Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

II - Qu'est-ce ?

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Donnez-vous à Dieu (Rom. VI, 13). Offrez vos corps... à Dieu (Rom. XII, 1). Ils se sont donnés premièrement eux-mêmes au Seigneur (II Cor. VIII, 5). Afin que tout le temps qui lui reste à vivre dans la chair, il ne vive plus selon les convoitises des hommes, mais qu'il vive selon la volonté de Dieu (I Pierre IV, 2).

Qu'est-ce que la vie livrée ? Ou plutôt, qu'est-ce que l'acte de consécration qui ouvre à Dieu la vie livrée ?

Les textes cités en tête de ce chapitre répondent clairement à cette question. La consécration, c'est le don volontaire de nous-mêmes à Dieu pour faire sa volonté au lieu de la nôtre. Notez bien les termes, car chacun d'eux est significatif et tous sont tirés des textes ci-dessus. Un don volontaire (donnez, offrez, se sont donnés) de nous-mêmes (vous, vos corps, eux-mêmes) à Dieu (à Dieu, au Seigneur) pour faire sa volonté au lieu de la nôtre (I Pierre IV, 2). L'acte de consécration est donc :


1. Une offrande
Le mot hébreu traduit par consacrer, signifie : « remplir la main ». Il est demandé à l'enfant de Dieu de s'offrir lui-même en témoignage de reconnaissance au Dieu qui l'a racheté, tout comme le pieux Israélite apportait en offrande à l'Éternel ce qu'il avait de meilleur, de plus riche, de plus exquis. Dans les temps passés, quand on vendait les hommes comme du bétail, un esclave attendait en tremblant sur le marché le résultat de la surenchère qui allait le séparer de sa femme, de ses enfants et de tout ce qu'il avait eu de cher et de précieux pendant son esclavage chez son dernier maître. Une surenchère succède à l'autre. Enfin, le marteau du crieur public tombe et s'arrête. Un monsieur s'avance vers l'esclave et lui dit : « Je t'ai acheté. » « Oui, massa », fut la réponse soumise. « Je t'ai acheté bien cher. » L'esclave ne put que baisser la tête en signe d'assentiment. « Mieux que cela, continua l'acheteur, je t'ai acheté pour t'affranchir ; va, tu es un homme libre », lui dit-il en ôtant ses liens. Tombant aux pieds de son libérateur, l'affranchi, éclatant de joie, s'écrie : « Massa, je reste votre esclave à jamais. » C'est ainsi, frères rachetés, que Christ, notre rédempteur, attend que nous tombions à ses pieds pour lui offrir la vie qu'il a affranchie. C'est ainsi que Paul, autrefois esclave du péché, prend avec joie le titre d'esclave (volontaire) de Jésus-Christ.

L'offrande de nous-mêmes est mise admirablement en relief par notre Seigneur, qui s'offrit pour faire la volonté du Père. Le passage (Hébr. X, 5) où il parle du corps qu'il offre à son Père est cité d'après le Ps. XL, v. 7. Là, au lieu de : « tu m'as formé un corps », il est dit : « tu m'as percé les oreilles ». Quand un esclave devenait libre, mais voulait, de son plein gré, rester chez celui qu'il avait appris à aimer, il se tenait debout contre le montant de la porte, et son maître lui perçait l'oreille avec une aiguille. Dès ce moment, son oreille percée le faisait reconnaître pour un homme qui, possesseur de sa liberté, s'était volontairement engagé par amour à rester esclave toute sa vie. Par cette image, le Saint-Esprit nous montre d'une manière vivante la soumission absolue et entièrement spontanée de celui qui a dit de lui-même : « Je suis descendu du ciel pour faire non ma volonté, mais la volonté de celui qui m'a envoyé, et je suis au milieu de vous comme celui qui sert. » Voilà comment Dieu voudrait que nous, qui sommes « fils de Dieu par la foi au Christ Jésus », nous nous offrions joyeusement en sacrifice à notre Père.

Au reste, qu'aucun de ceux qui se sont ainsi offerts en sacrifice à Dieu ne doute jamais qu'il appartient à Dieu. Car tous ses enfants sont à lui bien avant qu'ils se soient offerts eux-mêmes. La consécration ne constitue pas le droit de propriété, elle la présume. Ce n'est pas pour lui appartenir, mais c'est parce que nous lui appartenons que nous lui consacrons nos vies. C'est l'achat qui crée le droit de propriété, dont la livraison n'est qu'une conséquence nécessaire pour que la possession devienne effective. Aussi la question n'est-elle pas : « Est-ce que j'appartiens à Dieu ? mais : est-ce que j'ai livré à Dieu ce qui lui appartient déjà ? » Une fois que j'écrivais à un ami à ce sujet, demandant si celui qui se consacre à Dieu peut dire, sans l'ombre d'un doute, « je suis à lui », je reçus cette réponse aussi claire que brève : « Vous êtes déjà à Dieu par droit d'achat : livrez-lui maintenant ce qui lui appartient. » Que c'est vrai et simple ! Vous ne vous appartenez pas à vous-même. Pourquoi ? Parce que vous avez été racheté. Le texte nous montre clairement que Dieu possède un titre sur nos vies, mais nous en avons encore la possession, la disposition. Notre consécration à Dieu n'est donc que l'acte par lequel nous remettons à Dieu ce qui lui appartient déjà par droit d'achat. Et nous n'avons jamais à craindre un refus ni à douter que nous lui appartenions. Cela a été réglé quand il nous a achetés. Il nous a élus en Jésus-Christ dès avant la création du monde. Reste seule cette question : avons-nous remis ce qui a été acheté, avons-nous livré ce qui ne nous appartient plus ? Vous allez chez un bijoutier, vous achetez un diamant, vous le payez, mais vous le laissez chez lui pour le faire prendre plus tard. Le lendemain, quand vous passez, il refuse de vous le livrer. De par la loi, vous en êtes le possesseur légitime, et c'est injustement qu'il retient le bijou. C'est ainsi que Dieu, dans son amour, a dépouillé les cieux de leur plus riche trésor pour nous racheter, et pourtant nous pouvons refuser de lui livrer nos vies si chèrement payées. Cela nous amène à une deuxième pensée : la consécration est


2. Un don volontaire
Il y a une limite que Dieu ne veut pas franchir ; c'est celle de la liberté humaine. Il plaidera, il suppliera avec larmes à la porte du coeur qui lui refuse sa propriété légitime : mais il n'en forcera pas l'entrée. Ce qu'il y a de plus solennel dans la consécration de notre vie, c'est que le Saint-Esprit nous laisse libre de céder ou de résister quand il nous a convaincus de la réalité de l'appel de Dieu. Et tandis que le Christ plein d'amour se tient devant nous et réclame la possession de nos vies, disant : « Combien souvent j'aurais voulu », il se peut qu'il soit dit de nous : « mais vous ne l'avez pas voulu. » Oui, nous sommes capables de lever les yeux sur ce visage sanglant et de lui dire : « Seigneur, je sais que tu m'as acheté à grand prix, je sais que tu as sur moi les droits les plus élevés et les plus sacrés qui se puissent concevoir, mais je suis enlacé d'une manière inextricable dans mes plans terrestres, mes plaisirs et mes ambitions, et je ne tiens vraiment pas à te livrer ma vie. »

Dans le 1° livre de Samuel X, 27, nous lisons au sujet de Saül que des hommes pervers le méprisèrent et ne lui apportèrent point de présents ; mais il fit le sourd. C'est ainsi que notre Roi, après avoir quitté son trône dans les cieux, pris la forme d'un serviteur et donné sa vie dans la douleur et dans l'ignominie pour nous rendre participants de sa gloire éternelle, se voit souvent méprisé et renvoyé à vide, sans ce don après lequel son coeur languit : le don de nous-mêmes ! Et cependant il n'use pas de contrainte ; il ne crie pas ; il demeure tranquille. Pourquoi ? Parce que l'amour attend un mouvement d'affection volontaire et libre de ceux pour lesquels il souffre, et s'il n'en reçoit pas, il se renferme dans un silence douloureux. Ne t'attends pas, toi qui n'as pas livré ta vie à Christ, « à ce qu'il élève la voix contre toi et te commande avec véhémence de te consacrer à lui. » Il y a dans l'amour une délicatesse qui ne permet pas cela. Quelle femme véritablement aimante, après avoir peiné et souffert, s'être sacrifiée pour celui quelle aime, ne serait pas froissée à la seule pensée d'arracher une réponse à son affection au moyen de reproches, d'allusions piquantes, de gronderies ? Le subtil instinct de l'amour attend une réponse volontaire et spontanée et souffrira en silence plutôt que d'insister. Ce qu'est le parfum pour la rose, la couleur pour le couchant, la blancheur immaculée pour la neige, la spontanéité l'est pour la consécration de nos vies. Si le sacrifice de Christ a répandu dans le monde un parfum de vie, c'est qu'il a été une offrande volontaire. Et il s'attend de notre part à une offrande de même nature. Voilà pourquoi la parole de Dieu ne nous impose pas la consécration de notre vie, mais nous tient ce langage : « Je vous exhorte, frères. » C'est l'amour qui parle. Dans chaque page teinte de son sang, dans chaque verset qui relate ses souffrances, dans chaque ligne qui nous rappelle son sacrifice, c'est l'amour qui parle, et si l'amour n'éveille en nous aucune réponse, alors notre roi se tait. Car l'amour se taira plutôt que de mendier une réponse que la vue de ses souffrances devrait produire spontanément. La consécration est


3. Un don volontaire de nous-mêmes
C'est de nous-mêmes que Dieu a besoin. Aucun autre don en argent, temps, travail ou talents ne satisfera les besoins de son coeur. Car Dieu est amour, et l'amour demande par-dessus tout la possession du coeur. Ainsi la consécration est une transaction entre le Sauveur et le sauvé ; aucun autre sacrifice ne vaut ce don sacré d'une vie livrée. Il y a dans le coeur de l'homme le plus pauvre et le plus dégradé un sentiment instinctif par lequel il refuse l'argent quand c'est d'amour qu'il a besoin. Et Dieu, pourrait-il être content à moins ? L'or et l'argent, le temps, les talents, le travail, il les accepte, s'ils accompagnent le don de soi-même, mais il les refuse s'ils ont la prétention de remplacer ce don. Il est des personnes qui donneront fortune, temps et travail, mais qui ne se sont jamais vraiment livrées à Dieu dans le secret de leur coeur. Et quand elles se rendent compte que Dieu leur demande cela, elles tremblent, elles pâlissent, elles reculent. Pourtant, s'il faut que Dieu soit tout pour nous, il faut aussi que nous soyons tout à lui.
La relation de confiance intime entre le Sauveur et le racheté, qui est la plus grande bénédiction de la vie du croyant, ne pourra jamais s'établir sans que nous nous livrions à celui qui s'est livré pour nous. Sans cette pleine consécration, nous ne l'avons pas reçu comme Seigneur, quand même nous le reconnaîtrions comme Sauveur. Avez-vous jamais pris garde, à cette distinction ? Paul appelle Jésus « notre Seigneur Jésus-Christ. » Nous connaissons Jésus : « Tu lui donneras le nom de Jésus ; car c'est lui qui sauvera son peuple de ses péchés. » Nous connaissons la paix que fait naître le pardon des péchés ; nous connaissons la victoire sur le péché ; un jour nous nous réjouirons de savoir que le péché a disparu. Nous savons en quel Sauveur nous avons cru, nous savons qu'il est puissant pour sauver parfaitement tous ceux qui s'approchent de Dieu par lui. Comme Sauveur jamais il ne nous abandonne clans la détresse, il n'a jamais perdu une bataille livrée pour l'âme faible qui se confie en lui. Quelque terrible que puisse être la tentation, il donne toujours le moyen d'en sortir victorieusement. En vérité, notes l'aimons avant tout comme Jésus.

Nous le connaissons aussi comme Christ, comme l'Oint. Car c'est lui qui nous baptise de son Saint-Esprit, et l'onction que nous avons reçue demeure en nous et nous n'avons pas besoin que personne nous instruise. Cet Esprit-Saint, l'Esprit de Jésus lui-même, l'Esprit de Dieu demeure en nous. Il console, il guide, il purifie, il nous donne joie. paix, amour, il nous révèle les choses de Christ, il nous transforme à son image, il nous dévoile la gloire de Christ.

Mais ce même Fils de Dieu que nous confessons comme notre Sauveur et dont nous avons reçu l'onction, l'acceptons-nous comme le Seigneur (ce qui signifie Maître), le propriétaire de notre personne, le maître qui dispose d'un droit absolu et permanent, par le fait du rachat qu'il a opéré ? Bien-aimés, Jésus-Christ est-il notre Seigneur dans toute l'acception du terme ? Avons-nous joyeusement mis à sa disposition nos corps, nos vies, tout ce dont nous disposons ? Ou bien avons-nous accepté les privilèges de la rédemption, le pardon, l'onction sainte, sans reconnaître le droit de Seigneur et de Maître que son oeuvre lui confère ? Est-ce qu'il dispose de vous, de votre or, de votre argent, de vos affections, de vos pensées, de votre temps, de vos talents ? Comment serait-il possible d'appeler Jésus Seigneur dans ce sens, si ce n'est par l'Esprit ? Bien-aimés, l'Esprit qui vous atteste le pardon de vos péchés, votre adoption, vous dit-il aussi que vous êtes la propriété absolue et incontestée de Jésus-Christ votre Seigneur ?

Quand Marie dit : « Ils ont enlevé mon Seigneur » ; quand Thomas, à la vue des blessures du ressuscité, s'écrie : « Mon Seigneur ! », quand, à l'aube, sur la plage, les disciples reconnaissent que « c'est le Seigneur » ; ce mot de Seigneur semble avoir eu dans leurs vies une signification tout autre que celle que nos vies à nous lui donnent trop souvent. Il était leur « Maître » par le fait d'un choix joyeux et reconnaissant. Ils le proclamaient leur Seigneur de tout leur coeur, toujours, et non seulement dans l'exécution d'un chant ou dans un moment d'émotion passagère. La passion de leur vie était d'être tout pour lui, comme il avait été tout pour eux. Leur consécration était véritablement complète. La scène de Actes II, 44, 45, qui soulève tant de questions dans les coeurs non consacrés à Jésus, fait resplendir la souveraineté du Maître, si effective au sein de l'Eglise, que dans toute cette foule des premiers disciples « nul ne disait que ce qu'il possédait fût à lui ! » Bien-aimés, Jésus-Christ est-il pour vous non seulement le Sauveur et le Christ, mais aussi votre Seigneur ?


4. Le don volontaire de nous-mêmes à Dieu
Ce n'est pas à une vocation, à un champ de travail, à une occupation ou à un principe que nous nous sommes donnés.

Pour beaucoup de chrétiens, la pensée d'une vie livrée est inséparable d'un travail dans la mission, dans l'évangélisation, ou dans quelque ministère spécial. Aussitôt que l'appel de Christ se fait sentir à quelqu'un, il se demande : « Puis-je prêcher l'Évangile ? Aller en Chine, aux Indes, en Afrique ? » Dieu ne nous demande pas de livrer notre vie à un champ de travail spécial, mais de la lui remettre à lui, pour ainsi dire en blanc-seing. La décision à prendre n'est pas de partir pour un pays lointain, mais d'avoir en Dieu une confiance telle que nous lui remettions notre vie pour qu'il en fasse ce que bon lui semblera. Paul dit des Macédoniens : « Ils se sont donnés premièrement eux-mêmes au Seigneur et ensuite à nous selon la volonté de Dieu » (II Cor. VIII, 5). C'est-à-dire qu'ayant reconnu en eux-mêmes qu'ils devaient avoir confiance en celui qui est mort pour eux et que sa volonté est toujours ce qu'il y a de meilleur, ils se livrèrent à lui sans réserve. S'étant ainsi livrés au Seigneur et ayant été remplis du Saint-Esprit, ils purent se consacrer par une obéissance joyeuse et volontaire, au ministère particulier que Dieu, dans sa sagesse, leur avait préparé.

« Premièrement à Dieu ; puis à nous selon la volonté de Dieu ». La victoire véritable consiste à nous confier en Dieu sans savoir où ni comment il se servira de nous ; à nous livrer nous-mêmes à Dieu, plutôt qu'à nous introduire dans une mission lointaine avec une volonté encore insoumise. Quand notre volonté se soumet à Dieu, la victoire est alors remportée ; le Saint-Esprit remplit la vie livrée d'un esprit de joyeuse obéissance, et c'est désormais pour nous un besoin et un privilège d'accomplir la volonté de Dieu dans tous les détails de notre vie. Le vrai missionnaire ainsi consacré à Dieu, part pour son champ de travail sans hésitation ni crainte, rempli d'un bonheur indicible, porté par un esprit d'entier dévouement à celui qu'il sert. C'est pourquoi si des questions angoissantes se présentent à nous, pendant que nous luttons pour parvenir à une consécration complète et absolue, disons simplement : « Seigneur, je me livre à toi pour faire ta volonté quelle qu'elle soit, et quoi que tu demandes de moi je compte sur toi pour l'accomplir avec joie quand le moment sera venu. » La grâce de se livrer à un travail spécial sera donnée pleinement à celui qui s'est donné pour faire toute la volonté de Dieu.

Nous arrivons ainsi à la dernière pensée destinée à définir la consécration :


5. Le don volontaire de nous-mêmes à Dieu pour faire sa volonté au lieu de la nôtre
Voilà le but final de la vie consacrée. Il y a désaccord entre la volonté de la chair et celle de Dieu. L'homme déchu est en révolte contre la volonté parfaite de Dieu. La rédemption de Jésus-Christ a pour but de rétablir l'accord entre la volonté de l'homme et la volonté de Dieu. Le jour vient où cette volonté divine sera faite sur la terre rachetée aussi parfaitement qu'elle l'est maintenant au ciel. Puis donc que la volonté de Dieu fera la joie de ses rachetés pendant l'éternité, la seule attitude qui leur convienne, c'est de faire dès maintenant cette volonté, et non plus celle de la chair. La consécration n'est pas autre chose que l'acte par lequel nous prenons cette attitude d'obéissance. Et ce n'est point un acte qui nous procure aucun mérite devant Dieu ; c'est tout simplement l'acte indispensable par lequel le Dieu de toute grâce, désireux de faire abonder sa volonté parfaite dans la vie de chacun de ses enfants, arrive à la réalisation de son but glorieux sans porter atteinte à la liberté de l'homme, que Dieu respecte toujours.

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