II. Le droit au repos.
La loi du travail a pour corollaire le
droit au repos. Le Décalogue, dans le
même commandement où il ordonne
à l'homme le travail, proclame pour lui ce
droit au repos. Le récit de la Genèse
s'appuyait pour cela sur l'exemple de Dieu.
Moïse ne fait que rappeler à son peuple
l'obligation du repos, qui, comme l'institution de
la semaine, remonte à la plus haute
antiquité. Souviens-toi du jour du
repos. « Moïse, dit Proudhon,
n'inventa pas la semaine, mais il fut le premier et
le seul qui s'en servit pour un si grand
usage. »
N'a donc droit au repos - mais y a droit
d'une façon absolue - que celui qui a
travaillé six jours de la semaine et a
accompli toute son oeuvre. « Le dimanche,
au dire du président Grant, est le jour
où Dieu arrose la plante du travail pour lui
faire porter ses fruits. » Ce droit,
conséquence d'un devoir, n'est pas le droit
à la paresse, puisque celui-là seul
peut légitimement jouir du repos, qui a
accompli toute son oeuvre.
D'après la loi mosaïque, le
repos était une loi générale,
imposée même à la terre,
puisque tous les sept ans les champs labourables
devaient être exempts de culture.
Après sept fois sept ans,
c'est-à-dire dans l'année jubilaire,
on devait libérer les esclaves, abolir les
dettes et rendre la terre à son premier
propriétaire.
Jamais loi ne fut plus humanitaire que celle
du sabbat, ordonnant aux Hébreux d'accorder
le repos en ce jour au fils de la servante et
à l'étranger. Afin même de
prévenir toute dérogation, le
législateur énumère tous les
êtres auxquels elle doit s'appliquer. Il
nomme même avec minutie les animaux
domestiques qui doivent en profiter. Il ne suffit
donc pas à l'homme de
se reposer après son travail, il faut
encore qu'il fasse bénéficier de son
repos ceux qui se sont associés à son
effort, bêtes et gens.
Le repos de l'homme après le travail,
à l'exemple du Créateur, n'est pas un
terme, mais un arrêt, une simple
étape, séparant une tâche
achevée d'une oeuvre à faire, et
devenant la condition même d'un bon et
fructueux labeur.
Le verbe hébreu employé pour
rendre le mot se reposer signifie : s'abstenir
de tout ouvrage, tel que celui fait dans les jours
précédents. Le repos ainsi
défini n'est donc qu'un changement
d'activité. On pourrait même dire,
dans une certaine mesure, que si le dimanche est
jour de repos pour le corps, il est jour
d'activité pour l'âme. Cet
accroissement de force morale doit profiter au
travail de la semaine. En ce sens le repos du ciel
ne sera que l'activité sans effort, le
travail sans la peine, sans « la sueur du
front » attachée à toute
activité humaine.
Le travailleur manuel se délasse en
lisant, et le penseur, l'écrivain ou
l'artiste, en se livrant à des exercices
physiques.
Le repos n'est pas l'oisiveté,
mauvaise conseillère, car si le repos est
prescrit comme une nécessité,
l'oisiveté est condamnée comme un
danger. Il n'est pas non plus l'inaction
forcée, sous forme de chômage ou de
morte-saison, appelée plus justement
« saison de mort ». Le repos
n'est réel, valable et utile que s'il est
libre, volontaire, délassant. Enfin, il est
aussi indispensable à l'homme pour vivre que
le travail pour lui en procurer le moyen. On peut
rester un homme, a dit Charles Gide, en ne touchant
qu'un pauvre salaire, tandis qu'on ne peut
l'être sans disposer d'un minimum de
loisir.
On goûte d'autant mieux un moment de
détente que la tâche accomplie a
été plus rude. Il n'y a pas de vrai
délassement physique sans la satisfaction
morale de l'oeuvre achevée. Aussi ne peut-on
qu'approuver la célèbre formule des
trois huit, qui, au lieu de partager en
deux, comme pour la bête de somme, la vie du
travailleur une partie pour la peine, une partie
pour le sommeil, fait place à un
troisième facteur représenté
par le temps consacré à l'instruction
personnelle et aux joies de la famille. Il est
triste que des hommes puissent dire : Mon
petit garçon commençait à
parler, et je ne pouvais jamais l'entendre. Lorsque
je partais au petit jour, il dormait encore ;
lorsque je rentrais à la nuit, il
était déjà couché. Sa
mère me racontait ses gentillesses, ses mots
drôles ; je me détournais pour ne
pas lui laisser voir mes larmes. Il était si
joli, mon petit. Une nuit, il s'est mis à
tousser, le lendemain je ne suis pas
retourné à l'atelier. L'enfant m'a
dit - papa, reste avec moi, joue avec moi.
C'était la première fois que mon fils
m'avait appelé papa et.... la
dernière.
Le surmenage, travail sans repos, a pour
pendant l'oisiveté, repos sans travail,
aussi funestes, l'un que l'autre, à la
santé physique et à la vie normale.
Le premier est la cause, au dire d'un
médecin célèbre, des deux
tiers des cas de maladie qu'il a soignés et
qu'il est parvenu à soulager sans
réussir à les guérir. Pour
moissonner, l'essentiel n'est pas tant de couper le
blé sans arrêt que de s'arrêter
de temps à autre pour aiguiser sa faux.
À quoi servirait-il de travailler sans
répit, si l'on ne consacrait un certain
temps à réparer ses
forces ?
« D'après une statistique,
que j'ai lieu de croire exacte, écrivait en
1894 M. Paul Lapeyre, et les choses n'ont pas
dû bien changer depuis, neuf à dix
millions d'individus sont privés, dans notre
pays (1), du
repos hebdomadaire. D'autre part, le nombre des
oisifs adultes, rentiers ou autres, est d'environ
quinze cent mille. Pour ces quinze cent mille qui
réussissent à
vivre sans travailler, chaque jour c'est dimanche.
Le repos pour eux n'est pas hebdomadaire, mais
quotidien. Si, conformément à la loi
du travail, ces oisifs travaillaient six jours sur
sept, ils fourniraient par semaine neuf millions de
journées de travail. Ce sont
précisément ces neuf millions de
journées de travail que font les
travailleurs privés du repos hebdomadaire.
La concordance des chiffres est frappante et a
toute la valeur d'une loi. Cette loi peut se
formuler ainsi : Dès qu'un homme, le
pouvant, refuse de travailler, sa part de travail
retombe nécessairement en excès sur
les travailleurs, qui sont privés d'un repos
correspondant à ce travail refusé...
Ces ouvriers travaillent en trop pour ceux qui ne
travaillent pas assez
(2). »
La question du dimanche est
inséparable de la réforme du foyer.
Si, comme on l'a dit, Marie de Béthanie
avait été assujettie au labeur
acharné auquel sont soumises bien des femmes
dans l'industrie, elle n'aurait pas eu assez de
loisir pour s'asseoir aux pieds du Christ et
écouter ses divins enseignements.
Vous vous étonnez peut-être que
telle mère de famille chrétienne ou
telle jeune fille sérieuse ne
fréquente pas le culte public ou y vienne
rarement, mais vous ignorez sans doute que ces
pauvres ouvrières sont occupées du
matin au soir dans les ateliers ou les usines, et
qu'il ne leur reste pour laver, ravauder, repasser
leur linge, que les trop courtes heures du
dimanche ? Bien plus, elles doivent prendre,
non sur leur repos, mais sur leur sommeil, le temps
qu'elles consacrent aux soins du
ménage.
De là la nécessité
d'obtenir, après la loi sur le repos
hebdomadaire, et pour la compléter en la
rendant vraiment efficace, le congé du
samedi après-midi comme en Angleterre. Cette
mesure
législative permettrait à la femme
d'ouvrier de mettre, ce jour-là, sa maison
en ordre pour pouvoir, le lendemain, jouir
complètement, avec sa famille, du repos du
dimanche pris au grand air. Hélas ! le
travail de l'ouvrière rend le plus souvent
impossible l'accomplissement des devoirs de
l'épouse ou de la mère. M. Gibier,
curé à Orléans, a reconnu que
la prospérité des nations
protestantes s'explique, en grande partie, par leur
fidèle observation du dimanche
(3).
Faites des chrétiens, convertissez
les ouvriers, entendons-nous dire et
répéter de divers côtés,
et la question sociale sera résolue.
Parfait, et je suis bien de cet avis. Mais, pour
que les ouvriers ou les ouvrières se
convertissent à l'Évangile, vous
conviendrez qu'il faudrait au moins qu'ils puissent
l'entendre annoncer. Or, nous devons constater,
avec tristesse, qu'ils ne viennent plus où
on l'annonce. Dès lors, il faut aller
où l'on est sûr de les rencontrer pour
le leur faire entendre. D'accord. Mais comment
peut-on s'intéresser aux choses divines et
s'occuper de son âme, quand on est pris du
matin au soir par l'atelier ou par l'usine et qu'on
ne rentre chez soi que pour manger et pour
dormir ? Et que dire encore de l'enfant que
l'industrie saisit au moment ou il aurait le plus
besoin de l'influence de la famille et du
foyer ? Il est nécessaire de
prêcher et de réclamer la
sanctification du dimanche, mais il faut, avant
tout, la rendre possible par l'interruption
complète de tout travail et l'adoption, dans
nos pays, de la semaine anglaise.
Le repos hebdomadaire donne à
l'ouvrier sa dignité, sa liberté, la
conscience de sa personnalité, en sorte que,
pour un jour au moins, il peut se croire
l'égal des autres hommes. C'est une question
de santé physique, de justice sociale, de
liberté religieuse.
N'a-t-on pas fait l'expérience que la
fatigue physique et le surmenage portent les
ouvriers à abuser des boissons alcooliques,
tandis que la vigueur corporelle procure une
résistance plus grande et une intelligence
plus active ? On a observé, en outre,
qu'en Angleterre les bons ouvriers s'enivraient
moins, à mesure que leur salaire augmentait
et que leur position matérielle
s'améliorait. Le travail prolongé est
un des plus puissants facteurs de l'alcoolisme. (A
suivre.)
G. CHASTAND.
Où est le moniteur ou la monitrice qui ne
se soit trouvé fort embarrassé
lorsque la liste des sujets annonce un dimanche de
Missions ? L'embarras est parfois si grand que
d'un commun accord on prie le directeur de se
charger du catéchisme ce
jour-là.
N'y a-t-il pas là un tort de notre
part ? Nos élèves pourront-ils
s'intéresser de tout leur coeur à la
Mission, s'ils voient que nous évitons
systématiquement de leur en parler ? Ne
penseront-ils pas bien plutôt qu'il s'agit de
quelque chose d'accessoire ?
Mais comment leur en parler, alors que nous
sommes nous-mêmes si peu au courant des
questions missionnaires ?
C'est précisément pour venir
en aide aux monitrices et aux moniteurs perplexes,
que le Comité pour l'Étude
Missionnaire - appuyé moralement et
financièrement par le Comité des
Écoles du Dimanche du canton de Vaud - vient
de publier un album, intitulé
« Causeries sur le Japon,
destinées à des enfants de 8 à
12 ans. »
Cet album inaugure une nouvelle
méthode d'enseignement missionnaire ;
nouvelle pour nous du moins, car voici une dizaine
d'années
qu'elle est appliquée en Angleterre
où elle a donné les meilleurs
résultats. Il s'agit de rendre cet
enseignement plus systématique, car ce que
nous avons fait jusqu'à présent a
été trop fragmentaire. Il faut mettre
l'enfant, non plus en présence des
résultats atteints par la mission au sein de
telle ou telle tribu, mais en présence de la
nation elle-même ; il faut qu'il en
connaisse préalablement le caractère,
les aspirations ; il faut qu'il sache quelle
est la religion de ce peuple ; alors seulement
il pourra se rendre compte de la valeur des
résultats obtenus par
l'évangélisation, il se rendra mieux
compte aussi des difficultés vaincues.
Les Causeries sur le Japon nous
font
connaître tout d'abord la patrie du
Japonais ; puis nous pénétrons
dans sa vie privée, en le suivant à
l'école, et en l'accompagnant dans son
pèlerinage à Nikko ; enfin nous
faisons connaissance d'un héros de l'ancien
Japon, Hideyoshi ; d'un héros du Japon
moderne, Takeo Hirose ; puis d'un héros
chrétien, Nisima.
L'album, qui n'est pas destiné aux
élèves, mais au moniteur, est
accompagné de quelques dessins qui devront
être copiés par les enfants
(caractères d'écriture, armoiries,
portiques, etc.). Le Comité pour
l'Étude Missionnaire a fait éditer,
en outre, de grandes planches représentant
des maisons japonaises ; ces maisons seront
coloriées, découpées et
construites par nos élèves. Il est
important, en effet, que ceux-ci ne restent pas
passifs ; ils s'intéressent davantage
à ce qu'ils font qu'à ce
qu'ils entendent, et la construction de ces
maisonnettes fixera dans leur mémoire les
détails donnés par le moniteur.
Que si l'on vient nous dire que de tels
groupes sont impossibles à organiser dans
nos Écoles du dimanche telles qu'elles
existent, nous proposerons alors de les tenir en dehors
de l'école. Ne
pourrait-on pas, par exemple, donner le dimanche
les deux premières leçons, et
proposer aux enfants de les retrouver une fois
pendant la semaine afin de continuer cette
étude ?
Nous engageons, en tous cas, tous les
moniteurs et monitrices à se procurer sans
retard cet album, ainsi que les planches qui
l'accompagnent ; ils verront s'ils ne
pourraient pas s'inspirer de cette méthode
afin de transformer nos trop mornes dimanches de
missions en quelque chose de vivant et
d'enthousiasmant. L'album dont nous parlons, n'est
que le premier d'une série que le
Comité pour l'Étude missionnaire
désire publier peu à peu ; il
espère ainsi travailler à
étendre et approfondir la connaissance de la
mission parmi les enfants.
N'oublions pas l'affirmation de l'un des
congressistes présent à la
Conférence Universelle des Missions
(Edimbourg 1910) : « L'insuffisance
actuelle de l'Eglise en face de
responsabilités immenses, est en relation
directe avec le manque d'organisation de
l'éducation missionnaire des enfants dans te
passé ». Et encore :
« La grandeur même des demandes
faites à l'Eglise à l'aurore du XXe
siècle démontre l'impérieuse
nécessité d'une propagande
missionnaire scientifique et compréhensive,
afin d'inspirer l'amour de la mission à la
génération qui monte. » Que
celui qui a des oreilles pour entendre, entende.
SOPHIE VERNET.
Conseils.
Qu'aucun jour ne se passe sans que tu penses
aux enfants de ton groupe.
Que dès le premier jour de la semaine
tu connaisses le sujet du dimanche suivant.
Que jamais tu ne cèdes à la
tentation d'éviter un sujet qui te semble
difficile et de le remplacer par un autre que tu
crois plus facile.
Que la réunion hebdomadaire te soit
aussi indispensable qu'au soldat l'école de
recrues.
Sois à l'école avant les
enfants et à la place de ton groupe.
Que les enfants les moins aimables te soient
les plus chers.
Parle peu, lentement, et plus par le coeur
que des lèvres ; de ton sujet ne dis
pas tout, mais l'essentiel.
Ne sois jamais pressé et ne quitte
pas ton groupe avant la fin de l'école.
Viens à l'école pour les
enfants seulement.
Ne néglige aucun détail comme
étant sans importance ; il n'y a rien
de peu d'importance.
Sacrifie au règne de Dieu tes
sympathies et tes antipathies.
Sois l'ami de tes élèves.
Rappelle-toi surtout que tu fais le travail
de Jésus-Christ et sois-en joyeux, car pour
qui l'aime ses commandements ne sont pas
pénibles.
CH. M.
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