Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

CHAPITRE X

Promesse de libération

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Je serai avec toi pour te sauver et te délivrer, dit l'Éternel. Je te délivrerai de la main des méchants. Je te sauverai de la main des violents.
(Jér. 15. 20-21.)
 
L'Éternel des Armées éprouve le juste... C'est à Toi que je confie ma cause. Chantez à l'Éternel, louez l'Éternel ! Car Il délivre l'âme du malheureux de la main des méchants.
(Jér. 20. 12-13.)


 Il faisait beau et je mis à profit les rayons du soleil pour me remettre à « chasser ». J'étais absorbé par cette occupation, quand j'aperçus le général Hsiao-Keh, venant du village voisin, accompagné de son garde de corps ; j'étais loin de me douter qu'il viendrait vers moi, aussi continuai-je mes recherches agressives. Quand il me vit, il se dirigea brusquement vers moi, et, à mon grand désappointement, il me surprit au milieu de cette peu intéressante occupation.
- Comment allez-vous maintenant ? demanda-t-il.
- Je tousse un peu moins, répondis-je, mais je n'ai aucune force dans mes membres.

Alors il se hâta d'ajouter : « Nous avons décidé de faire, à l'avenir, des différences entre les pays. Vous êtes un citoyen suisse, et nous savons que la Suisse n'est pas un pays impérialiste. Vous n'avez pas de traité unilatéral avec la Chine ; vous n'y avez pas non plus de concessions exterritoriales, nous avons donc décidé de vous libérer demain. »
Puis il se tourna vers le père Kellner qui se trouvait tout près de là, en disant : « Nous n'allons pas relâcher le prêtre qui est là ; c'est un Allemand, et le fascisme n'est rien d'autre que de l'impérialisme. Hitler aide notre ennemi Chiang-Kai-Shek à rendre la Chine aussi impérialiste que l'Allemagne ! »

Là-dessus, il s'éloigna avec son aide de camp, me laissant très perplexe et rempli de sentiments contradictoires. Je demandai à mon gardien la permission d'aller auprès du père Kellner, assis un peu plus loin. « Avez-vous entendu ce que le général vient de dire ? » lui demandai-je.
- Oui, tout, répondit-il en me prenant la main et en me félicitant.
- « Vous avez de la chance ! disaient les autres en m'entourant. » C'était si soudain que je ne savais trop que penser. Cela me semblait trop beau pour être vrai ; puis me souvenant avec quelle félonie nous avions été joués autrefois, j'avais peur de me réjouir trop, et d'être déçu plus tard. Pourtant, le général en personne s'était détourné de son chemin, pour m'apporter cette nouvelle, et il avait fait sa déclaration en présence de ses hommes, de manière à être entendu des gardiens et des prisonniers !

Quand nous fûmes de nouveau en route, j'eus l'occasion d'en parler à M. Keng et je lui demandai. « Qu'en pensez-vous ? »
Ils vont sûrement vous relâcher, me dit-il, mais ne comptez pas trop sur leur « demain », cela signifie plutôt prochainement.

Quand j'étais encore à Chenyûan, le pasteur Tsao, de l'alliance chrétienne missionnaire, visita notre station, et il nous parla des expériences qu'il avait faites quand, pendant plusieurs mois, il fut prisonnier des bandits. Au début, il était très optimiste, et il était sûr que le Seigneur allait le délivrer promptement. Mais plusieurs jours se passèrent ; alors en pensant que Dieu avait créé les cieux et la terre en six jours et s'était reposé le septième, il conclut que le Seigneur le délivrerait le septième jour ; mais il n'en fut rien. Puis ses pensées se portèrent sur les dix jours qui s'écoulèrent entre l'ascension de Jésus et l'effusion du Saint-Esprit ; il reprit donc courage, mais les dix jours se passèrent sans apporter le soulagement souhaité. Les semaines s'écoulèrent et il se souvint qu'au moment du déluge, la pluie était tombée sur la terre pendant quarante jours et quarante nuits. Mais ce temps aussi s'écoula, et le pauvre homme était toujours en captivité. Enfin plus tard, quand il considéra sa situation au point de vue spirituel, il se mit entièrement à l'école de Dieu ; et le résultat fut celui-ci : au jour de sa libération, il était un homme transformé, entièrement donné à Christ et brûlant d'ardeur pour travailler au salut des âmes.

Je fis une expérience semblable et je me demandais quand Dieu pourrait enfin opérer ma délivrance. J'avais été fait prisonnier au jour anniversaire de mon départ pour la Chine, et je m'étais demandé si je serais aux mains de mes ennemis pendant autant de jours qu'il m'en avait fallu pour accomplir mon voyage ; dans ce cas j'aurais dû être délivré le 13 novembre ! Le temps passa, puis vint Noël, le Nouvel an, le 21 mars, enfin le 9 mai (jour qui avait été fixé pour notre exécution).

En calculant d'après les lunaisons, nous avions pu savoir où placer la Semaine sainte, et le lendemain dont avait parlé le général, tombait justement sur le dimanche des Rameaux, jour anniversaire du pasteur qui avait fait mon instruction religieuse, et qui avait eu une si grande influence sur ma formation spirituelle.

Ce jour-là, nous arrivâmes de bonne heure dans un grand village, et, en passant près d'un puits, nous vîmes des camarades occupés à soulever un grand baquet d'eau. J'étais très altéré et je les priai de me permettre de boire, mais ils se hâtèrent de m'expliquer que cette eau était empoisonnée, donc imbuvable. Ils accusaient de ce méfait les soldats du gouvernement qui s'étaient retirés devant les rouges.

Derrière la maison où nous étions logés se trouvait un autre puits, et les camarades hésitaient naturellement à boire de cette eau ; ils demandèrent à la maîtresse de maison si cette eau était potable et elle leur assura qu'ils ne couraient aucun danger. Désireux de prendre pour eux-mêmes toutes les précautions, ils la forcèrent à en absorber tout d'abord un plein bol.
On nous logea dans une chambre située à l'étage supérieur, mais, par deux fois menacés par des avions, nous avons dû descendre les affreux escaliers, ce qui nous obligeait à faire un effort dépassant nos forces.

L'argent qu'on nous avait donné quelques jours auparavant ne nous avait pas été d'une grande utilité, car il était difficile de changer des dollars. Le maître de la maison consentit à nous acheter quelques aliments, et il partit, muni de l'un de nos dollars, pour chercher à nous procurer des biscuits, des gâteaux, du macaroni, des pommes de terre ou des oeufs, mais il revint découragé en nous annonçant que tout avait été vendu. Plein de pitié, semblait-il, pour notre situation, il offrit de nous vendre un morceau de lard et de nous le faire cuire. Il faisait déjà nuit quand il nous l'apporta, mais nous l'avons mangé avec grand appétit. Le brave homme nous annonça qu'il n'avait pas pu changer notre dollar, et il nous proposa de lui laisser la pièce tout entière pour les vingt cents de lard qu'il nous avait fourni. Le prêtre se défit d'un bon chandail (probablement fabriqué en Europe), valant plusieurs dollars, et voulant participer à la dépense commune, il l'offrit au bonhomme. Mais le vêtement était si plein de vermine que notre hôte ne voulut pas même y jeter un coup d'oeil ; comme le prêtre désirait quand même s'en débarrasser, il le lança par la fenêtre. Il fut sans doute repris par celui qui, tout d'abord, l'avait dédaigneusement refusé. Après une longue discussion et des appels à sa conscience, il nous donna encore un peu de lard et quelques sous ; il réussit néanmoins à nous escroquer un demi-dollar.
Dès que nous fîmes halte, je communiquai au capitaine la promesse que m'avait faite Hsiao-Keh, mais il se montra très sceptique et me répondit : « Aussi longtemps que je n'ai rien reçu d'officiel, vous resterez mon prisonnier ! »

Le lendemain, dès avant l'aube, nous avons dû nous mettre en route ; les camarades étaient pleins d'espoir, car en avait chuchoté que nous nous dirigions vers Kutsing, siège d'une préfecture. Ce nom m'était familier car il était sur notre liste de prière. Mes amis, M. et Mme Curtis y avaient été autrefois, mais je me rappelais que, depuis plusieurs années, cette station avait été inoccupée ; j'avais donc l'espoir qu'aucun Européen ne serait en danger.

L'étape fut longue et pénible ; et comme c'est souvent le cas quand on traverse cette partie de la province de Yunnan, nous eûmes à lutter contre un vent violent. Quand il soufflait avec force à travers quelque brèche de la montagne, c'était difficile de se maintenir en selle. Dans les vallées il nous arrivait d'être pris dans des tourbillons de poussière qui obligeaient les camarades à se protéger la figure avec des mouchoirs de soie. Cette province mérite sûrement sa réputation, car les Chinois parlent du vent de Yunnan, de la pluie de Kweichow et du soleil de Szechwan.

Après avoir escaladé une haute colline, nous avons pu admirer la vaste plaine de Kuising. Du point où nous étions, on ne pouvait pas apercevoir la ville, et des passants nous apprirent qu'elle était située à une douzaine de kilomètres du bas de la montagne. Il fallut donc descendre à pied cette pente abrupte, et une fois dans la plaine, nous avons dû nous hâter pour regagner le temps perdu. Nos chevaux trottaient à la suite des camarades, mais voilà qu'à notre grande surprise, nous n'étions pas sur le chemin de Kutsing.

Bientôt nous aperçûmes, dans le lointain, un village nommé Nancheng, localité à l'apparence prospère. À son entrée se trouvait un bâtiment dont la blancheur brillait aux rayons du soleil, et dont le pignon était surmonté d'une croix. Nous avons échangé nos remarques, le prêtre et moi, et supposé, avec raison du reste, qu'il y avait là une station missionnaire catholique. Les prêtres avaient pu s'enfuir, mais un groupe de personnes se tenait devant l'église. Le prêtre Kellner chevauchait en avant et ces gens le saluèrent. Ils me prirent évidemment aussi pour un prêtre, car une petite fille m'appela « Sheng-Fu » (père spirituel) en courant à côté de mon cheval pendant un certain temps. Cette marque de sympathie était vraiment touchante.

Nous ne nous sommes pas arrêtés, mais en traversant rapidement les rues, nous avons subi un peu du supplice de Tentale, en voyant tant de bonnes choses exposées en vente. Plus tard, le prêtre me demanda si j'avais vu ceci ou cela, autant de choses qui lui avaient fait venir l'eau à la bouche et que j'avais aussi remarquées moi-même.

On nous fit parcourir encore quelques kilomètres et nous arrivâmes à Chungkiai, village populeux où nous fûmes conduits dans le temple ; notre logis était une pièce latérale ouvrant sur une cour. La chambre était agréable, meublée de quatre montants de lit malheureusement inutilisables, car ils n'avaient point de planches. Nous en réclamâmes, mais on nous répondit qu'il était impossible de nous en procurer ; nous n'avions donc rien d'autre à faire que d'installer notre lit de paille sur le sol. Il fallait pour cela renverser les montants de lit et les mettre les uns sur les autres pour avoir la place suffisante pour étendre notre paille. Quand on a besoin de feu et qu'on n'a pas de brasier, un sol de terre battue est préférable au plancher, car alors on peut se chauffer sans courir le risque de mettre le feu à la maison.

Il y avait un grand tas de bois dans la cour et on nous donna la permission d'en prendre. Nous avions encore avec nous notre précieux morceau de lard ; on nous prêta un pot de terre pour l'y faire bouillir ; après en avoir pris une tranche, nous avons découpé le reste pour en faire notre déjeuner du lendemain. Les gardiens étaient heureux de conserver du feu pendant toute la nuit, et de temps en temps, l'un ou l'autre d'entre eux se glissait dans la chambre pour tenir compagnie à notre geôlier. Au matin, le prêtre alla chercher le bol où nous avions conservé notre lard, mais voilà qu'il n'en restait plus que quelques parcelles ; inutile de dire que nous avons été naturellement très désappointés. Un des gardiens, à n'en pas douter, aurait certainement pu nous donner des nouvelles de notre viande. Malgré mes conseils, le prêtre se plaignit au capitaine qui répondit nonchalamment : « Ce sont probablement des rats » - Oui, nous avions bien entendu dire que des rats étaient capables de découvrir un récipient pour se régaler du contenu, mais jamais encore on ne nous avait dit que ces animaux remettaient le couvercle à sa place, après avoir mangé ! En général, les gardiens n'avaient pas l'habitude de se servir de cette manière.

Tous les camarades avaient profité de cette journée de repos pour prendre des bains et laver leurs vêtements, et après le déjeuner on nous demanda si nous ne voulions pas le faire aussi. Ils nous apportèrent un « tub » peu profond et un baquet d'eau, puis le prêtre, et moi, nous avons eu le plaisir de nous éponger l'un l'autre ; ce fut un bienfait pour nous, d'autant plus que depuis plusieurs jours nous n'avions pas même pu nous laver la figure.
Après le dîner, un messager apparut et nous dit : « Le général Hsiao-Keh vous invite à dîner avec lui ce soir ! et vous ferez bien de vous astiquer un peu » suggéra-t-il.
En désignant mes habits sales, je lui répondis : « Nous n'avons pas de vêtements de rechange. »
- Oh ! vous savez, nous autres communistes, nous ne faisons pas de cérémonies. Nous viendrons vous prendre quand il sera temps, dit-il et il partit.

À la tombée de la nuit, on vint nous chercher, et tandis que nous descendions la rue du village, nous rencontrâmes le juge Wu qui était aussi invité. Il se joignit à nous et se montra très aimable. Nous eûmes un peu de peine à trouver le domicile du général et ce ne fut qu'après avoir pénétré dans plusieurs cours que nous avons enfin réussi à le découvrir.

On nous introduisit ; le général était assis en compagnie de quelques hommes dans une grande chambre de réception. À notre arrivée, il nous fit simplement un petit signe de tête en nous disant de nous considérer comme tout à fait à la maison. En attendant de reprendre nos occupations autour d'une table carrée basse, nous nous sommes assis sur de petites chaises auprès d'un feu de charbon de bois. Quelques nouveaux hâtes firent leur entrée ; parmi eux se trouvait le général Chang.

Dans ce milieu il n'y avait pas de contrainte, on se sentait libre et à l'aise. La vaisselle et les bâtonnets tout à fait ordinaires, étaient déposés en piles, sur la table, prêts à être distribués à la ronde. Il y avait place pour huit personnes assises, mais dix se mirent à table et, pour y arriver, deux d'entre nous occupèrent les coins ; les places furent désignées sans distinction de rang. Quelques autres hommes furent invités à s'asseoir avec nous, mais ils refusèrent ; de leur nombre était M. Chou, qui s'assit en dehors du cercle et s'abstint de se mêler à la conversation ; il répondait par un oui ou un non quand une question directe lui était posée.

Les camarades ne se conformèrent pas à la façon habituelle de procéder, quand, en Chine, il s'agit d'un repas de fête, et qui consiste à apporter les plats successivement ; ils ne suivirent pas non plus la coutume ordinaire, où tout est mis à la fois sur la table. Au lieu de cela, les plats furent apportés à intervalles irréguliers, sans aucun souci de l'ordre du service. On offrit aussi du vin, mais peu de personnes en prirent

On entendait un brouhaha continuel de voix ; de temps en temps Hsiao-Keh posait au prêtre ou à moi-même une question directe. Ils auraient voulu connaître la tactique militaire de l'Allemagne, et ils pouvaient à peine croire le père Kellner quand il leur déclara que, en sa qualité d'ecclésiastique, il n'avait pas été astreint à faire du service. Ils insistèrent en prétendant qu'il avait dû être soumis à quelques exercices quand il était à l'école, mais le prêtre déclara qu'il n'en était rien. Puis, se tournant vers moi, le général remarqua : « La Suisse n'a pas d'armée permanente, vous n'avez donc pas été obligé de faire du service ! » Cette réflexion m'épargna l'ennui de donner une explication qui aurait facilement pu être mal interprétée. Puis la conversation roula sur la différence qui existe entre le protestantisme et le catholicisme, mais comme le sujet ne paraissait pas intéresser les camarades, il fut bientôt laissé de côté, heureusement pour nous.

Vers la fin du repas, Hsiao-Keh se tourna de nouveau vers moi et me dit : « Nous avons la ferme intention de vous relâcher demain ! » Un chef rouge, nommé Wang, placé près de moi, s'était montré très aimable. Peu après la remarque faite publiquement par le général, il me dit dans une conversation particulière. « Nous ne pourrons pas vous relâcher demain, mais dans un jour ou deux ce sera tout à fait possible. »

Pendant le repas, les camarades étaient entrés et sortis librement, tandis que d'autres, debout devant la fenêtre, tendaient le cou pour voir ce qui se passait à l'intérieur, ne se gênant pas pour faire des remarques sur ce qu'ils voyaient ; ils exprimaient l'étonnement que leur causait la présence des deux Européens.

Quand nos gardiens vinrent nous chercher pour nous reconduire à notre cantonnement, nous avons salué la compagnie, remercié notre hôte et quitté la maison. Nous avons parcouru lentement la longue distance qui nous séparait de notre prison. Le fait d'avoir été invité par l'élite du parti avait considérablement augmenté notre prestige, et les gardiens se montrèrent pleins de déférence.

Le lendemain il fallut partir avant l'aube, et, au point, du jour, nous avions déjà parcouru une grande distance. Nous devions avoir pris la direction de l'ouest, car le soleil se leva derrière nous.

Quand la troupe se déplace, des éclaireurs sont envoyés en avant pour reconnaître la route, et quand ils ont établi le véritable itinéraire, tous les chemins de traverse sont bloqués au moyen d'une grande feuille de papier blanc attaché à une branche. Parfois une flèche à la craie, dessinée sur un rocher, indique à l'armée la route à suivre. Ce jour-là, le conducteur manqua le sentier et nous fit suivre une fausse piste. Après avoir parcouru une certaine distance sans avoir rencontré les signes habituels, nous en avons conclu que nous nous étions fourvoyés. On nous fit arrêter brusquement et nous en étions à nous demander ce qui était arrivé, quand le conducteur reparut, revenant sur ses pas et suivi de toute la colonne. Quand ce fut notre tour de marquer le tournant de cette épingle à cheveux mouvante, nous avons fait volte-face et, comme tous les camarades, nous sommes revenus en arrière. Rien de plus intéressant que de voir cette procession passer devant nos yeux ; il n'y avait pas deux êtres pareils, - les équipements, les uniformes, les visages, tout était différent ! Nous assistions à une véritable pantomime ; parfois une brèche apparaissait dans la colonne ; alors il arrivait au traînard de faire un faux pas en courant pour regagner sa place, et cet incident suffisait pour provoquer un immense éclat de rire.

Le repos de la nuit fut bien écourté par la diane qui fut sonnée avant minuit ; après nous avoir fait attendre un peu, l'ordre du départ fut donné juste au moment où la lune apparaissait à l'horizon ; nous avons donc dû voyager pendant tout le reste de la nuit. Peut-être voulait-on éviter les attaques aériennes, mais si tel était le but, il ne fut certainement pas atteint, car après le lever de l'aurore, plusieurs avions survolèrent la colonne en marche. Après avoir traversé une grande ville, on nous fit loger dans des maisons disséminées dans la campagne.

Le jour suivant nous étions de nouveau en chemin pendant le clair de lune, mais à l'aube on nous fit reposer dans la maison d'un propriétaire foncier. Une jolie chambre nous fut assignée, pour le père Kellner et moi-même ; à peine arrivés nous nous sommes jetés sur le lit où nous fûmes bientôt profondément endormis. Au milieu de la matinée, un envoyé du juge arriva et me réveilla sans aucun ménagement, pour me demander d'écrire mon nom en anglais et en chinois : « Cela n'a rien à faire avec votre libération », me dit-il ; curieuse façon de m'encourager !...

Pendant les derniers jours, les gardiens me regardaient avec plus de bienveillance, et, une fois, ils me firent signe de m'asseoir auprès d'eux pour avoir une petite conversation : « Comment se fait-il qu'avec un si gros nez, vous ne soyez pas un impérialiste ? » essayèrent-ils de me demander. Un nouveau venu dans l'état-major du capitaine, s'intéressait tout particulièrement au christianisme, et nous eûmes une longue conversation à ce sujet. Pendant que nous étions ainsi occupés, on fit appel à des volontaires, chargés de partir en expédition de pillage dans les environs, afin de faire la chasse aux oppresseurs du pauvre peuple. Un appel de ce genre était toujours le bienvenu, car c'était l'occasion d'un enrichissement personnel ; mais, ce jour-là, il y eut peu d'enthousiasme ; les camarades étaient tous très fatigués.
Quelques-uns, cependant, répondirent et revinrent bientôt avec un prisonnier ; c'était justement le propriétaire de la maison où nous étions logés. Ils se mirent à le questionner et à le torturer pour le forcer à déclarer où son argent était caché.

L'interrogatoire n'était pas terminé que le son du clairon retentit de nouveau, annonçant un départ tout à fait inattendu. Les camarades avaient eu quelque peine à enfoncer des clous dans le mur pour y suspendre leur équipement. Je me hâtai d'éveiller le prêtre, et, dans la mi-obscurité de notre chambre sans fenêtre, nous avons rassemblé nos bagages.

Les gardiens se montraient de plus en plus impatients de nous faire sortir. Puis ils nous poussèrent en avant et nous firent avancer aussi vite que possible, avant même que les palefreniers fussent arrivés de leur cantonnement avec nos montures. À ce moment nous entendîmes distinctement le bruit d'une fusillade.

Après avoir quitté la grand'route, on nous fit prendre un étroit chemin de montagne ; l'ordre de se hâter était envoyé en avant et en arrière le long de la colonne, ce qui produisit une folle poussée en avant. La route était envahie par de hautes herbes et les longues branches des arbres montraient qu'ils n'avaient pas été taillés de longtemps. Nous devions être continuellement sur nos gardes, de peur d'être désarçonnés. Nous montions toujours, harcelés par l'ordre sans cesse répété de nous hâter davantage. Si nous arrivions sur un terrain plat ou sur une pente, les camarades prenaient le pas de course et les chevaux le galop, sans se soucier de maintenir leur rang dans la colonne de marche.

En arrivant au sommet de la crête, nous avons passé près de Hsiao-Keh accompagné de ses hommes de confiance, occupés à garder le passage en y installant des mitrailleuses. Il était si absorbé par les mesures de protection qu'il ne remarqua presque pas notre passage.

Sur une certaine distance, la route courait à travers un terrain plutôt plat, mais bientôt nous fûmes dans une région montagneuse et notre sentier devint de plus en plus rapide. Comme nous avions dû partir sans avoir pu prendre notre repas, les cuisiniers avaient rempli de riz, de lard, et d'autres viandes de nombreux récipients. Maintenant l'ascension devenait de plus en plus difficile à cause de la rapidité de la marche et de l'inclinaison toujours plus forte de la pente, si bien que, les uns après les autres, des seaux de nourriture furent répandus sur le chemin ; notre passage était littéralement marqué de riz et de viande.

Au milieu de tout cela, des avions nous survolaient, accomplissant leur mission de reconnaissance et de bombardement. Si nous marchions, nous courions le danger d'être bombardés ; si nous nous abritions, nous risquions d'être rattrapés par l'infanterie. Nous avons croisé plusieurs groupes de soldats rouges se préparant à s'opposer à l'avance de l'ennemi qui nous poursuivait, tandis que le gros de l'armée fuyait.

Enfin le sommet fut atteint ; puis il fallut entreprendre la terrible descente, continuellement menacés par les avions qui nous harcelaient. À cause de la faiblesse de mes membres, il m'était difficile de descendre de cheval et de me remettre en selle, cela me prenait beaucoup de temps ; aussi, une fois, au moment d'une alerte, le palefrenier me conduisit tout simplement avec le cheval sous un arbre tellement bas, que je dus m'aplatir sur le dos de ma monture ; de cette façon nous avons perdu moins de temps.

Dans la confusion de la fuite, notre compagnie avait perdu son avance, et il fallut se livrer à une course précipitée pour retrouver notre rang. Les camarades avaient traîné à leur suite un prisonnier bien vêtu ; l'effort avait dépassé les forces du pauvre homme qui était complètement épuisé ; ils ne trouvèrent rien de mieux à faire que de le tuer là, au bord du chemin. À la fin, nous avons atteint le pied de la colline, et longé une vallée bien cultivée où la route était meilleure. Il fallut néanmoins continuer au pas accéléré, bien qu'une chaîne de montagnes semblât nous séparer de l'ennemi.

Avant la nuit, nous avons atteint un village, où nous avons pu prendre du repos. Nous avions été privés de notre dîner, il va donc sans dire que nous étions d'autant plus désireux de prendre notre repas du soir. On nous donna l'ordre d'aller au lit de bonne heure, en prévision d'un nouvel effort à fournir pendant la nuit.

Réveil à minuit ; puis après nous avoir fait attendre frissonnants dans l'air froid de la nuit, on nous donna l'ordre de partir ; de nouveau, nous avons parcouru plusieurs kilomètres avant le lever de l'aurore. Le prêtre et moi, nous avions peine à nous tenir à cheval, tant nous étions encore somnolents.

Le samedi 11 avril, nous sommes arrivés en vue du grand village de Tawan. Une magnifique plaine embellie de plantations de pois et de haricots nous en séparait pour la contourner, nous avons dû prendre des sentiers qui ne sont autre chose que d'étroites digues séparant les rizières établies à différents niveaux. Nos bêtes avaient beaucoup de peine à se maintenir en équilibre. Tout à coup mon cheval s'abattit au coin d'une rizière, et je fus projeté dans la boue quelques pieds plus bas. Ce fut le dernier accident de mon temps de captivité. Après cette expérience, je voulus marcher, mais craignant de ne pas pouvoir garder mon rang, mon palefrenier insista, pour me faire remonter à cheval.

Comme nous approchions du village, un des camarades vint à moi, et me dit : « Nous allons vous relâcher et le juge Wu demande à vous voir ! » Il me conduisit vers la maison où la compagnie s'apprêtait à prendre du repos. Il était environ midi et le juge et sa femme venaient d'arriver. Ils s'amusèrent beaucoup à voir la difficulté que j'avais à mettre pied à terre. Mon conducteur allait se retirer, quand le magistrat lui dit : « Vous ferez mieux de le conduire dans sa chambre afin qu'il se repose un peu. Quand je serai prêt moi-même, je l'enverrai chercher ! » et il nous congédia.

Les gardiens occupaient la maison voisine ; on me fit grimper une échelle sur la gauche, et je trouvai le prêtre assis sur le lit. Après lui avoir dit ce qui s'était passé, nous nous sommes reposés tous les deux. Vers deux heures, le gardien nous réveilla pour nous donner le repas de midi, et environ une heure plus tard, le juge me fit appeler. Plein d'espoir, je me mis à rassembler mes maigres possessions, mais le messager me dit : « Il n'est pas nécessaire de prendre quoi que ce soit avec vous ! »

Le juge me salua d'un sourire et me dit : « J'ai quelque difficulté à me servir de cette lampe à alcool ; pourriez-vous m'aider à la mettre en état ? » Cette lampe était absolument neuve, et les directions étaient dans la boîte, en anglais, en français, en allemand et en italien, mais pas en chinois. Je traduisis ces instructions en chinois et il contrôlait à mesure afin de voir s'il pouvait la monter convenablement. La difficulté venait de ce que, au lieu de véritable esprit de vin, il avait employé de l'alcool du pays, qui donne beaucoup moins de chaleur. Bientôt après, la lampe fut mise de côté.
Au bout d'un moment, il envoya son ordonnance Inviter Hsiao-Keh et d'autres camarades à venir chez lui. Je compris bientôt qu'on préparait une fête. On fit aussi chercher le prêtre, le général Chang et nos deux délégués. Le vieux M. Chou était aussi avec nous.

Quand tout le monde fut arrivé, les bonnes choses furent apportées sur la table et le régal commença. Tout était très bien apprêté ; les bols et les bâtonnets étaient de bonne qualité. On servit aussi du vin, mais les quelques convives qui en acceptèrent, en prirent avec modération. La femme du juge et les généraux assis avec nous, n'y touchèrent pas.

La conversation se maintenait continuellement, et comme toujours, le sujet religieux fut abordé. Hsiao-Keh se tourna vers moi en disant : « Je ne comprends pas qu'un homme comme vous, instruit en Europe, puisse vraiment croire à l'existence de Dieu. Vous savez bien, n'est-ce pas, que nous descendons du singe. Je pense que tout être humain, doué d'un peu d'intelligence, sait que l'évolution est un fait.

« Les savants ne sont absolument pas d'accord sur ce point », répondis-je, « du reste ce qu'on peut dire de mieux de l'évolution, c'est qu'elle est une simple théorie. Pour ma part, il me faudrait beaucoup plus de foi pour croire que nous pourrions venir d'un être inférieur, que pour croire en un Créateur tout puissant ! » Le général Chang me surprit beaucoup en laissant tomber ces paroles. « Il croit que le Seigneur Jésus va venir une seconde fois pour prendre à Lui tous ses fidèles. Quand cet événement se passera, et que tous les braves gens auront été enlevés, alors les communistes pourront exécuter leur programme. »

Le chef rouge Wang était de nouveau placé près de moi, et il se montrait toujours très aimable. « Quand vous enverrez vos rapports à vos journaux, me dit-il, vous n'oublierez pas que nous sommes amis. Vous avez pu voir que nous sommes bons pour les pauvres, que nous agissons selon des principes certains, et que nous ne sommes pas de vulgaires bandits, comme on nous accuse de l'être ! »
Le juge ajouta : « Nous serons heureux d'avoir de vos nouvelles, si vous daignez nous écrire ! »
Et le général de dire : « Je n'ai aucune objection à ce que vous restiez en Chine, en qualité de touriste ; je vous autorise même à ouvrir une école, si seulement vous consentez à vous abstenir d'empoisonner le peuple par votre croyance en Dieu. Mais je crois que le meilleur parti à prendre est de rentrer dans votre pays.

Tandis que nous mangions et bavardions, un éclaireur se présenta et après avoir fait le salut militaire, il remit un papier au général, qui en prit connaissance, et le tendit au juge.
« N'avez-vous rien trouvé de plus rapproché que cette étape d'une quarantaine de kilomètres ? » demanda le général.
« La seule place suffisante pour une armée aussi nombreuse est à huit kilomètres d'ici », répondit l'éclaireur.

Après une courte discussion, le général conclut : « Comme tout le monde est très fatigué, nous ferons mieux de couvrir l'étape la plus courte ».

Quand les restes du repas eurent été emportés, la femme du juge disparut pour préparer un immense pot de café, sucré à l'excès, et dont chacun prit sa part. Le général Hsiao-Keh montra bientôt des signes de lassitude et faisant un signe à sa femme, il dit : « Nous ferions bien de partir ! » Alors ils se retirèrent sans cérémonie et les autres convives suivirent leur exemple.

Le juge fit reconduire le père Kellner à son domicile ; il ne resta plus que le général Chang, les deux délégués et moi. Alors je m'enhardis pour faire cette demande : « Puis-je me permettre de réclamer une faveur, non pas pour moi, mais pour le prêtre ? Si vous désirez qu'il vive jusqu'au jour où sa rançon vous sera payée, il faudrait qu'il fût mieux soigné. Ne pourrait-on pas lui donner une ordonnance, comme vous l'avez fait pour le général Chang ? Un homme qui lui fournirait de l'eau pour boire et pour se baigner, du combustible pour son feu, de la paille pour son lit ? etc. »
- Ce n'est pas possible, répondit le juge, en secouant la tête ; mais nous allons charger un sous-officier de veiller à ce qu'il soit mieux soigné.
- Pour ce qui concerne le régime, continuai-je, il ne peut pas manger assez pour maintenir ses forces, mais quelques extras lui seraient d'un grand secours ; par exemple, serait-il possible de lui donner un peu de café qui exciterait un peu son appétit ?
- Nous avons assez de café, répondit-il, et nous lui en donnerons. Croyez-vous qu'il aimerait aussi du cacao ? - Certainement, répondis-je; et le juge promit de lui en envoyer.

Puis il donna quelques ordres concernant le cas du général Chang, et tendit au délégué une lettre d'explications. Enfin, s'adressant à nous trois (les délégués et moi-même), il ajouta : « Ce soir, vous serez conduits dans la maison d'un bourgeois, où vous resterez jusqu'au jour, après quoi vous serez libres de partir. Nous, nous partirons aussitôt après minuit, quant à vous, il ne vous est pas permis de vous en aller avant l'aube. »

Après cela, il sortit un papier en disant : « Je vais vous lire ceci ; ce sont les conditions de votre élargissement ! » Ce document m'accusait d'avoir prêché l'évangile, et j'étais remis en liberté à condition de ne pas recommencer. Une fois de plus, on certifiait que ma libération était basée sur le fait que la Suisse n'est pas un pays impérialiste. Il ne me demanda pas de signer mon consentement, ni même de le donner verbalement.

La question qui fut ensuite soulevée fut celle des dépenses de voyage. « Combien vous faut-il pour arriver à Kunming (Yunnan-Fu), ou jusqu'au moment où vous pourrez rejoindre vos amis ? »
- Je ne sais absolument pas où nous nous trouvons, répondis-je, et j'ignore à quelle distance nous sommes de la capitale !
- Nous sommes à vingt-cinq kilomètres environ d'une ville éloignée seulement d'une étape de la capitale, répondit-il ; ainsi vous pourrez y arriver en deux jours !
- Il m'est impossible de marcher, répondis-je ; il me faut donc une civière ; et je pense que deux porteurs me coûteraient deux dollars par jour, ce qui ferait quatre dollars.

Alors il appela son trésorier et lui dit : « Comptez « si » dollars à l'étranger ! » Je n'avais pas dit que quatre dollars seraient suffisants ; ils ne couvriraient, en effet, que les dépenses du transport ; à côté de cela, il me fallait de la nourriture. « Quatre » et « dix » en dialecte de la région, se prononcent de la même manière, l'intonation qu'on y met marque seule la différence.
Pour s'assurer de la somme indiquée, le trésorier fit des signes avec ses doigts, demandant s'il devait me donner « si » (quatre) ou « si » (dix).
Le général Chang prit sur lui de répondre en disant. « Dix naturellement ! » Je ne désirais pas demander plus qu'il ne fallait, mais je n'éprouvai aucun scrupule de conscience en prenant les dix dollars qui m'étaient comptés.
Le juge alors plia le papier stipulant les conditions de mon élargissement, il me le tendit en même temps que plusieurs tracts communistes en disant : « Vous pourrez les examiner à loisir ! » Enfin je demandai un passeport, mais il me répondit : « Cela n'est pas nécessaire ! Dès que nous serons partis, vous ne serez plus sur le territoire des rouges, et une telle attestation ne vous sera d'aucune utilité, quand vous aurez rejoint les troupes du gouvernement ! »

Le soir était venu ; il était peut-être dix heures. Un gardien fut chargé de surveiller mon retour dans mon galetas, et d'inspecter tout ce que j'emportais avec moi. Un autre gardien me suivit jusqu'à la maison, et en y pénétrant, nous rencontrâmes partout des hommes couchés et endormis sur le sol. Il fallut presque se frayer un chemin à travers toutes ces formes immobiles.

Le père Kellner était déjà plongé dans un profond sommeil. Je le réveillai pour lui dire ce qui venait de se passer. « Le gardien est ici, lui dis-je, pour inspecter mes bagages ; pendant sa visite, je laisse à côté de vous les dix dollars qui m'ont été donnés pour mes dépenses de voyage ; il y a un peu plus qu'il ne m'en faut, vous en prendrez deux pour vos propres besoins. » L'inspection fut très superficielle, et contrairement à mon attente, il ne me fouilla pas.

Je pris ensuite les huit dollars, et je dis quelques mots d'adieu au prêtre, en lui promettant de prier pour lui. Il ne se leva pas, mais il me dit : « Voulez-vous venir me saluer au départ, demain matin ? »
- Oh ! ce serait de la dernière imprudence, répondis-je, car les rouges désirent évidemment que nous nous tenions à distance. Ma présence pourrait être mal interprétée ! » Suivant la coutume du continent européen, nous nous sommes embrassés, et il me demanda de lui pardonner ses mouvements d'humeur. Je sentais bien, moi aussi, que j'avais été loin d'être parfait à son égard et que j'aurais pu l'aider bien plus que je ne l'avais fait. Ainsi nous nous sommes confessé et pardonné mutuellement nos torts. Je lui avais déjà promis de faire tout mon possible pour faire activer les démarches en vue de son élargissement. Après avoir emballé mon livre « Sources dans le désert » et mon Nouveau Testament dans lequel je glissai les tracts communistes, je sortis avec mon conducteur. Je regrettais de ne pas prendre congé des gardiens, mais je pensais qu'ils ne me sauraient aucun gré de troubler leur sommeil, et je m'éloignai sans bruit.

Dans la rue, les délégués nous attendaient avec un gardien chargé de nous conduire au domicile qui nous avait été désigné. « Ne partez pas avant l'aube, nous recommanda-t-il encore par mesure de précaution. Adieu ! vous retrouverez bientôt tout le confort de l'existence à laquelle vous étiez accoutumé », et il disparut.


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