Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

Baulmes.


Le lundi 15 mai, 600 personnes, dont 400 moniteurs et monitrices des districts d'Yverdon et de Grandson se trouvaient assemblées dans le temple de Baulmes en réunion annuelle. Après un choeur d'enfants, M. F. Thomas prononça une prédication sur Jean 14 : 8 : Seigneur, montre-nous le Père et cela nous suffit.

L'éminent prédicateur dit d'abord sa joie de participer à cette belle réunion des Écoles du dimanche et l'importance qu'il attache à cette institution voulue de Dieu pour l'avancement de son règne ici-bas. Puis il aborde son texte. C'est au moment le plus émouvant de la carrière du Sauveur, à l'heure des adieux suprêmes et dans l'entretien sublime qui doit préparer ses disciples à la séparation que Philippe posa au Sauveur sa question : Seigneur montre-nous le Père et cela nous suffit.

Philippe était un brave homme, mais un peu lent, un peu lourd d'esprit, mais ce jour-là il a formulé l'aspiration la plus profonde de notre race déchue, séparée de Dieu par le péché, et qui pourtant le cherche parce que Dieu est le centre de gravité et la vie de toutes les âmes. Ce jour-là, Philippe a exprimer le soupir de la création dont parle saint Paul.

Et l'orateur commente, en termes émouvants, la réponse du Seigneur : la vue du Père, mais c'est la vue du Fils, image visible et incarnation de Dieu cherché et caché au regard de l'homme déchu.
Qui contemple le Fils contemple le Père qui l'a envoyé. En effet, Jésus révèle ou dévoile Dieu, notre Père, par sa parole. Il est, dit saint Jean, la Parole faite chair... etc.

Jésus révèle le Père, et nous voyons le Père à travers l'action et la vie du Fils. Jésus révèle le Père enfin par son Esprit. Puis en venant aux applications, M. Thomas nous dit comment l'enfant de Dieu sur la terre peut, à la fois, voir toujours mieux et faire connaître le Père qui nous aime et nous veut adopter : Par notre parole, par notre exemple et nos actions, par notre vie et pas nos prières.

Cette première partie de la réunion fut clôturée par le choeur des dames qui chantèrent un beau cantique répondant fort bien aux paroles impressives qu'on venait d'entendre.

Après le pique-nique de midi, la sonnerie des cloches annonça la séance de relevée qui eut lieu dans le temple aussi, très nombreuse également, et s'ouvrit à 2 heures par une invocation du choeur des dames. M. le pasteur Logoz avait présidé la réunion du matin ; M. le pasteur de Pury présida celle de l'après-midi, prononça quelques paroles de cordiales bienvenue, après quoi M. Logoz exposa ses réflexions sur le sujet indiqué dans le programme : L'École du Dimanche, ce qu'elle devrait et pourrait être. Souvent l'orateur s'est dit que si un ancêtre revenait ici-bas et visitait nos Écoles du Dimanche, il aurait bien des observations à faire. L'École du Dimanche, qui a remplacé chez nous la « prière » que présidait l'instituteur, nous vient d'Angleterre ; elle est cousine des écoles de déguenillés. D'abord, nos Églises nationales se refusèrent à l'accepter. En 1830, on n'en trouve qu'une trentaine dans le canton. Les débuts furent laborieux. Une personne dévouée, que l'orateur dépeint sous des traits peu avenants, réunissait quelques polissons, d'ordinaire dans la salle du catéchisme. La fréquentation était irrégulière ; meilleure, comme aujourd'hui du reste, aux approches de Noël. L'affaiblissement de l'enseignement religieux à l'école fit l'affaire de l'École du Dimanche. On peut rendre hommage à bien des membres du corps enseignant. Quoique l'histoire biblique soit une branche accessoire, ils vouent à leurs leçons tous leurs soins. N'importe. Cette branche accessoire n'a d'importance que dans la mesure des convictions du maître. De son côté, la famille ne contribue guère au développement religieux de l'enfant. Aussi, l'École du Dimanche est-elle devenue nécessaire, et l'entente cordiale entre les Églises, dans la poursuite de cette oeuvre, vaut mieux en général que l'école étroitement ecclésiastique.

L'École du dimanche doit combler des lacunes - préparer l'enfant au catéchuménat ; établir le règne de Dieu dans les jeunes âmes. Différente de l'école de la semaine, elle doit, dans chaque leçon, donner un grain de l'Évangile, travailler à faire des chrétiens, donner à l'enfant la connaissance de soi-même, de son péché, de la loi morale, de la responsabilité, en passant de la conscience à l'âme et de l'âme à Dieu. Il faut poser une base sur laquelle Dieu bâtira. Il faut ne pas négliger la mémorisation ; ce qui a été appris dans l'enfance, c'est ce qui restera, ce que le vieillard se rappelle pour la consolation de son âme. Que les moniteurs prennent courage ; l'oeuvre est belle, saintement utile. Si l'on s'y met avec dévouement, on a bientôt appris à parler de ce qu'on aime.

Après ce travail suggestif, M. Frank Thomas relève la nécessité, pour les moniteurs, d'instruire et d'édifier. M. Payot, de Chêne et Paquier, invite les moniteurs à donner à tous les actes de l'École du Dimanche leur valeur, leur signification, leur importance. Il y faut la vie : Soyons-y fortement. Le pasteur de Champagne, M. Steiner, accentue l'importance de la mémorisation sérieuse, persévérante des passages bibliques. Un moniteur d'Yverdon, M. Buttex, rappelle la question adressée à l'apôtre par le Sauveur : « M'aimes-tu ? » et illustre la nécessité de l'amour dans l'enseignement du moniteur par le fait touchant d'une lavandière parlant de son fils sur le front en termes si enthousiastes qu'elle provoquait l'émotion de ses auditeurs. Parlons avec enthousiasme du Sauveur que nous aimons. M. Serex, instituteur, a constaté que l'enseignement de l'histoire biblique à l'école a peu de valeur si le maître n'y apporte la conviction religieuse. M. le pasteur de Pury voudrait que l'Éducation chrétienne dans ses études bibliques, pût revêtir quelques caractères des études du Journal rose de Paris. Enfin, dans la courte séance administrative qui suivit, M. Comtesse de la Tour, délégué du Comité cantonal, à la place de M. de Mestral, après être revenu au travail de M. Logoz pour rappeler la mémoire de M. Jaulmes-Cook et son travail dans notre pays, a apporté à l'assemblée les salutations du Comité et des paroles d'encouragement.

Ces deux belles séances où vibraient les cordes de la fraternité et de la joie chrétienne furent suivies du thé traditionnel où les discours furent rares et le chant des cantiques de notre nouveau recueil presque continu.

C.


Pays-d'Enhaut.

C'est le 23 mai écoulé que le peuple du Pays-d'Enhaut a tenu sa réunion annuelle. Cette fois-ci, c'était aux Moulins, c'est-à-dire dans un hameau, mais un hameau qui est une portion importante de la paroisse de Château-d'Oex et qui renferme des partisans zélés de l'école du dimanche, preuve en soit le fait qu'ils avaient demandé et obtenu la faveur de recevoir les membres du groupe. C'était un essai ! Ce fut un succès, dont on les félicite !

À dix heures, l'assistance se forme peu à peu (à la vaudoise), dans la grande salle du collège des Moulins, gentiment décorée de verdure. Après un cantique et une prière, M. le pasteur Cartet, président du groupe, souhaite la bienvenue aux participants (parmi lesquels on remarque trois monitrices de Bulle et... quelques membres du corps enseignant féminin de la paroisse, qu'une autorité bienveillante et bien pensante avait munis d'un congé de circonstance), et salue la présence du délégué du Comité cantonal, M. le pasteur G. Meylan. Puis une surprise : un choeur mixte formé pour l'occasion exécute un beau morceau et en exécutera un second un peu plus tard. On applaudit en silence chaque fois. M. le pasteur Chuard présente dans l'intervalle une leçon ou plutôt une étude serrée et suggestive de la leçon du dimanche suivant, à savoir : Le retour de Paul à Jérusalem et sa fidélité au devoir, étude reprise et complétée par quelques-uns des pasteurs présents. Puis la parole est donnée au délégué du Comité cantonal dont les préoccupations, les projets, l'activité et les encouragements sont apportés et accueillis comme toujours avec intérêt et reconnaissance.

L'heure du repas est là. On va prendre l'air, puis l'on rentrer et l'on... transporte les bancs à l'étage supérieur, afin de mieux savourer l'excellent dîner que, pour un prix modique, les amis des Moulins ont préparé. Tables fleuries, menu à point, crème de la montagne, café, rien n'y manque, pas même la musique représentée par un choeur d'enfants de sept à douze ans qui, groupés dans le corridor, chantent des paroles de bienvenue et de gratitude, composées par un moniteur de l'endroit, sur une mélodie bien connue du Recueil des écoles du dimanche. C'était une seconde surprise et non la moindre. Tout cela méritait des compliments que tourna avec chaleur M. le pasteur Chuard. On redescend avec les bancs et après un chant et une prière, on écoute avec attention et édification un travail consciencieux de M. le pasteur Jaccard sur ce sujet capital : Comment défendre notre Bible ? La conclusion en est : la meilleure manière de défendre notre Bible, c'est d'en vivre ! Cette conclusion est reprise et soulignée par d'autres orateurs. Après quoi, on tranche quelques questions administratives et, après une prière, on remonte pour le thé, largement servi et accompagné de solides, auxquels s'ajoutent de chauds remerciements. C'est la fin. Le soleil à son déclin essaie de luire. Il luit tout à fait dans les coeurs, réconfortés et réchauffés par tout ce qu'ils ont reçu, entre autres par l'accueil vraiment généreux des amis des Moulins. E. S. L.




Gros de Vaud.

Au matin du mardi 28 mai, tandis que chacun vaquait à son travail habituel, pasteurs et monitrices de la région du Gros de Vaud s'acheminaient, joyeux, vers le beau village d'Oulens, où avait lieu la réunion des écoles du dimanche. Un temps quelque peu couvert au début n'enleva rien à la réussite de cette assemblée, à laquelle chacun apporta d'un bout à l'autre entrain et gaieté. Chaleureusement accueillis dans un temple artistiquement décoré de gerbes de fleurs et de guirlandes le long des murs, par un groupe de dames et de demoiselles d'Oulens, nous entendîmes quelques paroles de bon accueil de M. le pasteur Vallotton, suivies d'un choeur de circonstance des élèves. Ensuite vint la lecture d'un beau travail de M. Vallotton père, pasteur à Lausanne, sur ce sujet : Le drame biblique et l'école du dimanche. Chacun put y puiser maints renseignements utiles et profonds sur la manière d'interpréter les sujets bibliques et de les exposer aux enfants. Après une discussion nourrie et de nouveaux choeurs, exécutés par les dévouées monitrices de la paroisse, nous passâmes dans le jardin de la cure, où nous fut offerte la soupe traditionnelle complétée des provisions que chacun avait apportées avec soi. Groupés autour de longues tables dressées et également fleuries, ce ne fut pas pour nous la partie la moins animée de la journée. Ensuite on reprit le chemin du temple et nous eûmes le plaisir d'entendre un député, M. Wullyamoz, parler avec chaleur de la nécessité de l'instruction et de l'éducation chrétiennes comme devant s'associer intimement au culte de la Patrie. Cette voix, venant d'un « laïque », fit du bien à tous. Puis ce fut le tour de M. le pasteur Gailloud, représentant le Comité cantonal des écoles du dimanche, qui nous apporta des encouragements à persévérer dans notre oeuvre avec le sentiment des responsabilités qui s'y rattachent. Encore des productions musicales très goûtées, puis ce fut la clôture avec un thé « monstre » de plus de cent couverts dans le grand jardin de la cure. Chants et toasts s'y succédèrent sans interruption. Nous n'oublierons pas les boutades amusantes de M. Rochat, de Chavornay, et terminerons par un cordial merci à nos voisins et voisines d'Oulens pour leur aimable réception, qu'on n'eût pu souhaiter plus charmante ni mieux réussie.

Une monitrice de Goumoens.



 
District de
Cossonay.

C'est notre jubilé, ou, si vous voulez, nos noces d'argent. En effet, l'Association a été fondée au printemps de 1892 à Cossonay, et dès lors, chaque année, dans l'une ou l'autre de nos paroisses, a lieu la réunion du personnel enseignant et dirigeant de nos écoles. C'est devenu si bien une habitude, qu'on y pense et qu'on s'en réjouit douze mois à l'avance. Dieu nous a favorisés jusqu'ici, et nous lui demandons de nous permettre de nous réunir toujours ainsi à l'avenir !

La paroisse de Vufflens-la-Ville nous a donc invités à tenir le mardi 30 mai nos assises dans le joli temple de Mex, si admirablement restauré et si artistiquement embelli par M. le peintre Rivier, de Jouxtens. À deux heures commence la partie officielle. Il n'y a plus une place vide dans l'enceinte, et, en attendant l'ouverture du culte, chacun admire cette magnifique théorie d'anges qui, chantant et jouant de toutes sortes d'instruments, les yeux dirigés sur le Christ crucifié, ornent la frise tout autour de l'édifice.

Après une entrée d'harmonium, M. le pasteur Candaux, de Vufflens, donne lecture du programme et fait chanter à l'assemblée le cantique 86 du recueil des écoles. Il lit ensuite dans Jean chapitre 10, et nous parle de la joie qu'il éprouve de recevoir les délégués des paroisses. Les demoiselles de la localité exécutent d'une manière très juste le cantique : Quel grand secours ! M. S. Gindraux, pasteur à Echallens, a bien voulu se charger de la leçon du 4 juin, Paul emprisonné à Jérusalem. C'est un sujet un peu aride, mais M. Gindraux en tire tout ce qu'il s'y trouve d'intéressant pour nos élèves. Il le fait avec beaucoup de clarté et de bonheur. De nouveau nous entendons le choeur de dames, et M. Candaux ne nous en voudra pas, si nous dévoilons que paroles et musique sont de lui-même ! Ce cantique fait un bel effet.

M. Renaud, pasteur aux Croisettes, prend la parole et nous. donne une étude claire, intéressante, approfondie sur Un vieux livre toujours vivant. On sait de quel livre il s'agit ! L'orateur nous en montre la valeur toujours actuelle, la puissance de relèvement, le caractère si humain et si divin. C'est la Bible qui sauvera le monde bouleversé. C'est la Bible qui est à la base de la civilisation chrétienne. La propager, la lire, la suivre et la faire aimer de nos enfants, voilà notre tâche. L'impression fat profonde et sera durable. La cérémonie se termine par un chant, et la prière finale.

Sous les ombrages de la belle terrasse, offerte gracieusement par M. Charrière de Sévery, propriétaire du château de Mex, l'assemblée prend place aux nombreuses tables chargées de fleurs, puis on nous offre du thé et des pâtisseries, le tout excellent ! Nous ne vous citerons en entier ni les chants ni les discours. Nous relèverons toutefois l'allocution si aimable de M. Pache-Tanner, au nom du Comité cantonal ; une lettre de M. Charles, receveur à Orbe, qui, délégué par le bureau du Conseil du IVe arrondissement ecclésiastique, n'a pu venir nous rejoindre. Cette lettre, pleine de sentiments d'affection, de foi et de patriotisme, produit une vraie sensation. Citons encore de beaux vers de M. le pasteur de Perrot, de l'Isle, qu'il fait suivre d'une charade, poétique aussi, dont le mot est charmé, où il trouve une allusion aux chars qui nous ont amenés à Mex. Il est très applaudi, de même que les autres orateurs. Enfin, hélas ! arrive l'heure du départ. On se sépare en se donnant rendez-vous, s'il plaît à Dieu, à Cossonay en 1917.

Chacun a regagné son domicile en bénissant Dieu de ses grâces et de son appui ! Nous terminons en adressant aux autorités et à la population de Mex, spécialement à M. Charrière de Sévery, nos remerciements les plus vifs, dont une bonne partie doit aller à M. et à Mme Caudaux et à leurs monitrices.

L. WALTER, pasteur.


BIBLIOGRAPHIE

 

Les heureux, (1) par Frank Thomas. Étude pratique sur les Béatitudes. 1 vol. in-80. Attinger frères éditeurs, Neuchâtel et Paris. - Prix : 2 fr. 75 ; relié, 4 fr. 25.
Nous avons la ce volume avec un vif intérêt. Il fallait un certain courage à M. Thomas pour aborder après tant d'autres les Béatitudes du Sermon sur la montagne et pour faire de chacune d'elles une prédication spéciale.
On comprend, d'autre part, que ce sujet se soit imposé à l'auteur. Avec quelle étrange puissance elles sonnent à l'heure actuelle, ces paroles du Christ qui déclarent heureux : les doux, les miséricordieux, les pacifiques, les persécutés pour la justice, etc. Comme « elles répondent bien aux besoins de l'âme contemporaine ! » Nous remercions M. Frank Thomas d'avoir publié « ces simples études. »
On y retrouve les qualités habituelles de l'éminent prédicateur genevois : la clarté, des traits frappants, beaucoup de chaleur et. de vie, une parole qui s'adresse à la fois à l'intelligence, au coeur, à la conscience et qui est toujours franche, courageuse et très actuelle.
Les allusions aux circonstances que traverse maintenant l'Europe et aux problèmes qu'elles soulèvent y sont naturellement, nombreuses.
Le premier discours sur le bonheur et le dernier sur le soleil levant, inspiré à l'auteur par une visite aux installations du Dr Rollier, à Leysin, servent d'introduction et de conclusion à la série des huit Béatitudes.

Ces prédications sont bien des études, parce que le texte est sérieusement examiné et exposé, mais ce sont des études pratiques qui visent avant tout à l'édification.
Ce n'est pas l'oeuvre d'un littérateur ou d'un philosophe, c'est l'oeuvre d'un pasteur « qui exprime ce qu'éprouve un coeur aimant et ému pour ses contemporains. »

E. L. B.


À la Frontière, en 1870-1871. Souvenirs extraits des récits de soldats suisses par WILHELM-J. MEYER, premier lieutenant. Avec 12 gravures. - Lausanne, Georges Bridel & Cie. Prix 2 francs.
La mobilisation de l'armée suisse a réveillé le souvenir des événements de la guerre franco-allemande. Si le nombre de ceux qui firent alors la garde à notre frontière est maintenant bien réduit, il n'est que plus opportun de rappeler à la génération actuelle ce que vit et fit la précédente.
C'est dans cette pensée, que le premier lieutenant W. -J. Meyer, De ès lettres et bibliothécaire de la ville de Berne, a extrait des mémoires d'un grand nombre de soldats suisses les scènes les plus caractéristiques de l'occupation des frontières en 1870-1871. Il a groupé ces récits en quelques courts chapitres reliés d'un fil conducteur et ornés de jolies gravures.

Le but de ce petit volume est, au milieu des circonstances sérieuses que nous traversons, de contribuer à entretenir dans l'armée suisse comme dans le peuple un esprit prêt à la défense de la patrie. L'accueil fait à cet ouvrage dans la Suisse allemande a engagé à le mettre à la portée des lecteurs de la Suisse française. À la frontière est une lecture si intéressante et par places si passionnante qu'aucun citoyen suisse ne regrettera d'en avoir fait l'acquisition.

X.


Causeries sur le Japon, destinées à des enfants âgés de huit à douze ans. Brochure grand papier écolier de 16 pages de texte et Il pages d'illustrations, avec supplément de deux grandes feuilles à colorier et découper. - Lausanne, imprimerie coopérative La Concorde.
Ces causeries, au nombre de six, font partie d'une série destinée à éveiller l'intérêt missionnaire chez nos enfants, en leur faisant connaître successivement les diverses races humaines, aussi bien dans ce que leur caractère présente de traits nobles et élevés que dans leurs lacunes et leur insuffisance En voici les titres : 1. La patrie des Japonais ; 2. L'école au Japon ; 3. Un sanctuaire japonais ; 4. Un héros de l'ancien Japon ; 5. Un héros japonais d'aujourd'hui ; 6. Un Samouraï trouve le héros parfait. Chacune peut être utilisée pour une et même plusieurs leçons, intéressantes et utiles.

L. N.




L'
enfant, à la lumière du Nouveau Testament. (Suite et fin.)

Mais alors où est la noblesse de l'enfant et sa supériorité sur l'adulte en général ? Il nous semble que ces avantages proviennent du fait que l'enfant est faible et que, sentant sa faiblesse, il est naturellement disposé à la confiance et à l'humilité. Jésus lui-même a signalé ce trait du caractère enfantin. C'est ce besoin de confiance qui, nous semble-t-il, l'a attiré et charmé. L'homme naturel aime, admire et adore la force ; dans l'humanité irrégénéré le fort seul compte l'enfant y est nécessairement dans l'ombre. Pour le Christ, l'être faible, ordinairement méprisé, qu'était l'enfant, devait acquérir une valeur inconnue. Ajoutez à la confiance et à l'humilité (attitude naturelle de l'enfant et non fruit du raisonnement et de la volonté), la réceptivité, qualité dont les autres découlent, qualité mais non vertu, toutefois qualité inestimable. « Si vous ne recevez pas le royaume de Dieu comme un enfant le reçoit, vous n'y entrerez pas.... » Cette parole éclaire toute la question. En effet, la réceptivité est bien le trait le plus facilement observable du caractère de l'enfant, et le plus général. Les psychologues contemporains l'ont reconnu ; a ainsi Claparède, qui montre fort bien que l'enfance est « en soi » nécessaire à la formation de l'être humain. Tous les pédagogues accordent également que l'éducation doit se faire dans le jeune âge, c'est-à-dire tant que la réceptivité est grande.

Du point de vue évangélique, la réceptivité a une importance capitale. Si l'Évangile est une grâce, et il l'est, on ne peut devenir chrétien qu'en sachant recevoir. Or l'enfant sait recevoir, simplement, spontanément, joyeusement. Pour lui, c'est là une chose naturelle. Si nous voulons devenir des chrétiens, il nous faut l'imiter. Cela se peut-il ? Nous le croyons. La réceptivité, qui est l'art de savoir recevoir, en demandant, après s'être étonné de la beauté de ce que l'on désire obtenir, la réceptivité est une chose que les enfants ont naturellement sans doute, mais que l'on ne perd pas nécessairement avec les années ; on peut la conserver. On peut rester jeune de coeur et d'intelligence, avoir l'esprit ouvert, continuer à apprendre, porter son sac d'école, comme Michel-Ange, jusque dans l'extrême vieillesse, et quoique vieux s'épanouir encore et porter du fruit. Oui, on peut imiter l'enfant et redevenir semblable à lui dans l'art de recevoir. On le peut et on le doit. « La vraie sagesse est donnée dans ses bases nécessaires, dit Gratry, et les sophistes qui cherchent à créer le commencement de la sagesse sont d'inintelligents ingrats. La vraie religion est au milieu de nous, richement répandue, comme les bienfaits de la nature. Oui, Dieu lui-même s'est donné.... Pourquoi Dieu n'aurait-il pas fait pour le coeur et l'esprit de l'homme ce qu'il a fait manifestement pour son corps ? » (Les sources, p. 259.)

Si nous comprenons bien le sens des paroles du grand penseur catholique, il nous sera facile de saisir toute l'importance de la réceptivité enfantine au point de vue de l'Évangile. Cette doctrine d'amour est un don, offert non aux satisfaits, aux riches, aux blasés, aux justes, mais aux petits, aux faibles, aux malades, aux pauvres, aux pécheurs. Non aux sages et aux intelligents de ce monde, mais aux humbles et aux enfanta, c'est-à-dire à ceux qui peuvent et savent encore recevoir. Sans doute, la réceptivité n'est pas l'unique activité spirituelle du disciple de Jésus-Christ. Le chrétien doit aussi se livrer au travail d'assimilation et d'adaptation, et dans ce travail l'intelligence, la raison, le jugement, l'esprit critique entrent pour une bonne part. Mais cette activité-là s'exercera plus tard. Avant de s'assimiler un aliment, il faut l'absorber. L'Évangile commence par une invitation ; il faut s'asseoir à la table du royaume ; après... on verra à se rendre dans la vigne du Seigneur pour y travailler. Le début, c'est la foi, l'acceptation de la grâce. Commençons par le commencement. Soyons d'abord des enfants, et « souvenons-nous de notre Créateur pendant les jours de notre jeunesse, avant que les jours mauvais arrivent et que les années s'approchent où nous dirons : nous n'y prenons point de plaisir. » (Ecc. 12: 3.)




Il nous reste à décrire la réceptivité enfantine avec quelques détails et à apporter si possible quelques précisions.
Remarquons d'abord qu'elle n'est pas toujours égale chez tous les individus. L'esprit et le coeur de l'enfant ne sont pas toujours ouverts comme il le faudrait. Une éducation mal conduite peut vite détruire des dispositions naturelles heureuses ; des expériences douloureuses peuvent fermer prématurément l'âme enfantine. Il y a de grandes différences d'un individu à un autre ; il y en a entre les classes et les milieux divers. Mais ce sont différences de degrés. Voyons en quoi se manifeste la réceptivité des enfants, en général.

L'enfant sait s'étonner et admirer. Le monde est pour lui une mine inépuisable de découvertes et sa faculté d'admiration éveille en lui l'intelligence et la développe en appelant la raison à s'exercer. L'enfant sent très bien que perdu dans l'infinie multiplicité des phénomènes, il a tout un monde à conquérir par la pensée. Il collectionne des impressions, des visions, des mots. Et dans ce travail d'absorption, c'est l'étonnement qui le guide, l'étonnement dont Aristote disait qu'il est le père de la science. En règle générale et comparé à l'enfant, l'adulte est blasé ; il dira facilement nihil mirari (il ne faut plus s'étonner de rien) ou : « Je suis venu trop tard dans un monde trop vieux. » Il se croit supérieur ; hélas ! il est inférieur à l'enfant qui ouvre de grands yeux sur le monde et s'étonne toujours. Pour comprendre l'Évangile, - l'infini dans la vérité, - pour en sentir les beautés, la poésie et le charme, et surtout, pour en être frappé avec une suffisante violence, ne faut-il pas avoir encore cette fraîcheur de sensation morale et intellectuelle, qui est le partage de l'enfant ? Qui peut mieux que lui admirer dans l'Évangile ce qu'il y a de magnifique ; qui est plus capable de pleurer de vraies larmes de reconnaissance à la vue du sacrifice de Jésus, et de percevoir ce qu'il y a là d'unique et d'absolu ? Devant lui le monde de l'âme s'ouvre avec toutes ses richesses, dont on ne peut prendre possession que par l'âme. Il comprend moins bien que l'adulte, mais il sent plus intensément que lui, et devenu adulte, il comprendra d'autant mieux que, jeune, il a saisi avec plus d'intensité.

L'enfant sait demander. Tout simplement. Est-il tenté par un objet, vite, il émet le désir de le posséder. (On doit justement lui apprendre à se gêner un peu plus.) Il faut qu'un enfant ait déjà beaucoup souffert. pour ne pas oser demander. Quand les petits veulent savoir, ils questionnent avec une entière liberté. On sait les interminables « pourquoi ? » posés par les enfants.
Eh bien ! l'Évangile ne doit-il pas être demandé ? Es muss erbeten sein, dit le poète Gerhardt. « Demandez », dit Jésus. La prière persévérante est l'acte le plus naturel au chrétien.

L'enfant sait grandir. Il comprend d'instinct la loi du progrès. Il se rend compte de sa faiblesse et de son ignorance. Il veut en sortir. Il désire être adulte, pour être fort, grand, instruit. Un mot vient continuellement sur ses lèvres : « Quand je serai grand », et les projets de se succéder sans arrêt. Pas n'est besoin de montrer l'obligation qu'il y a pour le chrétien de savoir grandir et progresser toujours, jusqu'à ce qu'il ait atteint la pleine stature d'un enfant de Dieu. Nous nous bornons à ces rapides indications et nous nous hâtons d'en arriver à nos conclusions.

Puisque l'enfant est réceptif, l'éducateur, qu'il soit père, mère, moniteur, maître, pasteur, devra veiller à ce qu'il n'offre à l'admiration enfantine que ce qui mérite d'être admiré et ne propose d'autre but à atteindre que l'idéal. L'âme de l'enfant absorbe ce qu'on met en sa présence ; il faut donc lui présenter une matière intellectuelle et morale, saine et immaculée. Il faut se garder d'abuser de cette réceptivité qui peut devenir un piège. Il faut l'éduquer aussi, la diriger. L'enfant apprendra à choisir et à juger, surtout il apprendra, guidé par un éducateur sage, à reconnaître le souverain bien en le distinguant de valeurs inférieures. Son âme sera au premier occupant, veillons à ce que le premier occupant soit Jésus-Christ.

Les premières impressions (2) sont aussi les plus profondes et les plus fécondes pour la vie entière. (Voyez les souvenirs des grands hommes, de Spitteler, par exemple.) Il est par conséquent de toute importance que ces impressions soient pures, belles et saines. Ceci dit, on comprendra que pour éduquer il faut avoir le respect de l'enfant. Le chant populaire veut que les souvenirs d'enfance ne s'effacent jamais et Alfred de Musset s'est écrié avec justesse

Le coeur du jeune enfant est un vase profond,
Si la goutte qui tombe est une goutte impure,
La mer y passerait sans laver la souillure,
Car l'abîme est sans borne et la tache est au fond.

Quel avertissement ! Souvenons-nous-en toujours ! Prenons garde à ce que nous versons à ce vase encore vide ! C'est à l'âge où l'on est sensé observer le moins qu'on voit et sent le plus de choses. On les emmagasine sans s'en rendre compte et tout se retrouve plus tard. L'homme est le fils de l'enfant, parce que l'homme se forme dans l'enfant. Éducateurs de la jeunesse, vous contribuez à cette formation ; vous pétrissez cette pâte encore molle. Rien de ce que vous dites et faites ne se perd. Tout est enregistré, senti et sera plus tard critiqué. Les lacunes intellectuelles de votre enseignement, les tares de votre caractère et vos manquements d'ordre moral, tout porte à conséquence ; rien ne demeure indifférent. « Ce qui est excellent est tout juste suffisant pour les enfants, » dit Goethe. Il est plus redoutable de parler à des enfants qu'à des adultes ; là, aucune trivialité, aucun laisser-aller, aucune absence de préparation et de sérieux n'est permise. Oh ! le respect de l'enfant, on ne le cultivera jamais assez. Respectons, respectons l'enfant.

Enfin, la réceptivité de l'enfant, après nous avoir révélé la gravité de notre tâche, nous en montre aussi l'étendue et l'importance. C'est en nos mains que sont, en quelque mesure, déposées les destinées de l'Evangile. Car en confiant cette doctrine surnaturelle quant à son dogme et quant à sa morale à la portée des âmes enfantines, nous lui assurons l'avenir. L'Évangile, qui n'est pas monté au coeur de l'homme, qui à bien des égards lui est opposé, l'Évangile qui est sans cesse méconnu, persécuté, bafoué, ne saurait être extirpé complètement de l'humanité. Vérité sans cesse bannie du foyer où elle devrait briller, elle est sans cesse aussi rappelée par les cris de l'homme malheureux. Pourquoi ? n'est-ce pas parce que, étant enfant, on lui a appris à l'aimer et à l'apprécier ? Il y revient toujours ! comme on revient à la maison paternelle après les égarements et la folie. Non, les souvenirs d'enfance ne s'effacent jamais. « Enseigne au jeune enfant la voie qu'il doit suivre, et devenu vieux il ne s'en détournera pas. » (Prov. 22 : 6.)

Dans ses souvenirs d'enfance et de jeunesse, Ernest Renan, après avoir rappelé la légende bretonne d'après laquelle on entendrait monter du fond de la mer le son des cloches d'Ys, la ville fabuleuse engloutie sous les flots à une époque inconnue, avoue qu'il lui semble avoir au fond du coeur « une ville d'Ys, qui sonne encore des cloches obstinées, à convoquer aux offices sacrés des fidèles qui n'entendent plus. » Tous les hommes de notre génération en sont là. Au fond de leur âme sonnent des cloches obstinées qui les appellent à Dieu ; ce sont les cloches des souvenirs d'enfance et de la foi d'enfance. Qu'ils les écoutent on qu'ils ne les écoutent pas, elles sonneront toujours.

Que cette constatation nous suffise pour nous prouver que notre travail, s'il est, dans des circonstances défavorables, momentanément infructueux. ne saurait être vain. Aussi après avoir reçu, nous-mêmes, la vérité avec la soumission d'un enfant, défendons-la avec la fermeté et le courage de l'homme fait.

A. MAMBOURY.

1 Les heureux

2 Un des buts de l'éducation ne doit pas non plus être oublié : il s'agit de faire de la réceptivité, naturelle et spontanée quelque chose de voulu, de consenti, l'attention. La réceptivité d'un enfant n'est pas toujours orientée comme son éducateur le voudrait ; il n'en faut pas conclure qu'elle n'existe pas. Tel objet attire et captive l'enfant, au lieu de tel autre, mais son esprit observe sans cesse et absorbe sans cesse quelque chose. Un éducateur devra donc être un observateur attentif ; pour connaître l'infinie richesse de l'âme enfantine, il faut être soi-même réceptif. Ce n'est qu'en l'étant qu'on se gardera des généralisations dangereuses et des utopies décevantes. Si l'on part d'idées préconçues en ne cherchant pas à pénétrer la nature des enfants que l'on a devant soi, on risque de faire fausse route. 
Chapitre précédent Table des matières Chapitre suivant