Et maintenant, voyons un peu où
nous en sommes. Vous recherchez donc la
guérison qui vient de Dieu. Cette
guérison, vous êtes porté
à l'attendre du ministère de
l'Eglise, et vous tenez à vous y
préparer le mieux possible. Par ailleurs, il
est devenu clair pour vous qu'il s'agit pour
commencer d'apporter à Dieu toute
espèce de péché ou le
désir coupable, qui compromettent votre
libre communion avec lui.
Le caractère précis et
détaillé de votre confession doit
dépendre, cela va sans dire, de la nature du
mal dont vous souffrez et de son retentissement sur
vos facultés. Une personne qui souffre de
névrose ou de neurasthénie ne doit
pas s'appesantir sur son passé, pas plus
qu'un grand malade ne doit faire d'efforts de
concentration mentale, même si cela peut
paraître possible. Dans des cas de cette
nature, un désir sincère d'amendement
et d'abandon sans réserve à Dieu de
la vie entière suffira amplement, car il
connaît bien les limites de ce qu'on peut
attendre de tels malades.
Seuls donc la confession et l'abandon
confiant de l'être sont exigibles.
Mais on peut souvent se croire indigne
d'un don pareil et se demander s'il ne conviendrait
pas d'attendre encore pour se mieux
préparer. Pourquoi remettre à plus
tard ? Nous est-il loisible de nous rendre
plus dignes ? Certes non, puisque c'est
précisément parce que nous ne sommes
pas ce que nous devrions être dans notre
âme et notre corps que nous avons besoin
d'aller à celui qui guérit. C'est
donc tels que nous sommes que nous devons le faire,
pour lui permettre de nous rendre tels qu'il nous
veut. La seule chose qui nous soit demandée,
c'est de nous abandonner entièrement
à lui. Aussi bien est-ce encore par
grâce que nous recevons de lui la foi qui
nous rend capables de prier et d'aller à lui
pour être guéris.
Une exception cependant - dont il me
faut fréquemment tenir compte - c'est que,
dans certains cas, le besoin de guérison
divine ne s'impose pas suffisamment. Il convient
alors d'ouvrir l'esprit du malade à
l'idée même de pareille
guérison. Bien souvent en effet, on ne voit
plus dans le Christ celui qui guérit, et
l'idée d'aller à lui pour cela est
quelque chose de tout à fait nouveau,
quelque chose de trop beau pour être vrai. Et
lorsqu'on s'est plus ou moins fait à cette
idée, il faut parfois du temps pour en
arriver à se l'approprier vraiment, afin
d'être en état d'y donner suite et
d'en bénéficier.
Supposons maintenant que vous soyez dans
l'état d'esprit voulu pour être
guéri.
Si vous êtes dans l'obligation de
garder le lit, ou incapable de
quitter la maison, il s'agit alors pour vous
« d'appeler les anciens de
l'Eglise » et de réclamer leur
ministère. Nous devons bien
reconnaître, hélas ! que ce n'est
pas dans toute communauté paroissiale qu'on
trouve un « ancien », pasteur
ou prêtre qui soit en état d'exercer
le ministère de guérison - bien que
beaucoup y seraient amenés si des appels
plus fréquents dans ce sens leur
étaient adressés. Si vous ne trouvez
aucune assistance dans votre paroisse, alors il
vous faut chercher ailleurs, et si vous ne
connaissez personne qui puisse venir à vous,
vous pouvez encore - et c'est ce qu'il vous reste
de mieux à faire - vous adresser à un
cercle de prière qui s'occupe de
guérison.
Mais vous pouvez être valide et ne
trouver aucune aide dans la localité
où vous habitez. Souvenez-vous alors qu'on
organise de temps à autre, ici ou là,
des « cultes de
guérisons » (1). Si vous
décidez d'y aller
pour trouver la guérison, ou si vous
réclamez le ministère de l'Eglise,
ayez soin d'y apporter tout le sérieux
nécessaire. Lorsque la guérison est
vraiment désirée, elle mérite
des sacrifices. Le jour fixé pour
l'intervention de l'Eglise doit être
réservé à cette fin seulement.
Ce doit être un jour consacré à
Dieu. On peut parfaitement intercaler un
rendez-vous chez son dentiste dans une série
de courses en ville, ou le placer entre deux
obligations mondaines ; il n'en va pas ainsi
d'une visite à celui qui assure le
ministère de guérison, car ce n'est pas tant à
l'homme que vous allez, mais c'est au Christ.
N'oublions pas que c'est avant tout pour le
glorifier que nous devrions chercher auprès
de lui la guérison. Il s'agit donc de ne pas
procéder à la légère,
à notre convenance, quand nous en avons le
loisir et l'envie. Une longue expérience
personnelle nous a appris que ceux qui trouvent le
plus facilement la guérison sont ceux qui se
vouent corps et âme à sa recherche.
Vous voici maintenant sur le point de recevoir
l'imposition des mains ou l'onction d'huile
(2).
Dans la chambre haute, à
Jérusalem, la veille de sa passion, le
Seigneur dit à ses disciples :
« Encore un peu de temps, et vous ne me
verrez plus ; et puis un peu de temps encore,
et vous me verrez de nouveau »
(Jean
16 : 16). Nos versions ne
font généralement pas ressortir que
dans le grec nous avons pour
« verrez » deux verbes
différents : théoreité et opsesthé. Pour être
plus
précis, on pourrait traduire le second par
« percevrez », ce qui
donnerait : « Encore un peu de
temps, et vous ne me verrez plus ; et puis un
peu de temps encore, et vous me
percevrez » (spirituellement)
(3). Jésus
ne sera plus visible corporellement, mais les
disciples auront l'assurance de sa présence
permanente sur
le plan spirituel (4). Il leur dit
aussi :
« Il vous est avantageux que je m'en
aille »
(Jean
16 : 7). Par ces mots,
entendait-il seulement que sa présence
spirituelle le libérerait de toutes les
limites de temps et d'espace inhérente
à une présence corporelle ? Il
semble bien qu'il voulait dire, surtout, que sa
présence permanente, par l'Esprit, leur
serait plus réelle encore que ne l'avait
été sa présence
corporelle ?
Bien plus : leur communion avec
lui, dans la réalité de l'Esprit,
serait plus intime, plus complète et
opérante, que ne l'avait été
leur communion au temps de sa chair. Je ne puis me
persuader que, six mois après le jour de la
Pentecôte, par exemple, l'un quelconque des
apôtres eût
préféré revenir en
arrière, au risque de perdre la communion
spirituelle qui se manifestait avec une telle force
dans leur vie et leur comportement journalier.
Comment donc, dans ces conditions envier ceux qui
crurent parce qu'ils virent Jésus de leurs
yeux, alors qu'il nous a rendus capables
d'éprouver plus fortement sa
présence ?
Il ne nous reste donc qu'une chose
à demander c'est que le Saint-Esprit vous
donne l'assurance immédiate, absolue, que
vous êtes à genoux devant le Christ
lui-même. Vos craintes et vos doutes
tomberont alors d'eux-mêmes. Vous serez
sûr d'être mis au bénéfice de sa
grâce, et sachant qu'ainsi vous avez
déjà reçu ce dont vous avez
besoin, vous vous répandrez tout
naturellement et spontanément en actions de
grâces.
Si l'abandon est réellement total
de votre part, seule une déficience
personnelle de la foi peut empêcher la
guérison immédiate de se produire
(5). J'ai d'ailleurs
déjà
traité de la chose dans un chapitre
précédent. Qu'il me suffise ici de
dire que je ne me fais aucune illusion :
pareille affirmation sera contestée par
beaucoup. On me dira que la guérison est
souvent différée afin de nous rendre
attentifs à quelque aspect important de
notre état spirituel ; mais à
mon sens on devrait toujours y voir un
défaut de radical et positif abandon, et je
fonde mon assertion sur le fait que, lorsque le
Christ exerçait son ministère
ici-bas, aucune guérison ne fut jamais
différée au-delà de quelques
instants en vue de fortifier la foi du suppliant.
Nous sommes bien trop souvent portés
à attribuer à quelque intention
cachée de Dieu les conséquences de
notre faiblesse humaine. C'est ainsi que fut
changée la doctrine de l'Eglise aux environs
du Xe siècle, lorsque, ayant perdu le don de
guérison, elle se mit à enseigner que
la maladie était voulue de Dieu comme
faisant partie des disciplines de la vie.
En réalité, la seule
révélation décisive et
parfaite de la volonté et des intentions
divines fut celle qu'apporte le Christ. Nous ne
saurions prétendre légitimement que
cette volonté et ces intentions ont
changé, alors que nous sommes tout simplement
incapables d'en réaliser les conditions de
manifestation.
Je ne voudrais blâmer personne de
ne pouvoir s'attendre à une guérison
immédiate. C'est là une des
conséquences du long oubli dans lequel est
tombé le ministère de
guérison, et aussi des progrès d'une
civilisation qui nous attache de plus en plus aux
réalités matérielles de la
vie. On est souvent déçu, bien
sûr, quand la guérison n'a pas lieu
instantanément, car on croyait si bien en
réaliser les conditions. C'est si facile, en
effet, de confondre un très grand espoir
avec la foi, ou de se figurer que tout ira bien
parce qu'on s'est persuadé qu'on croyait
vraiment. On oublie, hélas ! les
craintes latentes du subconscient, comme aussi
l'atmosphère de doute qui nous environne.
C'est en effet par toutes sortes de moyens que
notre attente peut être mise à
l'épreuve.
Jusqu'où êtes-vous
disposés à aller, ou quelle somme de
désagréments êtes-vous en
état d'envisager, pour obtenir la
guérison ? J'ai connu des gens qui
n'auraient pas hésité à payer
n'importe quel prix pour une intervention
chirurgicale ou médicale, mais qui
rechignaient à faire le nécessaire
pour recevoir la guérison divine. De tels
gens, évidemment, ne pouvait y voir qu'une
« expérience » à
tenter.
Par ailleurs, qu'envisagez-vous de faire
dans l'immédiat ? Vous souffrez
peut-être d'une vue défectueuse ?
Dans ce cas, êtes-vous assez sûr de la
guérison pour rendre inutilisable les verres
que vous portez, ou pour les donner, avant de
recevoir l'onction d'huile ou l'imposition des
mains ? N'en êtes-vous pas à penser encore
qu'il
serait plus sage d'attendre un peu, pour vous
rendre compte si vous êtes en état de
vous en passer ? Ou bien, supposons que vous
ayez à porter une chaussure
orthopédique - inutile, certes, si vous
aviez un pied normal. Seriez-vous comme l'un des
malades dont parle M. Hickson - disposé
à faire la dépense d'une paire de
chaussures normales afin de les emporter avec vous
au culte de guérison, absolument sûr
d'en avoir besoin pour le retour ?
- Mais comment puis-je être
sûr, objecterez-vous peut-être, que
Dieu veuille pour moi une guérison
instantanée ?
- Tout simplement parce que le Christ
est « le même hier, aujourd'hui,
éternellement », et que, si vous
pouviez aller au Christ visible, vous n'auriez pas
l'ombre d'un doute.
- Mais alors, direz-vous
peut-être, si Dieu nous aime à ce
point et désire tellement nous
libérer de tout ce qui est mauvais pour
nous, ne manifeste-t-il pas sa puissance même
si nous sommes incapables de tout attendre de
lui ?
Je ne puis prendre sur moi de
répondre à cette question. Pourtant,
je puis vous suggérer deux thèmes de
réflexion :
1. Si le premier venu pouvait obtenir
une guérison complète et
instantanée en ayant recours au
ministère de l'Eglise, Dieu semblerait ne
pas attacher d'importance au niveau actuel de sa
foi. Le fait que tant de guérisons soient
différées est sans aucun doute un
appel pressant adressé à l'Eglise,
pour qu'elle cherche à relever ce niveau.
2. En second lieu, je suis
persuadé pour ma part que Dieu se sert de
l'esprit pour agir sur le corps, et que les doutes
qui le traversent empêchent souvent la
manifestation de puissance que le Père est
pourtant si désireux d'accorder.
Supposons maintenant que vous ayez
été mis au bénéfice du
ministère en question. Y a-t-il
déjà quelque résultat visible
ou perceptible ? Dans ce cas tout est bien. Si
toutefois il n'y en a pas, n'en soyez pas
découragé. Le grain a
été semé. De cela, vous ne
sauriez douter. Sachez donc rendre grâce
immédiatement et priez pour que rien ne
vienne contrarier la germination et la croissance.
Louez Dieu jour après jour, même si,
pendant quelque temps, aucune amélioration
ne survenait. Rien ne nous rapproche davantage de
Dieu que la louange. Et pourtant, même dans
l'action de grâce, nous n'arrivons pas
toujours à nous libérer du
« moi ». Il nous est plus
facile et spontané de remercier Dieu de ce
qui comble notre attente, en effet, que de ce qui
la déçoit - bien qu'en
réalité cela puisse nous être
plus profitable. Même dans l'intercession, le
« moi » intervient volontiers,
car nous sommes portés à prier avec
plus de ferveur pour ceux qui nous sont
particulièrement chers. Si, par contre,
c'est pour lui-même que nous louons
Dieu, pour ce qu'il est et non seulement pour les
bienfaits qu'il nous accorde, alors le
« moi » disparaît et nous
sommes élevés jusqu'au niveau
où il peut manifester en nous sa gloire.
Ne vous étonnez pas, ne soyez
surtout pas désemparés, si les choses
ne semblent pas devoir s'améliorer
après avoir eu recours au ministère
de la guérison. Durant la guerre
(6) nos
hommes
avaient à se retrancher sous le feu de
l'ennemi chaque fois qu'ils opéraient une
avance. C'est ainsi que chaque fois que nous
défions l'ennemi en opérant une
avance spirituelle, il cherche immédiatement
à réagir. Mais soyons confiants. Les
puissances des ténèbres ne sauraient
nous ébranler, si ce n'est au plan qui est
le leur. Pour peu que nous comptions sur le
Saint-Esprit pour être maintenus au plan
véritable, elles ne pourront pas plus nous
nuire que les requins ne peuvent nuire, en pleine
mer, aux passagers d'un navire.
Au demeurant, si vraiment nous entendons
vivre par la foi, nous devons être
prêts à subir des épreuves. Si
les choses s'arrangeaient toujours
d'elles-mêmes, ce ne serait pas très
sérieux. La pierre de touche c'est de rester
debout dans l'épreuve, de s'en tenir
fermement aux promesses divines en dépit des
apparences. Il nous faut une foi qui triomphe de
tous les assauts possibles. Comment donc
s'étonner lorsque le Père, afin de la
fortifier, permet qu'elle soit mise à
l'épreuve ?
La semence répandue est une bonne semence. À nous
de veiller
à ce qu'elle tombe dans une bonne
terre et à ce qu'elle soit bien
arrosée.
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