Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

Travail et repos.

(Suite et Fin.)


 II. Le droit au repos.

La loi du travail a pour corollaire le droit au repos. Le Décalogue, dans le même commandement où il ordonne à l'homme le travail, proclame pour lui ce droit au repos. Le récit de la Genèse s'appuyait pour cela sur l'exemple de Dieu. Moïse ne fait que rappeler à son peuple l'obligation du repos, qui, comme l'institution de la semaine, remonte à la plus haute antiquité. Souviens-toi du jour du repos. « Moïse, dit Proudhon, n'inventa pas la semaine, mais il fut le premier et le seul qui s'en servit pour un si grand usage. »

N'a donc droit au repos - mais y a droit d'une façon absolue - que celui qui a travaillé six jours de la semaine et a accompli toute son oeuvre. « Le dimanche, au dire du président Grant, est le jour où Dieu arrose la plante du travail pour lui faire porter ses fruits. » Ce droit, conséquence d'un devoir, n'est pas le droit à la paresse, puisque celui-là seul peut légitimement jouir du repos, qui a accompli toute son oeuvre.

D'après la loi mosaïque, le repos était une loi générale, imposée même à la terre, puisque tous les sept ans les champs labourables devaient être exempts de culture. Après sept fois sept ans, c'est-à-dire dans l'année jubilaire, on devait libérer les esclaves, abolir les dettes et rendre la terre à son premier propriétaire.

Jamais loi ne fut plus humanitaire que celle du sabbat, ordonnant aux Hébreux d'accorder le repos en ce jour au fils de la servante et à l'étranger. Afin même de prévenir toute dérogation, le législateur énumère tous les êtres auxquels elle doit s'appliquer. Il nomme même avec minutie les animaux domestiques qui doivent en profiter. Il ne suffit donc pas à l'homme de se reposer après son travail, il faut encore qu'il fasse bénéficier de son repos ceux qui se sont associés à son effort, bêtes et gens.

Le repos de l'homme après le travail, à l'exemple du Créateur, n'est pas un terme, mais un arrêt, une simple étape, séparant une tâche achevée d'une oeuvre à faire, et devenant la condition même d'un bon et fructueux labeur.

Le verbe hébreu employé pour rendre le mot se reposer signifie : s'abstenir de tout ouvrage, tel que celui fait dans les jours précédents. Le repos ainsi défini n'est donc qu'un changement d'activité. On pourrait même dire, dans une certaine mesure, que si le dimanche est jour de repos pour le corps, il est jour d'activité pour l'âme. Cet accroissement de force morale doit profiter au travail de la semaine. En ce sens le repos du ciel ne sera que l'activité sans effort, le travail sans la peine, sans « la sueur du front » attachée à toute activité humaine.

Le travailleur manuel se délasse en lisant, et le penseur, l'écrivain ou l'artiste, en se livrant à des exercices physiques.

Le repos n'est pas l'oisiveté, mauvaise conseillère, car si le repos est prescrit comme une nécessité, l'oisiveté est condamnée comme un danger. Il n'est pas non plus l'inaction forcée, sous forme de chômage ou de morte-saison, appelée plus justement « saison de mort ». Le repos n'est réel, valable et utile que s'il est libre, volontaire, délassant. Enfin, il est aussi indispensable à l'homme pour vivre que le travail pour lui en procurer le moyen. On peut rester un homme, a dit Charles Gide, en ne touchant qu'un pauvre salaire, tandis qu'on ne peut l'être sans disposer d'un minimum de loisir.

On goûte d'autant mieux un moment de détente que la tâche accomplie a été plus rude. Il n'y a pas de vrai délassement physique sans la satisfaction morale de l'oeuvre achevée. Aussi ne peut-on qu'approuver la célèbre formule des trois huit, qui, au lieu de partager en deux, comme pour la bête de somme, la vie du travailleur une partie pour la peine, une partie pour le sommeil, fait place à un troisième facteur représenté par le temps consacré à l'instruction personnelle et aux joies de la famille. Il est triste que des hommes puissent dire : Mon petit garçon commençait à parler, et je ne pouvais jamais l'entendre. Lorsque je partais au petit jour, il dormait encore ; lorsque je rentrais à la nuit, il était déjà couché. Sa mère me racontait ses gentillesses, ses mots drôles ; je me détournais pour ne pas lui laisser voir mes larmes. Il était si joli, mon petit. Une nuit, il s'est mis à tousser, le lendemain je ne suis pas retourné à l'atelier. L'enfant m'a dit - papa, reste avec moi, joue avec moi. C'était la première fois que mon fils m'avait appelé papa et.... la dernière.

Le surmenage, travail sans repos, a pour pendant l'oisiveté, repos sans travail, aussi funestes, l'un que l'autre, à la santé physique et à la vie normale. Le premier est la cause, au dire d'un médecin célèbre, des deux tiers des cas de maladie qu'il a soignés et qu'il est parvenu à soulager sans réussir à les guérir. Pour moissonner, l'essentiel n'est pas tant de couper le blé sans arrêt que de s'arrêter de temps à autre pour aiguiser sa faux. À quoi servirait-il de travailler sans répit, si l'on ne consacrait un certain temps à réparer ses forces ?

« D'après une statistique, que j'ai lieu de croire exacte, écrivait en 1894 M. Paul Lapeyre, et les choses n'ont pas dû bien changer depuis, neuf à dix millions d'individus sont privés, dans notre pays (1), du repos hebdomadaire. D'autre part, le nombre des oisifs adultes, rentiers ou autres, est d'environ quinze cent mille. Pour ces quinze cent mille qui réussissent à vivre sans travailler, chaque jour c'est dimanche. Le repos pour eux n'est pas hebdomadaire, mais quotidien. Si, conformément à la loi du travail, ces oisifs travaillaient six jours sur sept, ils fourniraient par semaine neuf millions de journées de travail. Ce sont précisément ces neuf millions de journées de travail que font les travailleurs privés du repos hebdomadaire. La concordance des chiffres est frappante et a toute la valeur d'une loi. Cette loi peut se formuler ainsi : Dès qu'un homme, le pouvant, refuse de travailler, sa part de travail retombe nécessairement en excès sur les travailleurs, qui sont privés d'un repos correspondant à ce travail refusé... Ces ouvriers travaillent en trop pour ceux qui ne travaillent pas assez (2). »

La question du dimanche est inséparable de la réforme du foyer. Si, comme on l'a dit, Marie de Béthanie avait été assujettie au labeur acharné auquel sont soumises bien des femmes dans l'industrie, elle n'aurait pas eu assez de loisir pour s'asseoir aux pieds du Christ et écouter ses divins enseignements.

Vous vous étonnez peut-être que telle mère de famille chrétienne ou telle jeune fille sérieuse ne fréquente pas le culte public ou y vienne rarement, mais vous ignorez sans doute que ces pauvres ouvrières sont occupées du matin au soir dans les ateliers ou les usines, et qu'il ne leur reste pour laver, ravauder, repasser leur linge, que les trop courtes heures du dimanche ? Bien plus, elles doivent prendre, non sur leur repos, mais sur leur sommeil, le temps qu'elles consacrent aux soins du ménage.

De là la nécessité d'obtenir, après la loi sur le repos hebdomadaire, et pour la compléter en la rendant vraiment efficace, le congé du samedi après-midi comme en Angleterre. Cette mesure législative permettrait à la femme d'ouvrier de mettre, ce jour-là, sa maison en ordre pour pouvoir, le lendemain, jouir complètement, avec sa famille, du repos du dimanche pris au grand air. Hélas ! le travail de l'ouvrière rend le plus souvent impossible l'accomplissement des devoirs de l'épouse ou de la mère. M. Gibier, curé à Orléans, a reconnu que la prospérité des nations protestantes s'explique, en grande partie, par leur fidèle observation du dimanche (3).

Faites des chrétiens, convertissez les ouvriers, entendons-nous dire et répéter de divers côtés, et la question sociale sera résolue. Parfait, et je suis bien de cet avis. Mais, pour que les ouvriers ou les ouvrières se convertissent à l'Évangile, vous conviendrez qu'il faudrait au moins qu'ils puissent l'entendre annoncer. Or, nous devons constater, avec tristesse, qu'ils ne viennent plus où on l'annonce. Dès lors, il faut aller où l'on est sûr de les rencontrer pour le leur faire entendre. D'accord. Mais comment peut-on s'intéresser aux choses divines et s'occuper de son âme, quand on est pris du matin au soir par l'atelier ou par l'usine et qu'on ne rentre chez soi que pour manger et pour dormir ? Et que dire encore de l'enfant que l'industrie saisit au moment ou il aurait le plus besoin de l'influence de la famille et du foyer ? Il est nécessaire de prêcher et de réclamer la sanctification du dimanche, mais il faut, avant tout, la rendre possible par l'interruption complète de tout travail et l'adoption, dans nos pays, de la semaine anglaise.

Le repos hebdomadaire donne à l'ouvrier sa dignité, sa liberté, la conscience de sa personnalité, en sorte que, pour un jour au moins, il peut se croire l'égal des autres hommes. C'est une question de santé physique, de justice sociale, de liberté religieuse.

N'a-t-on pas fait l'expérience que la fatigue physique et le surmenage portent les ouvriers à abuser des boissons alcooliques, tandis que la vigueur corporelle procure une résistance plus grande et une intelligence plus active ? On a observé, en outre, qu'en Angleterre les bons ouvriers s'enivraient moins, à mesure que leur salaire augmentait et que leur position matérielle s'améliorait. Le travail prolongé est un des plus puissants facteurs de l'alcoolisme. (A suivre.)

G. CHASTAND.



 
Comment intéresser les enfants à la
Mission.

Où est le moniteur ou la monitrice qui ne se soit trouvé fort embarrassé lorsque la liste des sujets annonce un dimanche de Missions ? L'embarras est parfois si grand que d'un commun accord on prie le directeur de se charger du catéchisme ce jour-là.
N'y a-t-il pas là un tort de notre part ? Nos élèves pourront-ils s'intéresser de tout leur coeur à la Mission, s'ils voient que nous évitons systématiquement de leur en parler ? Ne penseront-ils pas bien plutôt qu'il s'agit de quelque chose d'accessoire ?
Mais comment leur en parler, alors que nous sommes nous-mêmes si peu au courant des questions missionnaires ?

C'est précisément pour venir en aide aux monitrices et aux moniteurs perplexes, que le Comité pour l'Étude Missionnaire - appuyé moralement et financièrement par le Comité des Écoles du Dimanche du canton de Vaud - vient de publier un album, intitulé « Causeries sur le Japon, destinées à des enfants de 8 à 12 ans. »

Cet album inaugure une nouvelle méthode d'enseignement missionnaire ; nouvelle pour nous du moins, car voici une dizaine d'années qu'elle est appliquée en Angleterre où elle a donné les meilleurs résultats. Il s'agit de rendre cet enseignement plus systématique, car ce que nous avons fait jusqu'à présent a été trop fragmentaire. Il faut mettre l'enfant, non plus en présence des résultats atteints par la mission au sein de telle ou telle tribu, mais en présence de la nation elle-même ; il faut qu'il en connaisse préalablement le caractère, les aspirations ; il faut qu'il sache quelle est la religion de ce peuple ; alors seulement il pourra se rendre compte de la valeur des résultats obtenus par l'évangélisation, il se rendra mieux compte aussi des difficultés vaincues.

Les Causeries sur le Japon nous font connaître tout d'abord la patrie du Japonais ; puis nous pénétrons dans sa vie privée, en le suivant à l'école, et en l'accompagnant dans son pèlerinage à Nikko ; enfin nous faisons connaissance d'un héros de l'ancien Japon, Hideyoshi ; d'un héros du Japon moderne, Takeo Hirose ; puis d'un héros chrétien, Nisima.

L'album, qui n'est pas destiné aux élèves, mais au moniteur, est accompagné de quelques dessins qui devront être copiés par les enfants (caractères d'écriture, armoiries, portiques, etc.). Le Comité pour l'Étude Missionnaire a fait éditer, en outre, de grandes planches représentant des maisons japonaises ; ces maisons seront coloriées, découpées et construites par nos élèves. Il est important, en effet, que ceux-ci ne restent pas passifs ; ils s'intéressent davantage à ce qu'ils font qu'à ce qu'ils entendent, et la construction de ces maisonnettes fixera dans leur mémoire les détails donnés par le moniteur.

Que si l'on vient nous dire que de tels groupes sont impossibles à organiser dans nos Écoles du dimanche telles qu'elles existent, nous proposerons alors de les tenir en dehors de l'école. Ne pourrait-on pas, par exemple, donner le dimanche les deux premières leçons, et proposer aux enfants de les retrouver une fois pendant la semaine afin de continuer cette étude ?

Nous engageons, en tous cas, tous les moniteurs et monitrices à se procurer sans retard cet album, ainsi que les planches qui l'accompagnent ; ils verront s'ils ne pourraient pas s'inspirer de cette méthode afin de transformer nos trop mornes dimanches de missions en quelque chose de vivant et d'enthousiasmant. L'album dont nous parlons, n'est que le premier d'une série que le Comité pour l'Étude missionnaire désire publier peu à peu ; il espère ainsi travailler à étendre et approfondir la connaissance de la mission parmi les enfants.

N'oublions pas l'affirmation de l'un des congressistes présent à la Conférence Universelle des Missions (Edimbourg 1910) : « L'insuffisance actuelle de l'Eglise en face de responsabilités immenses, est en relation directe avec le manque d'organisation de l'éducation missionnaire des enfants dans te passé ». Et encore : « La grandeur même des demandes faites à l'Eglise à l'aurore du XXe siècle démontre l'impérieuse nécessité d'une propagande missionnaire scientifique et compréhensive, afin d'inspirer l'amour de la mission à la génération qui monte. » Que celui qui a des oreilles pour entendre, entende.

SOPHIE VERNET.


Conseils.
Qu'aucun jour ne se passe sans que tu penses aux enfants de ton groupe.
Que dès le premier jour de la semaine tu connaisses le sujet du dimanche suivant.
Que jamais tu ne cèdes à la tentation d'éviter un sujet qui te semble difficile et de le remplacer par un autre que tu crois plus facile.
Que la réunion hebdomadaire te soit aussi indispensable qu'au soldat l'école de recrues.
Sois à l'école avant les enfants et à la place de ton groupe.
Que les enfants les moins aimables te soient les plus chers.
Parle peu, lentement, et plus par le coeur que des lèvres ; de ton sujet ne dis pas tout, mais l'essentiel.
Ne sois jamais pressé et ne quitte pas ton groupe avant la fin de l'école.
Viens à l'école pour les enfants seulement.
Ne néglige aucun détail comme étant sans importance ; il n'y a rien de peu d'importance.
Sacrifie au règne de Dieu tes sympathies et tes antipathies.
Sois l'ami de tes élèves.
Rappelle-toi surtout que tu fais le travail de Jésus-Christ et sois-en joyeux, car pour qui l'aime ses commandements ne sont pas pénibles.

CH. M.


1 Il s'agit de la France. 

2 Le socialisme catholique ou Christianisme intégral, tome 1, p. 349, Paris, 1894.

3 Nos plaies sociales, p. 82. 
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