Cantiques N° 42 et 3.
Introduction historique. - Le
prophète Jérémie était
originaire d'Anathoth (1: 1) et fils d'un
sacrificateur. C'est une des grandes figures de
l'ancienne alliance ; grande par son :
courage, son énergie, sa
persévérance et, surtout, par sa
foi.
Jérémie a connu la douleur de
n'être pas écouté ; il fut
même insulté et
persécuté, - nous le verrons, -
à cause de ses convictions et de ses appels
à l'humiliation, de ses paroles de menace au
nom de l'Éternel, son Dieu. Il eut la
douleur, plus grande encore, d'assister à la
réalisation des menaces que l'Éternel
mettait dans sa bouche. Jérémie est
un témoin, qui voit clair et voudrait
épargner à son peuple le
châtiment prêt à tomber sur lui.
Mais tout fut en vain. C'est ainsi que le
prophète a vécu et souffert les
années d'agonie du royaume de Juda. Il
était prisonnier des chefs de son peuple,
quand les armées de Nébucadnetzar,
roi de Babylone, pénétrèrent
à travers les murailles renversées de
Jérusalem ; il fut lié de
chaînes étrangères,
après avoir connu celles de sa nation.
(39 :
15 ; 40 :
1.)
La vie de Jérémie s'est
écoulée sous le règne de sept
rois, les derniers du royaume de Juda. Il a connu
dans son enfance, les égarements de
Manassé, qui installa les cultes païens jusque
dans le
temple de Jérusalem. Il assista à la
réforme de Josias, dont nous avons
parlé il n'y a pas longtemps, sans qu'on
puisse dire s'il y prit une part quelconque.
Après le long règne de Manassé, le roi infidèle,
l'histoire de la royauté en Juda n'est plus
qu'une série d'événements
douloureux ou tragiques. Amon est
assassiné après un court passage sur
le trône ; le fidèle Josias est tué en 608 à la
bataille de Megiddo qu'il livra au pharaon
Néco Il. Joachaz, à peine sur le
trône, est fait prisonnier par Néco,
qui met à sa place Jojakim
(Eliakim).
Mais la victoire de l'Égypte devait
être courte. Néco est vaincu à
Karkémisch. L'empire d'Assyrie, alors la
puissance dominante en Orient, mais fortement
atteinte déjà par l'invasion des
Scythes, succombe sous les coups des Mèdes
et des Babyloniens. Babylone reprend la
première place.
Jojakim était mort ; Jojakin, son fils lui avait
succédé. Sous son règne une
armée babylonienne s'empara de
Jérusalem, en 597, et emmena captifs dix
mille Judéens. Nébucadnetzar, le
vainqueur babylonien, plaça sur le
trône un fils de Josias, sous le nom de Sédécias. C'est lui
qui fut le
dernier roi de Juda et sous lequel nous verrons
Jérusalem succomber une seconde et
dernière fois.
Voilà ce que furent les
événements, pendant lesquels se
déroulèrent la vie et
l'activité prophétique de
Jérémie. Ajoutons à cela les indécisions du peuple, se
tournant
d'un côté ou de l'autre pour chercher
du secours et croyant toujours pouvoir secouer le
joug étranger ; rappelons, surtout, ses fautes morales,
sa décadence
religieuse et nous comprendrons les
difficultés du ministère de
Jérémie, la tragique grandeur de sa
vie, la force et la beauté de sa foi, dont
la catastrophe n'a point diminué le
rayonnement. Cette foi rayonne jusqu'à nous,
claire et lumineuse.
L'appel. - Jérémie
entendit l'appel de son Dieu sous le règne
du roi Josias : Il précise même
la date : la treizième année de
ce règne
(1 :
2). Comme pour Esaïe,
cet appel s'est produit sous la forme d'une vision.
L'Éternel se tient devant
Jérémie, dans sa grandeur et sa
majesté souveraines. Souvenons-nous de la
description saisissante qu'en donne Esaïe,
dans le récit de sa vocation
(Esaïe
6).
Jérémie aussi, sans doute, a
tremblé, devant la majesté
divine ; il a tremblé, comme
Esaïe, à la pensée de son
infirmité morale. Mais il sent surtout son
impuissance à devenir, selon le voeu de
l'Éternel un « prophète des
nations »
(1 :
5).
Son premier geste est un refus
« Hélas ! Seigneur,
Éternel, je ne sais point parler, car je ne
suis qu'un enfant »
(1 :
6). Mais l'Éternel
ne s'arrête pas à cette
protestation ; il a lu dans le coeur de ce
jeune homme ; il connaît sa
valeur ; il sait ce qu'il deviendra, avec
l'appui de son Dieu. L'ordre est
impérieux ; il ne permet aucune
hésitation. Les ordres que Dieu nous donne
ne sont-ils pas aussi catégoriques que cet
appel ; n'est-ce pas nous qui hésitons
et reculons si souvent ?
Dieu dit donc à
Jérémie : « Tu iras
trouver tous ceux auprès de qui Je
t'enverrai ; tu diras tout ce que je
t'ordonnerai de leur dire ; ne les crains pas,
car je suis avec toi pour te
délivrer »
(1 :
7-8).
Rapprochez encore de la vision d'Esaïe
le passage qui sait :
« L'Éternel étendit la main
et toucha ma bouche » (1 : 9). Ici,
c'est l'Éternel lui-même qui touche la
bouche de Jérémie pour la purifier et
la fortifier ; un séraphin avait fait
de même pour Esaïe, avec un charbon
ardent
(Esaïe
6:6) ; cette
dernière scène fait le sujet d'un des
beaux vitraux du peintre Rivier dans le temple de
Châtillens.
Toute hésitation a cessé chez
Jérémie ; il n'a qu'à se soumettre à la
volonté d'en haut. Alors, seulement, Dieu lu
fait connaître l'oeuvre qu'il aura à
accomplir : « Je te donne
aujourd'hui tout pouvoir sur les nations et sur les
royaumes, pour arracher et pour démolir,
pour abattre et pour détruire, pour
bâtir et pour planter »
(1 :
10).
L'oeuvre de Jérémie. -
Le prophète ne fait aucune remarque,
après avoir entendu le redoutable message
qui lui est confié. Il en accepte le poids
écrasant avec énergie, car son Dieu
sera avec lui pour le soutenir et le
délivrer. Il l'a promis et le
prophète le croit. Et c'est avec cette foi
qu'il a marché à l'appel du devoir,
qu'il a proclamé la vérité si
dure soit-elle ; ne devait-il pas surtout
« démolir, arracher, abattre et
détruire » ?
C'est assez dire que le mal était
grand. Il se dressait partout autour de lui. Il
le connaissait déjà ; mais,
maintenant, au service de Dieu et guidé par
lui, il en voit mieux encore la laideur et le
danger. Les yeux du pécheur sont souvent
fermés ; les yeux de celui qui marche
avec Dieu s'ouvrent à mesure que sa
fidélité s'accroît, et il
découvre ses infidélités et
celles qui se commettent au milieu de son
peuple.
Israël avait succombé lors de la
prise de Samarie en 722. Amos avait prédit
ce châtiment au peuple infidèle. Il
semble que la leçon aurait du profiter au
royaume de Juda qui avait été
épargné. Il n'en a rien
été. Il y eut bien les
réformes d'Ézéchias et de
Josias, deux rois désireux de faire, de tous
leurs sujets, des serviteurs zélés de
l'Éternel. Mais si, pour un temps, les
coutumes païennes établies jusque dans
le culte solennel du temple de Jérusalem
furent écartées, si les
cérémonies des religions
étrangères furent combattues, tout
cela était encore trop enraciné dans
le coeur de la masse pour disparaître ainsi.
Et Jérémie s'élève
énergiquement contre ces égarements.
On avait placé une idole jusque dans
le temple de l'Éternel
(7 :
30) ; les
habitants de
Juda font brûler leurs fils et leurs filles
à la façon des idolâtres
(7 :
31). Le Dieu, qui avait
fait sortir les pères du pays de servitude,
est oublié. On se détourne de lui
pour servir les idoles, et même, quand on lui
rend un culte, on ignore que ce qu'il demande,
c'est un coeur pur, une volonté docile, un
service qui se manifeste moins par des
cérémonies rituelles que par la
consécration de toute une vie.
Les persécutions. -
Jérémie s'élève donc,
puisque Dieu l'a ordonné, contre ces
égarements. Il parle haut et ferme, à
la foule, aux chefs religieux et politiques, au roi
lui-même.
Mais il se heurte à l'endurcissement
des uns et à l'indifférence des
autres, Le peuple n'écoute pas ; les
chefs lui préfèrent les faux
prophètes, qui annoncent que tout ira bien,
garantissant le succès aux entreprises du
roi ; et qui se taisent sur les
infidélités, sur les
péchés de la nation.
L'hostilité s'est manifestée
non seulement par une opposition latente ;
elle a pris parti ouvertement ; la haine a
porté ses mains froides et cruelles sur
Jérémie. Et le prophète, qui
savait qu'il était dans la
vérité et partait au nom du Dieu de
son peuple, a passé par la souffrance. Il
a été persécuté pour la
justice, comme le rappelle le sous-titre de
cette leçon. Et, parmi d'autres faits, nous
avons à en relever deux qui se placent peu
avant la chute de Jérusalem, au moment du
dernier siège. Ils viennent s'ajouter
à d'autres persécutions que subit le
prophète au cours de sa longue
carrière.
Nous laissons aux moniteurs et monitrices le
soin de les exposer, avec quelques détails,
aux enfants. Ils se prêtent fort bien
à une description colorée et
vivante.
Les Chaldéens viennent de lever le
siège de Jérusalem, momentanément seulement,
pour marcher contre le pharaon Hophra qui s'avance
avec une armée. Les habitants de
Jérusalem croient déjà
à la délivrance. Mais
Jérémie proteste contre cette folle
espérance, fondée sur les armes
humaines et non sur Dieu. Même s'il ne
restait que des blessés de l'armée
des Chaldéens, ceux-ci se lèveraient
et « mettraient le feu à cette
ville »
(37 :
5-10).
Parler ainsi, c'était, aux yeux des
chauvins, parler en ennemi du peuple, en partisan
des Chaldéens, en renégat. Comme
Jérémie tente de sortir de
Jérusalem pour se rendre sans doute à
son village natal
(37 :
12) on l'arrête
comme un traître, sous prétexte qu'il
passe du côté des Chaldéens et
on le jette en prison
(37 :
11-16). Le roi
Sédécias était très
faible, mais il reconnaissait la
sincérité et l'autorité morale
de Jérémie. Il le fait amener vers
lui en secret pour l'interroger. Il n'obtient
aucune réponse conforme à ses
désirs. « Tu seras livré
entre les mains du roi de Babylone » dit
le prophète ; et nous entendons encore
gronder la voix puissante du serviteur de
Dieu !
(37 :
17). Le roi, sur sa
demande, le traite cependant avec quelque douceur
et le fait garder dans la cour de la prison.
Mais rien ne fera taire le prophète.
Dieu l'avait appelé il remplira sa mission.
« Si je dis ; je ne ferai plus
mention de lui (Dieu) ... Il y a dans mon coeur
comme un feu dévorant. - Je m'efforce de le
contenir et je ne puis. »
(20 :
9). Pour lui il n'y a de
salut que dans la soumission aux
Chaldéens ; ainsi seulement on pourra
épargner à la ville les horreurs de
la conquête et du pillage
(38 :
2). Comme aujourd'hui, il
s'agit de tenir jusqu'au bout, de « faire
le moral » du peuple.
Jérémie doit se taire. Les chefs
obtiennent alors de la faiblesse du roi qu'il leur
livre Jérémie et ils le font jeter
dans une citerne, à sec en ce moment. Mais,
tandis que les patriotes aveugles traitent ainsi
celui qui est le vrai patriote,
- fidèle au souverain de son peuple,
l'Éternel, -un étranger,
Ebed-Mélek l'Éthiopien viendra
charitablement le tirer de sa terrible position
(38 :
7-13).
Fidèle. - Ni hostilité,
ni persécution, ni mauvais traitement ;
rien ne modifiera l'attitude de
Jérémie. Nous le retrouverons encore
toujours le même à l'heure solennelle
où s'accompliront les menaces de
l'Éternel et où l'ennemi entrera dans
Jérusalem,
L'Éternel lui avait
ordonné : Tu seras
« prophète des
Nations », Il a accepté cette
mission. L'Éternel avait dit :
« Ne les crains pas, car le suis avec toi
pour te délivrer. » Il a mis donc
toute sa confiance dans l'Éternel.
Jérémie a connu pourtant des heures
de découragement, de solitude, de
détresse amère. Lisez, par exemple,
ses plaintes
(15:
10-21 ; 20
: 14-18). Mais il se
relève bientôt, courageux, heureux
même : « Tes paroles sont la
joie et l'allégresse de mon
coeur »
(15 :
16).
« L'Éternel est avec moi, comme un
héros puissant »
(20 :
11). Une conviction a
soutenu Jérémie, c'est celle de la
présence de son Dieu. Il a souffert ;
oui, mais pour la Justice. Il est resté
fort, et sa force s'est transmise à
d'autres, jusqu'à nos temps. Le mal, bien
souvent dans l'histoire, s'est dressé contre
des justes. Même celui qui est le Saint et le
Juste, - Jésus, - a dû souffrir et
mourir à son tour. Regardons à ces
grands exemples ; demandons l'esprit de
Jésus, afin d'être soutenus dans nos
luttes ; et nous comprendrons que Pierre a
raison à dire : « Il vaut
mieux souffrir, si telle est la volonté de
Dieu, en faisant le bien qu'en faisant le mal. Si
vous avez à souffrir pour la justice, vous
êtes heureux »
(1
Pierre 3 : 17).
RG. B.
Récapituler
leçon du 22
octobre. - Il y eut un prophète qui
commença à
prophétiser quand le roi Josias
avait vingt ans, mais
qui lui survécut et continua,
pendant le règne de quatre autres
rois, à donner ses avertissements
aux Israélites. C'était
Jérémie. Il eut de grands
malheurs. Cela vous intéressera
d'entendre comment Dieu fit de lui son
prophète et aussi de savoir ce
qu'il eut à souffrir.
(Jérémie 1 : 1-10 ; 37 : 11-21 ; 38 : 1-13.)
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