Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

LA DOUBLE CONNAISSANCE

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Colossiens 1/9 à 14

L'apôtre Paul peut affirmer selon la vérité qu'il ne cesse de prier Dieu pour les Colossiens, ces chrétiens qu'il ne connaît pas encore. Ceux-ci n'ont pas vu « son visage en la chair » (Col 2/1). L'Apôtre « a été informé » de leur foi en Jésus-Christ et de leur charité (Col. 1/4) ; et c'est depuis le jour où il a été informé par Epaphras de cette merveilleuse action de l'Esprit à Colosses, qu'il prie pour cette église avec persévérance.

Prier pour des frères en la foi, c'est la plus belle et la plus utile manifestation de l'amour ; c'est, en effet, appeler sur eux, à coup sûr, des grâces nouvelles et abondantes, c'est contribuer à les préserver, c'est les aider à croître. Prier pour des frères, c'est donc le réflexe de l'amour fraternel. Mais la prière d'un enfant de Dieu ne se limite pas à l'intercession en faveur des frères ou des soeurs qu'il connaît selon la chair, qu'il a vus ; elle va facilement au-delà du cercle des personnes connues et s'élève aussi en faveur des bien-aimés dont le visage n'a jamais été vu. L'amour fraternel connaît de larges envolées, et ne peut être assujetti à une connaissance selon la chair. Il a autant de force en dehors de cette connaissance qu'au-dedans. D'ailleurs, même ceux que nous connaissons selon la chair et dont la présence peut toujours nous réjouir, avant tout, nous les connaissons à travers le lien de l'esprit (2 Cor 5/16).

L'apôtre Paul, informé de la vie qui anime l'église de Colosses, prie pour ces frères inconnus de lui, et c'est ainsi que d'abord et essentiellement s'exerce son ministère. Un pasteur n'est pas seulement celui qui instruit où exhorte en prédicateur ; il est celui qui combat pour le troupeau qui lui est confié dans une ardente et une incessante prière. Les grâces reçues ont-elles été abondantes et variées, qu'il faut encore et toujours demander à Dieu ? Il faut lui demander la conservation et le renouvellement des grâces et des dons obtenus.

Or, voici le très haut objet que vise particulièrement la prière de Paul : une double connaissance. La connaissance de la volonté de Dieu, et la connaissance de Dieu. Pour vivre à la satisfaction du Seigneur, il importe, en effet, de connaître. La foi saisit la connaissance ; elle s'en empare. La première des deux connaissances mentionnées par l'auteur de l'épître, est celle qui permet d'entrer dans la révélation de la volonté de Dieu. Il ne saurait être question d'accomplir la volonté de Dieu sans la connaître avec exactitude et par intelligence spirituelle. Trop souvent, hélas, cette connaissance se trouve en partie négligée. Il arrive que l'on se contente de certains éléments de connaissance, et que, arrêtant là notre pénétration de la volonté de Dieu, nous demeurions dans l'impossibilité d'accomplir cette volonté. Pourtant, l'accomplissement de la volonté de Dieu est la base de la vie de foi. Aucune sanctification n'est possible s'il n'y a pas accomplissement de la volonté de Dieu, et si, par conséquent, cette volonté n'est pas bien connue. Que disait le Seigneur Jésus ? « Quiconque fait la volonté de Dieu, celui-là est mon frère, ma soeur, et ma mère » (Marc 3/35). La 1ère épître de Jean affirme aussi : « Celui qui fait la volonté de Dieu demeure éternellement » (2/17). La prière enseignée comme modèle par Jésus ne contient-elle pas ce voeu : « que ta volonté soit faite sur la terre comme au ciel » (Mat 6/10). Ainsi, il est indispensable de connaître la volonté de Dieu pour pouvoir l'accomplir.

Mais il faut connaître de telle sorte qu'il soit possible au chrétien de conformer ses actes et ses paroles à la volonté de Dieu. Il faut donc une connaissance « intelligente », une connaissance qui soit une « sagesse ». En toute occasion petite ou grande de la vie courante ou du témoignage, il convient de pouvoir disposer d'une pensée capable de bien diriger les actes ou les paroles, comme tout comportement ; de les bien diriger, c'est-à-dire, de les conformer à la volonté de Dieu. Or, les circonstances que nous rencontrons chaque jour varient sans cesse, et elles exigent donc de notre coeur des directions adaptées, des directions elles-mêmes variées. Notre coeur doit alors être apte à concevoir, en chaque circonstance, les directions convenables permettant l'accomplissement de la volonté de Dieu.

L'Évangile n'est pas un code, mais une puissance et une pensée (la pensée de Christ) ; il ne prétend pas régler tous les détails de notre vie ; ce serait impossible ; il veut communiquer aux croyants une connaissance qui soit la science de toujours pour mettre en accord leurs actes avec la volonté de Dieu, si diverses que soient les circonstances qui s'offrent à eux. Cette science qui doit remplir les chrétiens (Col 1/9), c'est-à-dire qui doit être reçue en la totalité de ses moyens, n'est autre chose que la sagesse même de Dieu, et que cette intelligence qu'apporte l'Esprit. Adam les a portées en lui avant la chute ; le dernier Adam, Jésus, les portait de façon parfaite, et les mettait à l'oeuvre devant chacune des circonstances qu'il rencontrait, et c'est ainsi qu'il pouvait faire toujours ce qui était agréable à Dieu Le Père. On comprend pourquoi l'apôtre Paul demande à Dieu que les chrétiens de Colosses aillent jusqu'à la plénitude de la connaissance de la volonté de Dieu, et que cette connaissance ne soit pas cérébrale, un simple enregistrement de la mémoire, une accumulation de préceptes rigides, mais, au contraire, qu'elle vienne en eux, dans leur coeur, comme une sagesse et une intelligence venues de l'Esprit, les rendant capables d'un accomplissement de la volonté de Dieu ininterrompu et parfait. Si la Bible nous rapporte cette prière de Paul, c'est pour susciter en ses lecteurs le puissant désir de posséder une telle connaissance.

Nous avons dit que la volonté de Dieu ne s'exprime pas, dans l'Évangile, sous la forme d'une collection de préceptes rigides qu'il suffirait d'apprendre par coeur, et d'appliquer à la manière des pharisiens. Mais alors, sur quoi porte la volonté de Dieu ? En quoi consiste-t-elle ? Nous pouvons établir deux ordres de choses qui se partagent la volonté de Dieu telle qu'elle nous est révélée ; ce sont :

1° les choses que Dieu veut obtenir de nous ;
2° les choses qu'Il veut nous donner et dont Il veut que nous soyons pourvus.

Que veut-Il obtenir de nous ; que pouvons-nous Lui apporter ? Notre foi, qui prend possession de ce que Dieu nous donne, qui s'approprie le salut et la plénitude de l'esprit ; notre fidélité, notre obéissance, notre piété (la grâce nous y aide).

Que sont les choses dont Dieu veut que nous soyons pourvus ? La plénitude de l'Esprit, la sanctification, la communion, le fruit porté.

Cette connaissance de la volonté de Dieu interviendra-t-elle immédiatement dans le coeur de l'enfant de Dieu ? Non pas. Lors de la nouvelle naissance, les ténèbres du coeur sont rompues par l'apparition d'une lumière qui fait resplendir la « connaissance de la gloire de Dieu sur la face de Christ » (2 Cor 4/6). La vérité se présente et affranchit celui qui la reçoit, par l'effet de sa foi. Il obtient donc, comme spontanément, une connaissance de la vérité. Il sait quelle est sa propre nature, il voit le néant en lui-même et son état de perdition ; puis il voit Christ, il comprend le grand besoin qu'il a de ce Sauveur ; il se repent, il saisit le pardon et l'amour de Dieu en Christ. Cependant, il n'est pas immédiatement apte à lutter, et il lui faut acquérir l'expérience d'une vie de soumission à la Parole de Dieu (l'expérience de la Parole de justice - Héb 5/11 à 14). Et pour cela, il lui faut recevoir non seulement les premiers rudiments des oracles de Dieu, mais l'enseignement de cette Parole de manière progressive. Il est un enfant, et doit croître pour devenir un homme fait. Paul demande à Dieu que les Colossiens soient remplis de la connaissance de la volonté de Dieu, qu'ils l'obtiennent, apportée par l'Esprit, dans toute la mesure qu'il est présentement possible d'atteindre.

Tout est objectif dans la Parole de Dieu, et, par conséquent, dans les desseins de Dieu ; si bien que la connaissance de la volonté de Dieu ne peut qu'engendrer d'heureux résultats. Ceux-ci se trouvent énumérés dans les versets 9 à 11 de notre texte :

1° Marcher d'une manière digne du Seigneur. Marcher, c'est utiliser le temps, la vie, les circonstances qui se présentent à nous pour accomplir la volonté de Dieu, pour « vivre l'Évangile ». Cette marche devient « digne » du Seigneur, si elle emprunte les voies de la sagesse de Christ, si elle ressemble à celle de Christ (« Celui qui dit qu'il demeure en Lui doit marcher aussi comme Il a marché Lui-même » (1 Jn 2/6).
Tout dans cette marche est l'accomplissement de la volonté de Dieu, selon l'intelligence spirituelle qui permet de conformer chaque action ou parole prononcée à cette volonté. Il n'y a que la perfection qui soit digne de Dieu et c'est donc jusqu'à la perfection qu'ira l'accomplissement de la volonté de Dieu, par le moyen d'une connaissance utilisée en toute sagesse et intelligence spirituelle.

2° Portant des fruits en toutes sortes de bonnes oeuvres. Paul dira ailleurs : « Nous sommes son ouvrage, ayant été créés en Jésus-Christ pour de bonnes oeuvres, que Dieu a préparées d'avance, afin que nous les pratiquions » (Ep 2/10). L'Épître aux Hébreux nous conseille de veiller les uns sur les autres pour nous exciter à la charité et aux bonnes oeuvres (Héb 10/24). L'entière connaissance de la volonté de Dieu ne peut, en effet, que produire ces bonnes oeuvres que, autrement, nous perdrons de vue. L'expression « bonnes oeuvres » suscite dans notre esprit quelques réticences, car elle touche de près la doctrine catholique romaine du salut par les oeuvres. Laissons de côté les erreurs, mais ne nous privons pas pour autant d'une notion qui figure dans la Sainte Écriture en de pressantes recommandations. Il y a quelque chose à bien saisir : si la connaissance de la volonté de Dieu nous remplit, nécessairement les bonnes oeuvres apparaîtront ; elles se feront toutes seules si l'on peut dire ; elles seront provoquées par une poussée de l'Esprit. Lisons encore Matthieu 5/16, où nous voyons que la lumière que rayonne le disciple de Christ accompli s'apparente aux bonnes oeuvres, lesquelles traduisent pratiquement l'amour de Dieu et du prochain.

3° Fortifiés à tous égards par sa puissance glorieuse en sorte que vous soyez toujours et avec joie persévérants et patients. Tout ce que demande l'apôtre à Dieu pour l'église de Colosses a pour aboutissement l'accroissement de force des membres de cette église. N'est-il pas écrit que celui qui a les mains pures se fortifie de plus en plus (Job 17/9). L'homme intérieur se fortifie dans une marche que guide la connaissance de la volonté de Dieu. Et cela, non pas partiellement, non pas en certains cas, mais « à tous égards » ; ce qui veut dire que la force que Dieu donnera se répartira à tous les besoins de la vie chrétienne, et interviendra en toutes occasions pour apporter au chrétien l'opportune puissance qui lui fera rendre un témoignage de foi, par oeuvres et par paroles. Qu'en résultera-t-il ? un comportement chrétien fort, où se manifesteront la patience envers tous, comme devant l'épreuve, ou dans l'attente des exaucements, la persévérance, la fermeté, la joie.


Après la connaissance de la volonté de Dieu, l'apôtre mentionne la connaissance de Dieu. Cette seconde connaissance est celle de la Personne de Dieu. Elle est une connaissance intime de Dieu, seulement réalisée par une vie de communion. Elle est associée à l'accomplissement de la volonté de Dieu, et ne peut exister dans cet accomplissement. En effet : « Si nous gardons ses commandements, par-là nous savons que nous l'avons connu. Celui qui dit : je l'ai connu, et qui ne garde pas ses commandements est un menteur et la vérité n'est point en lui » (1 Jn 2/3-4). Garder, c'est conserver pour accomplir. Ainsi, il n'y a de connaissance de Dieu que par le fait d'une obéissance à Sa Parole, selon une connaissance entière de Sa Volonté. L'une de ces connaissances dépend de l'autre, et c'est pourquoi l'apôtre Paul les associe dans les versets 9 et 10 de Colossiens 1. Et cette connaissance de Dieu fait croître le chrétien, l'élève, comme ce fut le cas, notamment, pour Josué que Dieu élève, parce qu'il est avec lui (Jos 3/7).

Les Colossiens, comme d'autres églises, sont les premiers destinataires des enseignements de Paul, mais nous sommes les destinataires actuels de ces mêmes enseignements. Recueillons-les, méditons-les et engageons-nous dans la voie d'une plénitude de connaissance de la volonté de Dieu, que nous utiliserons humblement par le moyen de la sagesse et de l'intelligence spirituelle.




LES LOIS DE L'UNIVERS

"Il a donné des lois, Il ne les violera pas".

Ps 148/6

On oublie trop facilement cette affirmation pourtant essentielle : L'Éternel a donné des lois. Et ces lois établies par Dieu sont assurées de permanence ; ce qui d'ailleurs est le propre des lois. Qu'est-ce qu'une loi ? Le dictionnaire nous dit que l'on appelle ainsi chacune des règles auxquelles sont assujettis les phénomènes de la nature. La loi a, en effet, pour objet d'imprimer aux choses ou aux êtres vivants un certain comportement dirigé. Un métal, par exemple, ne se comporte pas n'importe comment lorsque changent les conditions extérieures où il est placé, mais il se contracte, se dilate, change d'état (liquide, solide ou gazeux), conduit plus ou moins l'électricité, la chaleur ou les vibrations sonores, dans des conditions qui lui sont particulières, et qui ne varient pas. D'autre part, les phénomènes si nombreux que l'homme s'est ingénié à connaître, se produisent dans des conditions également déterminables, parce que toujours les mêmes. Ainsi, la nature et la vie obéissent à un ensemble de directions absolues que l'on appelle lois ou propriétés. Or, le hasard pourrait-il être l'auteur de ces directions impératives et constantes ? L'incrédule lui-même n'ose pas répondre oui ; il biaise. Peut-on dire alors que les lois et propriétés qui régissent les matériaux, ou le mouvement des astres, ont toujours existé, et que personne ne les a constituées ? Les matérialistes le disent ; aussi leur faut-il admettre que la matière est incréée, ce qui est aussi absurde que de faire intervenir le hasard.

Non, les lois, par leur existence même, postulent un Auteur ! Elles sont justement le témoignage d'un ordre, d'une organisation de la nature, et celle-ci suppose un organisateur. Il faut également admettre que l'Auteur des lois invariables que nous connaissons est toujours présent pour veiller à leur invariabilité. Un passage de Jérémie (31/36) nous montre que la permanence des lois de l'univers dépend tout autant de Dieu que l'existence du peuple d'Israël. Donc, la continuation des lois, leur inviolabilité sont dépendantes de Dieu, de Sa volonté, et par conséquent de Son existence. Si Dieu était mort comme Nietzsche l'a proclamé, il n'y aurait plus de lois, ni même de matière, ni de vie ! Les lois organisent la création et maintiennent toutes choses en existence ; c'est ce qu'exprime le Psaume 119, verset 91 : « c'est d'après tes lois que tout subsiste aujourd'hui, car toutes choses te sont assujetties ». Toute la création se trouve placée dans un total assujettissement à Dieu, qui maintient constantes les lois qu'Il a faites en vue d'organiser et de soutenir les choses et les êtres. L'Épître aux Colossiens parle aussi du maintien en existence des choses créées : « Il est avant toutes choses et toutes choses subsistent en Lui » (1/17). Dieu crée, et, en outre, Il garde, Il soutient tous les objets et les êtres de sa création ; et c'est là l'office des lois. Dieu ne viole pas les lois qu'Il a faites, car alors ce serait transformer Sa création ; Il ne les viole pas, ce qui signifie qu'Il leur conserve une parfaite constance, par Sa volonté, par Sa puissance ; c'est donc un miracle de chaque seconde.

Les hommes devraient reconnaître cela ; eux qui recherchent le pourquoi des faits qu'ils constatent. Ils s'évertuent à découvrir les propriétés des corps et les lois qui gouvernent les phénomènes de la nature ; ils les expriment mathématiquement, afin de les utiliser à construire des machines. Avez-vous pensé à ce que deviendraient ces machines, si les lois de la nature s'avisaient de changer ? Elles cesseraient aussitôt de fonctionner et tout l'acquis des techniques serait rendu vain. Rappelons-nous que si Dieu a donné des lois à la matière, Il en a aussi donné à la vie et à Sa créature, l'homme. Où sont ces lois ? Dieu les a écrites dans le coeur ; ce sont les lois de la justice, et la justice de Dieu conduit à la vie. Ce sont les lois de la vie. Si nous aimons la vie, gardons les lois de Dieu, aimons-les ; employons notre amour à les observer ; elles sont inviolables. Retenons ce verset « La loi de l'esprit de vie en Jésus-Christ m'a affranchi de la loi du péché et de la mort » (Ro 8/2).



LES DEUX PRIÈRES DE JONAS

Jonas 2 et 4/1 à 3

Captivante et puissamment instructive est l'histoire de Jonas. Son extraordinaire aventure le place dans les situations les plus diverses. Nous le voyons s'enfuir à Tarsis, loin de la face de l'Éternel, tant la mission d'aller à Ninive le rebute. Croyant pouvoir échapper à l'appel de Dieu, il s'embarque et vogue vers un cap aussi éloigné que possible du lieu où la Parole de l'Éternel l'avait envoyé. La direction qu'il emprunte ainsi se situe à l'opposé de celle que Dieu lui avait prescrite. Jonas n'a pas prévu le drame qui l'attend ! Après avoir été découvert comme le responsable de la terrible tempête qui menace le bateau et son équipage, il est jeté à la mer et englouti dans le ventre d'un grand poisson. Il y reste trois jours et trois nuits. Là, ayant gardé une entière conscience, il prie. C'est là sa première prière. Sur le bateau, il dormait ; il était dans l'esprit de son refus d'obéir aux ordres de l'Éternel ; il ne ressentait aucun besoin de prier. Le pilote du navire lui avait dit : pourquoi dors-tu ? invoque ton Dieu ! Mais Jonas n'avait pas su, ni pu prier ; son âme était remplie de lui-même ; les habitants de Ninive que Dieu entendait prévenir par son moyen lui étaient indifférents, comme l'étaient aussi les hommes du navire. N'ayant pas voulu partager la miséricorde de Dieu, il se sentait incapable d'aimer et de s'attacher à son prochain. Mais, dans le ventre du poisson, Jonas sent la mort le tenir de bien près. Cette liberté qu'il s'était donnée en fuyant sa mission, bien vite, elle lui avait été ôtée. En si peu de temps, il était passé de la liberté à la prison. Et quelle prison ! Le ventre d'un poisson ! Là, il prie l'Éternel. Dans sa détresse, il invoque son Dieu. Son coeur est humilié et rempli d'angoisses. On peut appliquer à Jonas ces versets : « les insensés, par leur conduite coupable et par leurs iniquités, s'étaient rendus malheureux... ils touchaient aux portes de la mort. Dans leur détresse, ils crièrent à l'Éternel, et Il les délivra de leurs angoisses » (Ps 107/17-19). Faut-il que ce soit seulement dans la détresse que l'homme soit porté à invoquer son Dieu ?

Cette première des deux prières que relate le récit de Jonas est une excellente prière. Tout d'abord, c'est une prière de foi, car l'exaucement y est considéré comme acquis : « Il m'a exaucé » ; « tu as entendu ma voix » ; « tu m'as fait remonter vivant de la fosse » ; « ma prière est parvenue jusqu'à toi ». Pourtant, lorsqu'il prie ainsi, Jonas se trouve dans le ventre du poisson. Il appelle la délivrance, mais sa foi l'a saisi déjà. Or, c'est ce que le Seigneur Jésus-Christ nous enseigne : « Tout ce que vous demanderez en priant, croyez que vous l'avez reçu, et vous le verrez s'accomplir ». La foi doit donc pouvoir se manifester par une solide assurance d'exaucement, au cours même de la prière. Il y a là un niveau à atteindre. La foi peut être cultivée et parvenir à ce niveau. Ensuite, la prière de Jonas est une prière inspirée. Pourquoi peut-on l'affirmer ? Parce qu'elle entre pleinement dans l'analogie de la foi, étant en tous points harmonisée avec la Parole de Dieu. Il ne peut qu'en être ainsi de toute prière inspirée. « Faites en tout temps par l'Esprit toutes sortes de prières et de supplications » (Eph 6/18). Or, l'Esprit, Le Consolateur, ne parle pas de lui-même, mais Il prend de ce qui est à Christ ; Il prend la Parole annoncée et la rappelle opportunément pour chacun des besoins de la prière. Une prière dite sans l'inspiration de l'Esprit ne possède pas ce plein accord avec la Parole de Dieu, même si les mots ou les expressions employées figurent dans la Bible (ce qui n'est nullement une épreuve d'inspiration) ; de plus, elle n'a pas l'opportunité utile. Seul, en effet, l'Esprit peut exprimer nos véritables besoins, et cela, selon la vérité. Dans la prière de Jonas, on retrouve des éléments de l'Écriture, opportunément utilisés ; ce qui montre que la pensée de Jonas emprunte les voies déjà tracées par la Parole de Dieu, disons par d'autres hommes (inspirés pour rédiger l'Écriture) ; mais ces hommes inspirés ont ressenti ce qu'ils ont exprimé par l'Esprit. On retrouve, par exemple le Ps 120, verset 1 ; la pensée du début du Ps 40. Cette prière de foi, inspirée par l'Esprit, se fait l'arme invincible contre la mort.

On peut encore noter une correspondance entre la prière de Jonas et les prières et supplications du Seigneur, celles mentionnées en Hébreux 5/7 et 8. L'apôtre Pierre déclare (1 Pi 1/11) que les prophètes de l'ancienne alliance ont fait de la grâce du salut l'objet de leurs recherches, et que l'Esprit de Christ qui était en eux attestait d'avance les souffrances de Christ et la gloire dont elles seraient suivies. Ainsi en est-il de Jonas dans le ventre du poisson. La prière de Jonas obtient son exaucement parce qu'elle prélude au combat victorieux de Christ contre la mort. Nous-mêmes, qui sommes de Christ, remportons une victoire dont Il nous a procuré l'assurance, à cause de la sienne. Ne combattons donc pas seuls, mais avec Lui, et par Lui. Ainsi, si comme Jonas, en ce chapitre 2 de son livre, nous savons nous livrer à la foi, ainsi qu'à l'Esprit de Dieu, nous pourrons tout surmonter, et vaincre, en toutes circonstances, les puissances de la mort.

Il est étonnant de retrouver Jonas, au chapitre 4, priant d'une toute autre façon. Les circonstances ont changé ; Jonas s'est rendu à Ninive ses avertissements ont porté ; toute la ville, roi en tête, s'est repentie et Dieu a fait grâce. Nous voudrions bien que nos témoignages obtiennent un si beau succès ! Mais lui, Jonas, il est mécontent, et même irrité. Pour le satisfaire, l'Éternel aurait dû ne pas donner à la parole de Jonas le caractère d'un avertissement, susceptible d'éviter le jugement, mais en faire un arrêt sans appel. Ce qu'il lui fallait c'est la destruction de Ninive. Il a annoncé une destruction qui ne s'accomplit pas, et son amour-propre en est mortifié. Il ne comprend pas Dieu ; il prend position contre la miséricorde de Dieu. Mieux valait la mort de milliers d'hommes et d'animaux, plutôt qu'un froissement d'amour-propre, au gré de Jonas. Lui, a bénéficié de la miséricorde de Dieu, mais cette même miséricorde, il ne la consent pas aux autres hommes ! Quelle méchanceté, et cela, par orgueil !

Jonas implore à nouveau l'Éternel (chapitre 4), mais pour dire quoi ? pour censurer la décision miséricordieuse de Dieu : « Je savais que tu es un Dieu compatissant et miséricordieux... », et c'est bien pour cela qu'il fuyait à Tarsis. Il censure Dieu, et justifie sa fuite. Il se donne raison, dans cette abominable prière. Il était bien avisé de fuir ; c'était là le meilleur parti à prendre. L'Éternel l'a arrêté dès le début de son voyage, sans quoi, il serait à Tarsis, et sa dignité d'homme n'aurait pas eu à souffrir d'une proclamation démentie par l'absence de destruction. Il dit à Dieu, comme un reproche : « tu te repens du mal » ; alors mieux valait ne pas annoncer un jugement que tu n'exécutes pas ! Telle est sa pensée et l'objet de son irritation. Et, dans son aveuglement et sa témérité, laissant libre cours à cette folle colère, il demande à Dieu de lui prendre la vie, la mort lui étant préférable à la vie, parce que sa chair souffre d'une humiliation qu'elle ne supporte pas. Humiliation sans cause véritable, car, en Jonas, l'esprit devrait ressentir la joie de ce que, par son ministère, des centaines de milliers de vies ont été épargnées et que Dieu a été honoré, là où il était méconnu. L'orgueil trouble tellement le prophète, qu'il s'installe au sortir de la ville, et y attend quelque événement. Sans doute, confusément, espère-t-il encore que la destruction aura lieu.

Et lorsque Dieu, pour la seconde fois, lui demande : « fais-tu bien de t'irriter ? », il répond insolemment : « je fais bien de m'irriter jusqu'à la mort ». Il met le comble à sa révolte contre Dieu, et se fait une gloire de son iniquité. Deux prières, deux états d'âme, l'homme d'esprit, l'homme de chair. Le contraste entre ces deux prières du même homme, est celui de l'esprit et de la chair. Lorsque l'angoisse et la détresse étreignent le coeur, que la chair tremble d'effroi, l'humilité apparaît : l'Esprit est libre ; le coeur s'éveille à la vie, et la prière juste et fervente monte vers Dieu. C'est pourquoi le chrétien doit toujours rechercher l'humilité. S'il lui arrive de laisser monter l'orgueil en son coeur, sa prière sera abominable. La chair ne peut jamais accomplir la volonté de Dieu ; aussi doit-elle être tenue crucifiée. Sous l'empire de l'orgueil, l'homme devient incapable de prier. Sachons-nous humilier en tous temps sous la puissante main de Dieu ; comprenons ses miséricordes, car Christ est mort pour beaucoup. Ne regardons pas à nous-mêmes, mais à Christ, et réjouissons-nous de l'amour de Notre divin Sauveur.

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