1831. - « JE COURS VERS LE BUT ». - PROJETS. - ÉPREUVES. - MÉ : SOUFFRANCES POUR CHRIST. - Ô MORT ! OÙ EST TON AIGUILLON ? - MENACES DE GUERRE. - LE PAGANISME RELÈVE LA TÊTE. - MORT DU ROI TAMATOA. - LA GUERRE ÉCLATE. - INTERVENTION DES CHEFS DE TAHITI. - NOUVEAU VOYAGE MISSIONNAIRE. WILLIAMS TOMBE A LA MER ET RISQUE DE SE NOYER. - RENOUVEAU DE PAGANISME A RAROTONGA. - CYCLONE ET RAS DE MAREE - RUINES.
QUELS que soient les résultats de
ses travaux, Williams ne s'imagine jamais qu'il a
atteint le but. Dans sa pensée, jamais ce
qu'il a fait n'est un
« terminus » : c'est une
étape, un relais, d'où il repartira
pour de nouvelles victoires. Il croit que le moment
est venu d'étendre les conquêtes de
l'Évangile aux Nouvelles-Hébrides.
Déjà l'infatigable missionnaire
dresse de nouveaux plans en relisant ce que le
capitaine Cook a écrit des îles
où il espère bientôt aborder.
Et à ce sujet, son biographe écrit
les lignes suivantes : « Si l'esprit
de suite et la persévérance, si un
but unique poursuivi avec zèle dans un
domaine quelconque - celui de la science par
exemple - attire l'admiration des hommes, quels
sentiments ne devons-nous pas éprouver
lorsque nous considérons la vie de ce pionnier
jamais lassé, vie
constamment tendue vers de nouvelles
conquêtes au service du Christ. Comme
l'Apôtre il pouvait dire :
« Je fais une chose. » Et rien
ne put jamais le détourner de la course que
le Maître lui avait
proposée. » [E. Prout].
Tandis qu'il fait des plans d'avenir pour
fortifier les églises nées de la
veille, et pour visiter les missionnaires
bronzés qu'il a laissés dans les
archipels du Pacifique, tandis qu'il prépare
le second voyage promis aux îles Samoa, le
ciel s'obscurcit soudain à
Raïatéa. Mrs. Williams tombait à
nouveau gravement malade. Les souffrances
intolérables d'un mal nommé dans ces
îles : fééfée
(1), l'avaient
rapidement amenée à un état de
faiblesse telle que le missionnaire dut songer
à partir immédiatement pour
l'Angleterre.
À cette époque il
écrit : « Si l'état de
Mrs. Williams ne s'améliore pas je ne
pourrais tenir la promesse faite de visiter
à nouveau Rarotonga et les îles Samoa.
À cause d'elle, je ne veux pas remettre
à nouveau le retour. Je puis faire autant
peut-être en rentrant immédiatement
qu'en attendant encore dix à douze mois...
Plusieurs me blâment déjà
d'avoir tant tardé et craignent qu'elle ne
soit trop épuisée pour pouvoir se
remettre. Je désire ardemment qu'on envoie
un missionnaire à Raïatéa. J'en
éprouverais un grand
soulagement. »
Lorsque John Williams annonça sa
résolution de départ aux
Églises de Raïatéa et Tahaa,
tous furent consternés. On refusait de le
laisser partir, on briserait plutôt le navire
qui viendrait le chercher. Les femmes
précédées de la reine vinrent
trouver Mrs. Williams, la
suppliant de rejeter toute idée de
départ. L'insistance auprès des
missionnaires fut telle que Mr. et Mrs. Williams
s'en trouvèrent gênés, et une
amélioration survenant ils
acceptèrent de prolonger leur séjour
de quelques mois. Ce délai allait permettre
la mise au point de la traduction du Nouveau
Testament en dialecte de Rarotonga, et de faire la
visite promise aux Îles Australes et aux
Samoa.
« ... Tels sont nos projets,
écrit Williams à W. A. Hankey ;
à moins d'imprévu nous arriverons
dans les douze mois qui suivront la
réception de cette lettre... Je vous suis
reconnaissant de votre affectueuse
appréciation de mes travaux. Il est
difficile de parler de soi-même ; mais
je dois bien dire que la construction de mon navire
m'a donné des possibilités
d'évangélisation et des
résultats qui dépassent ce qu'on peut
apprécier...
« Quelques-uns des ouvriers que
j'emploie depuis plusieurs années sont
devenus extrêmement habiles. L'un d'eux a
réparé à Houahiné la
goélette de Mahiné. Deux autres ont
construit un joli navire de quarante tonneaux pour
Tamatoa... Toutes les pièces de bois et de
fer ont été faites par eux...
« Je viens d'envoyer deux chaises
à ma soeur, Mrs. Kuck, comme spécimen
du travail rarotongan : l'une est pour
vous ; Mrs. Kuck doit vous l'expédier
et j'espère que vous voudrez bien me faire
l'honneur de l'accepter. »
À son retour des Samoa, Williams
s'était aperçu qu'un ancien guerrier
dit nom de « Mé »
n'occupait pas sa place au temple. Au temps du
paganisme, Mé avait été la
terreur de Raïatéa et des
Îles-sous-le-Vent. Dans sa dernière
bataille, il avait perdu les deux yeux. Il fut l'un
des premiers à se convertir au
Christianisme, et l'un des premiers membres admis
dans l'Eglise
raïatéenne. Malgré son
épreuve, il assistait aux écoles de
semaine apprenant par coeur ce que des amis
voulaient bien lui lire. Il venait aussi à
tous les services du dimanche. Un passant, un chef,
le roi lui-même prenaient
l'extrémité du bâton de
Mé, et le conduisaient ainsi à
l'école ou an temple.
« Je ne le vis pas à sa
place accoutumée, et à l'issue un
culte sa cordiale poignée de main me
manqua.
- Pourquoi Mé n'est-il pas là,
demandai-je à un diacre ? - Il est
très gravement malade, et on croit que sa
mort est prochaine. » J'allai le voir, le
trouvai dans une petite case près de sa
maison, et je lui dis :
- Mé, je suis bien affligé que
tu sois malade !
- Est-ce bien toi, demanda-t-il ;
est-ce bien ta voix que j'entends avant de
mourir ? Maintenant je mourrai content. Je
craignais de mourir avant ton
retour. »
Je lui demandai aussitôt si l'on
prenait soin de lui, si ou lui apportait
régulièrement ses repas ? [Au
temps du paganisme le malade ou le vieillard
étaient mis à mort de façon
barbare. Sous prétexte de les conduire
à la rivière pour qu'ils se baignent
on les menait jusqu'à un trou
préalablement creusé où on les
poussait, puis on entassait des pierres sur la
victime. Même après l'introduction du
christianisme, il était nécessaire
que nous veillions à ce que les malades et
les vieillards reçussent les soins
nécessaires]. À ma question,
Mé répondit qu'il lui arrivait
d'avoir bien faim.
- Comment cela, lui dis-je. Et tes
plantations ? [Malgré sa
cécité, Mé cultivait
lui-même ses champs de patates et sa
plantation de bananiers].
- Quand je suis tombé malade, les
gens avec qui je vis ont pris mes
plantations ; et parfois j'ai faim.
- Pourquoi ne l'as-tu pas dit au chef, ou
aux frères, qui viennent te voir ?
- J'ai craint que ceux qui me font tort ne
me traitent de rapporteur et ne disent du mal de ma
religion ; et j'ai réfléchi
qu'il valait mieux avoir faim ou mourir
plutôt que de leur donner l'occasion de le
faire. »
Je lui demandai alors quels étaient
ceux des frères, qui étaient venus le
voir et qui lui avaient lu la Bible ? Il m'en
nomma plusieurs, et ajouta :
« J'aurais aimé qu'ils vinssent
plus fréquemment, mais je ne suis pas seul.
Dieu me visite souvent. Tous deux nous parlions
ensemble quand tu es
arrivé. »
- Et que disiez-vous ?
- Je lui disais :
« Prends-moi pour être avec Christ,
ce qui me serait bien meilleur. »
Comme je lui parlais de la fin probable, de
la rencontre avec Dieu, et de la raison de son
espérance, il me répondit :
« Ce matin j'ai eu une grande
angoisse ; mais maintenant je suis heureux.
J'ai vu une haute montagne aux pentes abruptes
d'accès difficile, et je me suis mis
à la gravir. Quand j'étais
déjà à une très grande
hauteur j'ai perdu l'équilibre et j'ai
roulé en bas. Épuisé de
fatigue et de tristesse je m'éloignai puis
à quelque distance de la montagne je m'assis
pour pleurer. Mais voilà qu'une goutte de
sang tomba sur cette montagne et la fit
disparaître. »
Je lui demandai comment il expliquait cette
vision ? Ma question l'étonna et il
dit : « La montagne ce sont mes
péchés, la goutte de sang c'est le
précieux Sang de Jésus, qui ôte
la peine de mon
péché. »
Les yeux de Mé étaient depuis
longtemps fermés aux choses d'ici-bas, mais
les yeux du coeur avaient contemplé la
glorieuse vision... Quand je lui parlai de remèdes,
il me dit qu'il
prendrait ce que j'enverrais, mais qu'il
continuerait de prier Dieu pour être repris
de ce monde... »
J'étais à ses
côtés à l'instant de l'appel.
Il prononça à haute voix plusieurs
promesses des Écritures ; puis
après avoir crié avec force :
« O mort, où est ton
aiguillon ? », les paroles ne furent
plus qu'un murmure, les yeux restèrent
immobiles, les bras retombèrent, l'esprit
était parti pour trouver son Sauveur...
Ainsi mourut Mé, le guerrier de
Raïatéa devenu aveugle. En quittant son
lit de mort, je priai Dieu que ma fin fut semblable
à la sienne. »
Peu après son retour à
Raïatéa, Williams traversa l'une des
périodes les plus pénibles de son
ministère en ce pays.
« L'année 1831, écrit-il
dans son livre
(2),
fut une
année de détresse et d'angoisses dont
les seuls détails rempliraient un volume. Je
me contenterai donc d'en donner un court
résumé.
Fenouapeho (3), chef de
Tahaa
(4), ayant
disparu en mer, le gouvernement revint à
Tapoa (5), petit-filsd'un
féroce
guerrier de ce nom, ennemi
irréductible du christianisme. À
l'avènement de Tapoa, les exilés pour
cause de meurtre, complots, etc..., les païens
endurcis, quelques vieux guerriers, et de
façon générale les tenants
dans l'ancien régime, se rallièrent
autour du jeune chef. Ils le flattèrent,
insinuèrent que par une guerre bien
menée il ne serait pas impossible de vaincre
Tamatoa et de devenir le chef de toutes les
Îles-sous-le-Vent, comme l'avait
été Tapoa, son grand-père,
etc...
Williams alla voir le jeune chef. Il lui dit
tout ce que la raison, le bon sens et le coeur
suggéraient, pour le dissuader de poursuivre
la voie mauvaise où il s'engageait. Mais
l'ambition parlait déjà trop fort en
Tapoa, et le parti qui s'était formé
autour de lui veillait à le maintenir dans
ses idées de guerre et de renom à
conquérir par les armes. Certain jour que
Williams plaidait la cause de la paix auprès
de Tapoa, un guerrier furieux et qui
possédait un fusil mit en joue le
missionnaire. Mais un indigène, voyant le
geste, bondit et arracha l'arme des mains de
l'homme, avant que le coup partit.
Les rumeurs de guerre, les défis de
Tapoa, l'anxiété que provoquaient les
constantes menaces d'une descente de l'ennemi, les
préparatifs évidents de celui-ci,
tout cela fatiguait Tamatoa. Déjà
affaibli par l'âge, il tomba malade, pour ne
plus se relever. « J'allais
fréquemment le voir, écrit Williams.
Calme, il regardait à Christ comme à
son unique Sauveur. Peu avant la fin, il convoqua
son
entourage :
son fils qui devait lui succéder, sa fille,
les chefs. Il les exhorta à rester
fidèles à l'Évangile, à
maintenir les lois, à être bons avec
leurs missionnaires. Puis, levant vers moi ses deux
bras amaigris, Tamatoa dit : Mon cher ami,
voilà bien longtemps que nous travaillons
ensemble pour la bonne cause. Rien ne nous a jamais
séparés. La mort va le faire. Mais
rien ne pourra nous séparer de l'amour de
Christ. »
Le 10 juillet 1831, John Williams
écrivait : « C'est avec une
immense tristesse que je porte à votre
connaissance ce qu'est l'état actuel des
Îles-sous-le-Vent. L'agitation y est
très grande. Depuis deux ou trois mois nous
sommes constamment menacés de la guerre, et
il est à craindre qu'elle n'éclate
tôt ou tard. J'ai aussi la douleur de vous
dire la mort de notre cher Vieux roi :
Tamatoa. La période d'agitation,
d'insécurité, que nous traversons, a
eu de pénibles répercussions sur un
organisme déjà fortement atteint par
l'âge, ce qui a abrégé sa vie.
Il est mort heureux. Ses dernières paroles -
ou à peu près - furent
celles-ci : « Prenez garde que
l'Évangile ne soit chassé de nos
îles ! » L'enterrement a eu
lieu mercredi. Nous ressentons vivement son
départ... »
Dans son livre, Williams ouvre ici une
parenthèse pour ajouter quelques
détails sur le roi de
Raïatéa :
« C'était un fort bel homme
de haute stature (2 m. 10 de hauteur, soit 6 pieds
11 inches), le patriarche de la
royauté : sa fille aînée
gouverne Houahiné, et sa petite-fille est
reine de Tahiti.
« Lors de la visite de la
délégation anglaise, Mr. Bennet
demanda au roi quel crime, du temps de son
paganisme, pesait le plus sur sa conscience. Je
servais d'interprète. Après quelque
hésitation, Tamatoa répondit :
« C'est d'avoir permis qu'on
m'adorât comme dieu alors que je savais
n'être qu'un homme. » Autrefois il
était effectivement adoré comme dieu,
et c'est à lui qu'on présentait
l'oeil de la victime humaine, avant que le corps
fût porté au maraë.
« Avant sa conversion Tamatoa
était l'esclave d'une liqueur enivrante
obtenue par la macération d'une
racine : le kava. Cette liqueur a des effets
narcotiques qui rendent le bruit
particulièrement désagréable.
Dès qu'on apprenait que Tamatoa avait bu,
tout bruit cessait aux alentours, et on emmenait
aussitôt les enfants. Extrêmement
violent, s'il était dérangé de
quelque manière, il saisissait une lance ou
une massue et exerçait sa vengeance sur la
première personne rencontrée, amie ou
ennemie. Lorsqu'il était en colère
son apparence était, paraît-il,
terrifiante : un jour qu'il avait
été dérangé de cette
sorte d'ivresse, il sortit furieux, et ne trouvant
pas d'arme il frappa d'un coup de poing si violent
la première personne rencontrée que
l'oeil de la victime sortit de l'orbite et
lui-même se brisa les deux premières
phalanges de l'index.
« Au moment de sa conversion il
fit à Dieu le serment solennel de ne plus
jamais boire. Je l'ai connu intimement pendant
quinze ans et je suis convaincu qu'il a
été fidèle à la parole
donnée. Son exemple fut bienfaisant pour
l'oeuvre missionnaire à Raïatéa.
Alors qu'ailleurs mes collègues avaient
à lutter contre l'alcool, ce poison des
âmes et des corps, à
Raïatéa l'ivresse était
extrêmement rare. Je n'en ai vu que deux cas
en quinze ans.
« En devenant chrétien,
Tamatoa se dépouillait de bien des
prérogatives royales, et il abdiquait ce
caractère divin que lui accordait le
paganisme. Bien souvent il dut y avoir lutte, avant
que la grande décision fût prise, en ce coeur qui
n'avait jamais connu d'autre loi que son bon
plaisir. Il est resté fidèle. O
merveilleuse puissance de la Croix !
La mort de Tamatoa, loin de calmer le jeune
chef de Tahaa et son parti, sembla
déterminer un redoublement de
préparatifs de guerre. Tous mes efforts pour
empêcher qu'on en vienne aux mains semblaient
inutiles, écrit Williams. D'autre part, je
devais faire sans retard la visite aux Samoa, ne
voulant ni ne pouvant prolonger mon séjour
en Polynésie à cause de l'état
précaire de Mrs. Williams. Je pris donc la
décision d'aller à Tahiti pour
demander à quelques puissants chefs
d'intervenir en faveur de la
paix... »
En l'absence du missionnaire, les
hostilités commencèrent et quand les
chefs de Tahiti arrivèrent une grande
bataille était sur le point de se livrer.
Ils purent l'empêcher, et eurent la joie de
négocier la paix.
Le 21 septembre 1831, « le
Messager » reprenait la mer, faisant
voile sur Rarotonga. Mrs. Williams et ses deux fils
étaient du voyage. Le vent était
favorable, et la traversée s'effectua
rapidement. Le 28, la famille missionnaire
débarquait dans l'île de Rarotonga,
laquelle, après les jours troublés de
Raïatéa, fit aux voyageurs l'impression
d'une oasis.
Même une oasis ne pouvait retenir
longtemps Williams ; accompagné de Mr.
Buzacott et de Makéa, il repartait peu
après pour visiter les autres îles de
l'archipel.
Les évangélistes ont besoin
d'être visités, encouragés et
soutenus ; ils ont besoin d'être
aidés dans leur lutte contre le paganisme
ambiant. Il est aussi nécessaire de les
ravitailler en livres : bibles,
évangiles, abécédaires et
autres traités pour les écoles ;
enfin il est bon de songer à ce qui peut
leur être personnellement nécessaire.
Quelle émotion pour eux quand un
bateau est signalé, et quelle fête
quand se précise la nature du petit navire
et la venue du missionnaire ! Williams savait
que ces tournées annuelles étaient
nécessaires à tous les points de vue,
et ce n'est pas volontiers qu'il fût parti
sans visiter encore une fois les avant-postes.
À Mangaïa, ou a achevé la
construction d'un temple, et on attend Williams
pour l'inaugurer : la beauté de
l'édifice, avec ses hautes colonnes
sculptées, attire l'attention du
missionnaire : « C'est un superbe
bâtiment de forme ovale de quarante
mètres de long... Aucune description ne
pourrait donner l'impression qu'on ressent en y
entrant... Quand on songe au manque d'outils,
à la dureté du bois employé,
on admire à la fois et la patience et
l'habileté des artistes indigènes.
Mr. Buzacott a commencé le service
d'inauguration par la lecture de la Bible et la
prière, puis j'ai prononcé le sermon
prenant mon texte dans le livre du prophète
Aggée 11, 7 : « Je remplirai
cette maison de ma gloire, dit l'Éternel des
Armées. » De quinze à seize
cents personnes remplissaient le temple ; la
foule de ceux qui n'avaient pu entrer,
l'entourait... »
Quelques-uns des principaux de l'île
refusant absolument d'entendre la
prédication de l'Évangile, Williams
va les voir, et traverse montagnes et
vallées pour les trouver. Le premier chef
qu'il rencontre est flatté de sa visite et
convoque aussitôt son village : deux
à trois cents personnes, pour entendre
l'orométoua. Quelle audience ! Les
femmes portent pour tout vêtement des
guirlandes de feuilles imbriquées et des
colliers de baies, tout leur corps est luisant
d'huile parfumée. Les hommes aussi ont
décoré leur nudité de diverses
manières. Devant cet étrange
auditoire, Williams expose la Bonne Nouvelle aussi
simplement que possible, il
presse ses auditeurs d'accepter le salut. On
l'écoute, on lui promet de se souvenir. Le
chef remercie de l'honneur que lui a fait le
missionnaire en venant le voir. Il promet de
réfléchir aux paroles entendues.
C'est tout. Mais Dieu est puissant : il fera
lever la semence. Williams poursuit sa route,
gravit un autre sommet, descend dans une autre
vallée, trouve une autre
agglomération. Mais le chef et ses gens sont
partis pour le rencontrer au village des
chrétiens. En hâte, il retourne sur
ses pas. Et lorsqu'il arrive il voit à sa
grande joie que les visiteurs sont en grande
conversation avec le roi Makéa et les
chrétiens de Rarotonga ; ceux-ci les
exhortent à se faire chrétiens.
« Heureux de voir le chef de Mangaïa
et sa suite en si bonne compagnie je me retirai
après leur avoir dit quelques paroles de
bienvenue, les laissant aux énergiques
admonestations des chrétiens de Rarotonga.
Ils n'ont pas dû dormir beaucoup cette
nuit-là, ni les uns ni les autres !
Vers minuit, étendu sur la natte qui me
servait de lit, je les entendais toujours, et je
constatais que ni l'éloquence des
Rarotongans ni l'attention des gens de Mangaïa
ne diminuaient d'intensité. »
Après l'inspection des écoles, les
distributions de récompenses, les
exhortations finales, les adieux, « le
Messager de Paix » faisait voile vers
Aïtoutaki et Atiou.
Nous ne pouvons donner tous les
détails de ces visites missionnaires :
il y faudrait plusieurs volumes. Relatons cependant
l'accident survenu à J. Williams devant
cette dernière île. La mer brisant
avec moins de furie qu'elle ne le fait
généralement il avait décide
de se servir de la baleinière pour gagner la
terre. Tout alla bien à l'aller. Mais au
retour, avant que l'embarcation se fût
suffisamment éloignée de la
côte, une immense vague du
large s'écrasait sur elle, la renversait, et
jetait à la mer tous les occupants.
« Malheureusement, écrit Williams,
je fus entraîné fort loin du rivage
par la lame qui se retirait, et, pris dans un
tourbillon, je descendis à une grande
profondeur. Cela dura si longtemps que je
n'espérais plus pouvoir regagner la surface.
Enfin je revins à l'air libre, et supposant
que j'avais le temps de gagner un point du
récif à la nage avant
l'arrivée d'une autre vague, je me mis
à nager dans cette direction. Heureusement
deux indigènes d'Atiou m'aperçurent
et venant aussitôt à ma rencontre, ils
me prirent sous les bras ; avec leur aide je
pus enfin gagner le récif où je
retrouvai mes compagnons de voyage encore tout en
larmes de l'effroi qu'ils avaient eu en me croyant
perdu. Riant et pleurant à la fois les
indigènes m'entouraient et manifestaient
leur joie de mon sauvetage, en touchant mes habits
et en m'embrassant les mains. Pour la
sixième fois, j'avais manqué perdre
la vie en mer. En certains endroits, le
récif surplombe l'Océan et il est
creusé ici et là de profondes
cavernes. Être roulé dans l'une
d'elles par la violence des vagues c'est -
humainement parlant - la mort
inéluctable... »
De retour à Rarotonga, et en vue de
la croisière aux Samoa, Williams veut revoir
complètement son petit navire et l'allonger
de deux mètres. Après examen du
littoral, il choisit un endroit près du
village d'Avaroua, celui de Makéa, pour y
échouer « le Messager de
Paix ». On lui a envoyé
d'Angleterre des feuilles de cuivre, du fer, et les
pièces nécessaires. Il y avait quinze
jours qu'il consacrait ses matinées à
ce travail - les après-midi étaient
remplis par la révision ou la traduction du
Nouveau Testament en rarotongan - lorsqu'une triste
nouvelle se répandit : au cours d'une grande
réunion de chefs
quelqu'un avait incidemment proposé de faire
revivre certaines coutumes païennes,
proposition qui avait été
acceptée, « Y avait-il eu
préméditation ? S'agissait-il
d'une proposition fortuite ? Je ne pus m'en
assurer, écrit Williams. Toujours est-il
qu'à peine la proposition acceptée,
on commençait les opérations du
tatouage un peu partout, et que les
indigènes en grand nombre se mirent à
parader affublés à la manière
d'autrefois. Les répercussions de ce
renouveau de paganisme se firent aussitôt
sentir dans nos écoles, et plusieurs des
meilleurs élèves, sur lesquels nous
fondions de grandes espérances,
cessèrent de venir. Mes collègues et
moi en fûmes vivement affectés. Deux
jeunes chefs, jusque-là fort
dévoués et actifs,
déclarèrent nettement à Mr.
Pitman leur résolution de retourner aux
coutumes païennes, et afin d'entraîner
leurs condisciples ils usèrent à
l'égard du missionnaire d'un langage
insolent, voulant montrer par là que leur
décision était irrévocable. Le
résultat fut tout autre : plusieurs
élèves se levèrent
aussitôt pour protester contre cette indigne
conduite, et pour dire à Mr. Pitman qu'ils
voulaient servir Christ et qu'ils lui resteraient
fidèlement attachés. Les jeunes chefs
refusant la défaite firent alors pleuvoir
les plus durs sarcasmes sur ceux qui venaient de
faire profession de fidélité au
christianisme.
Ne sachant que penser de cette
réaction et soupçonnant que les
jeunes chefs devaient se savoir soutenus pour oser
se conduire ainsi, les missionnaires
décidèrent de ne pas intervenir. Mais
Mrs. Williams et moi nous partîmes
aussitôt pour Gnatangiia, afin de voir nos
amis Pitman, pour les consoler et les fortifier en
cette heure d'adversité...
Le dimanche je prononçai l'un des
plus puissants sermons qu'il
m'ait été donné de
prêcher : prenant mon texte au chapitre
dix-septième des Actes des Apôtres (v.
30 et 31), j'essayai de faire comprendre combien il
était grave de retourner au paganisme
après avoir reçu la
Vérité. Mieux eût valu pour
ceux qui retournaient en arrière ne l'avoir
jamais connue...
Le lendemain, les chefs convoquèrent
une réunion où Mr. Pitman et moi nous
fûmes invités. Pa et Kaïnaka nous
dirent leur tristesse. Ni l'un ni l'autre n'avaient
aucune part dans ce retour au paganisme. Pa
déclara toute l'horreur que lui inspirait le
mal, son attachement inébranlable aux
missionnaires et au christianisme, et sa douleur de
la conduite de son fils vis-à-vis de Mr.
Pitman.
Toupé, le juge, se leva ensuite et
résuma sa vie depuis sa conversion.
« De tous les chefs, il avait
été le dernier à embrasser le
christianisme ; mais alors il l'avait fait
à fond, bien décidé à
obéir à l'Évangile. Choisi
comme juge principal par les chefs lors de
l'introduction des nouvelles lois, il avait eu
à souffrir du fait de son
impartialité dans l'exercice de ses
fonctions. Il avait supporté la jalousie, la
suspicion, la destruction de ses biens ; deux
fois sa maison avait été
brûlée. Mais aussi longtemps qu'il
serait juge rien ne pourrait l'empêcher
d'exercer son office selon sa conscience, et
d'appliquer la loi. »
Mr. Pitman refusant de dire un mot, je
répondis aux orateurs par quelques paroles,
puis nous partîmes, pensant qu'il
était préférable de les
laisser prendre seuls les décisions qu'ils
jugeraient convenables. Ils prirent une
résolution unanime, demandant l'interdiction
de tout retour aux coutumes païennes, et
chargèrent un messager de la porter au roi
Makéa. Enfin les coupables vinrent faire des
excuses à Mr. Pitman.
Ainsi fut arrêté dès le
début à Ngatangiia le renouveau de
paganisme qui avait menacé de
dévaster le district.
À Arorangi le cher vieux chef
Tinomana avait absolument refusé d'entendre
parler d'aucun retour aux pratiques païennes,
et il avait mis un terme immédiatement.
Seuls Makéa et son parti refusèrent
d'agir. Le roi ignora la requête des chefs et
refusa de formuler l'interdiction qu'on
réclamait de lui. Dans son district les lois
furent foulées aux pieds sans qu'il s'en
mît en peine, les fêtes païennes
se succédèrent, et tout travail
devint insupportable à ceux qui se livraient
au mal. Faute de main-d'oeuvre, Williams dut
interrompre la réfection de son navire.
Alors il s'adonna uniquement à
l'achèvement de la traduction du Nouveau
Testament en langue de Rarotonga avec l'aide de ses
collègues, et à la révision
des livres déjà traduits.
Le 21 décembre, alors qu'il
était absorbé dans ce travail, un
messager envoyé par M. Buzacott survint et
lui remit une lettre. Son correspondant
l'avertissait que la mer était
démontée : une mauvaise
tempête s'annonçait, et le
« Messager » courait le risque
d'être mis en pièces. Aussitôt,
Williams partit pour Avaroua L'air embrasé
semblait irrespirable, le calme, le silence de
toutes choses était impressionnant, le ciel
était très bas, et la mer
agitée. Aussitôt arrivé sur les
lieux, et mesurant le danger que courait son
navire, Williams, aidé par quelques
indigènes, construisit une sorte de
jetée tout autour en empilant les uns sur
les autres des blocs de corail. Puis la
chaîne de l'ancre fut fixée d'une part
au « Messager », de l'autre au
pilier central de l'école située
à quelque 40 mètres du rivage et sur
un tertre de trois mètres de haut.
« Enfin je fis débarquer tout ce
qui était à bord : bois, cuivre,
fer, provisions, les mâts, les voiles, les
cordages, etc..., et je fis
faire un toit sur le pont. Après avoir pris
toutes les précautions imaginables, je
retournai à Ngatangiia. Au grand calme, la
tempête succédait rapidement : le
vent soufflait avec rage, et une pluie torrentielle
tombait sans discontinuer. Notre dimanche fut
triste. Les services eurent lieu quand même.
Sur le soir, le vent redoubla de violence :
les arbres se brisaient, s'abattaient, les maisons
étaient arrachées. À nos
côtés, un immense hangar
s'écroulait, ensevelissant mon meilleur
canot sous ses ruines. D'heure en heure,
j'espérais voir arriver mi messager avec des
nouvelles sur l'état de la mer et le sort du
navire. Personne ne vint. Enfin, vers 9 h. du soir,
un billet de M, Buzacott nous parvint. Nouvelles
inquiétantes : la mer montait toujours,
le « Messager » était
jeté de ci de là, et le toit qui
recouvrait le pont avait été
arraché. L'eau couvrait le rivage et
atteignait l'école où j'avais
remisé voiles, cordages et toute la
cargaison du navire. Tout le village était
menacé par le raz de
marée !
La nuit était tombée :
une nuit d'encre, un ciel noir ; et la pluie
continuait de se déverser à torrents.
J'étais à près de douze
kilomètres d'Avaroua ! Que taire dans
cette tourmente et dans l'obscurité ?
Je décidai donc d'attendre le matin. Le
bruit de la tempête, le mugissement de la
mer, les cris d'effroi des indigènes, les
craquements des maisons, tout cela était
bien fait pour empêcher de dormir quiconque
l'aurait essayé et remplir d'effroi le coeur
le plus brave. Au petit jour, je me mis en route,
prenant le chemin du bord de la mer pour
éviter des sentiers transformés en
ruisseaux où il fallait avancer avec de
l'eau jusqu'aux genoux, et à cause des
branches et même des arbres qui s'abattaient
dans toutes les directions. Mais le vent et la
pluie avaient tant de violence que je dus revenir sur
mes pas et prendre la
route
de l'intérieur où je
n'avançais qu'avec précautions.
À mi-chemin, je rencontrai quelques-uns de
mes ouvriers : ils me dirent que la mer avait
emporté la maison où j'avais
remisé mes provisions. Quant au
« Messager », il
s'élevait avec chaque vague, montait sur la
rive et se retirait avec le flot.
Après une marche épuisante,
transpercé par la pluie et glacé,
j'atteignis enfin Avaroua. Le village
n'était plus qu'un monceau de ruines !
Celles-ci dépassaient tout ce que j'avais
imaginé ; il ne restait rien des jolies
constructions : les femmes avec leurs enfants
cherchaient un endroit où s'abriter ;
les hommes essayaient de retirer quelques objets de
dessous leurs maisons
écroulées ; et des cris de
terreur perçaient de temps à autre le
bruit des éléments
déchaînés. Les hurlements du
vent, les détonations produites par les
grandes lames, détonations qui se
mêlaient aux éclats du tonnerre, les
déchirures des éclairs dans les
demi-ténèbres qui enveloppaient
l'île, les trombes d'eau qui se
déversaient sans interruption, tout ceci
formait un spectacle terrible et sublime à
la fois, et j'adorai... La terre tremblait ;
non seulement sur le rivage, mais jusqu'au centre
de l'île... Les maisons qui avaient
résisté jusque-là s'en
allaient maintenant par morceaux sous les efforts
redoublés du vent : temple,
écoles, la demeure de Mr. Buzacott, tout
était rasé.
Mrs. Buzacott et ses trois enfants
s'étaient réfugiés chez la
femme du chef dont la maison était encore
debout. Mais la mer montait toujours. Le vent
aidant, les vagues détruisirent ce dernier
abri. Alors ce fut la fuite vers la montagne ;
fuite bien lente, car ou n'avançait que
difficilement, avant souvent de l'eau jusqu'aux
genoux. Enfin, les fugitifs arrivèrent
à la colline où le
chef possédait une case. Hélas !
elle avait été emportée !
La course continua jusqu'à un autre endroit
où s'élevait une maison qui,
heureusement, était demeurée debout.
Elle était déjà remplie de
femmes et d'enfants qui accueillirent avec
bonté les nouveaux venus.
Pendant ce temps Mr. Buzacott
(6), quelques
indigènes et moi nous nous occupions
à transporter dans la petite maison
qu'habitaient les aides de mon collègue tous
les livres et tous les objets que nous avions pu
retirer des décombres. La case en question
était peu élevée ; nous
attachâmes son toit avec des cordes et
fîmes le possible pour la rendre
invulnérable aux furieuses rafales qui se
succédaient. Notre angoisse était
à son comble. Ce frêle abri allait-il
s'effondrer à son tour ? Alors que tout
semblait inutile, le vent se déplaça
de quelques degrés vers l'Ouest. Ce fut le
signal d'un decrescendo de la mer et de la
tempête. L'Océan se retira, le vent
cessa, les gros nuages noirs qui enveloppaient
l'île se dissipèrent et le soleil
brilla de nouveau... Dieu ne nous avait pas
oubliés...
Alors nous sortîmes de nos abris. Quel
douloureux spectacle ! J'envoyai un
indigène pour qu'il se rendît compte
de l'état de mon navire. N'avait-il pas
été mis en pièces ?
Lorsque l'homme arriva sur la rive, plus de
bateau ! Le « Messager de
Paix » avait disparu, ainsi que plusieurs
mètres du rivage où il était
amarré. « Une lame avait tout
emporté en se retirant, lui
dit-on. » Mais une autre vague avait
dû ramener le
« Messager », car il se
trouvait maintenant fort avant dans les terres, au
centre d'un bois de châtaigniers, et comme
posé sur un marécage.
J'avais réussi à envoyer un
messager à Mr. Pitman pour le prier de nous
envoyer du secours. Mais l'indigène revint
m'apportant de terribles nouvelles:
« Ngatangiia avait autant souffert
qu'Avaroua ! »
Très angoissé en pensant
à Mrs. Williams, je partis aussitôt
pour la rejoindre. J'appris alors que, sur le
matin, elle avait remarqué que le toit
au-dessus de sa chambre se soulevait. En hâte
elle s'était levée : se
vêtant rapidement et s'enveloppant d'une
couverture elle était sortie, rejointe par
Mrs. Pitman. À peine étaient-elles
dehors que la paroi et une partie du toit
s'abattaient sur le lit que ma femme avait
occupé. Les deux dames missionnaires
cherchèrent un refuge qu'elles
trouvèrent chez Pa. Le chef avait fait
attacher sa demeure au sol par des cordes ;
mais un immense cocotier s'inclinait avec chaque
rafale et menaçait de l'écraser en
tombant. À la demande de Mrs. Williams et
Mrs. Pitman, un jeune indigène s'offrit pour
grimper sur l'arbre (ce qu'il fit au péril
de sa vie) et il en coupa toutes les palmes. Ainsi
dépouillé, le stipe n'offrait plus de
prise au vent. La maison était sauvée
et ceux qui s'y étaient
réfugiés.
... Écoles, temples, demeures
missionnaires et presque toutes les maisons
indigènes sont détruits. Tout ce que
nous possédions a été
dispersé par le vent et les vagues en un
pays où les indigènes pratiquaient
autrefois le vol à un degré inconnu
ailleurs et où plusieurs mauvais sujets
continuent de voler. Toutes les récoltes,
tous les arbres fruitiers sont détruits.
À peine reste-t-il ici et là un
bananier, alors que la veille il y en avait des
centaines de mille. Des milliers d'arbres à
pain, des châtaigniers et d'autres arbres
immenses qui avaient résisté aux
orages des siècles gisent maintenant sur le
sol. De ceux qui restent debout, beaucoup n'ont
plus de branches,
tous
n'ont plus de feuilles... Il semble que le cyclone
ait contourné Rarotonga et touché
successivement toutes les parties de
l'île...
Les femmes et les enfants descendirent des
montagnes. De longues herbes furent coupées
et séchées au soleil. Le soir on s'en
servit pour couvrir le sol, puis on étendit
par-dessus des nattes en guise de lits. Le soleil
allait se coucher. Nous nous agenouillâmes
pour bénir Dieu, de ce que, au milieu de
grands dangers, et parmi ces ruines, il avait
cependant préservé nos vies. Puis,
nous nous étendîmes pour trouver un
peu de repos. C'était le 23 décembre
au soir, l'avant-veille de Noël.
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