Cantiques N° 1 et 12.
D'après la suscription, ce psaume a
été composé par David,
après qu'il se fut réfugié
chez les Philistins pour échapper à
Saül, et qu'il eut contrefait l'insensé
devant Abimélec, pour éviter un
nouveau danger de mort. Mais le passage où
se trouve relaté cet épisode, 1
Sam. 21 : 10-15, parle du
roi
Akisch de Gath. On a fait valoir contre
l'historicité de la suscription cette
différence de nom. D'autres ont
répondu que le nom d'Abimélec est un
titre commun à tous les rois philistins,
comme Pharaon était le nom
général des rois
d'Égypte.
Le ton du psaume est calme ; si ce
poème a véritablement trait à
l'épisode susmentionné, il a dû
être écrit passablement après
l'événement ; les
émotions ont fait place au travail
tranquille de la méditation. Notre psaume,
en effet, est un de ceux qu'on appelle alphabétiques, parce
que chaque petit
verset ou demi-verset commence par une lettre
spéciale selon l'ordre
alphabétique ; on arrive ainsi à
22 versets. Tels sont les psaumes 25,
34,
111,
112,
119,
145,
auxquels il faut ajouter les 9e
et 10e
qui ensemble parcourent la
série alphabétique.
Cette disposition littéraire
était faite sans doute en vue de faciliter
la mémorisation de ces morceaux plutôt
sentencieux et méditatifs, et ce
caractère de l'enseignement semble bien
apparaître aussi dans notre texte, v.
12 : Venez,
enfants,
écoutez-moi...
De tout ce qui précède et de
bien d'autres observations sur les psaumes, il
résulte que les suscriptions doivent
toujours être prudemment
contrôlées, vu qu'elles paraissent
avoir été ajoutées
généralement bien après la
composition du psaume.
Les psaumes alphabétiques se
prêtent moins facilement aux divisions que
les autres, sans doute à cause même de
leur structure spéciale. Cependant on peut
distinguer ici deux parties : d'abord v.
2-11, où domine la
reconnaissance ; puis v.
12-23 où domine
l'enseignement.
1. Vers.
2-11. Je bénirai
l'Éternel ! - C'est une
résolution et non pas seulement une
intention. Le ton ferme et décidé
apparaît dans l'indication qui
accompagne : en tout temps, et dans la
répétition de la pensée sous
une nouvelle forme : Sa louange sera
toujours dans ma bouche.
Lorsque nous venons de recevoir une
grâce de Dieu, au moment où nous
échappons au danger, nous voulons bien
volontiers bénir le Seigneur ; mais au
bout de quelque temps, cette reconnaissance
diminue, s'assoupit, se meurt. Peut-être le
psalmiste en a-t-il fait l'expérience et
veut-il se prémunir contre cette faiblesse.
En tout cas, il rassemble toutes ses
énergies pour bénir Dieu non
seulement aujourd'hui, mais en tout temps. La
bonté de Dieu a été si grande
dans le passé qu'elle reste un sujet de
louange inépuisable ! Elle est si
fidèle dans le présent, si
assurée dans l'avenir, que toujours et en
tout temps, dans les jours lumineux et dans les
jours sombres, le fidèle pourra bénir
Dieu. On sent que ce sera une plénitude dans
la durée, parce que c'est une
plénitude dans l'intensité : Que mon âme se glorifie en
l'Éternel ! Voilà le mot de
celui qui a tout trouvé en Dieu et qui lui
consacre toute sa vie !
Cette louange de Dieu, le psalmiste
désire la prononcer assez haut pour que tout
le monde l'entende, à commencer par les
malheureux ! Qui, plus que le pauvre et le
misérable, a besoin de connaître le
secret du bonheur, la délivrance qui vient
de l'Éternel ? Que les malheureux
écoutent donc et qu'ils se
réjouissent !
Le sentiment du psalmiste s'exalte ; il
interpelle non seulement les malheureux, mais tous
ceux qui l'entourent et, comme soulevant les
âmes, il s'écrie : Célébrez avec moi
l'Éternel ! Il y a dans ce
mouvement une force spirituelle remarquable. Prier
et rendre grâces pour soi-même, face
à face avec Dieu, c'est déjà
quelque chose de grand ; mais ce qui est plus
grand, c'est de pouvoir entraîner les autres
dans les mêmes effusions du coeur. Ce
résultat n'est obtenu que par une
reconnaissance débordante.
Le psalmiste motive dans une seconde strophe
(v.
5-7) son chant de
bénédiction et son appel dans le
même sens adressé
à son entourage. Il a fait une
expérience bénie : J'ai
cherché l'Éternel et il m'a
répondit !
Quel encouragement pour tous ceux qui
cherchent ! Jésus dira plus tard : Cherchez et vous
trouverez. C'est une loi du
monde spirituel aussi sûre que les lois du
monde matériel ! Il faut chercher
Dieu ; dans l'Ancienne Alliance, ce mot se
comprenait bien, puisque Dieu ne se
révélait que partiellement, que
progressivement. Mais ce mot se comprend tout aussi
bien dans la Nouvelle Alliance, où le
fidèle doit vaincre beaucoup de
difficultés en lui et hors de lui pour
parvenir jusqu'à Dieu : fausses
idées, mauvaises dispositions, obstacles des
péchés à confesser, des fautes
à réparer, crainte de l'opinion
publique, et tant d'autres choses ! Dieu ne se
cache pas, il tend continuellement à se
faire connaître. C'est l'homme qui se cache
dans ses ténèbres et qui doit faire
effort pour en sortir et pour marcher à la
rencontre de Dieu qui l'appelle.
Quand le psalmiste a cherché, Dieu a
répondu, Dieu a délivré. Et
cette expérience est si réelle, si
certaine que maintenant elle peut-être
généralisée ; cette loi
se vérifiera toujours, quand on tourne
vers Dieu les regards, quand un malheureux
crie. La science examine quelques cas et en
tire une loi ; pourquoi n'en serait-il pas de
même dans le domaine spirituel, où
nous avons affaire avec le Dieu fidèle, le
Dieu créateur de toute loi physique ou
morale ! Oui, l'expérience viendra
toujours à l'appui des affirmations du
psalmiste : pas de confusion, mais un
visage rayonnant de joie, le salut dans toutes
les détresses !
Dans une troisième strophe
(v.
8-11), le psalmiste proclame
encore la bonté du Dieu qui délivre. L'ange de l'Éternel campe
autour de ceux
qui le craignent. Rappelons que le mot
hébreu traduit par ange signifie d'abord et
tout simplement envoyé, messager ; diverses
opinions se sont
fait jour sur le sens à donner à ce
mot « l'ange de
l'Éternel » : 1° une
apparition de Dieu sous forme visible et
passagère ; 2° un être
particulier et spirituel, un ange quelconque ;
3° un personnage unique et toujours identique,
un ange créé qui représente
Dieu ; 4° un être d'essence divine qui serait
la
première manifestation de Christ
(1
Cor. 10 : 4-9).
À chacun de choisir ce qui lui semble
bon et peut-être selon les passages et selon
les écrivains sacrés. Dans tous les
cas, c'est une intervention divine, et, dans notre
texte, plutôt un envoyé quelconque de
l'Éternel qui vient protéger le
fidèle. Sa protection équivaut
à un camp d'armée, elle nous met
à l'abri des assauts les plus formidables.
Quelle merveilleuse confiance en Dieu !
Aussi le coeur pieux déborde-t-il de
nouveau et s'écrie-t-il: Sentez et voyez
combien l'Éternel est bon ! Pour
comprendre le psalmiste, il faut faire la
même expérience que lui, il faut sentir (goûter, comme
on
peut
aussi traduire) ; après seulement, on
verra, on comprendra. Le fait est primordial, il
est source de l'idée ;
l'expérience est plus riche que
l'explication ; la vie, plus importante que la
connaissance. La doctrine doit jaillir de
l'expérience religieuse ; il faut
d'abord goûter, alors on peut parler en
connaissance de cause.
Gardons-nous donc d'un esprit léger,
frivole, frondeur n'allons pas juger avec
précipitation, comme si nous avions tous les
droits, toute l'autorité, toute la science.
Premièrement le respect, l'humble
désir de connaître Dieu : Craignez l'Éternel ! Tout
est
dans cette attitude ; à celui qui se
courbe humblement devant le Seigneur, il ne
manquera rien, ni pour le corps, ni pour
l'âme. Les lionceaux Peuvent souffrir de
la faim, mais ceux qui cherchent l'Éternel
ne seront privés d'aucun bien.
Il. Vers.
12-23. Écoutez-moi ! - Le psalmiste
exhorte à rechercher la justice de Dieu. Il
s'adresse à ses fils, à tous ceux
qui, plus jeunes que lui ou moins
expérimentés, peuvent être
appelés par lui : mes enfants.
L'enseignement qu'il veut leur donner est la
crainte de l'Éternel. Si cette crainte a
été qualifiée de
« commencement de la sagesse »
(Ps.
111 : 10 ; Prov.
9 : 10), c'est qu'elle
renferme les premiers éléments du
sentiment religieux : dépendance envers
Dieu, respect de sa volonté, crainte de son
jugement et de sa puissance. L'amour de Dieu, la
paix du coeur, le
zèle et la joie peuvent disparaître,
sans que l'on devienne incrédule ou impie.
Mais si la crainte de Dieu est foulée aux
pieds, c'est l'impiété avec ses
conséquences terribles. La crainte de Dieu
est comme l'unique sol sur lequel peuvent germer et
fleurir l'amour, la paix et la joie.
Et c'est bien la pensée du psalmiste
dans cette première strophe
(v.
12-15). Il cherche l'homme qui
aime la vie, il l'appelle
(v.
13). Qui désire être
heureux ? Que celui-là agisse dans la
crainte de l'Éternel. D'abord la crainte
réprime ; il faut veiller sur sa langue
et se garder de toute mauvaise parole. Mais il faut
plus encore que la purification des lèvres,
il faut celle du coeur, il faut celle de la
conduite. Éloigne-toi du mal, c'est
le premier effort à faire, puisque nous
sommes par nature dans le mal. Fais le bien,
c'est le second pas, ou, si l'on veut, l'effort
parallèle au premier. On échappe au
mal dans la mesure où l'on s'attache au
bien, car l'homme ne peut-être sans rien
faire, il n'y a pas de zone neutre entre le bien et
le mal, c'est l'un ou l'autre.
Ce double effort doit être soutenu par
le désir de la paix: Recherche la
paix. Il y a dans la paix du coeur, comme un
sûr régulateur de la situation morale,
car, comme le dit souvent la Bible :
« Il n'y a pas de paix pour le
méchant »
(Es.
48 : 22).
Dans une deuxième strophe
(v.
16-19), l'enseignement tourne en
promesse. L'Éternel est juste, il vient au
secours des hommes droits, aussi vrai qu'il
châtie les méchants. Quand, le
fidèle crie, Dieu voit, Dieu entend
(Ps.
94 : 9). Il est vivant, il
s'intéresse à ses
créatures ; il est attentif
à leurs cris. Bien plus, il est amour et se
plaît à venir en aide à ceux
qui souffrent : Il est près de ceux
qui ont le coeur brisé. Ordinairement,
il semble dans la douleur que le ciel est noir,
vide, froid ; que Dieu est loin, absent. Comme
l'affirmation divine est différente !
C'est alors que Dieu est près, tout
près ; mais les pleurs du coeur naturel
troublent la vue et empêchent de le voir. Il
faut un effort de l'homme et une
grâce d'en haut pour reconnaître que
Dieu est là, tout près.
L'Éternel voit, entend, est attentif,
s'approche et surtout délivre. Il
n'est pas dit : L'Éternel dispense les
justes de toute épreuve, mais simplement
« les délivre », ce qui
est fort différent. Il sauve, c'est
donc une intervention qui va jusqu'au bout,
à la seule condition que l'esprit de
l'homme, au lien de se raidir et de
blasphémer, soit brisé, s'humilie
jusqu'à l'abattement
(v.
19).
La troisième strophe
(v.
20-23) réitère ces
promesses. Le malheur n'a pas les mêmes
conséquences pour le juste et pour le
méchant. Tandis que le malheur tue le
méchant
(v.
23),
ce même malheur se borne
à atteindre le juste ; mais
l'Éternel le délivre de tout. Il
garde les os du fidèle, aucun n'est
brisé. La plus belle illustration de
cette promesse est apparue en Jésus
(Jean
19 : 36).
En définitive, Dieu accorde à
ses bien-aimés pleine
sécurité. Il délivre (ou
rachète) leur âme et leur donne un
refuge inviolable.
ILLUSTRATION
Vers.
8. L'ange de
l'Éternel campe autour de ceux qui le
craignent (voir Gen.
32 : 1-2 ; 2
Rois 6 : 14-23).
Dans son livre La vie parmi les
Battacks, le missionnaire von Asselt raconte ce
qui suit :
J'étais assis, un matin, dans la
véranda de notre maison, lorsqu'un
païen m'aborda, me salua et s'assit en face de
moi. Après m'avoir regardé un moment,
il me dit : Où sont les gardiens qui,
la nuit, protègent ta maison ? - Je
n'ai point de gardiens, je ne sais ce que tu veux
dire, répondis-je. - Il me regarda avec
surprise et reprit : N'as-tu pas placé
des gardiens autour de ta maison ? - Non,
répondis-je. - Mais, du moins, ne les
connais-tu pas ? - Non. - Alors puis-je faire
des recherches dans ta maison ? - Pourquoi
pas ? Entre seulement.
Pendant que j'attendais tranquillement, il
entra, visita toute la maison ; ma femme le
vit regarder sous les lits et derrière les rideaux
où nos habits étaient
suspendus ; il parcourut toutes les chambres
et revint.
Ce fut à moi de le questionner ;
il me raconta ce qui suit:
« Lorsque tu es arrivé chez
nous, nous avions des sentiments hostiles et
rôdions autour de ta maison pour
t'assassiner. Mais chaque fois que nous
approchions, nous voyions une double rangée
de gardiens qui l'entouraient. Un de nos meilleurs
guerriers, l'ayant appris, se moqua de
nous :
Vous n'êtes que de vieilles femmes,
dit-il. Je vous y conduirai la nuit prochaine.
Il faisait clair de lune, lorsque nous nous
acheminâmes vers ta hutte ;
arrivés à quelque distance, notre
chef, sabre au poing, nous crie : Si vous
êtes des hommes, en avant !
Mais, tout à coup, il se
retourne : Vous avez raison, dit: il y a une
double rangée de gardes, serrés les
uns contre les autres, tout autour de. la maison.
Il faut s'en aller ! »
Aux nouvelles interrogations du païen,
je répondis:
Ne vous ai-je pas dit dès le
commencement que je ne suis pas un envoyé du
roi de Hollande, mais que c'est le Dieu du ciel et
de la terre qui m'a envoyé vers vous pour
vous indiquer le chemin de la vie ?
Je courus chercher ma Bible et lui
dis : Vois dans ce livre ; Dieu envoie
des anges pour nous protéger, afin que dans
votre folie païenne, vous ne nous massacriez
pas. - Mais comment se fait-il que tu ne les aies
pas vus ? dit-il avec étonnement. -
Vois-tu, mon ami, ce livre est la Parole de Dieu et
nous croyons ce qu'il nous dit, même sans le
voir. Seulement vous ne pouvez pas lire cette
Parole, c'est pourquoi Dieu vous a fait voir les
choses elles-mêmes. (Feuille religieuse du
canton de Vaud.)
Vers.
9. Goûtez et voyez
combien l'Éternel est bon !
Dans une usine de Pittsbourg, trois ouvriers
impies, travaillant sur une plate-forme haute de
cent pieds, avaient affiché devant eux un
écriteau biblique que l'un d'eux avait
reçu à une réunion
religieuse : Goûtez et voyez combien
le Seigneur est bon ! Heureux ceux qui se
confient en lui ! - Chaque fois qu'ils
passaient au-devant, ils crachaient contre cet
écriteau. Ils
desservaient un haut fourneau, d'un
côté jetant les matériaux au
feu, de l'autre entretenant la flamme qui consumait
les gaz empoisonnés qui sortaient de la
fournaise par un tuyau. Cette flamme
s'éteignit un jour ; deux ouvriers
tombèrent asphyxiés. Le
troisième n'avait qu'une chance de
salut : rallumer la flamme. Ayant
trouvé une allumette, il prit
l'écriteau, y mit le feu, jurant à
Dieu de se convertir, s'il le sauve de la mort. Le
papier enflammé rallume les gaz
délétères, mais l'homme tombe
sans connaissance. Quelques minutes après,
le secours vient par l'ascenseur. Les deux premiers
étaient morts, mais lui survécut et
put réaliser son serment.
G. PERRET-GENTIL.
Les enfants
orgueilleux aiment à
se glorifier, ce qui les rend
insupportables. Il n'en était pas
ainsi de David ; grand roi, grand
capitaine, vaillant héros, de belle
figure, il était cependant
humble ; on le voit bien en lisant
ses psaumes, spécialement le psaume
34 que nous lirons
ensemble aujourd'hui. Au lieu de s'y
vanter lui-même, il rend gloire
à Dieu, qu'il nous enseigne et nous
exhorte à glorifier à notre
tour. Comment ?
Psaume 34.
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