Il s'agit maintenant de reconnaître
encore que beaucoup de chrétiens fervents
n'ont pas recouvré la santé, bien
qu'ils eussent cherché la guérison
auprès de Dieu avec une foi sincère.
Ce sont là les prétendus échecs dont aiment à se
prévaloir les sceptiques pour nier la
guérison divine.
J'admets volontiers la
difficulté. Aussi bien serait-il d'ignorer
les faits. Ajoutons cependant que beaucoup de ceux
qui sont portés aux conclusions
hâtives prennent tout de suite les
guérisons différées pour des
échecs. Il s'agit donc d'être
très prudent en pareille matière.
Vous serez peut-être amenés à
renoncer à certains médicaments parce
qu'ils restent sans effet. Il n'en va pas ainsi du
Saint-Esprit.
Si vous attendez la guérison de
Dieu lui-même, vous pouvez avoir eu recours
à tous les intermédiaires humains -
ou avoir lu tous les livres possibles - sans
résultats apparents ; vous n'aurez pas
pour autant épuisé les enseignements
du Saint-Esprit, ni ne sauriez jamais le faire en
cette vie. Or, il opère toujours en vous.
Comment donc pourriez-vous
affirmer que la guérison ne viendra
pas ?
Je ne prétends aucunement tout
expliquer lorsque la guérison attendue ne
survient pas, mais je suis fermement convaincu
qu'il ne s'agit pas alors d'un échec de
Dieu, mais de l'homme. En affirmant cela, je ne
songe d'ailleurs à blâmer personne.
Loin de moi la pensée qu'un malade
quelconque, homme ou femme, aurait pu être
guéri s'il avait eu plus de foi ou
s'était soumis d'une façon plus
complète à la volonté de Dieu.
Pour peu, toutefois, que nous nous reportions aux
fondements mêmes de notre foi, je veux dire
au fait que le Christ, sur la Croix, se chargea du
fardeau de nos maladies aussi bien que du fardeau
de nos péchés, nous ne pouvons que
reconnaître une chose : Dieu, pour sa
part, a tout fait pour rendre la guérison
possible à chacun de ses enfants.
Il ne nous viendrait pas à
l'idée de croire que Dieu veuille qu'aucun
de ses enfants demeure dans le péché.
Beaucoup de chrétiens, cependant, n'arrivent
pas à accepter la rédemption qui les
libérerait. Ils ont humblement
confessé leurs péchés à
Dieu. Ils désiraient sincèrement que
leur vie change. Les péchés
d'autrefois leur ont très certainement
été pardonnés une fois pour
toutes. Pourtant, c'est toujours à nouveau
qu'ils vont à Dieu, afin d'implorer son
pardon pour les mêmes fautes, dans lesquelles
ils retombent constamment.
Vous me direz que c'est quelque chose
d'inhérent à la nature humaine, et
qu'aucun homme ne saurait prétendre à
la parfaite sainteté. C'est peut-être
vrai.
Vous ne pourrez contester, toutefois,
que s'il nous était possible de nous
abandonner à Dieu au point d'être
entièrement pénétrés de
son Saint-Esprit, nous ne pourrions plus
pécher, car l'Esprit-Saint rendrait
impossible le péché en inspirant et
en gardant nos pensées, nos paroles et nos
actes. Saint Jean, dans sa première
épître, nous assure que
« quiconque demeure en lui ne
pèche pas »
(1
Jean 3 : 6 ; 5 :
18). Si rares, cependant,
sont ceux qui ont été amenés
à se convaincre que la puissance du
Saint-Esprit nous préserve effectivement du
péché, que nous en sommes venus
à le considérer comme
inévitable. On a donc toujours beaucoup
parlé de régénération,
mais très peu de sanctification, en
dépit de la place que cette dernière
occupe dans l'enseignement de saint Paul.
Par ailleurs, il ne saurait faire de
doute que ceux-là mêmes qui vivent en
communion particulièrement étroite
avec le Seigneur commettent fréquemment des
erreurs (1) dans
lesquelles il faut bien voir des
« péchés ». Il
n'en est pas moins vrai qu'aucun chrétien
vraiment désireux de montrer sa foi par sa
vie ne peut avoir de cesse que ne soit
extirpé de son coeur tout désir
mauvais, par la puissance de l'Esprit qui l'habite.
Aussi longtemps que nous ne connaîtrons pas
cette libération, nous aurons à nous
repentir des mêmes péchés,
profondément ancrés dans notre nature
et qui, nous le reconnaissons, continuent de causer
notre chute.
Prenons, par exemple, le cas d'une
personne réellement
pieuse, qui s'efforce avec sincérité
et persévérance de vaincre en elle un
tel péché, mais qui aurait
échoué si souvent qu'elle
commencerait à penser que la lutte est
vaine. Nul parmi nous ne songerait à
suggérer qu'étant donné la
persistance de ce péché, il faudrait
y voir la volonté de Dieu à
l'égard de cette personne. Nous saurions
fort bien qu'elle est due seulement au fait que
celle qui en est la victime a imploré Dieu
pour obtenir son aide en face de la
tentation, au lieu qu'elle aurait dû demander
que le Saint-Esprit l'extirpât de son
coeur, pour se placer ensuite sous sa
protection.
Il va sans dire qu'il ne saurait
être question pour Dieu de tolérer la
persistance d'un péché quelconque. En
effet, le péché sous toutes ses
formes doit nécessairement être en
horreur au Dieu Très-Saint, à celui
qui donna son Fils unique pour nous
« racheter » de la puissance du
mal. Étant donné, par ailleurs, que
la Bible fait clairement remonter l'origine de la
maladie au péché, et qu'elle affirme
que notre Seigneur en porte le fardeau sur la
Croix, quelles raisons pourrions-nous avoir de
supposer qu'une maladie qui persiste en
dépit de prières
répétées soit
représentative de la volonté de
Dieu ? Cela ne peut signifier qu'une
chose ; c'est que, du côté de ce
qui vient de l'homme, on ne remplit pas, sur un
point quelconque, les conditions requises pour que
Dieu puisse manifester son Amour qui
guérit.
Quand il s'agit du péché,
nous n'hésitons pas à admettre que
c'est à nous-mêmes que l'échec
doit être imputé. Alors, pourquoi,
lorsqu'il s'agit de la maladie, ferions-nous tant
de
difficultés pour l'admettre
également ? Pourquoi
préférerions-nous voir dans sa
persistance une preuve que Dieu a modifié
son dessein, ou qu'il ne tient pas ses
promesses ?
Le problème que soulève ces
échecs a incité divers
théologiens (2) à formuler
l'hypothèse suivante : Bien qu'il ne
soit pas question de mettre en doute le
témoignage des évangiles quant aux
guérisons, il semble bien y avoir des
exceptions, en sorte qu'un certain nombre de
malades sont appelés à endurer leurs
maux avec patience.
Il n'est rien, dans la Bible, pour
autoriser pareille hypothèse - sauf
peut-être l'interprétation qu'on
avance relativement à l'écharde de
saint Paul (3).
Aucune béatitude ne vient
consoler le malade en l'exhortant à se
résigner avec patience à son mal.
Celui qui souffre de maladie ne peut chercher de
réconfort qu'en se disant qu'il participe
ainsi aux souffrances du Christ - que la maladie
n'a d'ailleurs jamais touché ; ou que
cela contribue à le faire progresser
spirituellement ; mais cela n'est vrai que
dans la mesure où il se souvient que seule
une acceptation confiante de ses souffrances peut
rendre possible la chose.
Pourquoi ne pas se placer
résolument en présence des faits et
ne pas accepter l'enseignement biblique, qui ne
discerne que deux
causes
à la maladie, quand elle reste sans
guérison : un manque de foi ou une
désobéissance ? Ce qui ne veut
pas dire que je conseillerai à quiconque
d'accuser brutalement un malade de l'une ou l'autre
chose. Le manque de foi peut ne pas lui être
imputable, et sa maladie peut être due aux
péchés de ceux dont il descend bien
plus qu'à un péché personnel
quelconque.
La foi d'un homme ne peut que
difficilement s'élever bien au-dessus du
niveau qu'atteint celle de ses amis. Avant donc de
blâmer un frère d'une
incrédulité qui nous est commune,
occupons-nous plutôt de nous-mêmes et
de nos progrès.
C'est chez ceux qui sont suffisamment
acquis à la cause de la guérison
divine pour faire partie d'un groupe
d'intercession, que nous devrions logiquement
trouver la foi la plus haute et la plus
opérante
(4).
Supposons un instant que nous
appartenions à un tel groupe et que
quelqu'un y relate une histoire de guérison
véritablement extraordinaire. Quel est le
mot qui viendra tout naturellement aux
lèvres de la plupart, sinon - comme je l'ai
remarqué souvent - celui de merveilleux ? Et c'est dit
d'un ton
qui
trahit la surprise bien plus qu'il ne traduit
l'adoration. Je vous le demande : serions-nous
réellement surpris si notre foi était
celle qu'elle doit être ? Toutes les
oeuvres de Dieu sont merveilleuses. Pourquoi donc
s'étonner lorsqu'une prière est
pleinement exaucée ?
Une personne qui souffrait d'un mal
rebelle fut invitée par
des amis à faire un séjour chez eux.
Ils croyaient à la guérison divine et
pensaient être aussi en état de prier
plus efficacement pour elle. Elle accepta leur
invitation et, le troisième jour, se
réveilla sans plus éprouver aucun
symptôme douloureux. Elle se leva
aussitôt et alla trouver ses amis qui
étaient en train de prendre leur
petit-déjeuner, afin de leur annoncer la
bonne nouvelle de sa guérison. Ceux-ci ne
purent en croire leurs oreilles. Les amis
mêmes qui avaient prié pour sa
guérison, et qui l'avaient invitée
chez eux dans cette intention, ne pouvaient
maintenant se persuader que leurs prières
avaient été exaucées. Avant de
nous montrer trop critique à leur
égard, cependant, n'oublions pas que les
chrétiens déclarés et
courageux, comme ceux qui passaient la nuit en
prière pour l'apôtre Pierre, alors
emprisonné, refusèrent de croire que
c'était bien lui qui frappait à la
porte
(Actes
12 : 11-16).
Il n'est pas seulement difficile pour un
homme de parvenir à une foi qui
dépasse celle de ses amis, mais on
s'élève difficilement aussi
jusqu'à dépasser ce qu'estime
possible le grand nombre. Il y a des choses
auxquelles tout le monde s'attend, telle la
réduction et la consolidation d'une fracture
osseuse ordinaire. D'autres, par contre, sont
considérées comme impossibles. Or, ce
n'est pas sans peine qu'un individu se
libère de l'opinion générale.
La plupart des gens en sont effectivement
incapables tant qu'ils n'ont pas
« rencontré »
personnellement le Christ vivant
(5).
À supposer même qu'on en
arrive à croire fermement, pour finir,
à la guérison définitive, on
subit plus ou moins l'opinion
générale, ne fût-ce qu'en
acceptant presque inconsciemment la classification
courante des maladies. C'est ainsi qu'on estimera
tout naturellement qu'il faut beaucoup plus de
temps pour guérir certains états
maladifs, certaines névroses ou certaines
infirmités corporelles, qu'il n'en faut pour
guérir des affections communément
jugées moins graves. Et pourtant, n'est-ce
pas chose toute simple, pour le Créateur
tout-puissant de l'Univers, de guérir nos
corps, qui ne sont après tout que peu de
chose ?
On ne saurait nier le fait que de
nombreux malades ne sont pas guéris parce
que parents et amis manquent de foi. J'ai connu
bien des cas de ce genre. C'est même un de
ces cas qui m'a amené à
reconnaître les avantages qu'offrirait une
« maison de guérison »,
où les malades seraient soustraits à
cette atmosphère de scepticisme. Et cette
atmosphère néfaste - si
étonnant que cela puisse paraître -
est due bien souvent à la tendresse
même de l'entourage. Le malade, trop
souffrant pour être en état de prier
lui-même, se trouve en effet entouré
de personnes qui le chérissent au point de
ne pouvoir se faire à l'idée de le
perdre. Elles en éprouvent tout
naturellement de l'angoisse, et c'est ainsi que
ceux-là mêmes qui devaient
libérer la grâce qui guérit
sont tellement inquiets intérieurement,
qu'ils ne s'en trouvent pas seulement
paralysés, mais que leurs
appréhensions retentissent sur le malade
lui-même. Une véritable
barrière de crainte et de scepticisme est
ainsi élevée, qui
empêche la grâce salutaire du Christ
d'atteindre celui qui, autrement, eût
recouvré la santé.
La plus grande barrière de toutes
est incontestablement l'incrédulité
générale de l'Eglise sur ce point -
surtout si l'on tient compte du fait qu'elle est si
répandue parmi ceux qui,
précisément, ont été
« ordonnés » pour
exercer le ministère
évangélique de guérison. Tout
évêque (6) n'a-t-il pas en effet
été consacré pour exercer,
entre autres, ce ministère ?
Il est facile aux membres du
clergé de prétendre que le premier
devoir auprès des fidèles est d'ordre
spirituel, que l'âme passe avant le corps, ou
qu'ils sont à ce point absorbés par
les activités proprement spirituelles de la
paroisse, qu'ils ne trouvent plus de temps pour
s'occuper des besoins du corps - ce qui,
d'ailleurs, regarde le médecin.
Et pourtant, n'est-il pas
généralement admis qu'une des
obligations d'un pasteur de paroisse est la visite
des malades ? À ce propos, ma propre
expérience me permet d'affirmer qu'il est
infiniment plus satisfaisant, à l'occasion
de ces visites, d'apporter aux malades le
bienheureux message d'une guérison possible
par le Christ, que de n'avoir rien d'autre à
leur offrir que l'exhortation à supporter le
plus patiemment possible des maux que leur aurait
envoyés un Dieu qui est amour.
L'oubli dans lequel est tombé le
ministère de guérison n'est pas
seulement une désobéissance au
commandement du Maître. Il a également
affaibli bien plus qu'on ne
l'imagine l'autorité de l'Eglise
auprès des masses, qui estiment que celle-ci
n'a rien à leur dire.
Comment, par conséquent, ne
comprendrions-nous pas qu'en négligeant le
ministère de guérison l'Eglise a
perdu la pierre de touche par excellence de sa
foi ? Lorsqu'elle devint consciente de son
impuissance à guérir, elle modifia sa
doctrine pour l'adapter à cette carence, au
lieu d'y remédier en en cherchant la cause
en elle-même. Par son état de parfaite
santé, le Christ fut aux jours de sa chair
la manifestation même de l'amour du
Père qui veut notre guérison. Or
c'est l'Eglise qui est aujourd'hui le
« corps » visible du Christ. Si
donc la grâce qui assure la guérison
ne peut plus être répandue librement
de nos jours - comme à d'autres moments de
l'histoire, d'ailleurs - ça ne peut
être dû qu'à
l'« encrassement du corps »,
qui ne la laisse plus passer. Quel rayonnement la
foi de l'Eglise n'aurait-elle pas aujourd'hui, si
la pierre de touche en question avait
été appliquée par elle pendant
dix-neuf siècles, si elle avait su
s'humilier devant Dieu chaque fois qu'une carence
secrète lui était
révélée par un affaiblissement
du don de guérison ! Avec quelle
puissance n'entreprendrait-elle pas de gagner le
monde au Christ, incitant les hommes, par la
guérison du corps, à rechercher
celle, plus importante encore, de
l'âme ! Songez aussi à ce que
cela eût signifié dans nos champs de
Mission, où les gens s'empressent d'accepter
la guérison avec une foi simple d'enfants.
Dans nos paroisses, pourtant, il en est qui
refusent d'admettre qu'une forme de service qui
occupe une place si
importante dans le ministère de Jésus
demeure, à l'heure actuelle, un des aspects
essentiels de celui de son Église.
Notre plus grand obstacle en tout ceci
est sans aucun doute le manque de foi de l'Eglise.
Mais avant de nous en prendre à l'Eglise,
n'oublions pas que celle-ci se compose d'individus,
et que la foi du corps ne saurait dépasser
celle dont la moyenne de ses membres font preuve.
Au reste, acceptons-nous - en le critiquant
peut-être - cet état de fait, ou
cherchons-nous à y remédier ? On
n'a aucun droit à la critique si l'on
n'apporte pas le remède.
S'il est vrai que la santé de l'Eglise -
corps visible du Christ - éclate avant tout
dans le fait que le ministère de
guérison s'y exerce avec puissance, ne
devrions-nous pas en déduire que la
santé morale et spirituelle de l'individu
conditionne pour lui la possibilité d'une
guérison physique ?
C'est là une très grave
question ; mais une question qu'il n'est pas
honnête d'éluder - tout en admettant,
cela va sans dire, que la maladie n'est pas due
forcément à une forme de
péché
délibérément poursuivie, elle
peut résulter également de la
crainte, de l'ignorance ou d'une idée
erronée qu'on se fait du dessein de Dieu.
Dans la mesure, pourtant, où la maladie est
chose essentiellement mauvaise, et où
pareille chose ne saurait aller de pair avec
l'Esprit divin reçu dans
sa plénitude, sa persistance doit rendre
attentif au fait qu'il y a encore quelque chose
à abandonner à Dieu, ou un
enseignement à recevoir de lui, avant que,
par l'Esprit, il puisse exercer une
souveraineté absolue sur l'être tout
entier. Tout échec dans ce domaine est un
dur défi qui invite à se placer sans
réserve sous l'éclairage
divin.
Nous avons vu déjà que
l'incapacité de s'attendre à de
grandes choses rend ces mêmes choses
impossibles. À plus forte raison la crainte
d'échouer, ou de courir à un
désastre, favorise-t-elle la
réalisation des éventualités
mêmes que l'on redoute.
La crainte n'est pas seulement à
l'origine de beaucoup de maladies ; elle en
empêche souvent aussi la guérison.
Comment s'étonner qu'un malade, dont
l'affection physique retentit sur le moral, ne
surmonte que difficilement une appréhension
quasi universelle, comme celle, en particulier, qui
résulte d'un verdict médical selon
lequel le mal qui vous ronge est
considéré comme habituellement
incurable (7). Pareille
appréhension ne
peut être surmontée que dans la foi au
Christ vivant.
Nombre d'affections chroniques
s'éternisent en raison de l'état
craintif du malade. Dès l'apparition des
symptômes en effet, il a peur qu'il n'en
résulte ce qu'enseigne une expérience
commune. Un mal de gorge banal devient aussi le
signe avant-coureur d'un rhume grave, et celui-ci
ne manque pas de s'installer.
La crainte n'a même pas besoin
d'être consciente. Pour peu que certains
faits se soient répétés, le
subconscient en est influencé ; il n'a
bientôt plus besoin que d'une
légère impulsion extérieure
pour s'imposer, sans même que, sur le moment,
on l'appréhende consciemment. Si quelqu'un,
par exemple, est bien persuadé qu'en
s'exposant à un courant d'air on finit
toujours par s'enrhumer, cela suffit pour que
l'inconscient l'enregistre - alors même que
la pensée consciente est trop
absorbée par autre chose pour y prêter
attention - et que le processus soit
déclenché.
Un nombre important d'échecs
provient de ce que, même guéri d'une
affection quelconque, un malade continue à
la redouter, épiant craintivement les
moindres symptômes de son retour. Dans ces
conditions, il est plus que probable que le mal
récidivera, faisant ainsi obstacle à
la guérison divine.
Étant donné que, lorsqu'on
reste anxieux, c'est parce qu'on ne s'appuie pas
sans réserve sur les promesses divines, les
échecs attribuables à cet état
d'esprit sont en réalité un manque de
foi. Cela nous mène à la
nécessité d'une vraie rencontre
personnelle avec le Christ vivant et à la
conviction absolue que le Saint-Esprit peut donner
vie, dans nos coeurs, à la
Vérité divine. Mais il ne saurait y
avoir une foi réelle sans mise en pratique
immédiate.
Supposons que se manifestent en moi les
premiers symptômes d'un rhume. Ce n'est pas
en suppliant Dieu de les faire disparaître
que le mal sera jugulé, puisqu'en le faisant
j'en reconnais la gravité et les renforce.
Si, par contre, je me place très simplement sous
la protection divine,
rejetant toute espèce de crainte, me
persuadant que cela n'a aucune importance,
puisqu'aussi bien je suis dans la main de Dieu, et
cela sans plus me préoccuper de savoir si je
m'enrhume ou non, alors tout ira bien. Chaque fois
que j'ai pu agir ainsi le rhume à
été coupé.
Si, par ailleurs, on est amené
à s'exposer à la contagion d'une
maladie infectieuse, il faut se garder de prier
pour en être préservé. En le
faisant, on reconnaît qu'on la redoute. Il
faut prier, bien plutôt, pour être libéré de toute crainte de
l'attraper, et, quant au reste, s'en remettre
entièrement à Dieu.
Après avoir tellement
insisté sur les graves conséquences
de la crainte, il se peut que j'aie
éveillé chez le lecteur la peur de la
crainte elle-même. Avant de passer à
autre chose, j'essaierai donc de montrer comment
elle peut être surmontée.
Lorsqu'une crainte s'installe tout
à fait, ou même revient
fréquemment, c'est la preuve qu'elle se
transforme en idée fixe dans le
subconscient. La volonté est alors
impuissante à la chasser. C'est à
Dieu qu'il faut avoir recours pour trouver la
délivrance, en priant pour que le
Saint-Esprit la remplace par la confiance. Il faut
y apporter à la fois une grande
déférence et une détermination
absolue. On commencera par une requête
précise, à la suite de laquelle on se
rendra disponible dans l'attente silencieuse, et
l'on terminera par l'action de grâce, parce
qu'on sera sûr de l'exaucement. Mais ensuite
viendra la mise à l'épreuve, car le
sentiment d'appréhension reviendra. Si l'on
s'en montre déçu, peut-être
même affligé, parce
qu'on croyait vraiment en être
débarrassé, on ne fait que s'avouer
de nouveau vaincu. Il s'agit au contraire d'y faire
face avec décision, comme on affronte une
tentation, en affirmant la certitude où l'on
est de son impuissance à vous dominer
encore.
Alors la crainte s'évanouira
bientôt. Il faut ici faire la
différence - elle est très grande -
entre un état d'âme qui vous domine
toujours et un état dont on est affranchi,
mais qui cherche à vous assujettir à
nouveau. Si l'on voit toujours dans la crainte
quelque chose d'invaincu, on pourra attendre
indéfiniment la vraie libération,
même si l'on croit pouvoir l'obtenir un jour.
Si, par contre, on a la certitude d'avoir
été exaucé, affranchi de toute
crainte, on ne voit plus dans ce nouvel assaut
qu'une tentation ordinaire à retomber dans
un état périmé. On n'a
qu'à résister au tentateur, et il se
retire. Et la peur n'aura plus de prise.
Les craintes qui nous empêchent de
connaître la paix peuvent être
multiples. N'essayons pas alors de nous attaquer
à la principale, quel que soit notre
désir d'en être
débarrassés. Nous sommes aidés
dans la mesure de notre foi, et c'est beaucoup plus
facile d'être libéré d'une
crainte relativement faible que d'une peur qui nous
a dominés pendant longtemps. Quand nous
aurons été affranchis de nos craintes
secondaires, notre foi sera en état
d'accepter la délivrance là où
c'est le plus difficile (8). J'ai
connu quelqu'un dont l'angoisse était
telle, qu'il se réveillait terrorisé
et en sueur. Il en fut complètement
délivré bien avant que la cause
immédiate fût éliminée.
Un échec peut fort bien être
dû parfois à un excès
d'information. Quand on se rend pleinement compte
de la gravité d'une maladie, quand on est au
courant de son évolution habituelle ou des
changements physiques qui doivent se produire avant
toute guérison, il devient beaucoup plus
difficile d'accéder à la foi toute
simple de l'enfant, que ce n'est le cas lorsqu'on
ne sait rien de tout cela. C'est la raison pour
laquelle la guérison instantanée est
plus fréquente chez les peuples primitifs et
les enfants, que chez les gens
évolués. Cela ne fait d'ailleurs que
souligner à nouveau la
nécessité de la foi : on
échoue parce qu'on s'appuie sur la raison
humaine et les données d'un monde
essentiellement tourné vers la
matière, au lieu de compter absolument sur
les promesses divines.
Certains échecs sont dus au fait
qu'on s'applique à fournir un effort
personnel, alors qu'il faudrait s'abandonner avec
confiance, tout simplement. Lorsque la
guérison ne vient pas, le malade a souvent
le sentiment de ne pas avoir fait tout le
nécessaire. C'est ainsi qu'il sera
amené à essayer différents
autres moyens. Il changera, par exemple, sa
façon de prier, ou prolongera ses temps de
dévotion, ou communiera plus souvent. Tout
cela peut être excellent en soi, mais c'est
inutile si l'on
croit
ainsi pouvoir gagner - ou s'assurer
-
la guérison. La guérison ne peut pas
être gagnée ; elle doit
être reçue comme don gratuit de Dieu.
Notre rôle, par conséquent - comme
toujours lorsqu'il s'agit des grâces divines
- est d'agir comme ayant été
exaucés après avoir prié,
plutôt que de poursuivre des efforts
personnels.
J'ai connu des déconvenues parce
qu'on ne réussissait pas à se
libérer de toute discussion stérile
concernant les symptômes. Le simple fait de
noter soigneusement les progrès
réalisés, et le désir d'en
témoigner, continuent à fixer
l'attention sur la maladie, et retardent ainsi la
guérison. Combien souvent le Christ n'a-t-il
pas recommandé à ceux qu'il
guérissait d'aller leur chemin, et de n'en
rien dire à personne. Sans doute se
rendait-il compte qu'en détaillant à
tout venant le mal dont on avait été
guéri, même dans l'intention de
témoigner positivement, on s'exposerait
à une rechute, en pensant encore beaucoup
trop - et trop souvent - au mal en
question.
La majorité des gens semblent se
délecter à parler maladie et à
se décrire mutuellement symptômes et
malaises. Ils ne se doutent guère du mal
qu'ils se font et qu'ils font aux autres en
répandant des idées
déprimantes plutôt que des
idées de santé. On nous dit souvent
que les actes regrettables ou même
désespérés dont se rend
coupable une certaine jeunesse sont dus à
l'influence du cinéma. Ces jeunes ont la
tête tellement farcie des exploits des desperados de l'écran,
qu'ils
n'arrivent plus à se contrôler. Que
ceux, donc, qui se gargarisent de propos incessants
sur nos misères prennent
garde au retentissement qu'ils peuvent avoir sur la
santé du corps.
Cela peut sembler paradoxal, mais je
suis persuadé qu'on peut faire remonter
certains échecs particulièrement
embarrassants à la
« spiritualité » du
malade. Une personne portée à la
spiritualité, en effet, à qui l'on a
probablement toujours enseigné que la
maladie fait partie d'une discipline voulue de
Dieu, et qu'il ne faut pas accorder trop
d'attention au corps, une telle personne verra tout
naturellement dans la maladie une croix qu'elle est
invitée à porter, et pensera qu'on
peut offrir à Dieu des souffrances
patiemment endurées en crucifiant ainsi le
« moi ». Une telle attitude
peut aussi être basée sur
l'incompréhension du caractère vrai
de l'épreuve que subit saint Paul du fait de
son « écharde » ;
ou prévenir de l'oubli de cette
réalité capitale que le Christ porta
sur la Croix « le poids de nos
maladies ». Si le corps est bien le
« temple du Saint-Esprit », il
ne saurait être négligé.
Comment, par ailleurs, pourrait-il être
méprisable, puisque le Fils de Dieu voulut
bien s'en servir ? Ce qui ne veut pas dire,
bien sûr, qu'on lui attribua la même
valeur qu'à l'âme.
J'insisterai une fois de plus à
ce propos sur la nécessité de
n'offrir à Dieu qu'une souffrance qui soit
vraiment un hommage spontané !
C'est ainsi qu'une souffrance ne saurait être
considérée comme telle si nous ne
l'offrons que parce que nous n'avons pu nous en
affranchir, après l'avoir pourtant
essayé. Lorsque, toutefois, cette offrande a
été faite en toute
sincérité et ferveur, je ne puis
croire qu'elle n'ait pas été acceptée en
réponse par la miséricorde divine
(9), alors
même qu'il s'agissait d'une conception fausse
à notre avis. Les progrès spirituels
effectivement réalisés, parfois, par
la personne en question sont certainement une
preuve de cette acceptation. Quoi qu'il en soit, la
guérison, si elle avait pu être
acceptée, aurait encore davantage
glorifié Dieu... Est-ce trop de dire :
« Si elle avait été
acceptée » - comme s'il n'y avait
pas eu beaucoup de ferventes prières pour
obtenir la guérison, avant qu'on se
résignât à voir dans la maladie
la volonté de Dieu ? Ce que je tiens
à rendre clair, c'est uniquement le fait
qu'en dépit de la ferveur des prières
offertes, elles n'étaient pas celles de la
foi qui accepte sans réserve si le moindre
doute subsistait quant à la volonté
divine.
Ajoutons que l'âge aussi peut
affaiblir la foi. Un malade peut se croire trop
âgé pour être en droit
d'espérer encore être guéri,
puisqu'aussi bien il faut mourir un jour.
N'oublions pas que Dieu peut reprendre -
tout simplement - la vie qu'il a donnée, et
le faire au moment qu'il juge opportun. Il n'a pas
besoin, pour cela, que le corps soit détruit
par la maladie. Pour ce qui est de l'âge, par
ailleurs, je n'ai pu fixer encore celui
au-delà duquel la guérison ne peut
plus être attendue. Je fus amené, un
jour, à m'occuper d'une dame
âgée de septante-six ans et qui
souffrait beaucoup de rhumatisme. Elle n'avait pas
mis les pieds dehors depuis plusieurs mois et ne
pouvait pas atteindre sa nuque
avec les mains. Quatre jours après avoir
reçu l'onction d'huile, elle put faire une
assez longue promenade, et, quelques jours plus
tard encore, elle pouvait se coiffer seule. Une
autre fois, c'est auprès d'un homme de
septante-huit ans que je fus appelé. On le
croyait sur son lit de mort. Deux ans plus tard, je
le vis moi-même en train de scier des
rondins.
La durée de notre vie est
l'affaire de Dieu. Il ne nous appartient donc pas
d'intervenir pour tenter de la modifier. La maladie
est cependant un mal en soi, et nous avons le
droit, bien mieux, le devoir de chercher à
être délivré de ce mal - sans
qu'il soit question pour autant de la durée
elle-même de notre vie. Même si
j'étais absolument sûr que Dieu
veuille rappeler demain tel de ses serviteurs,
cette certitude ne m'empêcherait aucunement
de demander pour aujourd'hui sa
« guérison » de toute
maladie. je ne prierais pas pour que sa vie
fût prolongée, bien sûr - il
appartient à Dieu seul de décider -
mais pour qu'il fût délivré de
tout « mal », dans son
âme et dans son corps. À plusieurs
reprises, d'ailleurs, j'ai vu s'accomplir des
guérisons à quelques jours seulement
d'une issue déclarée fatale. Il n'est
jamais trop tard pour demander à Dieu de
glorifier son nom en libérant l'un de ses
enfants de la puissance du mal.
L'Écriture nous enseigne encore
qu'une autre cause fréquente d'échec
est la désobéissance, ou le
péché. Nous avons essayé
déjà de montrer à quel point
la purification du « coeur » -
aussi bien que la guérison du corps -
était nécessaire. C'est pourquoi,
lorsque tarde la
guérison, nous devons prier pour que la
lumière pénétrante de l'Esprit
de vérité nous révèle
quelque « interdit »
(10) qui
pourrait subsister.
Car il est des déconvenues qu'il
faut attribuer au fait de n'avoir pas
recherché la guérison pour la gloire
de Dieu avant tout, c'est-à-dire
complète, intégrale
(11). Tous,
nous avons sans doute entendu dire :
« Si je puis être
délivré de ces souffrances, pour le
reste je m'arrangerai ». Et pourtant,
tout ce qui peut souiller le temple du Saint-Esprit
doit être abandonné.
En terminant, il convient de remarquer
que ceux qui, au fond, ne désirent pas une
guérison absolument complète sont
beaucoup plus nombreux qu'on l'imagine. Il faut
dire qu'eux-mêmes, pour la plupart, ne s'en
rendent pas compte et restent difficiles à
convaincre. Quand ils étaient
réellement malades en effet, ils
étaient sincèrement désireux
d'être guéris, mais une fois
passée la phase aiguë, ils ne font pas
attention au fait qu'ils continuent toujours de
tenir à toutes sortes de petits soins ou
égards auxquels ils s'étaient
habitués, et que cela empêche
maintenant pour eux, en la voilant, la pleine
santé.
Ajoutons enfin que bien des gens croient
se donner de l'importance en se plaignant d'une
chose ou d'une autre, surtout s'il s'agit de
quelque chose qui sort de l'ordinaire. C'est en
réalité le vieux péché
d'orgueil, qui les porte à s'accrocher
à tout ce qui peut les distinguer des autres, ne
fût-ce que légèrement, et
attirer sur eux une attention qu'autrement on ne
leur accorderait pas. Et puis, il y a aussi le fait
que notre humaine nature cherche toujours
volontiers une excuse à ses travers, et
qu'une déficience organique fait
admirablement l'affaire. Si cette déficience
est visible, en effet, elle constitue une excuse
valable, et non un simple prétexte
imaginaire.
J'ai bien peur que vous n'alliez croire
maintenant que les obstacles à la
guérison sont si nombreux, et les conditions
à remplir telles, qu'il est à peu
près vain d'avoir recours à la
grâce divine dans ce but. Mais gardez-vous
bien de vous laisser décourager.
En réalité, rien n'est
plus simple - à la condition toutefois que
l'on veuille effectivement se mettre en
règle avec Dieu. Les difficultés qui
nous rebutent sont celles que, dans notre manque de
simplicité, nous nous créons à
nous-mêmes. Nous interprétons la
Vérité révélée
de l'Écriture (12) avec notre
raison
personnelle, au
lieu de l'accepter comme Parole de Dieu. La
Vérité est la simplicité
même. La volonté du Père est
effectivement de libérer ses enfants de tout
mal, qu'il s'agisse de l'âme ou du corps. Il
est la Source de toute guérison, et
Jésus-Christ est le chenal par lequel
s'épanche en nous l'Amour qui guérit,
l'Amour du Père. Le Saint-Esprit, lui, est
la Puissance divine opérant en nous pour
qu'éclate la Force souveraine de
guérison de cet Amour, que la foi au Christ
- et au Christ seul - nous permet de recevoir.
Nous sommes dans le cabinet de travail d'un
presbytère anglican de campagne.
Une jeune fille entre en boitant,
visiblement souffrante. Elle vient de se fouler le
pied sur la route, et a été
ramenée chez elle en voiture par un
voisin.
Le padre (13) lui
demande :
« Crois-tu que si tu voyais Jésus
debout dans cette pièce, il te
guérirait ? »
- Mais oui, Monsieur.
- Crois-tu que Jésus est ici,
bien que tu ne puisses pas le voir ?
- Oui, Monsieur.
- Te souviens-tu qu'il ordonne à
ses disciples d'imposer les mains aux malades en
son Nom ; c'est-à-dire que, bien qu'il
n'ait pas aujourd'hui des mains que nous puissions
voir, il peut se servir des miennes pour te
guérir ?
- Bien sûr, Monsieur.
Une courte prière est alors
prononcée pour se réclamer, en Son Nom, de
la promesse faite et de la rédemption
opérée, ainsi que de la foi qu'il
donne, par son Esprit qui est en nous. Les mains
sont alors imposées, une action de
grâce s'élève et la jeune fille
quitte le cabinet pour vaquer de nouveau à
ses travaux habituels.
Quoi de plus simple que cette foi
d'enfant, qui accepte la promesse faite par l'Amour
du Père, dans le Christ jésus, notre
Seigneur ?
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