Cantiques proposés :
N° 88. Seigneur ! sanctifie... -
N° 76. Aux jours de mon enfance...
J'ai devant moi une reproduction du tableau
de Burnand « le samedi saint ».
Les onze sont dans la chambre haute, la tristesse
la plus profonde est peinte sur leurs visages, ils
ressemblent à des orphelins le jour
où l'on a enterré leur mère.
L'un de ces hommes attire l'attention, on ne voit
pas sa figure, il est assis à la table et se
tient la tête dans les mains ; ses deux
bras robustes de batelier semblent crispés
par le chagrin. Cet homme qui a l'air si fort
pleure comme un enfant, et ne se laisse pas
consoler par ses amis. Pourquoi pleure-t-il, et qui
est-il ? C'est l'apôtre Pierre qui
pleure. parce que Jésus, son meilleur ami,
est mort, abandonné par
tous, et surtout par lui, Pierre, qui avait promis
de rester jusqu'au bout.
Pourtant il l'aimait bien, son ami
Jésus, son maître ! Nous en avons
de nombreuses preuves. Raconter
brièvement l'histoire de l'apôtre,
sa première rencontre avec Jésus, son
enthousiasme, la place qu'il occupe dans le groupe
des apôtres. C'est lui qui prend la parole au
nom des autres, qui proclame Jésus,
même alors que le peuple se détourne
de lui. Il ne, veut aller à personne
qu'à Jésus, qui lui a apporté
les paroles de la vie éternelle. Pendant la
nuit, sur le lac, il se jette à l'eau pour
aller à sa rencontre, et quand il a
enfoncé et que Jésus l'a sauvé
de la mort, un nouveau lien s'est établi
entre le maître et le disciple. À
Capernaüm, Jésus était son
hôte, et pour lui prouver sa confiance, il
lui avait donné ce beau nom de Pierre. Il
l'a pris avec lui chez Jaïrus, sur la montagne
de la transfiguration. Aussi, quand le ciel est
devenu sombre au-dessus de la petite troupe, quand
le danger a menacé et que ces hommes
commencent à perdre courage, c'est
naturellement Pierre qui tient bon, et qui, voyant
que Jésus ne peut pas compter sur les
autres, lui dit : « Même s'il
faut mourir avec toi, je ne t'abandonnerai
pas ! » Raconter, ou plutôt
faire raconter aux enfants ces diverses
scènes, montrer les raisons que Pierre avait
d'aimer Jésus, et combien il
l'aimait !
Maintenant le voilà qui pleure, la
tête cachée dans ses mains ! Que
s'est-il passé ? On a tué son
ami, il y a bien là de quoi avoir du
chagrin, Mais ce n'est rien encore : cet ami,
il l'a trahi, lâchement abandonné,
renié. Voilà qui est affreux.
Être frappé par ses ennemis, c'est
terrible, mais naturel. Mais être
abandonné par son ami, par son meilleur, par
celui qui a dit qu'il irait jusqu'au bout, et
être abandonné par lui juste au moment
où il faut souffrir et mourir, voilà
ce que Jésus a souffert, voilà ce que
Pierre lui a fait souffrir.
Depuis cet affreux moment, Pierre se cache, il
pleure sans arrêter, il revoit ce regard de
Jésus, chargé de douleur et de tendre
reproche, fixé sur lui. Ce regard, il ne le
reverra plus, plus jamais, car Jésus est
mort sans que Pierre ait pu lui demander pardon,
sans que Jésus ait pu lui dire qu'il
l'aimait encore.
Et puis, Pâques est venu. Jésus
n'est pas mort, il est ressuscité. Alors un
immense espoir a rempli le coeur de Pierre.
Peut-être pourra-t-il le revoir, lui demander
pardon ? Et sûrement, Jésus, qui
est si bon, lui pardonnera, car il a tant de
regret, il se repent tellement d'avoir
été si lâche !
Notre chapitre d'aujourd'hui décrit
justement la rencontre de ces deux amis,
l'un si profondément offensé, l'autre
si tristement coupable, et la réconciliation
du maître et du disciple, par le pardon du
maître et le repentir du disciple. Raconter
la scène, en insistant sur la hâte de
Pierre, qui se jette à la nage pour arriver
plus vite. Va-t-il se jeter aux pieds de
Jésus, se remettre à pleurer, ou
essayer de s'excuser, expliquer qu'il a
été pris par surprise, qu'au fond il
n'a pas cessé de l'aimer ? Rien de tout
cela. Pierre, qui autrefois parlait volontiers, a
appris à se taire. Sa grande faute l'a rendu
humble, il ne se sent plus digne d'aborder son
maître comme un ami, de lui parler le
premier. Il attend patiemment que le repas soit
fini, il laisse Jésus s'occuper des autres.
Il se dit peut-être : c'est fini, il ne
voudra plus de moi, il va partir sans m'avoir
permis de lui parler, c'est bien fait, je n'ai que
ce que je mérite. Oh ! comme Pierre a
dû souffrir pendant ce repas ! quels
regards suppliants il a dû jeter sur son
maître ! Jésus, qui lit dans les
coeurs, n'a pas eu de peine à
déchiffrer ces regards, ces traits
tirés, cette attitude soumise, cette
souffrance Intérieure. Il n'a pas besoin de
demander à Pierre s'il se repent, cela se
lit sur sa figure.
Alors Jésus, ce modèle des
amis, ce frère toujours prêt à
pardonner, invite Pierre à venir à
l'écart, et là, rien que les deux,
ils causent. Pas beaucoup de paroles, mais quelle
tendresse dans cette simple question :
M'aimes-tu ? Voyez comme Pierre a
changé, il ne commence pas un long discours,
il ne dit même pas : maintenant, s'il
faut mourir avec toi, je ne t'abandonnerai plus. Il
sait qu'il n'a plus le droit de dire cela
après ce qu'il a fait. Mais ce qu'il peut
dire, et de tout son coeur, il le dit :
« Oui, Seigneur, tu sais que je
t'aime. »
Est-ce que Jésus n'a pas
entendu ? ou bien est-ce qu'il doute de son
disciple ? Il lui redemande la même
chose, et encore une troisième fois. Pierre
souffre intensément de penser que son
maître n'a plus confiance en lui. Mais il l'a
mérité et ne répond que la
même affirmation, poignante dans sa
monotonie : « Oui, Seigneur, tu sais
que je t'aime. » Et à la
troisième question, il en appelle à
la puissance de Jésus, cette puissance qui
lui permet de tout savoir, de lire jusqu'au fond
des meurs : « Tu sais toutes choses,
tu sais que je t'aime. » Oui,
Jésus le savait bien, il n'avait pas besoin
de le demander trois fois pour le savoir. Mais le
plus grand défaut de Pierre était son
orgueil, il n'aimait pas qu'on doutât de lui,
il se croyait fort, Il faut que cet orgueil soit
complètement brisé. Il faut que
Pierre accepte avec patience ces questions
répétées et le doute qu'elles
semblent recouvrir. L'épreuve est
surmontée, et Jésus pardonne.
Pierre avait agi aussi par manque de
courage. L'orgueil et la faiblesse vont souvent
ensemble. C'est quand nous nous croyons le plus
fort que nous sommes le plus faible. C'est pourquoi
Jésus lui demande simplement :
« M'aimes-tu ? » Aimer
Jésus plus que tout au monde, et surtout
plus que soi-même, c'est le secret du
courage : parce que
celui
qui aime Jésus est décidé
à le servir quoi qu'il puisse en
coûter, à tout supporter pour lui,
à être fort comme il l'a
été. Et puis celui qui aime
Jésus comprend qu'il ne peut rien sans lui,
il sait que par ses propos forces il n'est capable
que de le renier et que dans cet amour seul il peut
trouver le secret de la victoire. Aussi, lorsque
Pierre répond « Tu sais que je
t'aime », cela veut dire que maintenant
il est décidé à suivre
Jésus jusqu'au bout, mais que, connaissant
sa faiblesse, il prendra la force que Jésus
lui donne.
Voilà ce qui est le plus beau dans le
pardon de Jésus. Il ne suffisait pas de
pardonner à Pierre en le laissant aussi
faible et prêt à retomber. Il
fallait lui pardonner en le rendant fort . Pour
cela, Jésus est mort sur la croix. Il est
mort justement pour cet homme qui l'a abandonne,
pour nous qui le renions si souvent. Quand Pierre a
compris cela, son coeur a été
brisé, il est mort lui-même, mort
à son orgueil, à son
égoïsme, le vieux Pierre est mort, et
un nouveau Pierre est né, dans lequel
Jésus a versé sa force. Ce n'est plus
maintenant Pierre qui vit, c'est Jésus, mort
pour lui, qui vit en lui. Le pardon de Jésus
a tué le Pierre des anciens jours, il a
créé un homme nouveau.
Et quel homme ! Jésus lui donne
une tâche immense:
« Paix mes agneaux. »
Pierre devra conduire les hommes à
Jésus, il devra commander et diriger, lui si
faible. Et il réussira par la force de
Jésus. Il devra souffrir, aller où il
ne voudrait pas, être enchaîné,
et mourir martyr, lui qui n'osait pas affronter les
moqueries d'une servante. Et il ira, vaillamment,
jusqu'à la mort, par la force de
Jésus. Il devra accepter que d'autres soient
plus grands que lui et réussissent mieux que
lui, que lui devienne petit quand d'autres seront
célèbres, comme l'apôtre Paul,
lui, Pierre, qui était si orgueilleux !
Et il en viendra à bout, par la force de Jésus. Il
devra
parler beaucoup, et ne jamais parler de lui, rien
que de Jésus. C'est ce qu'il fera.
Désormais Pierre n'a qu'une passion,
Jésus, qu'un nom à la bouche,
Jésus, qu'un but dans la vie, suivre
Jésus. Quelle transformation
opérée par le pardon de Jésus,
qui a donné sa vie pour pouvoir nous
pardonner ainsi !
On dît souvent que demander pardon,
c'est de la faiblesse ; que pleurer sur ses
fautes, c'est indigne d'un homme. Quand
trouvez-vous que Pierre a été
faible ? Est-ce quand il se croyait assez fort
pour suivre son maître, et qu'il l'a
abandonné, ou bien est-ce quand après
avoir pleuré et demandé pardon, il a
su tout souffrir et tout donner pour
Jésus ? Il n'y a rien de plus grand, de
plus viril, de plus beau, que de voir un homme se
repentir, jeter loin de lui sa misère, et
devenir enfin fort dans le pardon de
Jésus.
On dit souvent aussi que pardonner, c'est de
la faiblesse, qu'un homme fort ne pardonne pas,
qu'il se venge. Trouvez-vous que Jésus a eu
tort de pardonner, qu'il a été
faible, qu'il aurait été plus grand
en repoussant Pierre ? Tâchons de
comprendre où est la vraie grandeur, Jamais
Jésus n'a été si grand qu'en
donnant sa vie pour Pierre, pour nous. Il lui
fallait pour cela plus de courage qu'au soldat qui
marche au combat.
Jamais non plus il n'a été si
heureux. C'est par là que nous
terminons : le bonheur du maître et
du disciple. Quelle joie pour Jésus de
retrouver son ami repentant et fidèle, de se
dire que son sacrifice sur la croix n'a pas
été inutile, puisqu'il a conquis
Pierre, d'avoir le droit de le serrer sur son
coeur, parce qu'il lui a tout donné, sa vie
même pour le sauver ! Quelle joie pour
Pierre de pouvoir enfin demander pardon, de se dire
que sa faute n'est pas irréparable, qu'il
peut encore servir son maître, qu'il est
maintenant un autre homme, sûr de lui parce
qu'il est sûr de Jésus, qu'il ne fera plus
jamais un chagrin pareil à son meilleur
ami ! Quelle joie pour eux d'aller maintenant,
Jésus dans le ciel veiller sur ses
serviteurs en sachant qu'ils l'aiment d'un amour
immense, Pierre dans le monde parler partout de
Jésus, de ce qu'il a fait pour lui et peut
faire pour d'autres, en sachant qu'il est
pardonné, rentré dans la confiance de
son maître, et que tout est
réparé !
Ce bonheur, est-ce que Jésus le
connaît à votre égard, est-ce
que vous donnez de la joie à Jésus en
lui demandant pardon et en lui montrant que son
sacrifice n'est pas perdu pour vous, en vous
laissant transformer par lui ? Ce bonheur,
est-ce que vous le possédez, le bonheur
d'aimer Jésus plus que tout au monde, de
vivre pour lui, sans jamais le renier, d'être
vainqueur dans toutes les tentations parce que vous
l'appelez sans cesse à votre
aide ?
Nous venons d'étudier l'histoire de
ces deux hommes qui ont beaucoup souffert, l'un par
sa faute, l'autre par la faute de ses amis, de
nous. Ils sont devenus tous les deux heureux,
Jésus en pardonnant, Pierre en se laissant
pardonner. Vous souffrirez aussi, et beaucoup, par
votre péché. Rappelez-vous l'histoire
de Pierre et trouvez comme lui le chemin du
bonheur, près de Jésus.
P. Vz.
Récapituler
leçon du 30
avril. - Puisque les apôtres, comme
les enfants de la famille, avaient leurs
défauts et leurs
péchés, ils avaient besoin
d'être corrigés et
pardonnés. Nous l'avons vu à
propos de Thomas ; aujourd'hui nous
le verrons de nouveau à propos de
Pierre ; il avait gravement
péché, mais il se repentit
et fut pardonné.
( Jean 21 : 1-19.)
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