Cantiques : N° 144 et 143.
La Mission romande, comme la plupart des
sociétés de Missions, a eu des
commencements extrêmement modestes ;
c'est petit à petit et grâce à
la bénédiction de Dieu qu'elle s'est
développée, étendant sa
sphère d'influence du nord du Transvaal
à la province portugaise de Mozambique
où se trouve le gros de la tribu thonga que
les missionnaires romands
évangélisent.
Au cours de l'année 1915, les
Églises suisses (1) du Transvaal
ont en
l'occasion de
jeter un coup d'oeil en arrière sur cette
première étape parcourue, alors que
réunies à Valdézia au mois de
juillet, elles ont célébré le
souvenir de l'arrivée aux Spelonken,
quarante ans auparavant, de MM. Ernest Creux et
Paul Berthoud. En constatant les progrès
réalisés, les chrétiens thonga
ont reçu un puissant encouragement et il
doit en être de même en Suisse pour
tous les amis des Missions, car ces progrès,
- reconnaissons le à la gloire de Dieu, -
sont une preuve évidente de la puissance de
relèvement et de transformation qu'apporte
partout avec lui l'Évangile de
Jésus-Christ.
Déjà au point de vue purement
matériel et extérieur que de
changements pendant ces quarante
années ! M. Paul Berthoud, qui depuis
trente ans n'était pas retourné au
nord du Transvaal, en a été
très frappé tout dernièrement.
Voici ce qu'il écrivait en février
1916 :
« Dans le courant de
l'après-midi, M. Jaques nous conduisit
à Valdézia. Je reconnus de loin
« les trois arbres » signal de Valdézia, ainsi que
tous les profils
des collines et des vallons, tant et si bien que
pour un moment, il me sembla ne les avoir jamais
quittés. Mais les choses changées sont
nombreuses :
elles me
ramenèrent à la
réalité ! Mes yeux
cherchèrent en vain la forteresse d'Albasini
et ses maisons, où, dans mon voyage avec les
Mabille, nous avions reçu
l'hospitalité en 1873 : on n'en voit
plus aucune trace.
Valdézia est devenu une fort belle
station, avec des fleurs, des jardins, des
bosquets, une vaste pelouse gazonnée que
traversent plusieurs avenues bien tenues, des parcs
qui s'étendent au loin, une belle
église là où le terrain est
surélevé, et derrière elle un
village indigène qui comprend plusieurs
rues, dont les chaumières serrées
sont bâties en briques. Au haut du village,
on voit la maison d'école avec ses salles
très claires et gaies....
Mon vieux Valdézia, qu'on voyait
là-bas à trois cents pas d'ici, celui
de nos cabanes où mon ami Creux et moi
avions demeuré et travaillé les
premières années, au milieu des
souffrances et aussi de nombreux bonheurs, mon
vieux Valdézia est entièrement
disparu ! »
À Elim les transformations
sont encore peut-être plus manifestes, car au
nord de la station missionnaire on voit
s'élever les bâtiments de la Mission
médicale qui a été
fondée en 1899 par le Dr Liengme.
L'année dernière 114 malades
européens et plus de 400 indigènes y
ont été hospitalisés.
Et si nous insistons sur les changements
extérieurs, c'est pour relever, en passant,
le fait que la maison du missionnaire d'Elim,
grande et confortable, a été
construite toute entière par des
chrétiens indigènes sous la direction
d'un blanc ; le fait en dit long sur
l'influence exercée, indirectement, par les
missionnaires dans le domaine social.
Mais tout cela est secondaire ; le but
de la Mission chrétienne, c'est, on l'a dit,
« l'avancement du règne de Dieu
par la constitution d'Églises
chrétiennes capables, au double point de vue
spirituel et matériel, de vivre de leur vie
propre, de se propager et de transformer la vie
sociale du pays. » Eh bien, la preuve que
la Mission romande au Transvaal est en voie de
réaliser ce but, c'est le fait que deux des
six stations du nord de ce pays étaient, en
1915, dirigées par des
pasteurs indigènes : Samuel
Malalé à Mhinga, et Jonas
Mapopé à Youamitwa.
Ces deux pasteurs noirs étaient de
petits bergers païens et ignorants, au moment
où MM. Berthoud et Creux arrivaient aux
Spelonken, et maintenant ils sont des pasteurs
dignes de ce nom, capables d'exercer un
ministère évangélique, utile
et bienfaisant, au milieu de leurs
compatriotes : Quel contraste entre
l'expression ouverte, joyeuse, qui rayonne sur le
visage de ces hommes, et celle que l'on contemple
fréquemment sur la figure des chefs
païens, dont les traits trahissent trop
souvent la sensualité. La présence de
ces pasteurs au Jubilé et au Synode des
Églises thonga de 1915 était un sujet
de profonde reconnaissance pour les missionnaires
à l'oeuvre là-bas.
Certes, ces pasteurs dépassent de
beaucoup, au point de vue spirituel et intellectuel
aussi, la plupart des chrétiens de nos
Églises indigènes : trop
nombreux, hélas ! sont encore dans nos
jeunes congrégations des
catéchumènes, des baptisés ou
mêmes des évangélistes dont les
missionnaires ont à déplorer le recul
ou la chute. S'il y a lieu de s'en affliger, on ne
saurait s'en étonner outre mesure, car il ne
faut jamais oublier le milieu d'où ils sont
sortis. Voici, à cet égard, un
passage de la conclusion du rapport de M. N.
Jaques, le missionnaire d'Elim, sur l'année
1915 :
« Plus on vit au milieu des
indigènes, plus on sera indulgent envers
eux. Ne les mesurons pas à notre propre
mesure. À notre arrivée dans ce monde
nous héritons un patrimoine chrétien,
puis nous grandissons dans une atmosphère de
piété. Eux, au contraire,
héritent l'habitudes et de
préjugés séculaires en
opposition avec la morale chrétienne et que
quarante années de contact avec le
christianisme n'ont pas encore pu détruire.
Nos chrétiens aiment Dieu et
répètent en toute
sincérité la parole de
Josué : « Moi et ma
maison » nous servirons
l'Éternel ». Mais la vieille
nature est encore terriblement puissante chez ces
enfants nés d'hier à la vie nouvelle.
Ainsi s'expliquent les inconséquences qui
nous font tant de peine dans la conduite des
meilleurs d'entre eux.
« C'est dans la fournaise que se
révèle le pur métal. Nous
avons vu mourir, il y a quelques semaines, deux
jeunes gens dans la fleur de l'âge. Atteints,
tous deux, de tuberculose, et se sachant
condamnés, ils ont contemplé la mort
avec une sérénité
édifiante. Pendant plusieurs jours, alors
que le corps luttait contre la maladie, l'âme
goûtait à l'avance le repos de la vie
d'en haut. « Ne me touche pas, disait
l'un à son père qui essayait de le
soutenir pendant un accès de toux, ne me
touche pas, tu es impur. » Et le second
disait aux visiteurs qui l'approchaient :
« Retirez-vous, laissez-moi seul avec mon
Dieu. »
« Mourir une telle mort, quel
triomphe de l'esprit sur la chair, de la vie sur la
mort. »
Non moins encourageant est l'exemple suivant
tiré du rapport du missionnaire de
Valdézia, M. Rosset.
« En février, nous avions
la grande douleur de perdre, après deux mois
de maladie, le plus capable et le plus spirituel de
nos maîtres d'école, Gaïus
Mandlati. Sans être parfait, il était
en exemple à tous, et si Dieu ne l'avait pas
rappelé, certainement il serait devenu plus
tard l'un de nos meilleurs pasteurs. Il
réunissait les caractères du
véritable indigène et ceux d'un vrai
chrétien, toujours étonné et
réjoui à la vue d'horizons nouveaux.
Ce départ a fait une impression profonde sur
ses collègues restés à la
brèche et aussi sur les élèves
qui depuis lors ont mieux suivi les
cultes. »
Ce Gaïus était sorti, il y a
deux ans à peine, de l'École normale
de Lemana ; il est temps de mentionner
cette Institution dans ce tableau que nous
cherchons à esquisser de l'oeuvre poursuivie
actuellement au Transvaal par la Mission romande.
Cette école est fréquentée
aujourd'hui par 48 élèves, dont la
moitié environ nous vient d'autres
Missions ; elle est la pépinière
d'où sortent les instituteurs
évangélistes nécessaires au
développement de nos écoles, qui
comptent maintenant plus de 800
élèves. Ici aussi, que de
progrès réalisés depuis le
jour où M. Creux, en 1875, réunissait
dans un hangar quelques enfants pour leur
enseigner, avec les rudiments de la lecture et de
l'écriture, les récits de la Bible.
Et si nous nous transportons au centre du
Transvaal, nous pourrons constater là aussi
un développement réjouissant de la
Mission. Il y a quarante ans, Prétoria était une toute
petite bourgade, et Johannesburg n'existait
pas ; or, la capitale de l'Union sud-africaine
compte actuellement 50 000 habitants, dont 20 000
sont des indigènes, et Johannesburg
représente aujourd'hui une grande
agglomération renfermant 120 000
européens et autant d'indigènes, sans
compter tous les faubourgs de la vaste cité
minière.
La Mission romande a entrepris une oeuvre
d'évangélisation parmi les milliers
de Thonga qui viennent travailler dans les villes
et dans les mines pour y gagner leur vie.
Johannesburg a été appelée une
université du crime ; il était
du devoir des Églises chrétiennes de
chercher à contrebalancer l'influence
délétère qu'exerce trop
souvent sur les noirs la civilisation
européenne ; pour cela, pour
réaliser cette oeuvre de réparation,
il faut jeter à pleines mains la semence de
cet Évangile qui seul est un antidote assez
puissant pour triompher du paganisme.
Et c'est à Prétoria que nous
retrouvons M. Creux, toujours actif après
quarante années de travail, poursuivant dans
cette ville sa belle oeuvre de miséricorde
et d'amour parmi les plus
déshérités parmi les
indigènes : les lépreux, les
prisonniers, les condamnés à mort et
les aliénés. Une des dernières
lettres de notre vétéran nous apporte
les échos de son travail parmi les
lépreux.
« J'ai eu, le jour de
Pâques, des baptêmes aux lépreux
et des réceptions de
catéchumènes baptisés dans
leur enfance et venus d'Eglise de plusieurs
dénominations. J'ai baptisé et
reçu 31 lépreux et lépreuses,
ce qui nous donne une Église d'environ 240
communiants. Pendant plusieurs semaines je passais
mes mercredis à les interroger, à les
instruire, ce qui instruisait aussi bien mes
anciens que mes catéchumènes. C'est
un travail long et difficile avec des gens, pour la
plupart, très ignorants et très
timides. Et malgré tout, on peut sentir le
travail de l'Esprit de Dieu et admirer chez ceux
dont le corps est souvent affreux à voir, la
nouvelle naissance par
l'Esprit qui fait admirer la nouvelle nature
régénérée.
La cérémonie,
extrêmement simple, a été
suivie comme toujours d'une explosion de joie de
l'Eglise qui, à la sortie, accompagne les
néophytes dans les
« compounds » avec des
cantiques. C'est une scène qu'on voudrait
pouvoir photographier que ces félicitations,
poignées de mains, embrassades à la
sortie du culte, ce bruit de la multitude en
fête qui entoure ces femmes et jeunes filles
coiffées d'un mouchoir blanc ou même
vêtues de robes blanches. Dans ces
moments-là, qui témoignent de l'amour
qu'ils ont pour l'oeuvre de Dieu au milieu d'eux,
on sent vibrer son coeur d'une émotion
intense à la pensée de la joie qui
doit répondre à cette joie parmi les
anges de Dieu. Quels contrastes entre ce que le
monde considère comme la maladie la plus
affreuse et la joie qui remplit les coeurs de ces
bannis de la civilisation et de la
société. Beaucoup de ceux et de
celles qui partent en chantant ont les pieds
entourés de bandages et boitent bien bas,
beaucoup de voix sont déjà
enrouées, la gorge étant atteinte,
mais la joie domine tout. Ils sont enfants de Dieu
et se sentent anoblis par la réception dans
l'assemblée universelle des enfants de Dieu.
Et tout cela est spontané et se renouvelle
chaque fois que nous avons ce que nous pouvons bien
appeler « une fête de
baptême ». Dieu me donne d'en voir
encore beaucoup. »
Oui, certes, l'Évangile du Christ a
toujours la même puissance, sous tous les
cieux et sous tous les climats, puissance de
consolation, de relèvement et de vie.
Bénissons en Dieu et puisons dans cette
constatation une raison nouvelle de travailler avec
persévérance à cette oeuvre
entreprise au nom et à la gloire de celui
dans lequel nous saluons notre Roi, de celui qui
nous a dit : « Allez ».
A. DE M.
Récapituler
leçon du 22
octobre. - Les Israélites
abandonnaient sans cesse le vrai Dieu pour
adorer des idoles. Après la
découverte du livre de la loi dans
le temple, ils promirent de ne plus
adorer que lui. Il dit en effet dans sa
Parole : Je sais Dieu, et il n'y en a
point d'autre. Il n'y a point d'autre Dieu
que nous devions adorer,
c'est-à-dire :
|
Chapitre précédent | Table des matières | Chapitre suivant |