Il n'y a jamais eu dans les siècles
passés, une aussi grande
préoccupation de ce que doit être la
vie chrétienne, que de nos jours. Les vrais
enfants de Dieu soupirent après la
plénitude de Christ, que la plupart des
chrétiens réalisent si
imparfaitement. La parole de Dieu la promet, les
premiers disciples l'ont glorieusement
révélée, les âmes
vivantes s'y cramponnent, et leur foi en la
possibilité d'une telle vie provient du
Saint-Esprit. Voyant qu'il ne peut pas bannir des
coeurs cette vision des hauts sommets, le grand
adversaire cherche à obstruer le passage qui
y conduit. L'erreur, l'enseignement falsifié
de la parole, le perfectionnisme, la sanctification
de la chair, l'ignorance et bien d'autres causes
s'accumulent pour empêcher l'âme
d'atteindre ce but, comme le mirage et le
brouillard empêchent le pèlerin
d'arriver au terme de son voyage. À travers
tous ces obstacles, l'Esprit discerne et retrouve
le chemin, de sorte qu'au milieu même des
ténèbres des derniers siècles,
il a maintenu la conception de la vie de
plénitude en Christ.
Aussi longtemps que les hommes errent dans
le labyrinthe de leurs propres pensées et
recouvrent la vérité du pauvre vernis
de leur sagesse humaine, l'Esprit ne peut rien leur
révéler. Mais aussitôt qu'ils
rendent à la Parole de Dieu sa
simplicité et sa suprême
autorité, la vraie lumière jaillit et
l'étude sérieuse et véritable
de la Bible dévoile le secret d'une pleine
et abondante vie en Jésus.
Notre corps est le temple du Saint-Esprit
qui entre en nous à la conversion, pour
habiter éternellement en nous. Le mobile de
la vie de puissance est de marcher selon l'Esprit,
au lieu de marcher selon la chair
(Rom.
VIII, 5). Et pour marcher selon
l'Esprit, il est absolument nécessaire de
livrer à Dieu ces vies que nous avons
jusqu'ici dirigées nous-mêmes. Ces
glorieuses vérités sont clairement
expliquées dans la Parole de lieu,
spécialement dans les épîtres
de saint Paul.
Si nous marchons par l'Esprit, nous ne
péchons pas
(Gal.
V, 16). Si nous marchons par
l'Esprit, nous faisons mourir les actions du corps
(Rom.
VIII, 13).
Si nous marchons par l'Esprit, la loi de
l'Esprit de vie nous affranchit de la loi du
péché et de la mort
(Rom.
VIII, 2).
Si nous marchons selon l'Esprit, nous sommes
fils de Dieu
(Rom.
VIII, 12).
Si vous êtes conduits par l'Esprit,
vous n'êtes plus sous la loi
(Gal.
V, 18).
Si nous marchons selon l'Esprit, nous sommes
transformés à l'image de Christ, de
gloire en gloire
(2
Cor. III, 18), et l'image de sa
glorieuse vie est reproduite en nous dans tous ses
traits d'amour, de joie, de paix, de
longanimité, de bienveillance, de
bonté, de fidélité, de
douceur, de tempérance
(Gal.
V, 22).
En un mot, celui qui réalise la
marche de l'Esprit marche en Dieu au lieu de
marcher par lui-même ; pour lui, vivre
c'est Christ.
La consécration de notre vie est
nécessaire pour que Dieu puisse agir
librement en nous. Comment le Saint-Esprit peut-il
conduire, purifier, transformer, remplir et
employer une vie, avant qu'elle lui soit
complètement livrée ? Que peut
faire le potier avec une argile qui n'est pas
maniable ?
Comment Dieu peut-il façonner un
être qui pleure et qui gémit sur
chaque idole qu'on lui enlève, qui se
désespère pour chaque affliction
nécessaire, qui oppose sa volonté
hostile aux coups de ciseau du divin
sculpteur ?
Comment peut-il mouler, transformer,
bénir ? Certainement le navire dont
Dieu n'est pas le pilote est destiné
à faire naufrage.
Certainement la harpe qu'il n'a pas
accordée ne rendra jamais que des sons
discordants et confus.
Si nos montres ont besoin de
réparation, nous les donnons à
l'horloger ; si nos bijoux se brisent, nous
les portons au bijoutier ; si nous avons un
membre cassé, nous le confions au
chirurgien.
Pouvons-nous refuser à Dieu de lui
remettre cette vie rachetée à un si
grand prix, pour qu'il réponde à nos
aspirations les plus élevées ?
C'est pour cela que la parole de Dieu nous presse
de céder, de céder encore, de
céder toujours, de nous livrer
nous-mêmes à Dieu
(Rom.
VI : 13, 16,
19.
XII :
1), si nous voulons que
son Esprit ait libre cours dans nos vies. Son
dessein, de grâce, de
bénédiction, et le ministère
qu'il confie aux siens est complètement
anéanti pour celui qui ne veut pas se livrer
à lui.
Considérons la vie de
Jésus-Christ. Rien n'est plus frappant que
son attitude d'absolue soumission à son
Père : « Me voici, je suis
venu pour faire ta volonté »
(Hébr.
X, 9). Il est venu,
comme il le dit lui-même, non pour faire sa
propre volonté, non pour dire ses propres
paroles, non pour chercher sa propre gloire, non
pour enseigner ses idées. Dans toutes ces
choses, il proclamait son entière soumission
au Père, son renoncement complet au moi pour
la direction de sa carrière terrestre. Et,
s'il est vrai que le serviteur n'est pas plus que
son maître, comme le Père l'a
envoyé, ainsi il nous a de même
envoyés. Et, si lui, le Fils de Dieu, sans
tache et sans péché, a livré
sa vie terrestre à son Père, à
bien plus forte raison nous aussi devons-nous lui
livrer nos vies. À chaque page du divin
livre nous sommes exhortés à suivre
les traces de Christ, et qui voudrait s'en
dispenser ? Le désir de porter des
fruits pour lui, n'est-ce pas un mobile suffisant
pour nous presser d'imiter Jésus, et de nous
donner à Dieu sans réserve ?
Plusieurs de ceux qui sont sauvés ne sont
pas serviteurs ; ils se réjouissent de
leur salut, mais ils redoutent la mission de
disciples ; ils convoitent la couronne ;
mais ils repoussent la croix. Pendant que nous
n'étions que pécheurs, Christ est
mort pour nous
(Rom.
V, 8). Il est mort pour que
ceux qui vivent ne vivent plus pour
eux-mêmes, mais pour celui qui est mort pour
eux
(II
Cor. V, 15).
Dans le premier passage, ces âmes
voient le dessein de Christ de sauver, mais
elles ne voient pas dans le second le dessein de
Christ en nous sauvant. Elles ne voient pas
qu'il est mort, non seulement pour sauver
notre vie, mais afin de l'employer pour lui,
non seulement pour amener des hommes dans son
royaume, mais pour en faire des serviteurs du Roi.
Il ne se contente pas de pécheurs
sauvés, il lui faut des saints
consacrés. Le fait le plus étonnant
de la religion de nos jours, c'est le grand nombre
d'hommes et de femmes qui, sauvés par
Christ, refusent de se livrer à Christ pour
vivre pour lui. Ceux qui répondent de tout
leur coeur avec joie à l'appel divin sont en
aussi petite minorité dans nos
églises que les inconvertis qui
reçoivent l'Évangile. Quel
mépris de l'amour de Jésus, quelle
révélation du règne du moi !
Comment la vision bénie du sacrifice
de Christ ne nous presse-t-elle pas de nous jeter
à ses pieds avec tout ce que nous
possédons, au lieu de lui marchander
à regret les dons parcimonieux de notre
abondance ? Aucune vérité de la
parole de Dieu n'a souffert autant de
contradictions que cet appel à une vie
livrée, aucune n'a été plus
souvent dénaturée par ceux qui se
disent chrétiens. Elle a été
affligée du douloureux insuccès de
ses messagers et de l'inconcevable
légèreté de ceux qui parlaient
de la consécration comme d'un vain mot, et
des réunions de consécration le
sourire aux lèvres.
Malgré tout, cette
vérité reste là comme l'acte
suprême de la vie du croyant, comme le
principe d'un service plein de succès et de
bénédictions. Beaucoup d'enfants de
Dieu se contentent de quelques actes isolés
qui doivent plaire au Seigneur, et ils trouvent de
la joie à le suivre aussi longtemps que ses
plans leur conviennent.
Mais quand il faut marcher dans la nuit,
supporter et accomplir des choses qui
répugnent à leur volonté
propre, ils s'arrêtent et cherchent des
exceptions à la volonté de Dieu.
C'est alors qu'un acte décisif de
consécration est de grande valeur, car il
implique la condition de faire et de souffrir tout
ce que Dieu veut, en tout temps, comme
étant ce qu'il a de meilleur pour nous. Et
si nous sommes appelés à marcher dans
le crépuscule d'une foi simple et
absolue ; si les voies de Dieu semblent
douloureuses, nous le suivrons avec autant de
confiance dans la nuit de la foi que dans la
lumière de la vue. Nous retournerons en
arrière, nous souvenant du moment où
nous lui avons remis la responsabilité de
notre existence ; nous nous rappellerons sa
fidélité et sa puissance pour garder
tous ceux qui se confient en lui !
Laissons donc paisiblement notre vie au pied
de la Croix, là où nous l'avons
placée, une fois pour toutes, entre ces
mains dont le sang a coulé, et qui sont
parfaitement sûres pour la garder à sa
gloire.
À celui qui nous a aimés et
qui nous a lavés de nos péchés
par son sang et qui a fait de nous un royaume de
sacrificateurs pour son Dieu et Père,
à lui la gloire et la force aux
siècles des siècles !
(Apo.
I ; 6)
Amen.
- | Table des matières | Chapitre suivant |