprenant
que nous ne discernions pas, dans les effets de
causes pareilles, l'expression de la sainte
volonté de Dieu ? C'est ainsi que dans
un tableau où la main d'un enfant ou d'un
novice aurait tout brouillé ou
défiguré, vous ne reconnaîtriez
pas l'oeuvre d'un grand maître. Tels sont, en
général, les événements
de l'histoire humaine ; le bien et le mal, le
divin et l'humain s'y mêlent dans des
proportions infiniment diverses : c'est
pourquoi cette histoire ne reflète pas
l'image de Dieu. Mais il y a une exception. Il y a
un homme en qui la parfaite image de Dieu a
resplendi, c'est Jésus-Christ. Il y a une
page de l'histoire qui traduit clairement et
fidèlement la pensée et la
volonté de Dieu à l'égard des
hommes, c'est celle qui nous raconte la vie, la
mort et la résurrection du Sauveur.
Il y a un jour où Dieu nous a
ouvert tout son coeur et nous a fait
connaître ses véritables intentions
à notre égard, c'est le jour
où Jésus-Christ a donné sa
vie, lui juste, pour nous injustes, afin que
quiconque croit en lui ne périsse point,
mais qu'il ait la vie éternelle.
(1
Pierre III, 18 ; Jean
III, 16.) Si nous croyons cela,
comment ne pas nous réjouir en Dieu ?
Est-il un méchant, sur la
terre ou dans l'enfer, qui puisse nous ôter
ce que Dieu nous a donné ? Est-il au
pouvoir d'un usurpateur quelconque de nous
séparer de l'amour du Père et
d'anéantir le royaume que le Fils de Dieu a
fondé par sa victoire sur le
péché et sur la mort ?
« Le Seigneur est ma force, dit Habacuc,
il rend mes pieds aussi agiles que ceux des biches,
il me fait trouver un refuge sur les
hauteurs. » Oh ! comme la joie
triomphante du prophète doit faire honte
à ces chrétiens qui, en principe,
selon la parole de saint Paul, sont
déjà « ressuscités
avec Jésus-Christ, déjà
transportés avec lui dans les lieux
célestes »
(Eph.
II, 6.), et qui semblent croire
tout perdu si le communiqué d'aujourd'hui
est moins favorable que celui d'hier, ou si la
Bulgarie achève de se rendre ou de se livrer
à ces puissances d'iniquité à
qui elle ressemble !
Toutefois, je le reconnais, notre joie serait
bien incomplète, si elle reposait uniquement
sur les grandes choses que Dieu a faites pour nous
dans le passé. Les bienfaits de Dieu dans le
présent, notre communion actuelle avec lui,
sont une nouvelle et abondante
source de confiance et de joie. Ici encore, nous
suivons l'exemple et nous invoquons
l'expérience d'Habacuc. Il n'est pas
seulement un disciple fidèle des anciens
prophètes, il est prophète
lui-même. Après avoir invoqué
l'Éternel et attendu sa réponse, il
reçoit une révélation
personnelle et directe qui lui déclare,
comme nous l'avons rappelé, que l'orgueil du
méchant sera châtié et que le
juste vivra par la foi, en attendant son
entière délivrance. À
l'ouïe de cette parole de Dieu, le
prophète tremble, comme il convient à
un homme pécheur, ses genoux
s'entre-choquent, ses os semblent près de se
dissoudre. Pourtant, ce n'est pas la crainte qui
domine et qui demeure, c'est l'action de
grâces ; car le prophète entonne
un cantique dont les derniers mots, ceux
mêmes que nous méditons, expriment la
plus sereine et la plus joyeuse confiance.
Nous ne sommes pas des prophètes,
mes frères, et nous n'avons pas le
bénéfice d'une inspiration
surnaturelle. Mais, si nous sommes
chrétiens, nous sommes des enfants de Dieu,
et les grâces qui nous sont accordées
dépassent de beaucoup celles dont
jouissaient les serviteurs de Dieu les plus
privilégiés de l'ancienne Alliance.
Car Dieu s'est manifesté à nous avec
tout son amour de Père. Jésus-Christ
n'est pas seulement le Sauveur qui nous a
rachetés par son sang il y a deux mille ans,
il est celui qui demeure avec nous jusqu'à
la fin des siècles, qui nous sauve de jour
en jour et d'heure en heure. Le
Saint-Esprit nous a été donné
afin qu'il habite avec nous éternellement et
qu'il nous communique les trésors de salut
et de vie qui sont en Christ. L'amour de Dieu
répandu dans nos coeurs par cet Esprit,
l'assurance du pardon de nos péchés
et de notre relation filiale avec le Père
céleste, la victoire sur la tentation,
l'assistance qui nous rend capables d'accomplir la
volonté divine et d'être en
bénédiction à nos
frères, la ferme espérance de la vie
éternelle, voilà quelques-unes des
grâces qui nous sont acquises, qui nous
appartiennent de droit, puisque Jésus-Christ
est à nous et que nous sommes à lui.
Si nous sommes privés de ses
grâces, ou si nous en sommes pauvrement et
incomplètement pourvus, c'est par notre
faute ; c'est l'effet de notre
désobéissance et de notre
incrédulité, car les deux grands
moyens de grâce et de communion avec Dieu
sont la foi et l'obéissance. La foi :
« Toutes choses sont possibles à
celui qui croit.... Si vous aviez de la foi, gros
comme un grain de moutarde, vous transporteriez des
montagnes. »
(Marc
IX 25 ; Luc
XVII, 6. )
L'obéissance : « Si vous
gardez mes commandements, dit Jésus, vous
demeurerez dans mon amour, comme je garde les
commandements de mon Père, et je demeure
dans son amour. Demandez alors ce que vous voudrez,
et cela vous sera accordé. »
(Jean
XV, 7.)
Si nous remplissons ces conditions (et
ne voulez-vous pas avec moi, et surtout avec l'aide
de Dieu, les remplir dès aujourd'hui ?)
comme nous nous réjouirions en Dieu en tout
temps ! Qu'importe, en effet, pour rappeler
les paroles du prophète, que les fruits du
figuier, de la vigne et de l'olivier fassent
défaut si, devenus des sarments du vrai cep
et demeurant en lui, Jésus-Christ porte par
nous des fruits abondant s ! Qu'importe que
nous soyons soumis à des privations qui
n'iront pas, nous pouvons l'espérer de la
fidélité de Dieu, jusqu'à
celle du pain quotidien, si nous sommes nourris du
Pain de vie ! Qu'importe que les eaux
débordées de l'adversité
menacent de nous engloutir, si Dieu, qui est notre
force, nous donne des pieds agiles comme ceux des
biches, et nous fait trouver un refuge dans les
hauteurs ! De tout temps les chrétiens
ont, par la foi, triomphé en Dieu, au milieu
des plus cruelles afflictions. Je me rappelle une
martyre huguenote, Philippe de Luns, revêtant
ses habits de fête pour monter sur
l'échafaud ; un galérien
protestant, de Marolles, écrivant, du fond
d'un cachot obscur et infect, que Dieu lui fait
faire tous les jours des repas délicieux en
le comblant de ses grâces ; Adèle
Kamm, dont la jeunesse ne fut qu'un long et
douloureux martyre, trouvant dans sa foi le secret
d'une joie habituelle et abondante, et la force
d'aider et de consoler ses compagnes d'infortune.
Après cela, comment le plus
éprouvé et le plus
désolé d'entre nous pourrait-il se
croire privé ou dispensé de se
réjouir en Dieu ?
J'ai peut-être été trop loin
quand j'ai semblé dire : qu'importent
les événements actuels ? Certes
des malheurs comme ceux qui fondirent sur
Jérusalem au temps de ses derniers rois, ou
comme ceux qui accablent aujourd'hui la France,
importent beaucoup. Pour le croyant, ils sont un
sujet de trouble, pour l'incroyant, un
prétexte d'incrédulité. Ils
obscurcissent l'honneur de Dieu. Aussi Dieu ne nous
demande-t-il pas de les accepter comme
définitifs et irréparables. Au
contraire, il nous en promet la réparation.
Il vient, par sa révélation, d'en
donner l'assurance au prophète. C'est ce qui
a fait jaillir de son coeur une hymne d'action de
grâce. Voici donc le dernier sujet de
confiance et de joie : ce que Dieu fera demain
pour nous. Ses promesses s'adressent à
l'individu et à la
société ; elles embrassent la
vie présente et la vie à venir ;
elles répondent aux voeux de notre
conscience et aux besoins de notre coeur.
Notre conscience exige que justice soit
faite elle sera faite en son temps ; d'une
façon partielle et préparatoire
ici-bas, puis tout à fait, dans l'éternité,
lorsque le Christ reviendra pour achever son oeuvre
et établir définitivement son
règne. Alors toute grandeur orgueilleuse
sera confondue et anéantie, toute gloire
égoïste et charnelle changée en
opprobre, toute inhumanité et toute
cruauté châtiée sans merci,
toute hypocrisie démasquée ;
alors aussi les humbles et les petits
hériteront le royaume, les affligés
seront consolés, les pacifiques seront
appelés fils de Dieu. Dans ces nouveaux
cieux et cette nouvelle terre, où la justice
habitera, toutes les questions qui nous troublent
aujourd'hui seront résolues, toutes nos
larmes essuyées, tous les besoins de nos
coeurs apaisés ; nous serons pour
toujours avec le Seigneur et avec ceux que nous
aimons en lui ; le contemplant tel qu'il est,
nous lui deviendrons semblables. Nous ne pouvons
nous faire qu'une idée bien imparfaite de
cette perfection future, mais nous savons qu'elle
dépassera tout ce que nous pouvons imaginer
et penser ; Jésus-Christ
lui-même, notre Frère
aîné et notre Rédempteur, est
le garant de notre espérance et notre
précurseur dans la félicité et
dans la gloire. En attendant, nous sommes
appelés à vivre par la foi. La foi
compte sur ce que Dieu est, elle s'approprie ce
qu'il a déjà fait pour nous et en
nous de jour en jour ; elle rend grâce
d'avance de ce qu'il fera demain. « Le
juste vivra par la foi. » ( Hab.
Il, 4.) Cette parole est comme
le centre du livre
d'Habacuc ; l'apôtre Paul en a fait la
pierre angulaire de sa doctrine de la
justification ; on peut dire qu'elle
résume l'expérience des serviteurs de
Dieu, depuis le commencement jusqu'à la fin
des temps. Qu'elle soit désormais
l'inspiration et la règle de votre vie et de
la mienne !
Amen.
Oratoire, 10 octobre 1915.
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