CES deux Capitaines ne furent pas plutôt
joints, qu'ils entreprirent d'aller forcer le Bourg
de Garsillane tenu par leurs ennemis, qu'ils
trouvèrent extrêmement
fortifié, l'alarme ayant été
donnée, les ennemis qui étaient en
grand nombre dans les lieux circonvoisins, tant
Cavalerie qu'Infanterie, avertis par le son de la
cloche, coururent au secours de ce Bourg, et
environnèrent les Vaudois, qui en combattant
vaillamment et courageusement se retirèrent
du milieu de leurs ennemis, et en se retirant, ils
enlevèrent d'un Village voisin de ce Bourg,
six paires de boeufs et quantité d'autre
bétail, et firent quelques prisonniers, sans
faire perte que d'un seul homme.
Le 28 de Mai, ils se rendirent au point du jour
près du Bourg de St. Segond pour le
surprendre. Après avoir fait la
prière selon leur coutume, et s'être
encouragés les uns les autres, ils
attaquèrent ce Bourg avec tant de vigueur et
d'adresse, qu'ils s'en rendirent bientôt les
Maîtres.
La garnison qui était, composée
d'Irlandais et de Piémontais fut toute
passée au fil de l'épée, le
Bourg fût brûlé avec ses
Églises, après que les Vaudois en
eurent retiré sept cloches, et tout le
bétail qui y était, ils firent aux
maisons et Églises, ce que leurs ennemis
avaient fait à leurs maisons et à
leurs temples. En la prise de ce Bourg il y
eût huit cents Irlandais tués, et 650
Piémontais. Les Vaudois n'y eurent que sept
hommes tués et six légèrement
blessés. Ils n'étaient qu'environ 600
hommes et leurs ennemis étaient pour le
moins 1500 retranchés et
fortifiés.
Le 2 de Juin les Vaudois allèrent
brûler les Métairies et les Cassines
de la plaine de Briqueiras, et après
s'être retirés par le chemin de St.
Jean et s'être rencontrés au
rendez-vous, ils chargèrent si bien et si
à propos leurs ennemis par trois
côtés, qu'ils les mirent en fuite,
laissant 150 morts sur la place, sans ceux qu'ils
emportèrent et les blessés. En ce
combat il n'y eût qu'un Vaudois tué et
deux ou trois blessés.
Quelques jours après le combat de St. Jean,
les ennemis envoyèrent Un convoi au fort de
Mirebouc, - situé au haut de la
Vallée de Lucerne escorté par trois
cents hommes. Le Capitaine Janavel se rencontra par
hasard à un détroit, qui était
sur le chemin de ce convoi, suivi seulement de huit
Soldats, à la faveur du lieu il les
arrêta pendant cinq à six heures, en
tua et blessa plusieurs sans perdre aucun des
siens.
Après ces glorieux exploits, Janavel ayant
renforcé sa troupe, se retira derechef sur
la montagne appelée la Palea de Jaimet, et
envoya de là à ceux de la Tour et de
Bobbi, qui s'étaient révoltés
pour éviter les cruautés et les
barbaries de leurs ennemis, et qui s'étaient
retirés au Bourg du Vilar, que si dans 24
heures ils ne se retiraient tous vers lui, il les
traiterait comme des Apostats et des Traîtres
à leur Patrie. Ils ne manquèrent pas
de venir avec autant de joie, de voir quelque
espérance à leur liberté, que
de témoignage de tristesse, pour la
lâcheté qu'ils avaient commise.
Les Capitaines Jayer et Janavel s'étant
joints pour la deuxième fois,
résolurent d'attaquer le Bourg de la Tour,
où était la plus forte garnison des
ennemis, qui ayant quelque vent qu'on venait les
attaquer, se mirent de bonne heure en
défense et tuèrent le premier Vaudois
qui parût sur le Pont devant la porte du
Bourg, et ensuite ils firent une grande sortie sur
les assaillants, qui reçurent leurs ennemis
avec tant de vigueur, qu'ils en couvrirent la terre
de corps morts. Le combat dura jusques à la
nuit, les Vaudois se battaient d'une petite
éminence, et de quelques masures qu'ils
avaient gagnées, d'où leurs ennemis
ne purent jamais les chasser, bien qu'ils fussent
en beaucoup plus grand nombre qu'eux, et qu'ils
fussent renforcés par le secours qui leur
venait de la Ville de Lucerne.
À l'entrée de la nuit les ennemis se
retirèrent dans le Bourg, sans pouvoir
enlever leurs morts qui étaient plus de
trois cents. Cet heureux succès donna tant
de courage aux Vaudois que le lendemain ils
s'allèrent poster devant les portes de ce
Bourg, sans que leurs ennemis eussent l'assurance
de sortir.
Après l'attaque de la Tour, les Vaudois se
retirèrent en un lieu d'Angrogne
appelé le Verné, où
étaient reliés deux ou trois
couverts, qui avaient résisté aux
flammes. Là ils résolurent dans le
conseil de guerre, d'envoyer 450 hommes qui
faisaient les trois quarts de leurs troupes, pour
se jeter sur la Communauté de Crusol, dont
les habitants leur avaient fait tant de mal au
temps des Massacres. Au premier bruit de leur
approche, ceux de Crusol se retirèrent dans
une grande caverne, qui était en une
montagne voisine. Les Vaudois ne pouvant les
forcer-là, se contentèrent d'enlever
quatre cents boeufs ou vaches, et six cents brebis
ou chèvres, et tout l'autre butin qu'ils
purent emporter, parmi lequel ils reconnurent
beaucoup des choses, qu'on avait auparavant
enlevé de leurs maisons.
Pendant que les 450 Vaudois étaient en
chemin, pour l'expédition de Crusol les
Papistes de St. Segond, de Lucerne, de la Tour, et
de Briqueiras, brûlèrent quelques
maisons, qui étaient demeurées de
reste dans Rocheplate, et de là
passèrent en Angrogne, pour y surprendre la
petite troupe qu'on y avait laissée pour
garder ce Poste, sous le commandement des
Capitaines Laurens et Benet. Ils
découvrirent leurs ennemis, qui venaient
à eux pour les attaquer par divers endroits,
cela les obligea à partager leur petite
troupe en deux corps, dont l'un gagna promptement
le sommet de la montagne, et l'autre se tint un peu
plus bas sur une petite colline. Ils mirent en
fuite 17 bons soldats en embuscade en un lieu
avantageux, où les ennemis venaient se
joindre.
Cette embuscade s'étant jetée sur eux
à l'improviste, et mis par terre sept des
leurs, cela leur fit tellement fondre le coeur,
qu'ils se retirèrent sur leurs pas sans oser
rien entreprendre.
Au retour de Crusol, le Capitaine Jayer alla
à la Vallée de Pragelas pour y vendre
une partie du butin. N'étant pas revenu au
jour marqué, le Capitaine Janavel avec trois
cents hommes avait entreprit de forcer la Ville de
Lucerne ; il se rendit au point du jour
auprès de cette Ville, c'était le 6
de Juin, dès qu'il y fût arrivé
il détourna les canaux, qui conduisaient
l'eau dans la Ville, et abattit le pont qui
n'était qu'à la portée du
mousquet, pour empêcher le secours d'y
entrer, après quoi il fit son attaque, et
défit deux corps de garde. Mais le soir
précédent Maroles qui en était
Gouverneur, y étant entré avec un
nouveau Régiment, il ne lui fût pas
possible de se rendre Maître de cette place
avec si peu de monde. Il se contenta de ce qu'il
avait fait, et se retira sans perte.
Le 15 de Juin, le Capitaine Janavel se trouvant
dans Angrogne avec les trois cents hommes qu'il
commandait, fût rudement attaqué par
l'armée ennemie composée de trois
mille hommes, et qui était partagée
en quatre corps, dont l'un devait gagner le haut de
la montagne, un autre devait l'attaquer à
droite, l'autre à gauche, et le
quatrième de front. Le Trompette qui devait
donner le signal aux ennemis, pour fondre tous en
même temps sur les Vaudois, ayant
sonné un peu plutôt qu'il ne fallait,
donna loisir à Janavel de se poster sur une
Colline voisine et avantageuse, où avec
l'assistance de Dieu qu'il implora, il
résista depuis le matin jusques à
deux heures après midi à toutes les
attaques des ennemis, et après en avoir
tué un grand nombre, ils
lâchèrent le pied, et s'enfuirent en
confusion et en désordre. Janavel les
poursuivit jusqu'au bas d'Angrogne, et tua
plusieurs de ces fuyards. Les ennemis suivant leur
propre aveu, perdirent en cette occasion cinq cents
hommes, et eurent beaucoup de blessés. Des
Vaudois il n'y en eût qu'un de tué et
deux blessés.
Incontinent après ce combat, le Capitaine
Jayer arriva avec sa troupe, ce qui donna un tel
courage à Janavel et aux siens, qui bien
qu'ils fussent extrêmement fatigués
pour avoir combattu tout le jour sans avoir pris
aucune nourriture, ayant remarqué que les
ennemis ne se doutaient de rien, et ne pensaient
qu'à se partager, pour se retirer chacun
à son quartier, ils résolurent de les
aller attaquer, ils fondirent sur eux avec tant de
vigueur et de courage, Jayer d'un côté
et Janavel de l'autre, qu'ils les mirent en
déroute, et en tuèrent plus de cent,
entre lesquels il y avait trois Officiers de
marque. Mais par malheur pour les Vaudois, le
Capitaine Janavel à la fin du combat,
fût percé d'une balle, qui entrant par
la poitrine sortait entre les deux épaules,
Ce qui le mit en tel état, qu'on croyait
qu'il mourait sur l'heure. Il eût pourtant le
jugement de prier le Capitaine Jayer, de ne plus
rien entreprendre ce soir-là, à cause
que ses Soldats n'en pouvaient plus, et lui donna
même ses avis, touchant ce qu'il croyait
qu'il devait entreprendre. Il se fit ensuite porter
à Pinache, et sur la fin du mois de Juillet
il fût guéri de sa blessure.
Les ennemis des Vaudois ne pouvant subsister devant
eux dans les montagnes, se servirent d'un
Traître, pour attirer le Capitaine Jayer dans
la plaine. Ce perfide le vint trouver après
le combat, dont nous venons de parler, il lui dit,
qu'il n'y avait point de troupes du
côté d'Osacq, où il pouvait
faire un bon butin, et rendre la pareille à
ses ennemis sans danger en brûlant leurs
maisons et leurs cassines. Il prit 150 Soldats de
cette petite armée, et mit le feu à
quelques cassines assez proches d'Osacq, et fit
quelque butin, mais pourtant en des lieux où
la Cavalerie ne pouvait avoir aucun avantage. Le
Traître qui le menait à la boucherie,
lui fit entendre qu'il y avait un peu plus bas en
des cassines qu'il lui enseignerait,
quantité du bétail, qui ne lui
coûterait que le prendre, le persuada d'y
aller. Il ne fût pas plutôt
arrivé au lieu où on le menait, qu'il
se vit enveloppé de l'Escadron de Savoie,
qui le défit avec quarante Soldats qui
l'avaient suivi. Se voyant trahi, il tua le
Traître de sa propre main, et trois
Capitaines de cette Cavalerie, son fils, et ses
Soldats vendirent chèrement leur vie :
mais ayant à faire a tant d'ennemis, ils
furent tous taillés en pièces,
à la réserve d'un qui se sauva dans
un marais.
La mort du Capitaine Jayer et la blessure du
Capitaine Janavel, qu'on croyait mortelle,
survenues en un même jour, causèrent
une grande consternation dans l'esprit des Vaudois.
Ils reprirent pourtant courage, et sous la conduite
du Capitaine Laurens. et du, frère du
Capitaine Jayer, qui lui succéda en sa
charge, se rassemblèrent sur la montagne de
la Vachère, où ils résolurent
d'aller au devant de leurs ennemis, qui venaient
pour les attaquer. Ils se jetèrent sur eux
avec tant de résolution, de courage et
d'adresse, qu'ils les mirent en fuite, et les
obligèrent de se retirer en désordre,
après avoir laissé plus de deux cents
morts sur la place, entre lesquels était le
Lieutenant Colonel du Régiment de
Bavière, et plusieurs Officiers de marque,
outre les blessés et les Prisonniers. Les
Vaudois ne perdirent en ce combat ; que le
Capitaine Bertin et un, Soldat, et ce qui est
étonnant ils n'étaient que 550
hommes, et leurs ennemis étaient 6000, au
rapport des prisonniers. Ceci Aussi est digne de
remarque et d'admiration tout ensemble, C'est que
tout aussitôt, que le Capitaine Bertin
fût mis par terre ; son fils
héritier de sa piété et de sa
charge, ayant fait emporter promptement le corps de
son père, se mit à la tête de
sa Compagnie, et commerça sa fonction par
ces paroles.
Prenez bon courage mes frères, bien que mon
père soit mort, notre père
céleste peut me donner le même courage
et la même adresse pour vous conduire, comme
par sa grâce il m'a rempli d'un même
zèle.
Le jour suivant les Vaudois furent en de
continuelles escarmouches avec leurs ennemis
à la Tour et au Tailleret, où
plusieurs de leurs ennemis furent tués ou
blessés, et les Vaudois n'eurent qu'un
Soldat légèrement blessé.
Les ennemis sachant que toutes les Puissances
Protestantes s'intéressaient pour les
Vaudois, ils renforcèrent leur armée
de nouvelles troupes, pour faire un dernier effort
pour les détruire, avant que les
Ambassadeurs d'Hollande et d'Angleterre arrivassent
à la Cour de Savoie.
Le onze du mois de Juillet toute l'armée les
vint attaquer sur la montagne de la Vachère,
où ils s'étaient postés
auparavant. Le Colonel Andrion de Genève et
Jean Léger Ministre étaient
nouvellement arrivés dans les
Vallées, ils virent que les Vaudois avaient
leurs logements fort écartés, pour se
servir des couverts de quelques étables,
où les Paysans mettaient ordinairement leur
bétail, il les exhortèrent pour
éviter les surprises, de s'assembler tous en
un même lieu de la montagne, où ils
avaient fait quelques barricades pour se mieux
défendre ; mais il fût impossible
de les y obliger, Le lendemain qui fût le
jour de l'attaque, ils envoyèrent quatre
Soldats deux heures avant le jour, pour observer
l'ennemi, dont deux sans y penser,
s'allèrent jeter dans leur armée, qui
faisait halte auprès du temple d'Angrogne.
Ils parlaient Piémontais, ce qui fût
cause qu'ils les prirent, pour être des
leurs ; mais peu de temps après ils
prenaient avec précipitation le chemin de la
montagne, on leur lâcha deux coups de fusil,
qui ne servirent qu'à donner, l'alarme aux
Vaudois, qui en même temps
s'assemblèrent pour se défendre. Les
ennemis se partagèrent en quatre corps, pour
les attaquer par quatre endroits différents,
comme ils firent incontinent après.
Le combat fût rude et dura environ dix
heures, les ennemis étant forts se
rafraîchissaient et se soulageaient les uns
les autres... Ils s'étaient
déjà emparés des
premières barricades et criaient victoire.
Mais les Vaudois qui s'étaient
retirés dans leur dernier retranchement,
après une courte mais ardente prière
qu'ils firent à Dieu, en sortirent et se
jetèrent avec tant de vigueur sur leurs
ennemis, qu'ils les obligèrent à se
retirer, ce qu'ils firent pourtant sans
désordre.
Le Colonel Andrion ne voulut, pas permettre de les
poursuivre de peur de la Cavalerie qui les
attendait en un lieu plus bas. En ce combat les
ennemis y perdirent environ quatre cents hommes,
entre lesquels il y avait plusieurs Officiers de
marque, et 180 Soldats du Régiment de
Bavière. Les Vaudois n'y eurent que quelques
Soldats légèrement
blessés.
Après ce combat, les ennemis ayant perdu
l'espérance de pouvoir moissonner les
blés d'Angrogne comme ils avaient fait ceux
de la plaine, entreprirent de les brûler,
mais les Vaudois y accoururent si promptement et si
à propos, qu'ils les obligèrent de
quitter leur entreprise. Car après avoir mis
par terre douze de ces Incendiaires, ils se
jetèrent sur les autres et les mirent en
fuite, dont une partie en fuyant abandonna ses
armes pour sauver sa vie.
Le Capitaine Bertin les poursuivit jusqu'à
la Tour, et en tua et blessa plusieurs. Il tua
aussi la sentinelle et quatre Soldats, qui
paraissaient sur les remparts du Fort, et y jeta
une si grande épouvante, que les ennemis ont
avoué depuis, que s'il eut poursuivi sa
pointe il s'en serait rendu Maître.
Dans tous ces combats dont nous venons de parler,
il paraissait visiblement que Dieu y
présidait, et qu'il s'était
déclaré le Protecteur et le
Défenseur des Vaudois, autrement comment
est-ce qu'une poignée de gens, qui
n'étaient point dressés au
métier de la guerre, auraient je ne veux pas
dire, remporté tant de victoires, mais
seulement pu résister à tant de
puissants et si forts ennemis, comme nous voyons
qu'ils ont fait jusques au 15 de Juillet, qu'ils
ont combattu seuls, sans l'aide ni l'assistance
d'aucune puissance étrangère. Et ce
qui est considérable, ils avaient à
faire à leur Prince, que les
Émissaires du Pape avaient armé
contre eux, seulement en haine de leur Religion.
Leur Prince était assisté du Roi de
France et du Duc de Bavière, dont le dernier
était son beau-frère, et l'autre son
cousin germain.
Les Vaudois ne faisaient pas la centième
partie des Sujets du Prince, ni de ses
États. Le Prince et tous ses autres Sujets
étaient armés contr'eux, et cependant
ils ne purent remporter sur eux aucun
avantage ; au contraire ils furent toujours
battus, et mis honteusement en fuite en presque
toute sorte d'occasions.
Les Protestants de France ayant appris le cruel
Massacre, qu'on avait fait de leurs frères
de Piémont y firent des Prières
extraordinaires à Dieu pour eux, et des
collectes pour assister les
réchappés. Plusieurs Provinces
même célébrèrent un
jeune en leur faveur ; celle des
Cévennes le célébra de l'ordre
de son Synode, assemblé au lieu de la Sale
au mois de Juin de la dite année 1655.
Sur la nouvelle qu'on eût, que les
rechapés du Massacre, étaient
rentrés dans les Vallées et s'y
défendaient courageusement, plusieurs
Officiers et Soldats des Cévennes et bas
Languedoc allèrent au secours de leurs
frères, qui par petites bandes et par divers
chemins se rendirent dans les Vallées, et
ainsi l'armée des Vaudois qui n'avait
été jusques au 14 ou 15 de Juillet
que de cinq à six cents hommes se trouva
composée de dix-huit cents le 17 ou 18 du
même mois. Le Sr. Descombies de la Ville
d'Anduse en Cévennes, fût du nombre de
ceux qui allèrent au secours de leurs
frères ; et comme il avait eu des
charges considérables dans les armées
du Roi de France, il fût d'un commun
consentement créé
Général de l'armée. À
l'exemple de ceux du bas Languedoc et des
Cévennes, plusieurs Soldats du
Dauphiné se jetèrent dans les
Vallées.
L'armée étant fortifiée de
deux tiers, on résolut dans le Conseil de
guerre d'aller forcer le Bourg et le Fort de la
Tour, on partit la nuit du 18 de Juillet pour cette
expédition, et on arriva le lendemain avant
le jour à un quart d'heure de la Tour,
où on fit halte jusqu'au point du jour, que
le Sr. Des Combes envoya reconnaître le Fort,
ceux qui furent envoyés ayant fait le
rapport, et jugé la place imprenable
à une plus grande armée le
dit Sr. Commandant fit sonner la retraite
appréhendant de réussir mal dans la
première action.
Le Capitaine Bertin qui était d'avis
contraire, ne voulut pas se retirer, mais avec sa
Compagnie s'alla jeter à corps perdu contre
le Bourg. Il fût bientôt suivi de tout
le reste des Vaudois, et de deux ou trois
Français. Ce Capitaine qui était de
ce Bourg, et qui n'ignorait pas les endroits
faibles du feu, perça incontinent la
muraille du côté du Couvent des
Capucins, avant que les ennemis s'en
aperçussent, se rendit Maître du
Bourg, et ensuite du Couvent et y mit le feu. Il
n'y a point de doute que si toute l'armée
des Vaudois eût suivi le Capitaine Bertin,
qu'on aurait aussi pris le Fort, nonobstant le
secours, que Maroles Gouverneur de Lucerne y amena,
dès qu'ils eût avis de l'attaque. Le
Sr. Descombies ayant vu ce que le Capitaine Bertin
avait fait , fût fâché d'avoir
fait sonner la Retraite.
C'est ici que finit la guerre de 1655 qui fût
suivie du cruel massacre, qu'on fit des Vaudois le
mois d'Avril de la même année. Avant
que nous parlions de la paix, il est
nécessaire, que nous fassions quelques
réflexions sur cette guerre.
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