Comme nous l'avons vu déjà,
saint Jacques dit clairement que c'est
« la prière de la foi »
qui sauvera le malade. Il n'attache pas la
même certitude à celle de
l'espérance, ou du désespoir.
En parlant de la prière, il
écrit en effet : « Qu'il...
demande avec foi, sans douter ; car celui qui
doute est semblable au flot de la mer, que le vent
agite et soulève. Qu'un tel homme ne
s'imagine pas qu'il recevra quelque chose du
Seigneur ».
Comme fondement, la foi a besoin de
connaissance.
Nous savons en premier lieu que Dieu peut guérir.
De cela, nous avons de
nombreux témoignages.
Par ailleurs, nous savons que notre
guérison se situe dans la volonté de
Dieu, puisque le Christ a porté nos maladies
sur la Croix. C'est pourquoi nous ne devons pas
ajouter une réserve à notre
prière en terminant par les mots :
« si telle est ta
volonté ». Il ne viendrait pas
à l'esprit de faire cette réserve
quand il s'agit du pardon des
péchés. Alors, pourquoi la faire
lorsqu'il s'agit de recevoir la grâce de
guérison qui nous a été
acquise en même temps et de la même
manière ?
La foi, cependant, va bien
au-delà de toute connaissance doctrinale,
quelles que soient nos certitudes sous ce
rapport.
Croire vraiment, c'est
« connaître » Dieu
lui-même, (d'une façon
immédiate). Il ne suffit pas d'en savoir
beaucoup à son sujet ; il nous
faut le connaître, lui. Ou bien - ce
qui est sans doute plus à la portée
de la majorité d'entre nous - il nous faut
connaître Jésus-Christ comme Seigneur et Sauveur vivant (1).
Seule une expérience personnelle
du Christ Jésus nous permet de surmonter les
adversités de la vie en nous appuyant sur
les promesses de l'Écriture.
Supposez que, souffrant, vous demandiez
une consultation à un éminent
spécialiste, une sommité
médicale, et que celui-ci, après
examen approfondi, vous déclare atteint d'un
mal incurable ; la valeur de son verdict sera
pour vous fonction de son autorité
personnelle. Il en résultera une
réaction de crainte qui envahira votre
subconscient et deviendra une idée fixe. Une
fois là, cette idée ne pourra
être surmontée que par une idée
animée d'un dynamisme plus grand. Or, ce
sont les paroles de l'Écriture, les
promesses faites par notre Seigneur lui-même,
qui devraient avoir pour vous ce dynamisme
supérieur. Mais comment
pourrait-il en être ainsi, si ces paroles et
ces promesses n'ont même pas à vos
yeux l'autorité que confère au
verdict du spécialiste sa forte
personnalité ? Ce n'est pas tant que
vous doutiez de leur réalité, mais
elles sont incapables de vaincre en vous
l'appréhension. Or, c'est l'idée qui
« de fait » domine votre
subconscient - et non celle que vous
« souhaiteriez » y
voir dominer - qui s'impose à vous
pratiquement et règle votre conduite. Il est
impossible de vaincre semblable crainte par la
force de la volonté. De fait, plus on s'y
acharne et plus on l'ancre en soi. Chaque effort
dans ce sens est en réalité une
façon de reconnaître son existence et
d'accroître sa virulence. Si elle
n'était pas là, on n'aurait nul
besoin de la combattre, et le seul fait de la
combattre prouve qu'on la redoute.
Cette crainte ne peut être
surmontée que par quelque chose de plus
puissant, la force de la Vérité. Nous
avons vu déjà que la
Vérité est un « accord avec
la réalité ». Mais la
réalité en question peut ne pas
être celle qui s'accorde à la
Vérité la plus haute, la
Vérité qui est principe
éternel de ce qui doit être, la
Vérité que représente la vie
de Jésus.
En tant qu'assertion d'un fait, il peut
être conforme à la
vérité apparente de dire qu'une
personne souffre d'une certaine maladie. La
Vérité telle que nous la
découvrons en Jésus est autre,
cependant. Elle consiste à dire que le poids
de cette maladie a été porté
par lui sur la Croix, et que, par
conséquent, elle ne doit pas
détériorer le corps, temple du
Saint-Esprit.
Il résulte de tout cela que si la
Vérité est la puissance qui doit nous
libérer, il faut nécessairement
qu'elle s'appuie sur ce qu'apporte d'absolu la
personne de Jésus ; et elle ne saurait
le faire pour nous, aussi longtemps que nous
n'avons pas une expérience personnelle du
Christ Jésus.
Cette expérience est-elle
à la portée de tous ?
Très certainement, pourvu que
nous la recherchions comme elle doit l'être.
Il ne s'agit pas ici d'émotions. La
rechercher de cette manière-là ne
conduit qu'à des alternances d'exaltation et
de dépression. Il est alors des moments
où la prière et les sacrements
semblent nous unir au Christ, et puis, à
d'autres moments, nous nous sentons
complètement abandonnés.
Ce n'est donc pas dans les
émotions, mais par l'Esprit, que nous
pouvons trouver le Christ. Il s'agit par
conséquent de s'en tenir fermement à
la vérité qu'il est toujours en
nous, que sa présence ne dépend
pas de ce que nous pouvons éprouver, mais de
sa promesse. Alors, nous sommes dans les conditions
voulues pour qu'il puisse se révéler
à nous. Beaucoup de chercheurs font des
efforts, désespérés parfois et
sincères toujours, pour trouver le Christ,
sans se rendre compte que cet effort même est
pour eux un empêchement, parce que dans
l'effort on exalte le sentiment et les
émotions. Mais si nous ne pouvons pas le
trouver ainsi, il peut, lui, se
révéler à nous, parce que son
Esprit est en nous, et que c'est par l'Esprit que
doit venir la révélation. Il se
révélera dans la mesure où,
dans l'adoration, la louange et l'entière
disponibilité de l'abandon vrai, nous reconnaîtrons sa
présence par
l'Esprit. C'est « de par Dieu que nous sommes
dans le Christ
Jésus ». Autrement dit, c'est Dieu
(agissant par) le Saint-Esprit
(2), et
lui seul,
qui nous donne l'assurance intime de cette
présence, assurance qui peut être
aussi convaincante que celle qui résulte de
la vue elle-même.
Il s'agit donc de croire
à
la promesse, et d'agir ensuite comme celui
qui croit. Alors on reçoit. Dans la
mesure où la communion devient ensuite plus
réelle, ses promesses aussi deviennent plus
certaines, parce qu'elles sont faites par celui qui
est l'Homme (3).
Quand il s'agit d'un jeune enfant,
Jésus est pour lui parfaitement réel.
Je me souviens d'un enfant de cinq ans qui
souffrait d'une forte rougeole. Alors qu'il
était en pleine éruption, il demanda
à Jésus de le guérir, car on
lui avait enseigné que Jésus
guérissait les malades. Sa prière
était donc la prière de la foi, et,
deux jours après le docteur le
déclara guéri.
Un autre exemple de foi enfantine est
celui d'un garçonnet de huit ans,
éprouvé par l'asthme au point que le
docteur craignait qu'il ne pût passer encore
un hiver. je priai avec lui et lui imposai les
mains au nom de Jésus-Christ. Deux jours
plus tard, il pouvait rentrer chez lui. je lui fis
savoir que j'étais disposé à
lui imposer encore une fois les mains avant sa
sortie de l'hôpital, afin d'appeler sur lui
une nouvelle grâce. On revint me dire qu'il
ne croyait pas en avoir besoin : il avait tout
obtenu la première fois ; pourquoi
aurait-il besoin de venir de nouveau ? En
somme, il avait parfaitement
raison. Il avait reçu sa grâce, et il
était guéri de son asthme.
Quand le Seigneur nous dit que nous
devons ressembler aux petits enfants, il n'entend
pas que nous devions leur ressembler en innocence
seulement, mais aussi par la simplicité de
notre foi, et par notre empressement à nous
laisser instruire par lui. Vous ne pouvez rien
apprendre à quelqu'un qui croit savoir
déjà tout ce que vous pourriez lui
enseigner. Dieu non plus ne peut nous instruire de
sa Vérité aussi longtemps que nous
nous fions à notre acquis d'ordre
intellectuel. Par contre, nous sommes prêts
à recevoir la vraie connaissance dès
l'instant où nous commençons à
reconnaître que nous ne savons rien. Dieu
alors ne tardera guère dans sa tentative de
se révéler à nous. Ce fut en
tout cas ma propre expérience, et je ne
commençai à
« connaître » Dieu d'une
façon qui pût me satisfaire
qu'à partir du moment où je me rendis
à l'évidence que, pour l'essentiel,
je ne savais rien. je ne veux pas dire par
là, bien sûr, que nous ne devions pas
nous servir de nos facultés intellectuelles
ou de nos facilités de raisonnement, mais
que nous devons les utiliser à la
lumière du Saint-Esprit, et non à la
seule lumière de la sagesse du monde et
d'une connaissance toute humaine.
Ce qu'il y a lieu de souligner avant
tout, c'est l'absolue
nécessité d'une expérience
personnelle du Christ vivant.
Ce n'est même plus une question de
guérison seulement. C'est une question de
vie. En dehors de cette expérience, notre
religion n'a que bien peu de valeur effective, et
c'est
précisément dans nos moments
d'extrême détresse ou de plus grand
désarroi qu'elle nous trahira. Nous pouvons
certes avoir observé scrupuleusement la
« loi », ou rempli les
obligations du culte public et du service
organisé, notre religion s'effondrera au
premier choc décisif si nous n'avons pas du
Christ la connaissance que donne la puissance de
l'Esprit qui habite en nous.
C'est très bien de dire que nous
sommes sûrs d'avoir reçu le
Saint-Esprit, parce que nous avons
été baptisés, puis
confirmés, et que nous communions
régulièrement. La question n'est pas
tant de savoir si la grâce de recevoir le
Saint-Esprit nous a été faite - cela
ne souffre aucun doute ; elle est bien
plutôt de savoir si nous sommes devenus comme
« instinctivement » - ou
« naturellement » - conscients
de sa présence en nous, au point
d'être amenés à agir, et cela effectivement, avec la certitude
que c'est
bien lui qui est la source même de notre vie,
de notre force et de notre paix. J'ai connu maints
disciples dévoués du Christ, qui
avaient même donné leur vie pour le
servir, mais qui ne furent amenés à
faire cette expérience que tard dans la vie.
Je prêchai moi-même l'Évangile
pendant plus de vingt ans, pleinement convaincu de
sa vérité, mais secrètement
obligé d'espérer que ceux à
qui je le prêchais y trouvaient plus de
solide et pratique réalité que
moi-même. Depuis le jour où j'avouai
ne rien savoir d'essentiel encore, je suis en
état de prêcher cet Évangile
avec la certitude que donne l'expérience de
sa vérité.
Cette certitude d'expérience est
donnée aux uns et aux
autres de façons différentes. C'est
sans doute le plus souvent en réponse
à l'abandon personnel véritable,
quand le coeur y est tout à fait et que tout
est déposé sur l'autel du culte que
Dieu réclame, quand on est prêt
à lui donner tout ce qu'il peut demander,
non seulement les biens matériels, mais
encore les relations qu'on peut avoir, les
désirs, les idées, les doutes, les
craintes, les espoirs et les ambitions, tout
en un mot.
Cette certitude d'expérience
résulte parfois du risque total qu'accepte
de courir la foi, de la réponse audacieuse
que, dans l'obéissance, on donne à
l'appel de la conscience, en faisant confiance
à l'Esprit pour recevoir lumière et
force indispensables dans pareille
aventure.
À d'autres, elle est
donnée dans l'allégresse d'une
gratitude débordante, alors qu'ils ont
été l'objet d'une grâce insigne
ne pouvant venir que de Dieu.
D'autres, par contre, l'ont
trouvée au cours d'une méditation
tranquille, alors que, dans l'adoration
intérieure de l'Esprit, il leur semblait
être à l'unisson de l'Infini.
D'autres encore y parviennent en face de
telle parole de l'Écriture, quand, sous un
nouvel éclairage, le sens profond s'en
dégage et vient s'insérer, vivant,
dans leur expérience personnelle. Cela peut
s'accompagner d'une manifestation de puissance ou
d'une extase bienheureuse qui envahit le coeur et
l'esprit, indépendamment de toute influence
extérieure ; tandis que dans d'autres
cas ce sera plutôt le sentiment profond de
« la
paix
qui surpasse toute intelligence »
(Phil.
4 : 7).
Notons enfin que cette certitude
s'établit parfois de façon si
graduelle qu'on ne saurait préciser à
quel moment elle s'est imposée. Quelle qu'en
soit la cause, cependant, ou la façon dont
elle s'installe, une chose est certaine, c'est que
notre conception de la vie en est
entièrement transformée : au
lieu de demander à Dieu de nous aider dans notre travail, nous
en arrivons à
comprendre qu'il s'agit de son travail
(4) à
lui,
que nous devons assumer dans la puissance qu'il
donne.
Souvenons-nous que cette connaissance,
qui résulte pour nous de
l'expérience, est toujours le don de Dieu,
Elle ne peut être acquise en faisant appel
aux émotions, c'est l'oeuvre du Saint-Esprit
dans un coeur ouvert pour recevoir, et qui prouve
sa disponibilité par quelque acte de
foi.
Peut-être penserez-vous que je
fais de cette recherche de la guérison
quelque chose de trop difficile, d'inaccessible au
commun des mortels, dont la vie est très
remplie et qui n'ont que peu de temps à
consacrer à la prière et à la
méditation. C'est loin d'être mon
intention, et, bien qu'il me faille insister sur
l'importance de l'expérience personnelle
quand il s'agit pour le chrétien de
progresser, je sais par ailleurs que Dieu est plein
de miséricorde et qu'il regarde au
désir secret de nos coeurs.
Nombreux sont les malades qui ont
été - et qui continuent d'être
guéris, même sans être parvenus
encore au stade de l'expérience personnelle.
De ce fait, ils n'ont pas pu venir avec la foi dans
sa plénitude. Mais si l'on est tant soit peu
sincère dans sa quête de Dieu, et si
l'on cherche honnêtement à courir
l'aventure de la foi, même bien
imparfaitement en réalité, Dieu
accepte le peu de foi qu'on peut lui apporter. Ce
ne sera peut-être pas grand-chose, mais si
c'est « tout ce que nous
possédons », comme il en
était de la veuve et de son obole, il y
répondra par sa grâce, et ce sera
suffisant pour nous combler.
Il va sans dire, toutefois, que si Dieu
accorde souvent ses grâces en réponse
aux élans encore très imparfaits de
la foi, cela ne doit nullement nous inciter
à croire que la foi dans sa
plénitude, telle que saint Jacques la
conçoit, n'est pas nécessaire. Nous
ne devons, au contraire, avoir de cesse que nous y
soyons parvenus.
« La foi est la substance (ou
la ferme assurance) des choses qu'on espère,
la démonstration de celles qu'on ne voit
pas »
(Hébr.
11 : 1). Elle est,
en d'autres termes, prise de conscience du
spirituel. C'est pourquoi la foi est à la
portée de tous. Elle ne dépend pas de
la faculté que nous pourrions avoir de nous
obliger d'admettre ce que ne peut accepter notre
raison, mais de la puissance du Saint-Esprit, qui
nous rend capables de saisir la
réalité du spirituel. Quand nous
parlons de notre foi, nous devons entendre
par là, la foi qui est la nôtre en
vertu seulement de l'usage que nous en faisons. En
elle-même, la foi ne saurait être nôtre. C'est
toujours
celle, en nous, du Christ, car c'est l'Esprit qui
nous rend conscients de la réalité de
l'invisible.
La difficulté, pour la plupart
d'entre nous, n'est pas tant le manque de foi que
son inutilisation pratique. Dieu nous la donne
(5), mais
il
s'agit pour nous de nous en servir toujours
à nouveau, jusqu'à ce que nous le
fassions instinctivement. C'est faute de comprendre
cela au point d'en vivre que tant de gens sont
poussés à parler de leur foi,
ou à se lamenter parce qu'ils n'ont pas la
foi.
Tel enfant peut être
remarquablement doué pour la musique, mais
ce don naturel ne fera pas de lui un musicien
virtuose s'il n'accepte pas des années de
travail persévérant. Nous sommes de
même naturellement en état de
percevoir la réalité spirituelle,
mais cette faculté de perception ne se
développera et ne nous permettra de nous
appuyer sur elle, qu'à la condition d'en
faire un usage aussi patient et
persévérant que celui dont a fait
preuve notre musicien. À quoi cela sert-il
de souhaiter pouvoir jouer du violon comme un
Kreisler, si l'on refuse de s'astreindre aux
longues heures d'étude et
d'entraînement technique sans lesquelles on
ne saurait y parvenir.
C'est ainsi, également, qu'il est
vain pour nous d'aspirer à la foi d'un
George Muller ou d'un Hudson Taylor, à moins
d'être prêts à compter
absolument sur Dieu comme ils le firent, et de nous
comporter en tout selon les exigences du
Saint-Esprit en nous.
Il y a lieu de faire observer, pourtant,
que très rares sont les êtres
doués pour devenir des virtuoses du violon,
alors que « le Père céleste
donne l'Esprit Saint à ceux qui le lui
demandent »
(Luc
11 : 13). Nous ne pouvons
pas tous devenir de grands violonistes, parce que
nous n'en avons pas reçu le don ; mais
tous nous pouvons ressembler à Georges
Muller, à la condition de nous donner
à Dieu comme il le fit.
Nous comprenons mieux, maintenant, ce qu'entend
saint Jacques par « la prière de
la foi ».
Il s'agit d'aller au Père, celui
que nous fait connaître le Christ
Jésus, non pas tant pour demander que pour
recevoir ; ou, si l'on préfère,
pour lui dire que nous sommes là, tout
prêts à recevoir ce dont nous sommes
sûrs qu'il veut nous combler.
Certes, il est beaucoup de choses que
nous aimerions recevoir, mais dont nous ne sommes
pas sûrs qu'il veuille nous les donner. C'est
pourquoi nous nous sentons obligés d'ajouter
à notre prière : « si
telle est ta volonté ». Mais il
s'agit en ce moment de la question de la
guérison, et nous savons qu'à ce
sujet nous n'avons pas à faire de
réserve, parce qu'il nous a fait comprendre
que sa volonté est bien de nous
guérir. C'est parce que nous savons cela par
les données certaines des Écritures,
et parce que nous le connaissons dans la puissance
de révélation de l'Esprit qui est en
nous, que nous pouvons nous approprier la
prière de la foi, cette prière dont
saint Jacques nous dit qu'elle guérit le
malade.
« Tout ce que vous demandez
dans vos prières, croyez que vous l'avez
reçu, et cela vous sera
accordé »
(Marc
11 : 24). Quand notre
prière est conforme à ce que nous
savons être la volonté de Dieu, et
qu'elle est offerte, non seulement au nom de
Jésus, mais aussi avec la foi qui est la
sienne, alors nous sommes sûrs de recevoir.
Nous pouvons donc immédiatement rendre
grâces. Quand bien même
l'accomplissement de la promesse serait
différé - nous en verrons par la
suite quelques-unes des raisons - la foi du
début, celle qui vient de Jésus et
qui inspira notre prière, entretiendra
vivante en nous l'assurance éprouvée
jusqu'à ce que se manifeste la
guérison. Elle nous rendra capables de
persévérer dans l'action de
grâces, même alors qu'aucun signe
d'exaucement n'est encore en vue.
Et puis, il y a aussi ceux qui semblent
voir dans la prière
persévérante une preuve de foi. J'ai
entendu des propos comme ceux-ci dans la bouche
d'un malade : « je crois fermement
à l'efficacité de la prière,
et je crois fermement aussi que Dieu peut me
guérir. J'ai prié pendant des mois
pour cela et je continue de prier. Si je n'avais
pas la foi, je ne le ferais pas. »
À ce malade je suis tenté de
dire : « Si vraiment vous êtes
si bien convaincu que Dieu veuille vous
guérir et qu'il puisse le faire, où
donc est pour vous la nécessité d'une
prière aussi
persévérante ? Pourquoi demander
toujours à nouveau à Dieu ce qu'il
est tout disposé à donner, puisque
vous en êtes sûr ? Pensez-vous
peut-être n'avoir pas réussi encore
à attirer son attention sur votre besoin, ou
pensez-vous peut-être qu'il
soit nécessaire de lui rappeler toujours
à nouveau sa promesse ? La foi vraie ne
s'affirme-t-elle pas plutôt dans l'action de
grâce, après qu'on ait pleinement
exposé à Dieu son besoin de
guérison par la
prière ? »
Les Évangiles nous disent bien
sûr de persévérer dans la
prière, mais c'est essentiellement dans
l'affirmation devant Dieu que nous croyons à
son action providentielle et souverainement
efficace en notre faveur que nous devons
persévérer, beaucoup plus qu'à
essayer avec acharnement de l'obtenir.
On gâche aussi bien souvent sa
prière par toutes sortes de requêtes
détaillées. Quand nous tombons dans
ce travers, la prière devient pour nous
l'occasion de nous appesantir sur nos insuffisances
et nos soucis de toutes sortes, au lieu qu'elle
devrait être celle de lever un regard
paisible et confiant vers le Père, afin d'en
être fortifiés et rassurés.
Plus nous nous arrêtons aux détails
pénibles, et plus nous rendons difficile
notre guérison. Notre esprit est toujours
plus obsédé, en effet, par la chose
même dont nous aspirons à être
délivrés.
L'objet vrai de la prière n'est
pas d'arriver à persuader Dieu de la
légitimité de nos
désirs, afin qu'il en assure la
réalisation ; il est de
« perdre notre vie » dans la
contemplation de la sienne, afin qu'il puisse
remplir nos coeurs du désir de faire sa
volonté. C'est lorsqu'ainsi nous nous
perdons en lui, qu'il peut nous donner l'assurance
de l'accomplissement en nous de ses desseins.
Ainsi, nos prières pour la guérison
cessent d'être des tentatives
répétées d'obtenir de lui quelque chose ;
elles
deviennent des moments de silence intérieur
où l'on apprend à compter sur lui, en
sorte qu'il peut désormais accomplir en nous
ses oeuvres et nous délivrer du mal qui trop
souvent profane le temple de son Saint-Esprit.
Un obstacle fréquent à
l'exaucement de la prière en question est de
demander au-delà de ce que l'on est
réellement en état d'attendre et de
recevoir. Nous pouvons croire fermement qu'il est
possible à Dieu de nous guérir, et
qu'il le veut ; mais il ne nous est pas
facile, pour autant, d'attendre vraiment de lui une
guérison complète et
immédiate. Il y faut une foi totale.
Prenons un exemple. Supposons qu'une
personne ait souffert d'arthrite pendant des mois,
des années peut-être. Elle sait alors
d'instinct que chaque mouvement est l'occasion
d'une douleur aiguë. Il lui est par
conséquent difficile de faire abstraction
d'une donnée constante de
l'expérience, et d'être en état
d'accueillir une délivrance
instantanée. Il ne suffit pas en effet que
le conscient seul s'y emploie il faut que le
subconscient en fasse autant, lui aussi sinon, bien
que le malade puisse faire un essai
téméraire, une peur latente de la
douleur subsistera encore en lui.
Au fond, nous sommes ici
confrontés à une occasion de courir
l'aventure de la foi. Il se peut que l'esprit ne
soit pas préparé encore à
prévoir la disparition définitive de
toute souffrance, mais il devrait être en état de
prévoir du moins un répit temporaire.
À quelqu'un qui souffre, je dirais, par
conséquent : « Demandez que
cette souffrance vous soit ôtée
pendant dix minutes, par exemple ; et puis,
fixez aussitôt votre attention sur quelque
chose qui la captive au point de la
détourner de vous-même. Priez aussi
pour d'autres personnes qui souffrent, ou lisez
tels psaumes de louanges ; - et vous vous
sentirez soulagé. Si les symptômes
douloureux reparaissent, répétez
votre acte de foi et, dans la mesure où vous
serez aidé, prolongez la période de
répit ».
J'ai moi-même constaté que
la douleur occasionnée par un abcès
dentaire avait aussi été
soulagée au point que le sommeil
était revenu avant la fin de la
troisième phase. Il va sans dire qu'on
n'éprouvera aucun soulagement aussi
longtemps qu'on épiera - ou qu'on attendra -
la disparition de la souffrance. Lorsqu'on a
prié, il faut simplement croire assez
à l'exaucement de cette prière pour
ne plus avoir à se mettre en peine à
ce sujet. De pareilles tentatives partielles se
révèlent utiles pour parvenir
à la foi qui, elle, est à même
d'accueillir la guérison
complète.
De toute façon, rappelons-nous
qu'on ne saurait se jouer du subconscient. Il
n'obéit d'ailleurs pas à la raison.
Il s'impose brutalement, automatiquement pour ainsi
dire. Une idée fixe saisit toutes les
occasions pour s'imposer, et, une fois partie, elle
suit son chemin - à moins qu'une idée
plus forte ne vienne la remplacer. Nous comprenons
maintenant que l'appréhension toute
instinctive de la souffrance ne puisse être
surmontée que par la Vérité.
Or, la Vérité qui guérit s'installe dans la
conscience et la subconscience quand le
Saint-Esprit impose la réalité de la
guérison divine au coeur aussi bien
qu'à la raison. Mais les tentatives
partielles de la foi ont souvent
préparé le terrain.
En d'autres termes, il ne suffit pas de
dire que nous croyons si, dans le même temps,
nous avons le sentiment secret qu'une crainte
quelconque se dissimule au fond de notre coeur.
S'il en est ainsi, nous ne devons pas dire
seulement : « Seigneur, je
crois », mais nous devons ajouter, comme
le père de l'enfant démoniaque,
« viens au secours de mon
incrédulité » (Marc
9 : 24), et lui remettre notre crainte
secrète avec la certitude que le
Saint-Esprit peut lui ôter tout pouvoir. Nous
serons alors en état de recevoir, parce
qu'en état de vraie
réceptivité.
Une des preuves les plus convaincantes que la
maladie est d'origine et de nature mauvaise, c'est
qu'elle rend souvent la prière difficile,
sinon impossible. Ce sont alors les proches ou les
amis du malade qui doivent avoir recours à
la prière de la foi. Dans de nombreux cas,
les amis peuvent plus facilement faire preuve de
foi, et prieront par conséquent avec plus
d'efficacité, que ne peut le faire le malade
lui-même. Leurs facultés, en effet, ne
sont pas diminuées par la maladie.
Quand, par ailleurs, on prie pour un
être cher, on risque fort - en raison
même de l'affection qu'on lui porte - d'entretenir
une
atmosphère lourde d'angoisse, de sorte qu'il
sera environné de crainte au lieu de foi. Je
m'étendrai davantage à ce propos dans
un autre chapitre, mais je tiens à signaler
dès maintenant ce danger. Lorsque nous
prions pour les autres, il est essentiel que nous
fassions tout pour chasser l'angoisse : il
faut en particulier que nous évitions
d'être écrasés nous-mêmes
par la pensée de leurs souffrances. Il
s'agit donc d'entourer nos malades de
pensées qui les soutiennent, et non de les
déprimer avec des pensées
négatives. Enfin, si nous les apportons au
Christ, nous ne devons pas seulement croire qu'il
en aura pitié, mais qu'il les
guérira.
Il y a quelque temps, il était
question dans la revue Science of Thought d'une malade qui
n'avait plus de tympan et qui
souffrait, en outre, d'un ramollissement de l'os
environnant. Un an plus tard, son médecin
fut stupéfait de constater qu'elle avait un
tympan absolument normal. Sa fille avait
prié pour elle ; mais au lieu de le
faire en s'apitoyant sur son sort, et en ne pensant
qu'à son infirmité, elle
s'était efforcée de se la
représenter avec une oreille en parfait
état et conforme au plan divin. La
prière de la foi avait permis à la
grâce divine d'opérer la
guérison.
Je ne puis me défendre du sentiment que
c'est une erreur, de la part de ceux qui
intercèdent en groupe pour un malade,
d'énumérer minutieusement les divers
aspects de son mal. Sans doute ne suffit-il pas de
le nommer. Il faut « personnaliser son
cas en disant dans les grandes
lignes de quoi il s'agit, mais la dernière
chose à faire est de fixer la pensée
du groupe sur le mal lui-même, en tant que
mal bien défini.
Il est des gens qui vous disent qu'ils
ne peuvent prier efficacement s'ils ignorent ce
dont souffre, d'une façon précise, le
malade. Je crois pour ma part que c'est une erreur.
En fait, l'efficacité de la prière
est souvent compromise, sinon entièrement
éliminée, par une information de
cette nature, car alors, si la maladie est de
celles qu'habituellement on qualifie d'incurables,
ou du moins de très graves, la prière
risque fort d'en être influencée et de
n'être plus qu'un acte d'espérance,
sinon même de désespoir, plutôt
qu'un acte de foi. Notre prière pour les
autres doit revêtir un caractère
positif et non négatif ; elle doit
s'arrêter à la perfection à
quoi Dieu les appelle, et non à leur
condition imparfaite du moment. Il ne saurait y
avoir de pensée plus haute, pour inspirer
cette prière, que de demander pour le malade
la grâce d'être recréé
à l'image du Christ, aussi bien dans son
corps que dans son âme, puisque cela inclut
tous les besoins de l'homme et fait confiance
à Dieu pour le reste.
Il est en réalité tout
à fait déplacé d'exposer
à Dieu notre sentiment personnel, et de lui
dire ce que nous croyons être bon pour celui
qui a besoin de notre prière. Il sait cela
mieux que nous. Et puis que de prières
insolites doivent lui être
présentées avec ferveur, pour la
guérison de maladies inexistantes, par des
gens induits en erreur par un mauvais
diagnostic !
En somme, intercéder, c'est
s'offrir à Dieu pour qu'à travers
nous sa grâce puisse atteindre les autres.
Lorsque nous parlons du Christ comme de notre
intercesseur, nous ne voulons pas dire qu'il se
tienne entre un Dieu courroucé et
nous-mêmes, plaidant pour obtenir notre
pardon. Nous voyons en lui, au contraire, le
Rédempteur, celui dont la passion a
brisé la barrière dressée par
le péché, qui se tient effectivement
entre Dieu et nous, mais afin de nous conjoindre et
permettant à l'amour du Père de se
répandre sur ses enfants. Et quand,
nous-mêmes, nous prions en intercesseurs,
nous entrons, comme autant de maillons, dans une
grande chaîne, ou, si l'on
préfère, nous offrons notre coeur
pour qu'à travers lui l'amour qui
guérit puisse atteindre ceux pour lesquels
nous prions. C'est un peu comme si nous mettions
une main dans celle de Jésus et l'autre dans
celle de notre ami, bien assurés que l'amour
divin atteint cet ami à travers nous. Nous
prendrons bien garde, par conséquent, que
rien en nous ne vienne contrarier le
courant.
J'ai l'expérience de diverses
méthodes d'intercession, et j'en suis venu
à la conclusion que la meilleure est celle
que nous pratiquons journellement dans notre petite
chapelle (6). Nous commençons par
énumérer distinctement les noms de
ceux en faveur desquels nous recherchons l'aide
d'En-Haut ; cela, sans aucun détail
particulier, ni conseils sur ce que nous croyons
devoir convenir aux uns ou aux autres. Ensuite,
nous observons ensemble un moment de silence, avec
la certitude que Dieu
se
sert de nos coeurs ainsi offerts pour
répandre sa grâce sur ceux que nous
lui présentons, afin que se réalise
son dessein, qui dépasse en perfection tout
ce que nous pourrions demander de meilleur.
Pareille intercession ne saurait
demeurer sans effet. Aussi bien, nous ne demandons
pas à Dieu de faire quelque chose de
particulier, avec un doute éventuel quant
à la possibilité d'être
entendus ou exaucés. Nous nous offrons
à Dieu, tout simplement, afin qu'il dispose
de nous pour que se réalise son dessein.
Peut-être ne pourrons-nous pas plus mesurer
ce qui en résultera que nous ne pouvons
mesurer la croissance d'un arbre jour après
jour. Mais, de même que nous savons que jour
après jour le soleil a lui sur l'arbre et
qu'en conséquence la croissance a eu lieu,
de même aussi, nous savons que chaque fois
que notre coeur s'est offert à la
grâce de Dieu en faveur des malades, le
soleil de son amour a brillé sur
eux.
La question de savoir s'il est utile que
nous continuions à prier pour une personne,
quand il ne semble pas y avoir d'exaucement, ne se
pose même pas, car nous savons que Dieu
daigne se servir de nous. Si nous continuons de
nous offrir toujours pour être
utilisés par lui, la croissance se
poursuivra même imperceptible. Il est
essentiel, pourtant, que nous ayons soin de laisser
la grâce passer librement et qu'aucun doute,
qu'aucune crainte ne vienne obstruer la voie.
Revenons à la promesse : « La
prière de la foi sauvera le malade, et le
Seigneur le relèvera... »
(Jacq.
5 :15).
Quand il s'agit de maladies mentales, la
prière de la foi offerte
par de vrais intercesseurs est d'une importance
capitale. Comment douterions-nous de
l'efficacité de la guérison
qu'apporte le Christ dans toutes les affections de
l'esprit ou du corps dont l'homme peut être
victime ? Mais, pour nous en tenir aux
désordres mentaux - qu'ils soient dus
à des perturbations biochimiques affectant
le cerveau ou à des phénomènes
de « possession » par des
entités mauvaises - ils ressortissent au
plan de la Rédemption. Notre Seigneur a
déclaré en effet, en parlant des
signes qui accompagnent la foi : En mon nom,
ils chasseront les démons »
(Marc
16 : 17). Nous avons ainsi
la certitude que le ministère de la
guérison doit apporter la délivrance
à ceux qui sont possédés
mentalement aussi bien qu'à ceux qui sont
mentalement malades pour des raisons biochimiques.
Ici, du reste, nous avons affaire à beaucoup
de malheureux qui sont bien incapables de prier
pour eux-mêmes et qui, par conséquent,
ont besoin de toute l'aide que peut procurer
l'intercession. Encore faut-il que cette
intercession soit de bon aloi, qu'elle s'inspire
uniquement de ce qu'il y a de plus haut dans
l'Amour divin qui guérit et qu'elle soit
prête à faire preuve, pendant
longtemps s'il le faut, de patiente
persévérance sans être
encouragée par une amélioration
visible.
Vous pensez peut-être que je fais
preuve moi-même d'un manque de foi
véritable dans la puissance de
guérison du Christ en spécifiant que
la guérison peut être longue à
venir dans des cas comme ceux auxquels je viens de
faire allusion. Ce n'est absolument pas que j'aie
le moindre doute quant à
cette puissance de
guérison ; mais ce sont les
circonstances qui en rendent la manifestation
difficile. C'est une nécessité
absolue de maintenir les malades mentaux sous
surveillance, et c'est pourquoi ils sont
hospitalisés dans des établissements
spéciaux. Il n'est pourtant rien de plus
contraire à leur guérison que
l'atmosphère inévitablement
créée par la promiscuité qui
en résulte. Pour le moment, on ne saurait y
remédier, de sorte que ces malheureux ont
d'autant plus besoin de l'aide que peut leur
apporter la prière. L'Union de
prière pour les malades mentaux
(7) fait
énormément déjà pour
eux en organisant l'intercession. Elle s'efforce en
ce moment d'assurer dans tout le pays cette aide
spirituelle aux hospitalisés. On cherche
à grouper le plus grand nombre possible
d'intercesseurs, de façon à mettre
les malades au bénéfice d'une
intercession régulière,
systématique, en formant pour ainsi dire un
cercle de prière autour de chaque
établissement.
Il y a là une occasion
d'accomplir un excellent travail
(8).
Chapitre précédent | Table des matières | Chapitre suivant |