Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

CHAPITRE VIII

Du Sacrement de Mariage

 § 2. - DU VOEU DE CHASTETÉ.



 En poursuivant notre causerie, nous avions traversé un bois de pins et nous étions arrivés au sommet d'une colline dominée par un ancien couvent, fermé comme les murs d'une prison. Alors, le désignant de la main,
M. le Curé me dit : - Dans les institutions diverses de notre Église romaine, une chose m'a toujours étonné. Nos conciles ont fait du mariage un sacrement, donc c'est une chose sacrée ; ensuite, sans soupçonner même la contradiction qu'ils soulevaient, ils ont décrété que le voeu de chasteté - qui, remarquez-le, n'est pas un sacrement, - était supérieur au mariage !

M. A. - C'est, placer une institution humaine au-dessus d'une institution divine !

M. le Curé. - En effet, le décret s'exprime sévèrement ainsi :
« Si quelqu'un dit que l'état de mariage est à préférer à l'état de virginité ou de chasteté, et qu'il ne vaut pas mieux, ou que ce n'est pas la chose la plus heureuse de demeurer en virginité et chasteté que d'être marié, qu'il soit anathématisé (1). »

M. A. - Si la plupart des fidèles catholiques romains avaient écouté à la lettre cette curieuse décision du Concile. il ne resterait aujourd'hui que peu de chrétiens pour la défendre ; le catholicisme s'éteindrait faute de catholiques !

M. le Curé. - On s'est appuyé pour discuter sur une parole de saint Paul :
« Pour ce qui regarde les vierges, je n'ai point reçu de commandement du Seigneur, mais voici le conseil que je donne, comme ayant reçu du Seigneur la grâce d'être son fidèle ministre. Je crois donc que cet état est avantageux à cause des misères de la vie présente ; je veux dire qu'il est avantageux à l'homme de ne se point marier (2). »

M. A. - Je ne trouve là aucun anathème. L'apôtre est absolument de bonne foi, n'ayant reçu aucun commandement de Dieu, il donne un simple conseil. Il se garde bien de déclarer la virginité supérieure au mariage ; il dit seulement que le célibat est plus avantageux...

M. le Curé. - Pour quelle raison ?

M. A. - « A cause des misères de la vie présente », c'est-à-dire à cause des persécutions cruelles dont les églises naissantes étaient l'objet ou allaient l'être ; la guerre des Romains en Judée, la prise de Jérusalem par Titus, les cruautés des Décius et des Néron.

M. le Curé. - Saint Paul prévoyait donc comme prochaine la réalisation de la prophétie du Christ, où l'Église chrétienne devait voir dans le lieu saint l'abomination de la désolation (3).

M. A. - Nous ne pouvons qu'approuver la prudence de l'apôtre et l'opportunité de son conseil.
Donc, si, relativement au célibat, il a en des idées quelque peu exclusives, il n'a pas voulu cependant le placer au-dessus de l'hymen, il n'a pas opposé son conseil au commandement de Dieu disant : « Il n'est pas bon que l'homme soit seul ».

M. le Curé. - En effet, saint Paul dit très nettement : « Si vous épousez une femme, vous ne péchez point » (4).

M. A. - Quelques versets plus loin, il prend soin de garantir la légitimité de l'union matrimoniale :
« Si quelqu'un pense qu'il doit marier sa fille, qu'il fasse ce qu'il voudra, il ne péchera point si elle se marie » (verset 36).

M. le Curé. - Il est certain que la plus grande liberté existait alors...

M. A. - Dieu a institué le mariage, et par là même, Il le sanctifiait. La famille chrétienne, nous l'avons dit, à son rôle moralisateur à remplir sur la terre, sa mission sainte et bénie. Si quelques âmes sont naturellement portées à la virginité, qu'elles demeurent dans cet état ; si l'oeuvre du Seigneur exigeait ce sacrifice, qu'elles l'accomplissent ; l'état supérieur à l'autre sera toujours celui de la fidélité à Dieu.

M. le Curé. - Je suis toujours lié par l'anathème du Concile ! Mais je constate une fois encore votre fidélité à l'Écriture, votre respect de la Vérité, et j'estime avec vous qu'on aurait dû garder comme conseil ce qui n'était qu'un conseil, au lieu d'en faire un anathème !


(1) Conc. Trente, Sess. VIII sous Pie IV, Canon 10. 

(2) 1 Cor. 7/25 à 34. P. R. Commun des Vierges, p. 563.

(3) Matth. 24/15 à 35. P. R. XXIVe Dimanche après la Pentecôte p. 487. En 70, les cohortes romaines adorèrent leurs idoles dans le temple de l'Éternel, à Jérusalem.

(4) 1 Cor. 7. P. R. Commun des Vierges, p. 563.
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