À EIMEO. - MISSIONNAIRES ET INDIGÈNES. - UNE CARCASSE. ARMATEUR. - UNE NAISSANCE. - HUAHINÉ. - UN DÉLICIEUX REPAS. - TAMATOA. - INVITATION ROYALE. - RAÏATÉA.
DÈS le lendemain, le contingent des
missionnaires venant pour renforcer la mission de
Tahiti s'embarquait pour traverser le
détroit qui sépare Tahiti de
Mooréa (1) où se trouvait alors le
quartier général de la Mission.
« Le 17 novembre nous sommes
arrivés à Eiméo,
écrivit John Williams. Presque
aussitôt, nous nous rendîmes au temple
pour un service d'actions de grâce. Ce temple
est fait de baguettes rondes blanches,
fixées à quelques centimètres
l'une de l'autre, et il est recouvert de feuilles.
À l'intérieur, vers le milieu et
près de la paroi, un pupitre pour le
prédicateur. Le tout est très propre,
se présente bien, et a été
fait par les indigènes.
« Sur le soir, nous
entendîmes ici et là des cantiques en
langue maorie, s'élevant des cases qui entourent la
nôtre.
C'étaient les indigènes qui
célébraient le culte de famille. Nous
nous retirâmes pour la nuit, les coeurs
remplis de louange pour tout ce que nous avions vu
et entendu. »
Le surlendemain de leur arrivée, les
missionnaires assistèrent au service
qu'à cette époque on
célébrait tous les mercredis.
« Là, réunis au temple, je
vis sept à huit cents indigènes qui,
cinq ans auparavant, s'adonnaient au culte des
idoles, et à toutes les horribles pratiques
qu'entraîne l'idolâtrie. Sûrement
songeais-je, l'oeuvre ici est chose faite ;
notre venue est bien inutile. Des centaines
d'indigènes ignorent encore le vrai Dieu,
mais ils souhaitent ardemment de le
connaître. Quelle joie de voir ces femmes
tahitiennes, maintenant décemment
vêtues de robes de tapa (2), la
tête ornée de
fleurs blanches ou de chapeaux de paille !
Assises à la tailleur autour du pupitre,
elles paraissent écouter le
prédicateur avec une grande
attention. »
Et aux Directeurs de la
Société des Missions, John Williams
écrit : « Nous ne pouvons
nous empêcher de comparer ce que nous voyons
aujourd'hui avec ce qui était autrefois
lorsque « le Duff » visita pour
la première fois ces îles ; et
nous nous demandons s'il est possible que ces
parents, entourant aujourd'hui leurs
bébés de tant d'affection, soient
ceux qui, autrefois, les faisaient mourir. Est-ce
vraiment eux qui - il y a quelques années
seulement - offraient des sacrifices humains pour
apaiser leurs dieux et se ménager leurs
faveurs ?
« Aujourd'hui, ils se mettent au
bénéfice du sacrifice du Seigneur
pour le pardon de leurs péchés.
« Tout ce que nous voyons ici remplit
nos coeurs de reconnaissance et nous
réjouit. Quels extraordinaires changements
depuis que l'oeuvre missionnaire est
commencée ! C'est un revirement complet
vers le Christianisme, et nous espérons que
dans cette foule qui a rejeté les idoles,
quelques coeurs se sont vraiment convertis et
donnés à Dieu.
« Dimanche, nous sommes
allés aux abords de la case où les
indigènes tiennent leurs réunions.
L'un d'eux priait. Il commença par invoquer
le Dieu d'Abraham, d'Isaac et de Jacob, le
remerciant de ce qu'Il était un Dieu qui
entend la prière et de ce qu'il leur avait
envoyé des missionnaires. Il les avait
conduits sûrement ainsi que leurs femmes et
leurs petits-enfants par delà les
Océans. « Et maintenant Seigneur,
aide-les à apprendre le tahitien pour qu'ils
soient en état de nous enseigner ta
Parole... » Suivirent plusieurs
requêtes de ce genre et il termina sa
prière. »
La beauté des îles,
l'intensité des couleurs, l'harmonie des
paysages, tout cela frappa les nouveaux
arrivés, et ne laissa pas insensible John
Williams. Cependant, là-bas, sur la plage
d'Eiméo qui étincelle sous les rayons
ardents du soleil, une masse sombre attire plus
particulièrement ses regards. Qu'est-ce donc
que cela ? - Eh quoi ? C'est la quille
d'un petit bateau, un bateau commencé et
laissé inachevé. Williams l'examine
attentivement. il s'enquiert, il questionne les
missionnaires, et apprend que ceux-ci avaient
essayé de construire un vaisseau pour aider
le roi Pomaré à exporter les produits
indigènes en Australie : la noix de
coco et l'huile de palme. Ils espéraient
aussi avoir un moyen de communication avec les
autres archipels pour y porter l'Évangile.
Mais l'entreprise dépassait leurs
capacités, et après avoir
travaillé quelque temps à ce bateau,
ils avaient dû l'abandonner.
John Williams assurant qu'il pourrait
achever le navire avec l'aide des autres
missionnaires, ceux-ci se réunirent,
examinèrent la question, et
décidèrent l'achèvement du
vaisseau. De sorte que le troisième jour de
son arrivée dans l'île, John Williams
passait son tablier de forgeron, retroussait ses
manches, installait sa forge et commençait
de préparer sur l'enclume toutes les
pièces en fer ; travail dont il
assurait pouvoir se charger et qu'on lui avait
confié. Quant aux autres missionnaires, ils
s'occupaient de travailler le bois. Si on avait dit
à John Williams, lorsqu'il écrivait
au Comité de la Société de
Londres pour offrir de devenir l'un de ses
missionnaires, que son premier travail comme tel
serait l'achèvement d'un bateau sur une
plage polynésienne, il eût
été bien étonné. Toutes
les heures passées à étudier
la cale de la « Harriet », sa
charpente, le pont, etc.... toute cette minutieuse
étude de la structure intérieure du
navire allaient porter des fruits immédiats.
De l'aurore au coucher du soleil, la colonie
missionnaire consacre à l'achèvement
du petit navire toutes ses heures
disponibles : armés de scies, de
rabots, de marteaux, tous s'occupent de
préparer les pièces
nécessaires sous la Direction du jeune
Williams, qui a la responsabilité de
l'entreprise. Huit jours après, le navire
était achevé. De toutes les
vallées, de tous les villages, les
indigènes accourent pour contempler le
premier bâtiment construit dans l'île
et auquel le roi Pomaré devait donner un
nom.
Le jour choisi pour le lancement, la baie
est noire de monde. De chaque côté,
deux à trois cents indigènes s'attellent aux
cordes préalablement passées autour
de la coque du navire. Au signal qui leur est
donné, tous se mettent à tirer avec
énergie et le roi Pomaré, debout
à bâbord, au lieu de briser la
bouteille traditionnelle sur le côté
du petit navire, la jeta avec force sur l'avant
où sa chute fit un tel fracas que tous les
indigènes du même côté
que Pomaré sur-sautèrent et
lâchèrent la corde, effrayés.
De l'autre côté, on tirait
toujours ; le navire fit alors demi-tour et se
coucha tandis que s'élevaient les
lamentations, des indigènes :
« Auê te pahi e ! »
« Hélas ! le navire !
Hélas ! le navire ! »
L'air moitié triste, moitié
satisfait, Pomaré répétait en
s'en allant : « J'ai toujours dit
qu'il ne fallait pas essayer de lancer ce
bâtiment ! » Quant aux
indigènes, ils étaient visiblement
découragés. John Williams ne pouvait
admettre que ce léger incident
changeât rien au résultat. Ce
même jour, le vaisseau était
redressé et les troncs sur lesquels il
devait rouler vers la mer replacés. Le
surlendemain, un lundi, l'opération du
lancement était recommencée. À
côté, sur une petite éminence,
un orateur, « un taala
faailoito » s'était placé
qui, par le geste et la parole, encourageait les
indigènes. Taata faaitoito, signifie :
l'homme qui communique la vie, l'énergie. On
l'employait surtout en temps de guerre pour exciter
les guerriers, ranimer leur courage.
« J'étais assez près de
lui, écrit John Williams. Toutes les fibres
de son être semblaient entrer en action, et
rien que de regarder le vieillard, je me sentais
incité à tirer. »
Le petit navire s'ébranla d'abord
doucement, puis plus vite ; et gagna la mer
où il se redressa fièrement au milieu
des cris de joie et de triomphe des
indigènes.
Les semaines s'écoulaient et les
premières impressions de John Williams ne
tardaient pas à se modifier. Il comprit
alors qu'au lieu d'être achevée,
l'oeuvre ne faisait que commencer. Les
indigènes venaient nombreux pour qu'on leur
enseignât le culte du vrai Dieu pour lequel
ils professaient un certain respect. Mais la
plupart continuaient en même temps à
servir leurs idoles et s'adonnaient aux
épouvantables pratiques du paganisme. Cette
constatation, loin de décourager John
Williams et d'abattre son esprit missionnaire, ne
fit que développer en lui un plus grand
amour des âmes et un désir toujours
plus ardent de conquêtes pour Christ.
Son temps était rempli par tout ce
qu'il était en son pouvoir de faire pour les
missionnaires, et par l'étude de la langue
maorie. Le 7 janvier 1818, les Williams furent
réjouis par la naissance d'un fils qu'ils
consacrèrent à Dieu : ils lui
donnèrent les prénoms de John
Chauner. Leurs coeurs débordent de
reconnaissance envers Dieu, mais aussi de crainte
en songeant au milieu de corruption morale dans
lequel l'enfant devra se développer.
Écrivant chez elle, Mrs. Williams demande
aux siens de prier pour le petit être que
Dieu vient de leur confier : « Vous
ne pouvez imaginer le milieu dans lequel il faut
élever l'enfant missionnaire, et la grande
corruption qui sévit ici,
dit-elle... »
Il y avait alors à Eimeo des chefs de
l'archipel des Îles-sous-le-Vent, venus pour
aider Pomaré à reconquérir la
souveraineté sur Tahiti. Désireux
d'apprendre à servir le vrai Dieu, ils
préférèrent prolonger leur
exil une fois la guerre terminée et souffrir
de bien des privations pour être instruits
dans la foi chrétienne,
plutôt que de retourner dans leurs îles
où ils jouissaient de toute la puissance et
de toutes les prérogatives accordées
aux chefs. Les missionnaires constatant ce besoin
réel d'instruction, décidèrent
l'envoi de quelques-uns d'entre eux à
Huahiné, l'une des Iles-sous-le-Vent
(3). C'est
ainsi
que Mr. et Mrs. Williams, Mr. et Mrs. Ellis, Mr. et
Mrs. Orsmond, accompagnés de Mr. Davies
comme interprète et dé plusieurs
chefs, quittèrent Eiméo le 18
juin.
Le surlendemain, le 20 juin, on arrivait
à Huahiné où les voyageurs
reçurent une réception enthousiaste.
Les Williams y sont logés dans une maison
indigène. À peine viennent-ils de s'y
installer qu'on leur apporte un petit pote
rôti et une grande terrine d'ignames cuits.
« Nous fîmes alors du thé,
écrit Mrs. Williams aux siens, et je vous
assure que notre repas nous sembla succulent.
Ensuite, nous songeâmes à nous
installer pour la nuit. Nous séparâmes
l'une des extrémités de la case qui
est très grande, en fixant de part et
d'autre un morceau d'étoffe
indigène :
« tapa ». Nous nous
étendîmes dans la chambre ainsi
aménagée et y avons dormi aussi
profondément que si nous avions
été dans un palais. Le lendemain, on
nous conduisit dans une jolie petite maison de
forme ovale, que nous avons tapissée de
« tapa. ». Mon cher John fit de
la chaux pour plâtrer le plancher. Les jours
suivants, chacun des principaux chefs nous envoya
neuf porcs, un rouleau de
« tapa » et toutes sortes de
fruits de l'île. J'aimerais pouvoir vous
faire goûter de nos gâteaux
d'arrow-root et de maïoré
(4).
Vous vous demandez sans doute ce que
peuvent être nos menus ? Eh bien !
je vais essayer de vous en donner une idée.
Il y a ici quantité de poules et nous les
cuisons de façons diverses. Parfois, nous
avons du porc frais, ou bien nous tuons un cochon
de lait et le cuisons aussi bien que vous pourriez
le cuire en Angleterre, dans vos spacieuses
cuisines. On le transperce de part en part avec une
baguette qui repose sur deux fourches. En dessous
un grand feu. Un garçon tourne la broche
improvisée jusqu'à ce que l'animal
soit cuit à point. Il arrive que nous ayons
du boeuf bouilli ou rôti. Si seulement nous
avions une vache, je pourrais faire un peu de
beurre. Enfin, nous avons assez de lait pour le
thé, et cinq chèvres... »
Et, complétant cette lettre de Mrs.
Williams, citons cette phrase d'une missive de son
mari : « Ma chère Mary est
une fameuse cuisinière ! Je ne sais
vraiment ce que pourrait faire un pauvre homme seul
en un endroit comme celui-ci ! »
Bientôt, de tout l'archipel des
Îles-sous-le-Vent, les visiteurs
arrivèrent en foule. Les uns, mûs par
la seule curiosité, d'autres par des motifs
plus élevés, venaient à
Huahiné pour voir les
« papaa » (les blancs). Parmi
eux, nous ne nommerons que le plus important
Tamatoa, roi de Raïatéa.
À l'émotion causée par
l'annonce de sa venue, les missionnaires auraient
compris que ce visiteur était un homme de
haut rang s'ils n'avaient déjà connu
de réputation Tamatoa. « C'est
Tamatoa ! C'est Tamatoa ! »,
redisent les indigènes, tandis que la grande
pirogue montée par les principaux chefs
raïatéens s'avance vers la rive de
Huahiné. Chef de haute stature, de belle
apparence, le roi de Raîatéa
aussitôt débarqué vint trouver
les missionnaires : « Je suis venu, leur
dit-il, afin que
vous
me donniez des missionnaires pour
Raïatéa et ils enseigneront les gens de
mon île. »
La haute situation de Tamatoa et
l'importance de Baïatéa comme centre de
l'idolâtrie en Polynésie donnaient une
singulière importance à la
démarche du roi. Il était impossible
aux missionnaires - qui cependant venaient de
s'installer à Huahiné - de ne pas la
prendre en considération. Ils ne pouvaient
pas davantage y répondre par une fin de
non-recevoir.
Mais le nom de Raïatéa la
Sacrée est allié à celui des
coutumes les plus abominables du paganisme,
coutumes qui corrompent et détruisent les
indigènes ; pratiques
dégoûtantes et cruelles passées
dans les moeurs. C'est à Raïatéa
que se trouvent le temple et l'autel d'Oro, le Mars
et le Moloch des archipels polynésiens.
C'est sur l'autel du grand maraë d'Opoa - que
ruisselle le sang de milliers de victimes humaines
que de toutes parts on amène à
Raïatéa pour être
sacrifiées. Raïatéa, c'est la
citadelle du paganisme. L'île est la plus
grande de l'archipel. Son roi a droit de
souveraineté sur les îles
environnantes. On lui paye des tributs. Bien plus,
on lui rend, ainsi qu'à ses chefs, les
honneurs dus à la divinité.
Parmi les missionnaires réunis
à Huahiné, qui donc entendrait
l'appel que le Maître faisait retentir par
l'intermédiaire de ce roi païen ?
Qui donc répondrait « Me
voici » ?
Le coeur de John Williams brûle
au-dedans de lui. Il souhaite ardemment qu'on le
choisisse pour ce poste d'honneur. Mais il n'ose se
mettre en avant. « Il convient d'attendre
que les aînés dans l'oeuvre en
Polynésie se soient prononcés,
songe-t-il. »
Après quelque temps de
réflexion, ceux-ci déclinèrent
l'invitation faite. Avec quelle joie MM. Williams
et Threlkeld s'offrirent alors pour aller porter
l'Évangile dans cette forteresse de Satan,
afin d'en chasser l'ennemi et de la
conquérir pour Christ. C'est ainsi que le 11
septembre 1818, les Williams et les Threlkeld
quittaient Huahiné pour gagner vers le
Nord-Ouest l'île de Raïatéa, que
dans ses récits le capitaine Cook nomme
Ulitéa. Huit jours auparavant, John Williams
avait prêché son premier sermon en
langue maorie.
Avec sa chaîne de montagnes aux pentes
abruptes, ses sommets souvent baignés de
nuages, Raïatéa, vue du large, n'a pas
l'apparence riante des autres
Îles-sous-le-Vent. Une bande de terre fertile
s'étend entre la base de ses montagnes et la
mer. Peu de pentes cultivables. Mais elle est
coupée de profondes vallées à
la végétation luxuriante. Ces
vallées se terminent souvent par une
muraille de rochers et une cascade ; au fond
de la vallée un ruisseau qui, à la
saison des pluies, devient un torrent
impétueux.
Une même ceinture de corail encercle
Raïatéa et l'île soeur :
Tahaa. C'est sur ces récifs
élevés par d'infiniment petits - que
viennent se briser les tempêtes souvent
terribles du Pacifique, sans que la mer
intérieure en subisse le contre-coup. Ici et
là, devant l'embouchure des grandes
rivières de l'île, la barrière
de corail s'interrompt. Ce sont les passes par
lesquelles entrent et sortent les grandes pirogues
des indigènes, et les navires de
passage.
Après avoir pris l'une de ces passes,
l'embarcation royale pénétrait dans
la mer intérieure : miroir bleu,
immobile, étincelant sous un soleil intense,
où chaque coup de pagaie faisait jaillir des
cascades qui semblaient d'or liquide. - On se
rapprochait du rivage. La plage était
couverte d'indigènes, et on fit aux missionnaires
une
réception enthousiaste. « Nous
étions à peine
débarqués, écrit John
Williams, qu'on nous apportait des présents
(« aroha », prononcer arofa).
Cinq porcs pour moi, cinq pour Mary, un pour baby
Johnny. Autant pour les Threlkeld. Puis ce furent
des corbeilles d'ignames, de taros, de noix de
cocos, de féï, de bananes - des
corbeilles immenses ! En quelques minutes, la
place avait pris les apparences d'un marché.
Les nouveaux-venus sont considérés
comme des étrangers aussi longtemps qu'ils
n'ont pas reçu ces présents de
nourriture, « qu'ils n'ont pas
été nourris ». Ceci fait,
ils deviennent « taata tabou »,
c'est-à-dire que leur personne est devenue
sacrée, et qu'ils doivent être
traités avec égards et
amitié.
« Tandis que s'effectuait le
transport de nos caisses, nous
dépassâmes une maison où l'on
était en train de prendre un repas. Mon
serviteur indigène y entra, arracha quelque
nourriture de la main d'une personne, et sortit
sans mot dire comme il était
entré.
- Pourquoi agir de la sorte, lui
demandai-je ? Ceci ne va-t-il pas exciter le
ressentiment de cet homme ? - Non pas! C'est
la coutume, me dit-il. » - De fait, j'ai
souvent vu la chose se faire depuis. Ou bien encore
des gens arrivent, soit de
l'extrémité de Raïatéa,
soit d'une autre île. Ils choisissent une
maison, y entrent, l'inspectent, et sans consulter
le propriétaire s'y installent en se disant
l'un à l'autre : « Cette
maison est bonne (maïtaï),
installons-nous-y. »
Le soir tombait. Le soleil venait de
disparaître derrière l'île. Les
indigènes se retirèrent, laissant les
missionnaires s'installer pour la nuit. La
première nuit sur cette terre
raïatéenne où ils devaient
travailler bien des années afin de gagner
des âmes à Christ ; afin de les arracher aux
plus
profondes ténèbres pour les amener
à la merveilleuse lumière de
l'Évangile (5).
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