Une dame qui avait longtemps gardé le
cocon d'un papillon observait avec
intérêt les efforts qu'il faisait pour
sortir de sa prison. Pendant toute une
matinée il s'était débattu et
ne semblait faire aucun progrès, toujours
arrêté par le col trop étroit
de l'ouverture.
À la fin, prenant en
pitié les efforts du prisonnier, la dame se
résolut à lui venir en aide, et
trancha les fils qui le retenaient pour
élargir tant soit peu
l'ouverture.
Et tout aussitôt, sans aucune
peine, le papillon rampe dehors, tramant un gros
corps boursouflé, avec de petites ailes
ridées et fripées. Anxieusement sa
libératrice guettait le moment de voir le
merveilleux spectacle des ailes qui se
déploient. Tous les détails, toutes
les couleurs y étaient, mais en
raccourci.
Ce fut en vain qu'elle attendit.
Sa
fausse tendresse avait été la perte
de l'insecte ; ses ailes ne se
développèrent jamais. jamais le
papillon ne fut autre chose qu'une créature
avortée, rampant, peinant à travers
cette courte existence qu'elle aurait dû
passer à voler par les airs sur des ailes
chatoyantes.
L'amour de Dieu est trop vrai
pour
ne pas aller jusqu'au bout.
P. DESJARDINS.
Au commencement il n'y avait pas de
vallée, mais seulement la grande Prairie,
toute plane. Un jour, le Maître de la
Prairie, se promenant dans son domaine où ne
croissait que de l'herbe, demanda :
« Où sont tes
fleurs ? » La Prairie
répondit : « Maître,
personne n'en a semé dans mon
sein. »
Alors il parla aux oiseaux, et ils
apportèrent les graines de toutes les
espèces de fleurs, et les
éparpillèrent au près et au
loin, et bientôt la Prairie se mit à
fleurir et à se couvrir de crocus et de
roses, de tournesols sauvages et de lis rouges,
tout le long de l'été. Alors le
Maître revint et ce qu'il vit lui plut.
Mais les fleurs qu'il aimait par-dessus tout
lui manquaient. Il dit : « Où
sont les clématites et les colombines, les doux
cyclamens,
les violettes et les muguets, et toutes les
fougères, et les buissons
fleuris ? » « 0
Maître, dit tristement la Prairie, je ne puis
pas garder ces fleurs, parce que le vent souffle
trop fort, le soleil brûle ma poitrine, les
graines s'envolent et
sèchent. »
Alors le Maître parla à la
foudre, et, avec un éclat violent, la foudre
frappa la Prairie jusqu'au coeur et la
déchira. Et la Prairie se tordait et
gémissait, comme si elle agonisait, et
pendant de longs jours elle souffrit cruellement de
la blessure qui restait béante, toute noire
et pantelante.
Mais la petite rivière se mit
à couler au fond de cette déchirure,
et à transporter de la terre qu'elle
déposait contre les parois de pierre. Puis
les oiseaux vinrent semer des graines dans la
vallée ainsi formée... et,
après que beaucoup de temps eut
passé, les gros blocs de pierre se
trouvèrent recouverts de mousses
délicates et de vignes vierges
retombantes ; dans les coins ombreux
fleurissaient des ancolies et des colombines ;
de grands ormes dressaient bien haut leur cime
à la rencontre du soleil ; plus bas
croissaient des buissons toujours verts, et partout
foisonnaient les cyclamens, les violettes, les
muguets.
La vallée était devenue
l'endroit où le Maître venait chercher
le repos, la paix et la joie.
(Le Pilote du Ciel.)
- Si toujours le soleil magique et généreux
- Versait à larges flots sa lumière féconde,
- Notre oeil ne connaîtrait qu'une moitié du monde,
- Car il ne saurait rien de la splendeur des cieux.
- Pour qu'il puisse, étonné, contempler le mystère
- De l'étoile qui roule aux champs de l'Infini,
- II faut que le soleil, du ciel bleu soit banni,
- Il faut que la nuit tombe et recouvre la terre.
- De même, à notre esprit il faut l'adversité,
- Les détresses du coeur et la nuit, pour qu'il sache
- Toute l'oeuvre de Dieu : ces trésors que nous cache
- L'astre aveuglant et dur de la prospérité.
Lausanne, Hôpital cantonal. 5 mai 1922.
Notre ami, M. le pasteur Alexis Mamboury, qui a
écrit ces vers et rendu ce
témoignage, célébrait ainsi un
anniversaire. Il était tombé malade
le 5 mai 1921.
Au mois d'août 1925, il entrait dans
l'invisible qu'il avait souvent contemplé
aux heures de souffrance.
Le commandement que je te prescris
aujourd'hui n'est certainement point au-dessus de
tes forces, et hors de ta portée. Il n'est
pas dans le ciel pour que tu dises : Qui
montera au ciel et nous l'ira chercher ; qui
nous le fera entendre, afin que nous le mettions en
pratique ?
C'est une chose, au contraire, qui est
tout près de toi, dans ta bouche et dans ton
coeur, afin que tu la mettes en pratique.
Vois, je mets devant toi aujourd'hui la
vie et le bien, la mort et le mal... Choisis la
vie !
Ne crains pas, ceux qui sont avec nous sont plus nombreux que ceux qui sont avec eux !
Celui qui est en vous est plus grand que celui qui est dans le monde !
Ainsi parle Celui qui t'a créé : « Ne crains rien, car je te rachète, je t'appelle par ton nom, tu es à moi ! »
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