Le plan que Dieu a établi pour conduire à la gloire beaucoup de fils
(et de filles), se décompose en plusieurs parties comparables aux
maillons d'une chaîne, et comprend en phase finale : la parfaite
ressemblance à l'image de son Fils, ce qu'affirme le passage suivant
de l'épître aux Romains.
"Nous savons du reste, que toutes choses concourent au
bien de ceux qui aiment Dieu, de ceux qui sont appelés selon son
dessein. Car ceux qu'il a connus d'avance, il les a aussi
prédestinés à être semblables à l'image de son Fils, afin que son
Fils fût le premier-né entre plusieurs frères. Et ceux qu'il a
prédestinés, il les a aussi appelés ; et ceux qu'il a appelés,
il les a aussi justifiés ; et ceux qu'il a justifiés, il les a
aussi glorifiés. " (Ro.
8. 28-30)
L'épître aux Éphésiens déclare que les saints et les
fidèles en Jésus-Christ ont été élus avant la fondation du monde pour
la sainteté. Le verset 29
de la citation ci-dessus apporte un appui à la révélation d'une
élection préalable à la création de la terre et précise même que cette
élection fut bien individuelle. En effet, elle intéresse ceux que Dieu
"a connus d'avance". Ceux-là seulement prennent part à la
prédestination à devenir les images vivantes de Christ, qui occupera
donc la position du "premier-né" de toute la nombreuse lignée
des élus devenus ses frères.
L'expression "premier-né" nous amène à penser à la
résurrection, en rapport avec la 1ère épître aux Corinthiens :
"Et comme tous meurent en Adam, de même aussi tous
revivront en Christ, mais chacun en son rang ; Christ comme
prémices, puis ceux qui appartiennent à Christ lors de son
avènement. " (1
Cor. 15. 22-23)
En somme, c'est par la résurrection que s'accomplira tout
à fait ce à quoi Dieu prédestine ceux qu'il a "pré connus"
c'est-à-dire la parfaite et glorieuse ressemblance au Fils premier-né.
Paul en reprend la vision d'autre part, et écrit que lorsque le
Seigneur Jésus apparaîtra du ciel avec les anges de sa puissance, il
sera "en ce jour-là" glorifié dans ses saints et admiré dans tous ceux
qui auront cru (2
Thes.1. 10) ; ce qui signifie que l'admiration de la
Personne du Seigneur s'élargira à toute l'escorte des saints, parce
que ceux-ci offriront tous à la vue l'image parfaite du Seigneur,
recouverte de la même gloire que lui-même.
Pourquoi Paul écrit-il en Romains
8. 29 "semblables à l'image de son Fils" et non pas seulement
"semblable à son Fils" ?
En réponse, on peut considérer en premier lieu que Christ
est lui-même une image, ainsi que Paul l'écrit aussi :
"Il est l'image du Dieu invisible, le premier-né de toute la
création" (Col.
1. 15) ; puis, l'épître aux Hébreux dit également que le
Fils est le reflet de la gloire et l'empreinte de sa personne (la
Personne de Dieu) (1.
3). En second lieu, Christ ressuscité et glorifié est un modèle
à la ressemblance duquel doivent arriver les "pré connus", si bien que
le terme image prend le sens de modèle. Le Christ a achevé son oeuvre
de rédemption en devenant "l'homme nouveau" ou le "dernier Adam"
destiné à se reproduire en chacun de ses rachetés.
C'est ce dont Paul fait mention en 1
Corinthiens 15. 49 : "Et de même que nous avons porté
l'image du terrestre, nous porterons aussi l'image du céleste. "
L'oeuvre de la rédemption parvient donc à ce prodigieux
aboutissement : un nouveau type d'homme est créé en la personne
du Fils de Dieu, à l'effet d'y conformer tous ceux qui auront cru.
Leur ressemblance sera totale en raison du pouvoir que possède le Fils
de "s'assujettir toutes choses" (Ph.
3. 21).
LA RESSEMBLANCE PERDUE
Dans la logique et la sagesse du plan de Dieu, intervient
le principe de la transmission de la vie qui veut qu'un nouvel être
ressemble à un autre être l'ayant précédé. Telle est la loi
fondamentale et universelle de la vie. On l'a nommée : "loi de
la continuité génétique", ou encore : "loi de la
conformité au type de l'espèce". Quand nous reviendrons à la
voie du salut, nous retrouverons ce principe de la conformité. Le
Seigneur l'a énoncé de façon simple :
"cueille-t-on des raisins sur des épines ou des figues
sur des chardons ? " (Mat.
7. 16) ; puis, dans un autre enseignement :
"Ce qui est né de la chair est chair, et ce qui est né
de l'esprit est Esprit. " (Jn.
3. 6).
Dieu a proclamé qu'il utilisait l'équivalent de ce
principe en créant l'homme :
"Faisons l'homme à notre image, selon notre
ressemblance... Dieu créa l'homme à son image, il le créa à l'image
de Dieu, il créa l'homme et la femme. " (Gen.
1. 26-27).
Dieu s'était donc reconnu en sa créature humaine. L'homme
était à la fois créature et image du Dieu incréé ! Pour
caractériser (dans une humble mesure) cette ressemblance, on peut
admettre sommairement que l'homme a reçu de son Créateur, outre le
corps et l'âme, un esprit (Zach.
12. 1), la sagesse, l'intelligence, ainsi qu'une volonté libre
lui permettant de suivre la voie de la sagesse et la crainte de
L'Éternel, ou bien de s'en écarter et de succomber. Toutefois, ces
merveilleuses facultés allaient se trouver confrontées à
l'épreuve ; il le fallait ; Job nous le dit :
"Alors il (Dieu) vit la sagesse et la
manifesta. Il en posa les fondements et la mit à l'épreuve. Puis il
dit à l'homme : Voici, la crainte du Seigneur, c'est la
sagesse ; s'éloigner du mal, c'est l'intelligence. " (Job
28. 27-28)
Dans le jardin d'Eden, vaste comme une province, Dieu
avait placé un arbre particulier dont le fruit ne devait pas être
mangé, parmi des milliers, ou des dizaines de milliers d'autres arbres
d'espèces variées, qui, tous, étaient "agréables à voir et bons à
manger". C'était le seul arbre susceptible de devenir l'objet de
la tentation. D'autre part, rien ne s'opposait à ce que Satan, le
tentateur, entre dans le jardin. Ainsi, l'épreuve de l'homme allait
résulter de la présence d'un objet de tentation, et d'un
tentateur ; comme il en sera plus tard pour Jésus dans le
désert :
"Après avoir jeûné 40 jours et quarante nuits, il eut
faim. Le tentateur s'étant approché lui dit... " (Mat.
4. 2-3).
Nous-mêmes, dans notre vie chrétienne, après être nés de
nouveau, nous subissons l'épreuve. Elle est indispensable. En Eden,
pour s'épargner les terribles conséquences de la désobéissance, à eux
et à leur postérité, il aurait fallu qu'Adam et Eve n'écoutent pas le
tentateur, c'est-à-dire n'écoutent aucune autre
parole que celle de Dieu, et ils auraient alors pu supporter aisément
la présence de l'arbre au fruit interdit, comblés qu'ils étaient par
ailleurs. Nous, membres de l'Eglise, nous sommes toujours face à la
situation d'entendre d'autres paroles que celles de Dieu ; notre
sauvegarde nécessite que nous nous en tenions à la parole de Dieu, que
nous n'écoutions qu'elle. Bien sûr, les tentations et les convoitises
ne nous manquent pas, elles se sont multipliées car Satan a amplifié
son pouvoir sur l'humanité qui le subit. La force toute-puissante de
Jésus-Christ permet seule de résister à la séduction, si tenace
soit-elle, sous la condition d'une fidélité fermement observée.
L'intérêt du récit de la création de l'homme et de la
femme et de leur chute ne se borne pas à celui d'une information, il
ne reste pas celui d'un savoir historique, car il se prolonge jusqu'à
nourrir en nous une utile réflexion dont nous avons un besoin
permanent. En effet, la tragédie qui s'est déroulée dans le jardin
d'Eden étend toujours ses terribles lendemains sur l'humanité et sur
chacun de nous en particulier ; elle nous a introduits dans la
mort, alors qu'en Adam nous étions créés pour la vie ; elle a
déchaîné la souffrance et la haine ; elle tue des millions
d'enfants nés ou à naître ; elle amplifie ses ravages et ses
destructions sur un monde qu'elle a perverti. Pour arrêter la marche
en avant de ses conséquences, qui se nomment le mal et le péché, Dieu
a dû employer les moyens extrêmes de sa miséricorde en donnant son
Fils unique comme victime, afin que, mourant sur la croix en portant
notre péché, il en fasse l'expiation et satisfasse pour nous la
justice de Dieu :
"Celui qui n'a point connu le péché, il (Dieu) l'a
fait devenir péché pour nous, afin que nous devenions en lui justice
de Dieu. " (2
Cor. 5. 21)
La vérité de tout cela ne prendra tout son poids en nos
coeurs que si nous laissons le récit de la chute nous remuer
intérieurement, si nous restons profondément conscients que la mort
éternelle, destin redoutable, ne nous emportera plus parce que nous
appartenons à notre Sauveur et vivons maintenant par lui et pour lui.
Il importe que la vérité de cette délivrance demeure implantée en
nous, non comme une doctrine (car ce n'est pas la doctrine qui sauve)
mais en une puissante et réelle conviction de la foi. Réalisons encore
quel prix nos coeurs doivent attacher à la vérité, car c'est par le
mensonge que le péché a enveloppé le premier couple. Au dire de Satan,
Adam et Eve allaient devenir "comme des dieux" s'ils décidaient de
manger le fruit de l'arbre de la connaissance du bien et du mal. Le
mensonge était gros, car ils portaient l'image du Dieu Créateur, et
rien au-dessus de cela ne pouvait advenir.
Après avoir cédé à la tentation, les voici séparés de
leur Dieu. Ils allaient vivre encore, mais seuls, sans force, sans
direction, sans toutes les marques d'amour de leur Créateur. Satan
venait de les prendre en otages. Leur ressemblance à Dieu tristement
se perd.
LE RETOUR DE L'IMAGE
"Ta foi t'a sauvée, va en paix. " (Luc
7. 50) dit Jésus à la femme pécheresse. "Sauvée !" en quoi
cela consiste-t-il ? L'on est sauvé par l'oeuvre de
Jésus-Christ ; sauvé de la condamnation, conséquence inéluctable
de l'état de péché et cette condamnation a atteint tous les hommes (Ro.
5. 18). Si elle subsiste, elle conduit à la perdition : "large
est la porte, spacieux est le chemin qui mènent à la perdition"
(Mat.
7. 13) ; soyons-en épargnés ! Selon une autre expression,
l'on est sauvé de la colère (Ro.
5. 9). Qu'est-ce que la colère de Dieu ? La colère de Dieu
est l'envers de son amour. En effet, l'amour de Dieu possède les
moyens de pardonner les péchés de l'homme qui s'en repent, et de le
sauver, mais lorsqu'on le repousse ou le méprise, la justice éternelle
accomplit son office en condamnant, puisque aucune personne n'héritera
la vie éternelle si, faute de repentance et de foi, elle a conservé le
poids de ses péchés. Le mobile de Dieu en toutes ses oeuvres, c'est
l'amour, mais la justice, base du règne de Dieu, a des droits
imprescriptibles. L'amour et la justice de Dieu ont trouvé leur
conciliation à la croix où le Fils a expié les péchés des hommes,
cependant que si l'on refuse les effets de cette conciliation, les
péchés ne peuvent plus être effacés, et la juste colère de Dieu
s'allume.
N'oublions pas malgré cela, que l'Éternel est un Dieu
miséricordieux et compatissant, "lent à la colère, riche en bonté
et en fidélité, qui conserve son amour jusqu'à mille générations,
qui pardonne l'iniquité, la rébellion et le péché, mais qui ne tient
point le coupable pour innocent... " (Ex.
34. 6-7).
Dieu a pour dessein de revêtir celui qui entre dans la
voie du salut (c'est-à-dire dans le plan de Dieu) de l'image de son
Fils. Il a résolu de créer son image en sa créature humaine pour la
seconde fois par un Nouvel Adam, établi Chef d'une nouvelle lignée,
ou, si l'on veut, d'une nouvelle humanité sortie de la première.
Pour y parvenir, ce second Adam, le Fils de Dieu, a dû
prendre l'image et la forme de l'homme perdu :
"Car, chose impossible à la loi, parce que la chair la
rendait sans force, Dieu a condamné le péché dans la chair, en
envoyant, à cause du péché, son propre Fils dans une chair semblable
à celle du péché... " (Ro.
8. 3) ;
"En conséquence, il a dû être rendu semblable en
toutes choses à ses frères, afin qu'il fût un souverain
sacrificateur miséricordieux et fidèle dans le service de Dieu, pour
faire l'expiation des péchés du peuple ; car, ayant été tenté
lui-même dans ce qu'il a souffert, il peut secourir ceux qui sont
tentés. " (Héb.
2. 18)
Quoique prenant l'image et la forme de l'homme perdu, il
apportait aussi l'empreinte de la Personne du Père (Héb.
1. 3 ; 2
Cor. 4. 4 ; Col.
1. 15). En l'homme nommé Jésus, le Père apparaissait pour qui
savait voir : "Celui qui m'a vu a vu le Père" (Jn.
14. 9). Dans le cours de sa vie sur la terre, dans ses
souffrances, ses épreuves, dans sa mort, Celui qui porte l'image de
Dieu demeure soumis à sa volonté, et rétablit en l'homme la capacité
d'obéir à Dieu (Héb.
5. 7-8), car la puissance du péché a détruit cette capacité. Il
a donc fallu que la nature humaine de Jésus apprenne l'obéissance dans
la souffrance ; et cela nous montre combien profondes sont les
destructions de cette puissance en l'homme, et combien la tentation
peut être exigeante.
Après la résurrection, le Serviteur de l'Éternel apparut
sous une autre forme (Marc
16. 12). Il venait d'être déclaré "Fils de Dieu avec
puissance, selon l'Esprit de sainteté" (Ro.
1. 4). C'est ainsi que la résurrection a fait de lui le
"premier-né" d'entre beaucoup de frères. Son oeuvre achevée, sa
personne tout entière se voyait élevée selon la parole du prophète
Esaïe : "Mon serviteur prospérera, il montera, il s'élèvera
bien haut" (52.
13). Voilà comment parut "l'homme nouveau"
dont le revêtement constitue l'objectif capital de tout enfant de
Dieu.
LA STATURE PARFAITE DE CHRIST
C'est ce que l'épître aux Éphésiens nous propose
d'atteindre. Les saints (membres de l'Eglise) y parviendront si leur
formation se poursuit par l'action des ministères et s'ils s'emploient
à construire une Église forte et active. La maturité spirituelle de
chacun d'eux résultera de leur perfectionnement et ira de pair avec la
maturité collective de l'Eglise, avec l'unité de la foi, l'unité de la
connaissance du Fils de Dieu, ainsi qu'avec la croissance à tous
égards en Christ, considéré comme le Chef ou la tête. Le corps
lui-même connaîtra un accroissement harmonieux en se construisant dans
l'amour. On ne cherchera plus à régler les problèmes intérieurs de
l'Eglise ; ils disparaîtront en raison de la puissance de
l'Esprit de Christ à l'oeuvre (Eph.
4.10-16).
La mesure de la stature parfaite de Christ qui correspond
à "l'état d'homme fait", et que nous venons d'appeler "maturité
spirituelle" peut encore se rapprocher du passage suivant de l'épître
aux Hébreux :
"Or quiconque en est au lait n'a pas l'expérience de
la parole de justice, car il est un enfant. Mais la nourriture
solide est pour les hommes faits, pour ceux dont le jugement est
exercé par l'usage à discerner ce qui est bien et ce qui est mal.
" (5.
13-14)
Ainsi au compte de la maturité spirituelle à laquelle
tous doivent avoir à coeur de parvenir, nous mettons trois
facteurs :
- 1°- la connaissance de toute la parole de Dieu, non pas tellement par la mémoire, mais surtout par notre enrichissement en les fortes valeurs spirituelles que nous aurons dégagées en la méditant ;
- 2°- l'expérience de la parole de justice, autrement dit, l'acquis obtenu au cours de nos préoccupations journalières de la mise en pratique de la parole de Dieu qui, nous l'aurons compris, a pour objet essentiel de nous apprendre à vivre selon la justice de Dieu.
- 3°- le discernement du bien et du mal, qui va de pair avec la pratique de la justice, et a ceci de particulier qu'il découle de l'intelligence et de la sagesse spirituelles venant d'en haut. Ces dernières se confirment en nous en même temps que s'accroît l'amour envers Dieu (Ph. 1. 9-10).
Le livre d'Ezékiel met l'accent sur le discernement que Dieu
désire :
"Ils (les sacrificateurs) enseigneront à mon
peuple à distinguer ce qui est saint de ce qui est profane, ils lui
feront connaître la différence entre ce qui est impur et ce qui est
pur. " (44.
23) Notre Dieu veut, en effet, que ce discernement agisse en son
Église, et qu'il ne soit jamais en défaut, parce que, sans lui, il ne
peut y avoir de juste ou de vraie obéissance à la parole. "Discerner
ce qui est bon, agréable et parfait", voilà ce qui nous mettra
en bonne capacité d'accomplir la volonté de Dieu.
La stature parfaite de Christ individuelle mais aussi
collective fera naître d'heureux résultats et sera notamment la cause
d'une marche ascendante de l'Eglise et de chacun deses
membres. On peut la regarder comme le stade actuellement accessible de
la ressemblance à l'image du Christ qu'il faut atteindre.
PARTICIPANTS DE LA NATURE DIVINE
"Simon, Pierre, serviteur et apôtre de Jésus-Christ, à
ceux qui ont reçu en partage une foi du même prix que la nôtre, par
la justice de notre Dieu et du Sauveur Jésus-Christ ; que la
grâce et la paix vous soient multipliées par la connaissance de Dieu
et de Jésus notre Seigneur ! Comme sa divine puissance nous a
donné tout ce qui contribue à la vie et à la piété, au moyen de la
connaissance de celui qui nous a appelés par sa propre gloire et par
sa vertu, lesquelles nous assurent de sa part les plus grandes et
les plus précieuses promesses, afin que par elles vous deveniez
participants de la nature divine, en fuyant la corruption qui existe
dans le monde par la convoitise... " (2
Pi. 1. 1-4)
Ce sont les promesses "les plus grandes et les plus
précieuses" qui contiennent en germe le moyen de "devenir participants
de la nature divine". Là encore nous trouvons une avancée progressive,
comme il en est pour accéder à la stature parfaite de Christ. La foi
continue (ou persévérante) qui met en expérience la parole de justice
conduit à l'accomplissement certain des grandes promesses en
lesquelles survient la participation à la nature divine, dont le seul
énoncé nous remplit de joie.
Notre mise en relation avec notre Dieu a commencé par la
nouvelle naissance, puis, notre foi restant active, cette relation
a suivi un développement vers la connaissance de Dieu et de
Jésus-Christ notre Seigneur (2
Pi. 1. 2). Or, en cette connaissance, Dieu connaît l'homme et
l'homme connaît Dieu. Leur union défie toute appréciation par le
langage, elle répond, pouvons-nous dire seulement, au voeu de
Jésus-Christ dans la prière sacerdotale :
"Je leur ai donné la gloire que tu m'as donnée, afin
qu'ils soient un comme nous sommes un, moi en eux, et toi en moi,
afin qu'ils soient parfaitement un, et que le monde connaisse que tu
m'as envoyé et que tu les as aimés comme tu m'as aimé. " (Jn.
17. 21-23)
Dans cette union parfaite, le Père et le Fils sont là
avec les perfections divines : "En lui habite corporellement
toute la plénitude de la divinité. Vous avez tout pleinement en lui,
qui est le Chef... " (Col.
2. 9-10)
Une union parfaite ! Seul l'Esprit saint peut unir
ainsi les personnes sans les confondre, et malgré la grande inégalité
entre Dieu et l'homme. Celui-ci obtient une cession de la nature
divine (non pas de l'essence divine qui est incommunicable) quoiqu'il
appartienne toujours au domaine du fini étant en ce monde. En
considérant une telle union, notre pensée se reporte au temps où Dieu
créa l'homme à son image, ce qui avait déjà établi une union entre le
Créateur incréé et sa créature. La parole nous révèle clairement que
l'amour de Dieu qui entend dispenser la vie véritable, le plus grand
des biens, veut aussi faire participer l'homme régénéré à la nature
divine qui, seule, correspond à cette vie qui est celle de Dieu.
Qu'est-ce que la nature divine, ou plutôt quels sont ses
caractères ? Selon la révélation qu'est la Bible, nous pensons
d'abord aux réalités éternelles que nous voyons en Dieu :
l'Esprit, la sainteté, l'amour, la vie, la justice, la paix,
l'intelligence et la sagesse, si bien que la participation à la nature
divine comporte la possession de ces puissantes réalités qui forment
une indestructible chaîne. L'apôtre Pierre a pris soin d'ajouter que
cette participation a pour corollaire une vie de sainteté et le ferme
rejet des convoitises venant d'un monde corrompu. Participer à la
nature divine ce sera donc aussi triompher du monde par la foi (1
Jn. 5. 4) ; ce sera opposer la force de Christ à la
puissance du péché et de la mort.
Par un autre texte, il nous est dit que nous sommes
devenus "participants de Christ" pourvu que nous retenions
fermement jusqu'à la fin l'assurance que nous avions au commencement (Héb.
3. 14). La nouvelle naissance a marqué pour tout chrétien la fin
du mode de vie qui la précédait, ainsi que le commencement de la vie
nouvelle qui est une vie de communion avec le Sauveur. Reprenons la
formule de Paul et disons : "Christ en nous l'espérance de la
gloire" (Col.
1. 27).
La vie de communion ressemble à un rameau greffé dont
l'histoire se confond avec celle de l'arbre sur lequel il a été
greffé. En effet, le disciple accompli participe à la vie divine de
Christ ; il participe donc à son incarnation, à sa crucifixion
(Gal. 2. 20), et à sa résurrection. Il participe au passé terrestre,
au présent, ainsi qu'à l'éternité de Jésus-Christ. Après avoir été
enlevé à la rencontre du Seigneur avec le "corps de Christ" et emmené
dans l'éternité avec lui, il paraîtra avec Christ dans la gloire de sa
parousie (Col.
3. 4).
Un lien vital unit le Christ (Eph. 2. 6) aux membres de
son corps, lesquels ne vivent plus pour eux-mêmes mais de la vie qui
anime tout le corps. Quel nom faut-il donner à ce corps ? On
l'appelle "l'Eglise", mais il peut aussi s'appeler"Christ" comme
l'apôtre Paul le fait dans le verset suivant :
"Car comme le corps est un et a plusieurs membres, et
comme tous les membres du corps, malgré leur nombre, ne forment
qu'un seul corps, ainsi en est-il de Christ." (1
Cor. 12. 12)
A la fin de ce verset, on attendait : "Ainsi en
est-il de l'Eglise" ; pourtant, l'inspiration a fait écrire
"Christ", ce qui montre que l'Eglise, dans cette représentation d'un
corps, reçoit le nom de son Chef (de sa tête). À n'en pas douter, ce
que veut l'Esprit saint qui a inspiré l'Écriture, c'est bien que la
foi saisisse la vision d'un corps et regarde l'Eglise de cette manière
seulement, et non pas comme une société de conception humaine. Dans le
mariage, Dieu veut que l'homme s'attache à sa femme afin que les deux
deviennent une "seule chair" ; or Christ et l'Eglise sont unis
selon le même principe, ce qui fait dire à Paul :
"Ce mystère est grand, je dis cela par rapport à
Christ et à l'Eglise" (Eph.
5. 31-32). L'apôtre a dit encore :
"Christ est ma vie et la mort m'est un gain" (Ph.
1. 21), convaincu qu'il était que ce n'était plus lui qui
vivait, c'était Christ qui vivait en lui (Gal.
2. 20). En ces témoignages devenus parole inspirée de Dieu,
n'avons-nous pas une émulation capable de nous mettre dans la même
situation que Paul et avec la même foi ? Tout chrétien qui entend
vivre vraiment sa foi les prendra à son compte.
Le chrétien a donc vocation à devenir participant de la nature divine
pour atteindre à la parfaite ressemblance de son Seigneur. Appelons
cette ressemblance : conformité à l'image, et décomposons la
comme l'Écriture le fait, sans toujours employer le terme
"conformité".
À l'orée de la vie chrétienne, nous avons deux
conformités jumelées : "En effet, si nous sommes devenus une
même plante avec lui par la conformité à sa mort, nous le serons
aussi par la conformité à sa résurrection. " (Ro.
6. 5) Ces deux conformités forment la base indispensable de
l'entrée dans la vie chrétienne et elle reprennent la notion de
"nouvelle naissance d'eau et d'Esprit", car pour naître, il faut
mourir, et pour vivre, il faut ressusciter (Ro.
6. 11).
Ensuite, au cours de sa marche, le chrétien rencontrera
une autre conformité qu'on peut appeler "conformité de condition" :
nous en avons l'exposé dans les passages suivants : Mat.
10. 22-33 ; Jn.
15. 18-25. Le Seigneur y donne à l'Eglise un avertissement de
nature à lui éviter d'être déconcertée par la haine, les persécutions,
et toutes les oeuvres d'hostilité dont elle sera la cible. Cet état de
choses subsistera constamment, il s'apparente à la contradiction dont
nous avons parlé (chapitre 4 - ce
qu'est l'Eglise). Le Maître étant parti, l'Eglise, son corps,
recueille le traitement qu'il a supporté lui-même de la part du monde.
Même ceux qui se convertiront un jour commencent parfois par une
détestation hostile. Ce sera une situation constante, inéluctable,
résultant de l'antinomie entre la société des hommes pécheurs et le
royaume des cieux, entre les ténèbres et la lumière.
Ceux qui, aujourd'hui, caressent le
dessein de fonder une Église en cherchant à convertir les gens soit
par, de savantes discussions, soit par une persuasion conciliante,
soit au moyen d'artifices plaisants et agréables, bâtiront avec du
bois, du foin et du chaume, leur oeuvre ne résistera pas à l'épreuve
du temps ; la repentance et l'humilité en seront restées
étrangères. Pour amener toute pensée captive à l'obéissance de Christ,
le seul véritable moyen consiste à "renverser des forteresses" en
combattant avec les armes puissantes de la vertu de Dieu (2
Cor. 10. 3-5). Ce genre de combat qui est celui de la foi,
l'Éternel l'avait mis en main à Jérémie : "Regarde, je
t'établis aujourd'hui sur les nations et sur les royaumes, pour que
tu arraches et que tu abattes, pour que tu ruines et que tu
détruises, pour que tu bâtisses et que tu plantes. " (Jér.
1. 10)
Voici le principe qui généralise la "conformité de
condition" : "Le disciple n'est pas plus que le Maître, ni le
serviteur plus que son Seigneur. Il suffit au disciple d'être traité
comme son Maître et au serviteur comme son Seigneur. " (Mat. 10.
24-25)
Considérons maintenant la "conformité de comportement",
dont voici le principe : "Devenez donc les imitateurs de Dieu
comme des enfants bien-aimés ; et marchez dans l'amour à
l'exemple de Christ qui nous a aimés et qui s'est livré lui-même à
Dieu pour nous comme une offrande et un sacrifice de bonne odeur. "
(Eph. 5.
1-2)
"Celui qui dit qu'il demeure en lui doit marcher aussi
comme il a marché lui-même. " (1
Jn. 2. 6)
Dans ce dernier passage, le verset 5 met en valeur le
fait de "garder sa parole" c'est-à-dire de garder tout l'enseignement
du Seigneur. S'il en est ainsi, la perfection de l'amour se trouve
atteinte ; de plus, il en résulte l'assurance que "nous sommes en
lui". Nous touchons ici au sommet de la vie chrétienne authentique.
Cependant, celui qui pourra se dire qu'il garde la parole
du Maître ne risquera-t-il pas de s'abuser, ou de se glorifier
lui-même ? Il faut y penser, mais le verset 5 ne manque pas de
netteté : c'est en sachant qu'il garde la parole du Maître qu'il
saura aussi qu'il demeure en lui, et il pourra même se le dire. Certes
une véritable et constante humilité sera nécessaire, ainsi que le
recours au témoignage du Saint-Esprit, selon Romains 8. 16 ; mais
n'ôtons pas de l'Écriture un encouragement aussi stimulant. Le verset
6 va encore plus loin en déclarant que si quelqu'un peut se dire qu'il
"demeure en lui" (et qu'alors il garde sa parole) il devra également
marcher comme il a marché lui-même. En somme, ce sont deux examens
auxquels ce quelqu'un se soumettra. D'abord il jugera son comportement
pour voir s'il se caractérise réellement par l'obéissance ;
ensuite, il regardera sa marche à travers le temps et les
circonstances de la vie, et la rapprochera de celle du Seigneur, sur
laquelle il aura médité attentivement. De cette manière, il se donnera
deux guides : l'un étant les commandements et les instructions du
Seigneur, l'autre, l'exemple de sa marche. En y veillant avec
application, il satisfera la "conformité de comportement".
Relevons dans l'Écriture quelques indications relatives à
une marche chrétienne empruntant celle du Seigneur :
- "faire aux autres ce qu'il a fait lui-même" (Jn. 13. 15)
- "aimer comme il a aimé" (Eph. 5. 1-2) ;
- "pardonner comme il a pardonné" (Col. 3. 13) ;
- "donner notre vie pour les frères comme il l'a donnée pour nous" (1 Jn. 3. 16) ;
- "avoir en soi les sentiments (ou dispositions de coeur) qui étaient en lui" (Ph. 2. 5)
Nous venons de réunir quatre "conformités" : conformité à
sa mort, conformité à sa résurrection, conformité de condition (le
disciple est traité comme son Maître), conformité de comportement
(parole observée, marche suivie). Elles conduisent à une cinquième
conformité, celle de la ressemblance à l'image du "Premier-né".
Ainsi se voit tracé le chemin de la vie chrétienne
aboutissant à la stature parfaite de Christ pour aller jusqu'à la
ressemblance à l'image qu'il nous offre.
LE PORTRAIT
Aujourd'hui un portrait s'obtient généralement par la
photographie, quoiqu'il puisse fort bien emprunter un mode descriptif.
Nous en avons un bel exemple au chapitre 5 de l'Évangile de Matthieu,
où l'ensemble des versets
1 à 12 forme un véritable portrait en différents traits de
dispositions d'ordre spirituel. De qui est donc ce portrait ? De
tous ceux qui ont reçu un "coeur nouveau" et sont soutenus par une foi
ardente ; c'est le portrait de tout véritable enfant de Dieu. De
lui seul ? ce ne serait pas possible ! Ce portrait est aussi
celui du Seigneur Jésus-Christ, et on y trouve toutes les dispositions
de coeur qui étaient en lui.
Voilà donc bien un merveilleux portrait qui reflète tout
autant les traits du Maître que de ceux avec lesquels il est en
communion. Cette pensée nous reporte ainsi à une ressemblance :
le Maître porte en lui une image modèle, et les disciples la
reflètent. On peut encore dire, à l'inverse, que les béatitudes qui
emploient le pluriel, réunissent l'ensemble des caractéristiques de
coeur et de vie qu'on devra trouver en tout disciple accompli, et qui
conviennent tout à fait au Seigneur lui-même. En voyant les choses de
cette manière, on va de la reproduction à l'image modèle, et l'on
s'aperçoit que la conformité de l'une à l'autre est parfaite.
Pour contempler ce portrait, pour le vouloir à soi, la
vallée où se tenait d'abord le Maître entouré de ses disciples
n'offrait pas le lieu propice : allées et venues, paroles
profanes, mouvements et rires. Non ! il fallait monter sur la
montagne et pouvoir librement s'y retirer afin de ne rien entendre que
la voix de la vérité, il fallait que l'oreille tendue fut celle d'un
coeur avide et conquis, il fallait suivre le Maître sur la montagne,
car là où est l'Esprit du Seigneur, là est la liberté.
"Heureux les pauvres en esprit, car le royaume des
cieux est à eux" (Mat.
5. 3)
Qui sont-ils ? Ce sont ceux qui se savent pauvres en
eux-mêmes, en leur vie intérieure, ceux qui ne s'illusionnent pas et
sentent le vide spirituel du fond d'eux-mêmes. Les voilà donc pleins
du désir de recevoir les richesses qui leur manquent, et c'est vers
Dieu qu'ils dirigent leurs aspirations à connaître les vérités qui ne
sont ni en l'homme, ni dans le monde et dont la vie dépend, dont le
coeur a soif. On peut les reconnaître en ceux que le Seigneur a
appelés "les enfants" (Mat.
11. 25) par opposition aux "sages et aux intelligents". Aux
enfants seuls les vérités révélées sont réservées.
Deux des béatitudes (versets 3
et 10)
comportent une promesse au présent (la même) "le royaume des cieux
est à eux", alors que les autres béatitudes sont associées à une
promesse formulée au futur. Pourquoi ne pas admettre que la forme du
présent indique une possession immédiate et dire, par conséquent, que
les pauvres en esprit et ceux qui sont persécutés pour la justice
possèdent d'ores et déjà le royaume des cieux. Ils ont en leur coeur
la lumière de ce royaume, à savoir, la justice, la paix et la joie par
le Saint-Esprit (Ro.
14. 17). En effet, ces termes fort riches résument les
caractères qui fondent le royaume des cieux.
"Heureux les affligés car ils seront consolés" (Mat.5.
4).
Quelle bonne chose que de ressentir de l'affliction en
réfléchissant à notre indigence morale, celle de notre nature ;
puis, d'autre part, de déplorer les ravages profonds de l'état de
péché au sein de la société humaine, au point d'en pleurer comme le
fit Jésus devant Jérusalem en voyant à l'avance les destructions et
les morts dont elle souffrirait en raison de ce qu'elle n'aura pas
connu le temps de la grâce de son Dieu.
Il s'agit donc d'une affliction ou d'une tristesse "selon
Dieu" qui appelle toujours la consolation. Le Seigneur l'a bien
dit :
"voici sur qui je porterai mes regards : sur celui
qui souffre et qui a l'esprit abattu, sur celui qui craint ma parole"
(Es. 66.
2).
"Heureux les doux car ils hériteront la terre" (Mat.
5. 5).
L'exemple vient tout droit de Jésus qui a dit : je
suis doux et humble de coeur. Cette béatitude utilise un paradoxe car,
dans notre monde, ceux qui s'emparent de l'espace n'ont généralement
pas la douceur comme qualité première ; celle-ci étant peu
compatible avec l'ambition et l'esprit d'accaparement ou de
domination. Ce sont les violents de toute sorte qui s'emparent des
sols, des territoires, des pays. Bien au contraire, la douceur propre
à l'Évangile se plaît à concéder aux autres et non à
s'accaparer ; elle sait renoncer aux biens de ce monde. Cependant
c'est elle qui disposera de la terre comme si elle possédait une
grande puissance ! Quand et où cela ? Sur la terre du
millénium ou sur la nouvelle terre qui portera la nouvelle
Jérusalem ? Pensons plutôt que la promesse d'hériter la terre
constitue dans le grand ordre éternel un principe de libre jouissance
du royaume de Dieu et de ses possessions, comme nous le discernons
dans la prière sacerdotale de Jésus : "tout ce qui est à moi
est à toi, et tout ce qui est à toi est à moi" (Jn. 17. 10). On
peut aussi rapprocher notre béatitude du psaume 37,
verset 11 (TOB) : "mais les humbles posséderont le pays,
ils jouiront d'une paix totale" (le pays de Canaan).
L'Écriture nous exhorte à mettre dans nos relations entre
frères de la douceur. Celle-ci compte parmi les vertus spirituelles en
compagnie de la miséricorde, de la bonté, de l'humilité et de la
patience ; elle y a bien sa place ainsi que parmi les neuf
aspects du "fruit de l'Esprit" (Gal.
5. 22) où elle figure également.
"Heureux ceux qui ont faim et soif de la justice, car
ils seront rassasiés". (Mat.
5. 6)
Le prix qui s'attache à la justice est tellement élevé
que l'on comprend que les coeurs livrés à Dieu, en ressentent un
besoin tel qu'il se montre exigeant comme la faim et la soif d'un
organisme en pleine santé. Ils seront rassasiés ! Cela aussi
se comprend aisément puisqu'ils sont infiniment agréables à Dieu. Ceux
qui aspirent si vivement à la justice seront comblés, car, en même
temps, ils aspirent à la vie éternelle. Ils la veulent, cette justice
de Dieu, tant en eux-mêmes comme le plus beau des vêtements que dans
toute l'action de leur être.
"La grâce de Dieu nous enseigne à vivre dans le siècle
présent selon la sagesse, la justice et la piété. " (Tite
2. 12) Nous aimerions affirmer à nouveau combien il doit être
cher à tout disciple de Christ de se placer en tous temps sous
l'empire de la justice de Dieu, grand ordre moral et spirituel où la
vie parfaite et impérissable trouve son atmosphère. Sachons qu'elle
est indestructible, inflexible, inéluctable ! Tant que nous
vivons sur cette terre, appliquons-nous à l'observer et à la faire
pénétrer dans toutes nos intentions. De plus, apprenons à nous servir
de la justice de Dieu, à l'enseigner autour de nous ;
rappelons-nous la prophétie suivante de Daniel :
"Ceux qui auront été intelligents brilleront comme la
splendeur du ciel, et ceux qui auront enseigné la justice à la
multitude brilleront comme les étoiles, à toujours et à perpétuité.
" (Dan
12. 3)
Jésus-Christ n'est-il pas le roi de justice et de
paix ? Il ne peut y avoir de paix sans justice (celle de Dieu
assurément).
"Heureux les miséricordieux, car ils obtiendront
miséricorde" (Mat.
5. 7)
En général, la miséricorde bénéficie d'une bonne presse,
mais n'est-elle qu'un sentiment humain, ou une heureuse disposition de
caractère ? Certes, nous n'en méprisons rien et tout bon
mouvement des coeurs ne peut que recevoir encouragement. Cependant,
notre béatitude nous présente tout autre chose
qu'un bon côté humain, elle nous parle d'une authentique vertu
chrétienne dont la grande supériorité lui vient de ce qu'elle
ressemble à la miséricorde divine et s'exerce en vue du salut éternel
de ceux qui en sont l'objet. En effet, cette miséricorde a pour
principal office de pardonner au coupable afin de le conduire dans la
voie du salut :
"Mais toi tu es un Dieu prêt à pardonner, compatissant
et miséricordieux, lent à la colère et riche en bonté... " (Néh.
9. 17)
Étant miséricordieux, eux aussi, les disciples de Christ
doivent avoir à coeur de pardonner toujours et sans réticences à ceux
qui leur font tort ou les maltraitent. Le faire entre dans leur
mission de témoins et contribue à la puissance qu'ils déploient. Nous
ne pouvons que nous souvenir des heureuses circonstances où nous avons
vu des âmes rebelles et agressives plier soudain et s'émouvoir
jusqu'aux larmes devant l'attitude chrétienne du pardon immédiat. Et
quand un tel revirement se produit chez notre interlocuteur, son coeur
s'ouvre et la parole de Dieu peut s'y glisser.
"Heureux ceux qui ont le coeur pur, car ils verront
Dieu". (Mat.
5. 8)
Certains ruisseaux coulant doucement à travers une
prairie offrent à la vue une eau limpide dont on dit aussitôt qu'elle
est une eau pure. Elle laisse apercevoir le fond de sa route creuse
ainsi que les corps étrangers qui peuvent s'y trouver. C'est à cette
image qu'il semble intéressant de comparer le coeur pur. En effet,
celui-ci se caractérise essentiellement par sa limpidité, si bien
qu'on voit jusqu'au fond de ce coeur, que l'intéressé voit lui-même
jusqu'au fond de son coeur et qu'il peut enlever toute impureté
accidentelle. C'est un coeur qui ne dissimule rien
et que l'on peut maintenir en état de propreté, car l'homme d'un tel
coeur tient à cette netteté, et sa prière s'apparente à celle de
David :
"Purifie-moi avec l'hysope et je serai pur ;
lave-moi et je serai plus blanc que la neige. " (Ps.
51. 9)
Aussi celui qui veille sur son coeur pour le garder pur
sera-t-il prompt à discerner en lui la moindre velléité d'hypocrisie,
ou l'assaut de toute subtile séduction, de toute amorce de tentation,
de tout risque de superstition, et réagira-t-il alors avec la fermeté
de la foi dans le sang de Jésus qui purifie de tout péché, mais qui
préserve aussi d'y succomber. Le profond et constant désir de
sauvegarder son coeur de toute embûche exclura l'éventuel malheur de
tomber dans le partage si hautement réprouvé (on ne peut servir deux
maîtres à la fois), comme de se laisser atteindre par la superstition
ou l'idolâtrie aux formes si diverses, ou encore empêchera que l'on
s'occupe trop de soi-même, de sa santé, de son existence et de ses
intérêts. L'apôtre Paul déplore que des chrétiens cherchent leurs
propres intérêts et non ceux de Jésus-Christ (Ph.
2. 21).
En définitive, le coeur pur est aussi un coeur libre à
l'égard de tout enchaînement, de tout ce qui éloigne de la communion
avec le Seigneur, un coeur qui fait l'objet d'une vigilance de tout
moment.
"Car ils verront Dieu". Promesse suprême et la
plus haute des espérances de toujours.
"Pour moi, dans mon innocence, je verrai ta
face ; dès le réveil, je me rassasierai de ton image" (Ps.
17. 15). Rappelons aussi : "Bien-aimés, nous sommes
maintenant enfants de Dieu, et ce que nous serons n'a pas encore
été manifesté ; mais nous savons que, lorsque cela sera
manifesté, nous serons semblables à lui, parce que nous le verrons
tel qu'il est. " (1
Jn. 3. 2)
Ne sentons-nous pas qu'au-dedans de nous-mêmes réside un
désir constant de voir Dieu ? Ne nous étonnons donc pas de
découvrir un sens particulier et mystérieux s'attachant au terme
"voir", autrement dit un sens qui émane de l'Esprit. L'une des
terribles conséquences de la chute n'est-elle pas d'avoir séparé le
Créateur de sa créature faite à son image ! L'amour, mobile
absolu des oeuvres de Dieu, ne le voulait pas ! Mais, en Eden,
l'homme a contracté un état étranger à sa nature première, l'état de
péché, qui rompt, qui détruit et introduit la mort. Comprenons bien
que nous sommes nés sur la terre du péché, et que nous y menons une
existence enserrée dans les conditions de la plus étrange anomalie qui
soit. Nous y sommes des morts-vivants et le restons tant que la grâce
rédemptrice n'a pas fait son oeuvre en nous pour nous réconcilier avec
notre Dieu.
Qu'elle est donc estimable et précieuse, cette
réconciliation qui prélude au temps prochain où nous verrons Dieu, où
le Père éternel et son enfant se retrouveront face à face, dans le
rayonnement de l'amour et de la sainteté. Depuis la réconciliation et
jusqu'à ce que nous puissions voir Dieu (Dieu lui-même sera avec eux,
Apo.
21. 3), aucun vide ne subsiste pourtant, car l'Esprit Saint
étant venu en nous, il nous a unis avec le Seigneur Jésus-Christ et
avec notre père céleste au moyen de cette "connaissance" personnelle
et intérieure dont nous avons déjà parlé.
L'avertissement selon lequel l'homme ne peut voir Dieu et
vivre (Ex.
33. 20) ne signifie pas que Dieu serait
d'essence invisible, mais seulement que son absolue sainteté ne peut
recevoir aucun regard de l'homme entaché du péché, ou même du seul
fait qu'il n'est pas encore transformé en toute sa personne (esprit,
âme et corps) et n'a pas atteint la perfection absolue. Jésus nous a
dit que les anges des petits enfants voient continuellement la face de
Dieu le Père qui est dans les cieux (Mat.
18. 10). Après complète rédemption, c'est-à-dire lorsque les
élus auront revêtu le corps céleste, ils verront face à face et
connaîtront comme ils ont été connus (1
Cor. 13. 12). Nous aimons lire et relire la merveilleuse
assurance qu'exprime aussi l'apocalypse :
"Il n'y aura plus de malédiction, le trône de Dieu et
de l'agneau sera dans la cité, et ses serviteurs lui rendront un
culte, ils verront son visage et son nom sera sur leurs fronts. Il
n'y aura plus de nuit, nul n'aura besoin de la lumière du flambeau
ni de la lumière du soleil, car le Seigneur Dieu répandra sur eux sa
lumière et ils régneront aux siècles des siècles. " (Apo.
22. 3-5 - TOB)
Actuellement nous marchons par la foi et non par la vue
et nous demeurons "loin du Seigneur" (2
Cor. 5. 6-7). Ce passage établit clairement la différence entre
la situation présente et celle qui attend les élus après leur
résurrection.
"Heureux ceux qui procurent la paix, car ils seront
appelés fils de Dieu !" (Mat.
5. 9)
Considérer certaines personnes comme pacifiques ne
signifie pas pour autant qu'elles procurent la paix. Le mot grec
"eïrênêpoïountés" désigne ceux qui ont le pouvoir d'établir la paix.
Ils en ont les ressources et la vocation en eux, comme il le faudrait
chez tous les disciples de Christ accomplis. Qu'est-ce que la paix
dans notre béatitude ? Il s'agit uniquement de celle que
Jésus-Christ donne :
"Je vous donne ma paix. Je ne vous la donne pas comme
le monde la donne. Que votre coeur ne se trouble point, et ne
s'alarme point. " (Jn.
14. 27) Ajoutons cette autre citation : "Et la paix de
Dieu qui surpasse toute intelligence, gardera vos coeurs et vos
pensées en Jésus-Christ" (Ph.
4. 7).
D'autre part, nous voyons tout de suite la parfaite
relation entre la justice mise en pratique et la paix venant l'une et
l'autre de Dieu dans les passages suivants :
"À celui qui est ferme dans ses sentiments, tu assures
la paix, la paix, parce qu'il se confie en toi" (Es.
26. 3) ; "Éternel tu nous donnes la paix, car tout ce
que nous faisons, c'est toi qui l'accomplis pour nous" (Es.
26. 12) ; "la justice et la paix s'embrassent" (Ps.
85. 11).
Considérons que la justice et la paix de Dieu ont place
dans cette puissante chaîne des vérités fondamentales et éternelles
que voici : VIE, AMOUR, VÉRITÉ, JUSTICE, PAIX, SAINTETÉ, JOIE.
Cette chaîne, on peut la contempler comme la lumière dont la
possession par le Saint-Esprit s'offre à tout ardent disciple de
Christ. En conséquence, et avant toute autre considération, procurer
la paix, n'est-ce pas tout simplement rendre témoignage au Prince de
la paix, pour, en son nom, annoncer la repentance, le pardon des
péchés et la réconciliation avec Dieu. Sur la route d'un enfant de
Dieu, bien d'autres circonstances s'ouvrent en lesquelles il sera
porteur et messager de la paix de Dieu. C'est pour lui qu'Esaïe
dit :
"Qu'ils sont beaux sur les montagnes, les pieds de
celui qui apporte de bonnes nouvelles, qui publie la paix !"
(52. 7).
Au sein de l'Assemblée, il sait dissiper les dissensions,
et, par le rayonnement de son amour, il chasse les ombres. Le triomphe
de l'amour et de la soumission apporte toujours la paix.
Pourquoi ceux qui procurent la paix seront-ils appelés
fils de Dieu ? La désignation d'enfant de Dieu résulte d'un
décret du Très-Haut qui l'accorde toujours à ceux qui naissent d'eau
et d'esprit, mais notre béatitude promet aux porteurs de la paix de
les reconnaître hautement comme fils du "Dieu de paix" puisque, par
son Esprit, ils font ce qui lui est tellement agréable. Pensons
toujours que Jésus est le roi de justice et de paix, si bien que tous
ceux qui se sentent investis de la mission de faire régner autour
d'eux la justice et la paix, reflètent déjà son image.
"Heureux ceux qui sont persécutés pour la justice, car
le royaume des cieux est à eux !" (Mat.
5. 10)
Nous avons vu que le Seigneur Jésus-Christ serait
toujours un signe qui provoquera la contradiction, et, comme il l'a
dit : "s'ils m'ont persécuté, ils vous persécuteront aussi". La
raison de ces persécutions tient à ce que l'Évangile annonce le
royaume de Dieu et sa justice. Or, cette justice heurte l'esprit et
l'état de notre monde, dont les réactions, conduites par Satan, se
manifestent beaucoup en persécutions de tous ordres. Ceux qui ne se
laissent pas arrêter par elles et poursuivent leur mission d'enseigner
et de manifester la justice de Dieu en les supportant ont vraiment
part au royaume des cieux.
"Heureux serez-vous... Réjouissez-vous et soyez dans
l'allégresse... " (Mat.
5. 11-12)
Les versets qui terminent l'ensemble des béatitudes
opposent le bonheur et la joie aux outrages, aux calomnies, aux
persécutions et à l'accablement susceptible de décourager les fidèles
de Christ. Au lieu de sombrer dans le désespoir, la foi leur permettra
de se réjouir dans l'attente certaine d'une grande récompense qu'ils
recevront dans les cieux et qui, maintenant déjà, illumine et soutient
leur coeur.
Ainsi, les béatitudes brossent le portrait des fidèles
disciples et également celui de leur Maître. Lorsque la foi se
conjugue à l'obéissance dans l'amour, ce n'est plus l'homme qui vit,
c'est Christ qui vit et agit en lui, ce qui fait qu'il porte les mêmes
traits caractéristiques que lui.
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