« Soyez fermes,
inébranlables »
(I
Cor. XV, 58)
Celui qui met la main à la charrue et
regarde derrière lui, n'est point propre
pour le royaume de Dieu Luc
IX, 62).
Ne crains point, crois seulement
(Marc
V, 36).
1. Soyez précis
Aussi bien à l'horizon de nos
montagnes qu'au rivage de nos mers, il est une
ligne de démarcation bien nette. Que la
consécration qui sépare la vieille
vie égoïste de la nouvelle vie
livrée à Dieu soit aussi bien
définie. Peut-être sommes-nous
arrivés à ce moment par une longue
série d'événements et de
manifestations de la bonté divine. Mais
quand l'appel se fait entendre clairement, quand la
bataille s'engage, une décision s'impose.
Livrons-nous sans réserve, ou bien assumons
la solennelle responsabilité d'un refus.
Plusieurs hésitent et marchandent avec la
vérité, se persuadant que leur
indécision n'est pas un refus. Et pourtant,
l'un vaut l'autre. La conscience
desséchée et engourdie est atteinte
dans ses forces vives. Il arrive un moment
où éluder une décision
équivaut à un refus de notre part.
Tranchons la question comme il convient à
une être immortelle rachetée par
Jésus-Christ et mise en présence de
toutes les exigences du Maître. Examinons,
réfléchissons, mais ensuite prenons
notre décision d'une manière
irrévocable. Il est précieux d'avoir
un souvenir précis de la date et de
l'importance de cette transaction avec le Seigneur.
Ce sera un moyen puissant pour nous raffermir plus
tard dans les temps d'épreuve.
2. Ayons confiance
Si nous nous confions à un
médecin en cas de maladie, et que nous nous
soumettions à son traitement, à plus
forte raison devons-nous être patients
lorsque Dieu agit en nous. Nous ne parvenons pas
d'un bond à la stature parfaite de
Jésus-Christ. On ne détrône pas
le moi d'un seul coup de main. L'oeuvre de notre
renoncement ne devient parfaite que si nous portons
notre croix jour après jour
(Luc
IX, 23). Nous ne saisissons pas
d'emblée toute la portée de notre
consécration, et la révélation
de tout notre égoïsme ne nous est pas
donnée en une seule fois. Notre coeur se
briserait de désespoir s'il nous arrivait de
nous voir tout à coup tels que nous sommes.
Ce n'est pas en un instant, en un mois, en un an,
que nous percevons la pleine lumière de la
Parole de Dieu, la pleine connaissance de sa
volonté. Il a bien promis de nous
« guider dans toute la
vérité », mais non pas en
une fois. C'est pourquoi soyons confiants,
patients. Il nous connaît comme nous ne nous
connaîtrons jamais nous-mêmes. Il y a
en nous mille choses dont la présence
empêche que notre purification soit une
affaire de peu de temps. Ayons confiance, toutes
choses seront menées à bien en leur
temps.
3. Ne faisons pas de réserves
Que notre acte de consécration
à Dieu pénètre tous nos
intérêts, tous nos plans, toutes nos
capacités, tout notre être. Qu'une
pointe du compas soit plantée bien au
centre, dans le coeur et la volonté et que l'autre
trace la ligne
comprenant l'horizon le plus lointain. Comme il n'y
a dans nos vies aucun détail trop infime
pour l'attention du Dieu d'amour, il n'y a rien non
plus qui ne mérite de lui être
consacré. Sans doute, Dieu ne nous demande
pas de tout savoir, il nous demande d'être
sincères. Il n'exige pas que nous voyions
à la fois toutes les conséquences
impliquées dans l'acte de notre
consécration. Le Dieu miséricordieux
dont le culte comprenait des sacrifices pour les
péchés ignorés, use de douceur
à l'égard de l'ignorance de ses
enfants. Ce qu'il nous demande, c'est de lui livrer
consciencieusement tout ce dont nous avons
connaissance, et de lui abandonner aussi avec
confiance tout ce qui pourrait nous être
montré dans l'avenir comme étant
impliqué dans notre acte de
consécration. Soyons attentifs à lui
appartenir complètement, et « si
en quelque chose nous sommes d'un autre sentiment,
Dieu nous le révélera
aussi ». Si donc notre coeur est droit
dans ses intentions et dans ses actes, ne craignons
pas que Dieu refuse notre consécration parce
que nous n'en aurions pas entrevu toute la
portée. Notre Dieu n'est ni
déraisonnable ni arbitraire, mais tendre,
rempli de bonté et de compassion. La
consécration de notre vie, faite d'un coeur
sincère, avec les lumières dont nous
disposons, est une offrande que Dieu juge
acceptable.
Mais prenons garde de ne rien retenir le
sachant et le voulant, que notre acte de
renonciation ne contienne aucune exception
suggérée par le moi, aucune
résistance consciente à la
volonté de Dieu. Quand nous nous disons en
nous-mêmes « Je puis dire oui
à Dieu, je puis lui soumettre ma
volonté, je puis me confier en lui pour
toutes choses, sauf celle-ci », nous
pouvons être sûrs que c'est
précisément cette chose-là qui
nous occasionnera un désastre spirituel. II
peut paraître insignifiant qu'un enfant
refuse à sa mère de ramasser un objet
qu'il a violemment jeté à terre, mais
l'esprit de désobéissance que ce
refus révèle est une chose grave, qui
rompt la communion entre la mère et
l'enfant, et fait une brèche
irréparable dans le caractère de
celui-ci. De même telle réserve que
nous pourrions faire quand nous livrons notre vie
à Dieu peut paraître insignifiante,
mais c'est la défiance et l'insoumission
dont elle est l'expression qui sont fatales
à nos relations avec Dieu, et nous priveront
de la manifestation de son Esprit en nous. Il faut
peu de chose pour arrêter un rayon de soleil,
mais ce peu de chose est loin d'être une
bagatelle. De même une petite réserve
faite dans nos coeurs suffit pour nous ôter
la plénitude de Dieu, si essentielle
à l'âme.
Par une nuit d'orage et de tempête,
les habitants d'une petite ville de la côte
de la Nouvelle-Angleterre virent une chose
étrange en regardant le phare dans
l'obscurité. La cloche d'alarme fit entendre
des accents de détresse, et l'on
aperçut soudain la lumière du phare
changer rapidement de place, rester un instant
comme suspendue au-dessus des flots, puis
décrire un arc et disparaître dans la
mer en tourmente avec le phare et ses habitants
solitaires. Le matin révéla le secret
de cette catastrophe. Les gardiens avaient quelque
temps auparavant fixé un gros câble
entre le sommet du phare et les rochers de la
côte pour hisser plus facilement leurs
provisions. Quand l'orage s'éleva cette
nuit-là, des vagues énormes
frappèrent la haussière de coups si
redoutables que la charpente métallique fut
ébranlée par l'effort ; le phare
chancela et fut entraîné à sa
ruine. Une seule ligne d'attache avait accompli
l'oeuvre de mort. Une seule exception dans notre
consécration à Dieu peut produire les
mêmes ravages. Si nous sommes sauvés,
elle n'entraînera pas notre âme
à la ruine. Mais elle peut arrêter
Dieu dans la réalisation de ses desseins de
plénitude, en sorte que notre bateau, sans
faire naufrage, entre dans le port de
l'éternité comme une pauvre barque
vide, alors qu'il eût pu s'avancer comme un
vaisseau richement chargé.
4. Ne revenons pas en arrière
Un acte de transfert est irrévocable. Que notre consécration le soit aussi ; qu'il ne soit jamais nécessaire de la renouveler, parce qu'elle n'aura jamais été mise en question. Une jeune fille étourdie se plaît à chicaner l'enfant confié à sa garde en lui montrant un objet qu'elle retire au moment où il veut le saisir. Cela se répète tant de fois que l'enfant ne sait plus s'il aura l'objet ou pas. Il y a des efforts de consécration qui sont aussi peu sincères. Nous paraissons offrir notre vie à Dieu, mais dès qu'il veut en prendre possession, nous la retirons brusquement, pour renouveler encore et l'offre et le retrait. Que toute vie soit offerte à Dieu sans aucune pensée de retour en arrière ; autrement notre sincérité sera mise en doute. Quand notre vie a été réellement livrée à Dieu, on ne parle jamais de reconsécration, et un enfant de Dieu vraiment consacré ne doit pas avoir à se consacrer à nouveau toutes les semaines ou tous les mois. Toutes les fois qu'il le fait, il jette un doute sur la réalité de la transaction par laquelle il s'est livré à Dieu une fois pour toutes. Ce que nous avons à faire non pas toutes les semaines et tous les mois, mais journellement et à toute heure, c'est de nous dire : « Seigneur, je t'appartiens pour toujours, ne permets pas que j'en doute ou que je l'oublie. » Voilà un joli trait de Brengel, le fameux commentateur. Il avait travaillé tout le jour sur le Livre des livres. Le soir venu, un de ses étudiants l'observa pour voir quelle serait sa fidélité à faire ses dévotions malgré sa fatigue. Vers minuit, il vit le saint homme fermer son livre et se rendre au repos avec ses simples paroles : « Seigneur, tu sais que nos vieilles relations sont toujours les mêmes. » C'est ainsi que, serviteurs de Dieu, nous devrions jour par jour pouvoir lever la face vers celle de notre Maître en lui disant : « Seigneur, tu le sais, nos relations sont toujours les mêmes ; je suis à toi, tu es à moi pour toujours. »
5. Soyons inébranlables
Veillons à ce que nos meilleurs amis
n'ébranlent pas notre fermeté.
Souvent nous restons forts et décidés
en face des assauts manifestes de l'ennemi, mais
notre coeur chancelle et notre âme
s'épouvante quand notre chemin est
traversé par l'ombre angoissante de
divisions et de dissentiments avec ceux-là
même dont l'approbation et l'affection nous
sont surtout précieuses. C'est ici que la
tentation est dangereuse et que plusieurs font des
chutes désastreuses. L'épouse qui
était prête à tout sacrifier
pour le Seigneur s'effraie à la
pensée de la barrière qu'une vie
entièrement consacrée pourrait
élever entre elle et son mari. Le mari, qui
semblait prêt à tout mettre aux pieds
de Christ, n'ose plus dire tout quand il
réfléchit que sa bien-aimée va
peut-être se détourner de lui.
L'épreuve paraît trop dure. C'en est
trop pour la chair et le sang de trouver des
ennemis dans sa propre famille, et les liens du
sang portent ainsi atteinte à une
fidélité envers Christ qui devrait
n'avoir aucune limite. Tout cela vient du malin,
ainsi que nous le voyons par la réponse de
Jésus à son disciple bien-aimé
qui cherche à le détourner du chemin
de la croix : « Arrière de
moi, Satan ».
La ruse du tentateur consiste simplement
à employer les liens les plus tendres de la
nature pour nous entraîner loin de Dieu. Et
notez que nos compromis manquent toujours leur but.
La femme chrétienne qui consent au jeu ou
à la danse dans l'espoir de gagner de
l'influence sur son mari, prend le chemin le plus
sûr pour la perdre. Le seul espoir qu'elle
ait d'élever son mari à une vie
consacrée, c'est de lui montrer combien une
vie semblable à de valeur à ses yeux.
Ce qui, en effet, pourra le mieux convaincre un
homme du prix de cette vie, c'est de voir que sa
femme n'en veut pas faire le sacrifice, par
même sur l'autel de l'affection conjugale.
Cette vie, au contraire, est rabaissée et
déshonorée à ses yeux quand il
voit que sa compagne n'y tient pas par-dessus tout.
« Ce qu'elle lâche si facilement,
se dira-t-il, est sûrement de si peu de
valeur que ce n'est pas la peine de le
rechercher. » Après tout, le joyau
de sa couronne spirituelle est falsifié. Le
respect se perd et l'influence s'en va. C'est ainsi
que le compromis tourne à un contraire. Il
est des coeurs qui ont fait cette expérience
à leur indicible chagrin. Par contre,
très nombreux sont les cas où une
loyauté à toute épreuve envers
Dieu a servi à lui amener un
bien-aimé.
Quelle ne sera pas notre douleur d'apprendre
un jour que notre manque de fidélité
a été exploité par l'Ennemi et
a causé le naufrage, ou tout au moins la
médiocrité d'une vie qui nous
était chère. Nous connaissons une
femme qui, aujourd'hui, rejette Jésus-Christ
avec obstination, parce qu'elle
préférait être perdue avec son
mari que sauvée sans lui. Que ce sera
terrible pour elle de reconnaître dans
l'éternité que si elle avait
été obéissante, son mari
eût suivi, lui aussi, le Seigneur ! Ils
sont nombreux, les hommes et les femmes qui
auraient défendu l'étendard d'une vie
livrée contre tout autre ennemi, mais qui
l'ont laissé choir dans la poussière
parce qu'ils n'ont pas osé lutter dans leur
propre maison. Celui qui ne prend pas soin des
siens, est pire qu'un infidèle.
« mais celui qui aime son père ou
sa mère plus que moi, n'est pas digne de
moi. » Soyons fidèles à
Dieu, quoi qu'il en coûte. Dieu se charge des
conséquences de notre
obéissance.
Vous qui, dans le cercle de famille, restez
fidèles, gentiment et tendrement, mais avec
une ténacité inébranlable,
sachez que vous faites la seule chose qui puisse
élever vos bien-aimés à une
vie spirituelle véritable. Ne craignez rien,
soyez patients, remplis d'amour, et la victoire qui
sort de la prière et de l'obéissance,
après s'être fait un peu attendre,
sera d'autant plus complète et plus
glorieuse quand elle se manifestera.
6. Ayons une grande espérance
Un jeune homme à la fleur de
l'âge se mourait de consomption. Il avait
passé loin de Christ ses années de
force et de santé, mais peu avant sa
dernière maladie, il avait donné son
coeur à Dieu, dont la longue patience
l'avait vaincu. Ses derniers jours furent remplis
d'une confiance enfantine, d'une paix
complète, rares chez quelqu'un de si jeune.
Un jour qu'il avait pu quitter sa chambre, un ami
lui dit que Dieu lui ferait peut-être
retrouver force et santé.
« Ah ! frère,
répondit-il le visage rayonnant de joie
à cette pensée, qu'il ferait bon
vivre maintenant ! »
Après les années
passées loin du Seigneur et après
l'expérience de la rédemption de son
âme, la pensée de vivre pour Christ
plutôt que pour lui-même, remplissait
le coeur du jeune homme mourant d'un intense
désir qui ne pouvait plus se réaliser
ici-bas.
Bien-aimés, après des
années de déceptions, de projets qui
ont échoué, de recherche de
nous-mêmes, après avoir suivi le
Seigneur de loin et nous être
révoltés contre la main qui frappait,
nous finissons par arriver au renoncement et nous
nous livrons au Seigneur, au Maître de notre
vie, qui pendant tout ce temps plaidait avec
insistance pour la possession de notre coeur. C'est
alors avec un joyeux assentiment que nous
répétons les mots du jeune
garçon mourant : « Qu'il
fait bon vivre maintenant ! » O toi qui es
troublé, épouvanté,
désorienté, sois sûr que si ta
vie a été toute de discorde et de
dissonance, c'est uniquement parce que tu
étais hors du centre,
c'est-à-dire de Christ. Mais
maintenant que ta volonté rebelle s'est
livrée et que tu trouves celle du Seigneur
« bonne, agréable,
parfaite », maintenant que tu connais la
paix en Dieu aussi bien que la paix avec Dieu,
maintenant que tu as trouvé le plan de ta
vie qu'il avait préparé de toute
éternité et que, joyeusement, tu
obéis à l'ordre qu'il donnait
à Daniel : « Toi, va à ton lot » ;
maintenant que
« vivre c'est Christ et que mourir
est un gain, qu'il fait bon vivre
maintenant ! » C'est pourquoi sois
plein d'espérance. Bien que tes
progrès vers la ressemblance parfaite de
Christ soient lents et que tu t'effraies en
constatant de plus en plus la puissance de la
chair ; bien que la consécration de ta
vie dépasse ce que tu avais
pensé ; bien que le sommet de la vie
chrétienne semble s'élever toujours
plus haut et te paraisse inaccessible,
malgré tout, espère. Dieu est
à l'oeuvre, il guide, il taille, il
transforme. Il arrive à son but mieux que
jamais. Regarde en arrière, aux jours qui se
sont écoulés depuis que tu t'es
livré à lui et réjouis-toi du
progrès réel de sa vie en toi. Tu
n'es pas encore où tu voudrais ? Non,
certes, et tu n'es pas non plus là où
il désire te voir. Mais il est
fidèle. Toi, espère, et il te fera
parvenir à la place, à la puissance
et au repos préparés de toute
éternité en Christ pour toi.
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