Colossiens
1/9
à 14
L'apôtre Paul peut affirmer selon la
vérité qu'il ne cesse de prier Dieu
pour les Colossiens, ces chrétiens qu'il ne
connaît pas encore. Ceux-ci n'ont pas vu
« son visage en la chair »
(Col
2/1). L'Apôtre
« a été
informé » de leur foi en
Jésus-Christ et de leur charité
(Col.
1/4) ; et c'est depuis le
jour où il a été
informé par Epaphras de cette merveilleuse
action de l'Esprit à Colosses, qu'il prie
pour cette église avec
persévérance.
Prier pour des frères en la foi,
c'est la plus belle et la plus utile manifestation
de l'amour ; c'est, en effet, appeler sur eux,
à coup sûr, des grâces nouvelles
et abondantes, c'est contribuer à les
préserver, c'est les aider à
croître. Prier pour des frères, c'est
donc le réflexe de l'amour fraternel. Mais
la prière d'un enfant de Dieu ne se limite
pas à l'intercession en faveur des
frères ou des soeurs qu'il connaît
selon la chair, qu'il a vus ; elle va
facilement au-delà du cercle des personnes
connues et s'élève aussi en faveur
des bien-aimés dont le visage n'a jamais
été vu. L'amour fraternel
connaît de larges envolées, et ne peut
être assujetti à une connaissance
selon la chair. Il a autant de force en dehors de
cette connaissance qu'au-dedans. D'ailleurs,
même ceux que nous connaissons selon la chair
et dont la présence peut toujours nous
réjouir, avant tout, nous les connaissons
à travers le lien de l'esprit
(2
Cor 5/16).
L'apôtre Paul, informé de la
vie qui anime l'église de Colosses, prie
pour ces frères inconnus de lui, et c'est
ainsi que d'abord et essentiellement s'exerce son
ministère. Un pasteur n'est pas seulement
celui qui instruit où exhorte en
prédicateur ; il est celui qui combat
pour le troupeau qui lui est confié dans une
ardente et une incessante prière. Les
grâces reçues ont-elles
été abondantes et variées,
qu'il faut encore et toujours demander à
Dieu ? Il faut lui demander la conservation et
le renouvellement des grâces et des dons
obtenus.
Or, voici le très haut objet que vise
particulièrement la prière de
Paul : une double connaissance. La
connaissance de la volonté de Dieu, et la
connaissance de Dieu. Pour vivre à la
satisfaction du Seigneur, il importe, en effet, de
connaître. La foi saisit la
connaissance ; elle s'en empare. La
première des deux connaissances
mentionnées par l'auteur de
l'épître, est celle qui permet
d'entrer dans la révélation de la
volonté de Dieu. Il ne saurait être
question d'accomplir la volonté de Dieu sans
la connaître avec exactitude et par
intelligence spirituelle. Trop souvent,
hélas, cette connaissance se trouve en
partie négligée. Il arrive que l'on
se contente de certains éléments de
connaissance, et que, arrêtant là
notre pénétration de la
volonté de Dieu, nous demeurions dans
l'impossibilité d'accomplir cette
volonté. Pourtant, l'accomplissement de la
volonté de Dieu est la base de la vie de
foi. Aucune sanctification n'est possible s'il n'y
a pas accomplissement de la volonté de Dieu,
et si, par conséquent, cette volonté
n'est pas bien connue. Que disait le Seigneur
Jésus ? « Quiconque fait la
volonté de Dieu, celui-là est mon
frère, ma soeur, et ma
mère »
(Marc
3/35). La 1ère
épître de Jean affirme aussi :
« Celui qui fait la volonté de
Dieu demeure éternellement »
(2/17).
La prière
enseignée comme modèle par
Jésus ne contient-elle pas ce voeu :
« que ta volonté soit faite sur la
terre comme au ciel »
(Mat
6/10). Ainsi, il est
indispensable de connaître la volonté
de Dieu pour pouvoir l'accomplir.
Mais il faut connaître de telle sorte
qu'il soit possible au chrétien de conformer
ses actes et ses paroles à la volonté
de Dieu. Il faut donc une connaissance
« intelligente », une
connaissance qui soit une
« sagesse ». En toute occasion
petite ou grande de la vie courante ou du
témoignage, il convient de pouvoir disposer
d'une pensée capable de bien diriger les
actes ou les paroles, comme tout
comportement ; de les bien diriger,
c'est-à-dire, de les conformer à la
volonté de Dieu. Or, les circonstances que
nous rencontrons chaque jour varient sans cesse, et
elles exigent donc de notre coeur des directions
adaptées, des directions elles-mêmes
variées. Notre coeur doit alors être
apte à concevoir, en chaque circonstance,
les directions convenables permettant
l'accomplissement de la volonté de
Dieu.
L'Évangile n'est pas un code, mais
une puissance et une pensée (la
pensée de Christ) ; il ne
prétend pas régler tous les
détails de notre vie ; ce serait
impossible ; il veut communiquer aux croyants
une connaissance qui soit la science de toujours
pour mettre en accord leurs actes avec la
volonté de Dieu, si diverses que soient les
circonstances qui s'offrent à eux. Cette
science qui doit remplir les chrétiens
(Col
1/9), c'est-à-dire qui
doit être reçue en la totalité
de ses moyens, n'est autre chose que la sagesse
même de Dieu, et que cette intelligence
qu'apporte l'Esprit. Adam les a portées en
lui avant la chute ; le dernier Adam,
Jésus, les portait de façon parfaite,
et les mettait à l'oeuvre devant chacune des
circonstances qu'il rencontrait, et c'est ainsi
qu'il pouvait faire toujours ce qui était
agréable à Dieu Le Père. On
comprend pourquoi l'apôtre Paul demande
à Dieu que les chrétiens de Colosses
aillent jusqu'à la plénitude de la
connaissance de la volonté de Dieu, et que
cette connaissance ne soit pas
cérébrale, un simple enregistrement
de la mémoire, une accumulation de
préceptes rigides, mais, au contraire,
qu'elle vienne en eux, dans leur coeur, comme une
sagesse et une intelligence venues de l'Esprit, les
rendant capables d'un accomplissement de la
volonté de Dieu ininterrompu et parfait. Si
la Bible nous rapporte cette prière de Paul,
c'est pour susciter en ses lecteurs le puissant
désir de posséder une telle
connaissance.
Nous avons dit que la volonté de Dieu
ne s'exprime pas, dans l'Évangile, sous la
forme d'une collection de préceptes rigides
qu'il suffirait d'apprendre par coeur, et
d'appliquer à la manière des
pharisiens. Mais alors, sur quoi porte la
volonté de Dieu ? En quoi
consiste-t-elle ? Nous pouvons établir
deux ordres de choses qui se partagent la
volonté de Dieu telle qu'elle nous est
révélée ; ce sont :
- 1° les choses que Dieu veut obtenir de nous ;
- 2° les choses qu'Il veut nous donner et dont Il veut que nous soyons pourvus.
Que veut-Il obtenir de nous ; que
pouvons-nous Lui apporter ? Notre foi, qui
prend possession de ce que Dieu nous donne, qui
s'approprie le salut et la plénitude de
l'esprit ; notre fidélité, notre
obéissance, notre piété (la
grâce nous y aide).
Que sont les choses dont Dieu veut que nous
soyons pourvus ? La plénitude de
l'Esprit, la sanctification, la communion, le fruit
porté.
Cette connaissance de la volonté de
Dieu interviendra-t-elle immédiatement dans
le coeur de l'enfant de Dieu ? Non pas. Lors
de la nouvelle naissance, les
ténèbres du coeur sont rompues par
l'apparition d'une lumière qui fait
resplendir la « connaissance de la gloire
de Dieu sur la face de Christ »
(2
Cor 4/6). La vérité
se présente et affranchit celui qui la
reçoit, par l'effet de sa foi. Il obtient
donc, comme spontanément,
une connaissance de la vérité. Il
sait quelle est sa propre nature, il voit le
néant en lui-même et son état
de perdition ; puis il voit Christ, il
comprend le grand besoin qu'il a de ce
Sauveur ; il se repent, il saisit le pardon et
l'amour de Dieu en Christ. Cependant, il n'est pas
immédiatement apte à lutter, et il
lui faut acquérir l'expérience d'une
vie de soumission à la Parole de Dieu
(l'expérience de la Parole de justice - Héb
5/11 à 14). Et
pour cela, il lui faut recevoir non seulement les
premiers rudiments des oracles de Dieu, mais
l'enseignement de cette Parole de manière
progressive. Il est un enfant, et doit
croître pour devenir un homme fait. Paul
demande à Dieu que les Colossiens soient
remplis de la connaissance de la volonté de
Dieu, qu'ils l'obtiennent, apportée par
l'Esprit, dans toute la mesure qu'il est
présentement possible d'atteindre.
Tout est objectif dans la Parole de Dieu,
et, par conséquent, dans les desseins de
Dieu ; si bien que la connaissance de la
volonté de Dieu ne peut qu'engendrer
d'heureux résultats. Ceux-ci se trouvent
énumérés dans les versets 9
à 11 de notre texte :
1° Marcher d'une manière digne du Seigneur. Marcher, c'est utiliser le temps, la vie, les circonstances qui se présentent à nous pour accomplir la volonté de Dieu, pour « vivre l'Évangile ». Cette marche devient « digne » du Seigneur, si elle emprunte les voies de la sagesse de Christ, si elle ressemble à celle de Christ (« Celui qui dit qu'il demeure en Lui doit marcher aussi comme Il a marché Lui-même » (1 Jn 2/6).
Tout dans cette marche est l'accomplissement de la volonté de Dieu, selon l'intelligence spirituelle qui permet de conformer chaque action ou parole prononcée à cette volonté. Il n'y a que la perfection qui soit digne de Dieu et c'est donc jusqu'à la perfection qu'ira l'accomplissement de la volonté de Dieu, par le moyen d'une connaissance utilisée en toute sagesse et intelligence spirituelle.
2° Portant des fruits en toutes sortes de bonnes oeuvres. Paul dira ailleurs : « Nous sommes son ouvrage, ayant été créés en Jésus-Christ pour de bonnes oeuvres, que Dieu a préparées d'avance, afin que nous les pratiquions » (Ep 2/10). L'Épître aux Hébreux nous conseille de veiller les uns sur les autres pour nous exciter à la charité et aux bonnes oeuvres (Héb 10/24). L'entière connaissance de la volonté de Dieu ne peut, en effet, que produire ces bonnes oeuvres que, autrement, nous perdrons de vue. L'expression « bonnes oeuvres » suscite dans notre esprit quelques réticences, car elle touche de près la doctrine catholique romaine du salut par les oeuvres. Laissons de côté les erreurs, mais ne nous privons pas pour autant d'une notion qui figure dans la Sainte Écriture en de pressantes recommandations. Il y a quelque chose à bien saisir : si la connaissance de la volonté de Dieu nous remplit, nécessairement les bonnes oeuvres apparaîtront ; elles se feront toutes seules si l'on peut dire ; elles seront provoquées par une poussée de l'Esprit. Lisons encore Matthieu 5/16, où nous voyons que la lumière que rayonne le disciple de Christ accompli s'apparente aux bonnes oeuvres, lesquelles traduisent pratiquement l'amour de Dieu et du prochain.
3° Fortifiés à tous égards par sa puissance glorieuse en sorte que vous soyez toujours et avec joie persévérants et patients. Tout ce que demande l'apôtre à Dieu pour l'église de Colosses a pour aboutissement l'accroissement de force des membres de cette église. N'est-il pas écrit que celui qui a les mains pures se fortifie de plus en plus (Job 17/9). L'homme intérieur se fortifie dans une marche que guide la connaissance de la volonté de Dieu. Et cela, non pas partiellement, non pas en certains cas, mais « à tous égards » ; ce qui veut dire que la force que Dieu donnera se répartira à tous les besoins de la vie chrétienne, et interviendra en toutes occasions pour apporter au chrétien l'opportune puissance qui lui fera rendre un témoignage de foi, par oeuvres et par paroles. Qu'en résultera-t-il ? un comportement chrétien fort, où se manifesteront la patience envers tous, comme devant l'épreuve, ou dans l'attente des exaucements, la persévérance, la fermeté, la joie.
Après la connaissance de la
volonté de Dieu, l'apôtre mentionne la
connaissance de Dieu. Cette seconde connaissance
est celle de la Personne de Dieu. Elle est une
connaissance intime de Dieu, seulement
réalisée par une vie de communion.
Elle est associée à l'accomplissement
de la volonté de Dieu, et ne peut exister
dans cet accomplissement. En effet :
« Si nous gardons ses commandements,
par-là nous savons que nous l'avons connu.
Celui qui dit : je l'ai connu, et qui ne garde
pas ses commandements est un menteur et la
vérité n'est point en lui »
(1
Jn 2/3-4). Garder, c'est conserver
pour accomplir. Ainsi, il n'y a de connaissance de
Dieu que par le fait d'une obéissance
à Sa Parole, selon une connaissance
entière de Sa Volonté. L'une de ces
connaissances dépend de l'autre, et c'est
pourquoi l'apôtre Paul les associe dans les
versets 9
et 10 de Colossiens 1. Et cette
connaissance de Dieu fait croître le
chrétien, l'élève, comme ce
fut le cas, notamment, pour Josué que Dieu
élève, parce qu'il est avec lui
(Jos
3/7).
Les Colossiens, comme d'autres
églises, sont les premiers destinataires des
enseignements de Paul, mais nous sommes les
destinataires actuels de ces mêmes
enseignements. Recueillons-les, méditons-les
et engageons-nous dans la voie d'une
plénitude de connaissance de la
volonté de Dieu, que nous utiliserons
humblement par le moyen de la sagesse et de
l'intelligence spirituelle.
On oublie trop facilement cette affirmation
pourtant essentielle : L'Éternel a
donné des lois. Et ces lois établies
par Dieu sont assurées de permanence ;
ce qui d'ailleurs est le propre des lois. Qu'est-ce
qu'une loi ? Le dictionnaire nous dit que l'on
appelle ainsi chacune des règles auxquelles
sont assujettis les phénomènes de la
nature. La loi a, en effet, pour objet d'imprimer
aux choses ou aux êtres vivants un certain
comportement dirigé. Un métal, par
exemple, ne se comporte pas n'importe comment
lorsque changent les conditions extérieures
où il est placé, mais il se
contracte, se dilate, change d'état
(liquide, solide ou gazeux), conduit plus ou moins
l'électricité, la chaleur ou les
vibrations sonores, dans des conditions qui lui
sont particulières, et qui ne varient pas.
D'autre part, les phénomènes si
nombreux que l'homme s'est ingénié
à connaître, se produisent dans des
conditions également déterminables,
parce que toujours les mêmes. Ainsi, la
nature et la vie obéissent à un
ensemble de directions absolues que l'on appelle
lois ou propriétés. Or, le hasard
pourrait-il être l'auteur de ces directions
impératives et constantes ?
L'incrédule lui-même n'ose pas
répondre oui ; il biaise. Peut-on dire
alors que les lois et propriétés qui
régissent les matériaux, ou le
mouvement des astres, ont toujours existé,
et que personne ne les a constituées ?
Les matérialistes le disent ; aussi
leur faut-il admettre que la matière est
incréée, ce qui est aussi absurde que
de faire intervenir le hasard.
Non, les lois, par leur existence
même, postulent un Auteur ! Elles sont
justement le témoignage d'un ordre, d'une
organisation de la nature, et celle-ci suppose un
organisateur. Il faut également admettre que
l'Auteur des lois invariables que nous connaissons
est toujours présent pour veiller à
leur invariabilité. Un passage de
Jérémie
(31/36)
nous montre que la permanence
des lois de l'univers dépend tout autant de
Dieu que l'existence du peuple d'Israël. Donc,
la continuation des lois, leur inviolabilité
sont dépendantes de Dieu, de Sa
volonté, et par conséquent de Son
existence. Si Dieu était mort comme
Nietzsche l'a proclamé, il n'y aurait plus
de lois, ni même de matière, ni de
vie ! Les lois organisent la création
et maintiennent toutes choses en existence ;
c'est ce qu'exprime le Psaume
119, verset 91 :
« c'est d'après tes lois que tout
subsiste aujourd'hui, car toutes choses te sont
assujetties ». Toute la création
se trouve placée dans un total
assujettissement à Dieu, qui maintient
constantes les lois qu'Il a faites en vue
d'organiser et de soutenir les choses et les
êtres. L'Épître aux Colossiens
parle aussi du maintien en existence des choses
créées : « Il est
avant toutes choses et toutes choses subsistent en
Lui »
(1/17).
Dieu
crée, et, en
outre, Il garde, Il soutient tous les objets et les
êtres de sa création ; et c'est
là l'office des lois. Dieu ne viole pas les
lois qu'Il a faites, car alors ce serait
transformer Sa création ; Il ne les
viole pas, ce qui signifie qu'Il leur conserve une
parfaite constance, par Sa volonté, par Sa
puissance ; c'est donc un miracle de chaque
seconde.
Les hommes devraient reconnaître
cela ; eux qui recherchent le pourquoi des
faits qu'ils constatent. Ils s'évertuent
à découvrir les
propriétés des corps et les lois qui
gouvernent les phénomènes de la
nature ; ils les expriment
mathématiquement, afin de les utiliser
à construire des machines. Avez-vous
pensé à ce que deviendraient ces machines, si les
lois de
la
nature s'avisaient de changer ? Elles
cesseraient aussitôt de fonctionner et tout
l'acquis des techniques serait rendu vain.
Rappelons-nous que si Dieu a donné des lois
à la matière, Il en a aussi
donné à la vie et à Sa
créature, l'homme. Où sont ces
lois ? Dieu les a écrites dans le
coeur ; ce sont les lois de la justice, et la
justice de Dieu conduit à la vie. Ce sont
les lois de la vie. Si nous aimons la vie, gardons
les lois de Dieu, aimons-les ; employons notre
amour à les observer ; elles sont
inviolables. Retenons ce verset « La loi
de l'esprit de vie en Jésus-Christ m'a
affranchi de la loi du péché et de la
mort »
(Ro
8/2).
Captivante et puissamment instructive est
l'histoire de Jonas. Son extraordinaire aventure le
place dans les situations les plus diverses. Nous
le voyons s'enfuir à Tarsis, loin de la face
de l'Éternel, tant la mission d'aller
à Ninive le rebute. Croyant pouvoir
échapper à l'appel de Dieu, il
s'embarque et vogue vers un cap aussi
éloigné que possible du lieu
où la Parole de l'Éternel l'avait
envoyé. La direction qu'il emprunte ainsi se
situe à l'opposé de celle que Dieu
lui avait prescrite. Jonas n'a pas prévu le
drame qui l'attend ! Après avoir
été découvert comme le
responsable de la terrible tempête qui menace
le bateau et son équipage, il est
jeté à la mer et englouti dans le
ventre d'un grand poisson. Il y reste trois jours
et trois nuits. Là, ayant gardé une
entière conscience, il prie. C'est là
sa première prière. Sur le bateau, il
dormait ; il était dans l'esprit de son
refus d'obéir aux ordres de
l'Éternel ; il ne ressentait aucun
besoin de prier. Le pilote du navire lui avait
dit : pourquoi dors-tu ? invoque ton
Dieu ! Mais Jonas n'avait pas su, ni pu
prier ; son âme était remplie de
lui-même ; les habitants de Ninive que
Dieu entendait prévenir par son moyen lui
étaient indifférents, comme
l'étaient aussi les hommes du navire.
N'ayant pas voulu partager la miséricorde de
Dieu, il se sentait incapable d'aimer et de
s'attacher à son prochain. Mais, dans le
ventre du poisson, Jonas sent la mort le tenir de
bien près. Cette liberté qu'il
s'était donnée en fuyant sa mission,
bien vite, elle lui avait été
ôtée. En si peu de temps, il
était passé de la liberté
à la prison. Et quelle prison ! Le
ventre d'un poisson ! Là, il prie
l'Éternel. Dans sa détresse, il
invoque son Dieu. Son coeur est humilié et
rempli d'angoisses. On peut appliquer à
Jonas ces versets : « les
insensés, par leur conduite coupable et par
leurs iniquités, s'étaient rendus
malheureux... ils touchaient aux portes de la mort.
Dans leur détresse, ils crièrent
à l'Éternel, et Il les délivra
de leurs angoisses »
(Ps
107/17-19). Faut-il que ce soit
seulement dans la détresse que l'homme soit
porté à invoquer son Dieu ?
Cette première des deux
prières que relate le récit de Jonas
est une excellente prière. Tout d'abord,
c'est une prière de foi, car l'exaucement y
est considéré comme acquis :
« Il m'a exaucé » ;
« tu as entendu ma
voix » ; « tu m'as fait
remonter vivant de la fosse » ;
« ma prière est parvenue
jusqu'à toi ». Pourtant, lorsqu'il
prie ainsi, Jonas se trouve dans le ventre du
poisson. Il appelle la délivrance, mais sa
foi l'a saisi déjà. Or, c'est ce que
le Seigneur Jésus-Christ nous
enseigne : « Tout ce que vous
demanderez en priant, croyez que vous l'avez
reçu, et vous le verrez
s'accomplir ». La foi doit donc pouvoir
se manifester par une solide assurance
d'exaucement, au cours même de la
prière. Il y a là un niveau à
atteindre. La foi peut être cultivée
et parvenir à ce niveau. Ensuite, la
prière de Jonas est une prière
inspirée. Pourquoi peut-on l'affirmer ?
Parce qu'elle entre pleinement dans l'analogie de
la foi, étant en tous points
harmonisée avec la Parole de Dieu. Il ne
peut qu'en être ainsi de toute prière
inspirée. « Faites en tout temps
par l'Esprit toutes sortes de prières et de
supplications »
(Eph
6/18). Or, l'Esprit, Le
Consolateur, ne parle pas de lui-même, mais
Il prend de ce qui est à Christ ; Il
prend la Parole annoncée et la rappelle
opportunément pour chacun des besoins de la
prière. Une prière dite sans
l'inspiration de l'Esprit ne possède pas ce
plein accord avec la Parole de Dieu, même si
les mots ou les expressions employées
figurent dans la Bible (ce qui n'est nullement une
épreuve d'inspiration) ; de plus, elle
n'a pas l'opportunité utile. Seul, en effet,
l'Esprit peut exprimer nos véritables besoins, et
cela, selon la
vérité. Dans la prière de
Jonas, on retrouve des éléments de
l'Écriture, opportunément
utilisés ; ce qui montre que la
pensée de Jonas emprunte les voies
déjà tracées par la Parole de
Dieu, disons par d'autres hommes (inspirés
pour rédiger l'Écriture) ; mais
ces hommes inspirés ont ressenti ce qu'ils
ont exprimé par l'Esprit. On retrouve, par
exemple le Ps
120, verset 1 ; la
pensée du début du Ps
40. Cette prière de foi,
inspirée par l'Esprit, se fait l'arme
invincible contre la mort.
On peut encore noter une correspondance
entre la prière de Jonas et les
prières et supplications du Seigneur, celles
mentionnées en Hébreux 5/7 et 8.
L'apôtre Pierre déclare
(1
Pi 1/11) que les prophètes
de l'ancienne alliance ont fait de la grâce
du salut l'objet de leurs recherches, et que
l'Esprit de Christ qui était en eux
attestait d'avance les souffrances de Christ et la
gloire dont elles seraient suivies. Ainsi en est-il
de Jonas dans le ventre du poisson. La
prière de Jonas obtient son exaucement parce
qu'elle prélude au combat victorieux de
Christ contre la mort. Nous-mêmes, qui sommes
de Christ, remportons une victoire dont Il nous a
procuré l'assurance, à cause de la
sienne. Ne combattons donc pas seuls, mais avec
Lui, et par Lui. Ainsi, si comme Jonas, en
ce
chapitre 2 de son livre, nous
savons nous livrer à la foi, ainsi
qu'à l'Esprit de Dieu, nous pourrons tout
surmonter, et vaincre, en toutes circonstances, les
puissances de la mort.
Il est étonnant de retrouver Jonas,
au chapitre
4, priant d'une toute autre
façon. Les circonstances ont
changé ; Jonas s'est rendu à
Ninive ses avertissements ont porté ;
toute la ville, roi en tête, s'est repentie
et Dieu a fait grâce. Nous voudrions bien que
nos témoignages obtiennent un si beau
succès ! Mais lui, Jonas, il est
mécontent, et même irrité. Pour
le satisfaire, l'Éternel aurait dû ne
pas donner à la parole de Jonas le
caractère d'un avertissement, susceptible
d'éviter le jugement, mais en faire un
arrêt sans appel. Ce qu'il lui fallait c'est
la destruction de Ninive. Il a annoncé une
destruction qui ne s'accomplit pas, et son
amour-propre en est mortifié. Il ne comprend
pas Dieu ; il prend position contre la
miséricorde de Dieu. Mieux valait la mort de
milliers d'hommes et d'animaux, plutôt qu'un
froissement d'amour-propre, au gré de Jonas.
Lui, a bénéficié de la
miséricorde de Dieu, mais cette même
miséricorde, il ne la consent pas aux autres
hommes ! Quelle méchanceté, et
cela, par orgueil !
Jonas implore à nouveau
l'Éternel
(chapitre
4), mais pour dire
quoi ? pour censurer la décision
miséricordieuse de Dieu :
« Je savais que tu es un Dieu
compatissant et
miséricordieux... », et c'est bien
pour cela qu'il fuyait à Tarsis. Il censure
Dieu, et justifie sa fuite. Il se donne raison,
dans cette abominable prière. Il
était bien avisé de fuir ;
c'était là le meilleur parti à
prendre. L'Éternel l'a arrêté
dès le début de son voyage, sans
quoi, il serait à Tarsis, et sa
dignité d'homme n'aurait pas eu à
souffrir d'une proclamation démentie par
l'absence de destruction. Il dit à Dieu,
comme un reproche : « tu te repens
du mal » ; alors mieux valait ne pas
annoncer un jugement que tu n'exécutes
pas ! Telle est sa pensée et l'objet de
son irritation. Et, dans son aveuglement et sa
témérité, laissant libre cours
à cette folle colère, il demande
à Dieu de lui prendre la vie, la mort lui
étant préférable à la
vie, parce que sa chair souffre d'une humiliation
qu'elle ne supporte pas. Humiliation sans cause
véritable, car, en Jonas, l'esprit devrait
ressentir la joie de ce que, par son
ministère, des centaines de milliers de vies
ont été épargnées et
que Dieu a été honoré,
là où il était méconnu.
L'orgueil trouble tellement le prophète,
qu'il s'installe au sortir de la ville, et y attend
quelque
événement. Sans doute,
confusément, espère-t-il encore que
la destruction aura lieu.
Et lorsque Dieu, pour la seconde fois, lui
demande : « fais-tu bien de
t'irriter ? », il répond
insolemment : « je fais bien de
m'irriter jusqu'à la mort ». Il
met le comble à sa révolte contre
Dieu, et se fait une gloire de son iniquité.
Deux prières, deux états d'âme,
l'homme d'esprit, l'homme de chair. Le contraste
entre ces deux prières du même homme,
est celui de l'esprit et de la chair. Lorsque
l'angoisse et la détresse étreignent
le coeur, que la chair tremble d'effroi,
l'humilité apparaît : l'Esprit
est libre ; le coeur s'éveille à
la vie, et la prière juste et fervente monte
vers Dieu. C'est pourquoi le chrétien doit
toujours rechercher l'humilité. S'il lui
arrive de laisser monter l'orgueil en son coeur, sa
prière sera abominable. La chair ne peut
jamais accomplir la volonté de Dieu ;
aussi doit-elle être tenue crucifiée.
Sous l'empire de l'orgueil, l'homme devient
incapable de prier. Sachons-nous humilier en tous
temps sous la puissante main de Dieu ;
comprenons ses miséricordes, car Christ est
mort pour beaucoup. Ne regardons pas à
nous-mêmes, mais à Christ, et
réjouissons-nous de l'amour de Notre divin
Sauveur.
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