Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

Chapitre IX.

Cinquième guerre contre les Vaudois sous Charles Emanuel I. Duc de Savoie, et principalement contre ceux du Marquisat de Saluces.

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CHARLES Emanuel son Fils lui succéda, qui peu de temps après le décès de son Père, s'empara du Marquisat de Saluces, qui appartenait au Roi de France. Mr. de l'Esdiguières s'empara par droit de Représailles des Vallées de Piémont, et on obligea les habitants de ces Vallées de prêter serment de fidélité au Roi. Les ennemis des Vaudois ne manquèrent pas de prendre ce prétexte, pour irriter l'esprit du Duc contre ces pauvres gens, pour le porter à les exterminer, quand il en trouverait le temps, sans considérer qu'ils avaient été forcés par les armées du Roi, à faire ce serment, leur Prince n'ayant pu leur donner aucun secours.

La guerre s'étant allumée entre Henri IV, Roi de France, et Charles Emanuel Duc de Savoie, à l'occasion du Marquisat de Saluces, le Roi se rendit Maître de toute la Savoie dans une campagne. Ce que voyant, l'Empereur et le Roi d'Espagne, prièrent le Pape, qui venait de faire le mariage de Marie de Médicis sa nièce avec le Roi de France, de travailler à faire la paix entre ces deux Princes, ce qu'il fit, et par le Traité fait entr'eux, le Roi rendit au Duc de Savoie, tout ce qu'il avait pris de ses États, à la réserve de la Bresse, qui fût échangée avec le Marquisat de Saluces.
Les ennemis des Vaudois ne manquèrent pas, dès que le Duc fût en paix, de le solliciter à leur faire la guerre : mais considérant que son père avait mal réussi en la guerre qu'il avait entrepris contre eux, bien qu'il fût assisté de l'Espagne et de la France, ne voulut point leur faire une guerre ouverte : mais permit qu'on les inquiétât en leur faisant des affaires. Et quand les Inquisiteurs avaient mis quelqu'un en prison pour la Religion, si on sollicitait envers le Duc son élargissement, il répondait qu'il ne se mêlait point de ces affaires.

Il agit bien autrement envers les Vaudois du Marquisat de Saluces, qu'envers ceux des Vallées, Contre ceux-ci, il se contenta de laisser agir leurs ennemis : mais contre ceux du Marquisat, il se déclara un Persécuteur ouvert dès qu'il en fût le Maître absolu. Car à la fin du mois de juin 1601. il fit un Édit, par lequel il ordonnait. Que chacun eût à déclarer à son Magistrat ordinaire, dans le terme de quinze jours, s'il était résolu de renoncer à sa Religion et aller à la Messe auquel cas non seulement il pourrait continuer de jouir paisiblement de ses maisons et biens ; mais aussi de plusieurs autres grands privilèges. Mais que pour ceux qui s'opiniâtreraient, à demeurer dans leur Religion, il leur était absolument enjoint, de sortir de ses États dans deux mois, après la publication de l'Édit, et de n'y jamais plus revenir sous peine de la vie, et de la confiscation de tous leurs biens.

Il y avait huit florissantes Églises dans ce Marquisat, mais cet Édit ayant été exécuté avec beaucoup de rigueur, toutes ces pauvres Églises furent dissipées : car les fidèles qui les composaient voyant, que le Duc ne voulait point révoquer son Édit, bien qu'il en fût instamment prié par plusieurs Princes Protestants, se retirèrent du Marquisat avec seulement ce qu'ils purent emporter, et allèrent habiter en des lieux, où ils pouvaient jouir du libre exercice de leur Religion.
Victor Amédée son fils et son Successeur, ne fit point aussi une guerre ouverte aux Vaudois, il en fût empêché par les guerres qu'il eût avec ses voisins, et principalement avec l'Espagne, il permît pourtant aux Inquisiteurs de Rome, et aux Moines de les persécuter sous le manteau de la justice en leur faisant des affaires, et par ce moyen, plusieurs qui tombèrent entre leurs mains perdirent la vie, ou furent condamnés aux galères, ou aux prisons perpétuelles, pour ne vouloir pas aller à la Messe.

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