Notre communauté russe à M.
grandissait et nous fûmes pris du
désir d'évangéliser les
villages russes et cosaques des environs. Nous
rédigeâmes des prospectus et des
affiches que nous envoyâmes aux
autorités des différents villages en
les priant de mettre à notre disposition, au
jour indiqué, un local approprié.
Cinq ou six bons chanteurs de notre
communauté et moi-même, nous nous
rendions ensuite dans la localité, et nous
logions chez des particuliers. Le lendemain, nous
avions généralement des
réunions très
fréquentées où nous chantions
nos cantiques. Il y eut de nombreuses conversions.
Voici quelques épisodes de ces
tournées
d'évangélisation :
Dans le village de R., à environ deux
kilomètres de la ville, se trouvait un
groupe de quelques Russes croyants qui
étaient malheureusement revenus peu à
peu à leur ancien train de vie à
cause de dissensions intestines. Nous
résolûmes d'aller leur rendre visite
et de tenter une réconciliation. Quand
l'affaire eut été
réglée entre les frères et
qu'ils se furent repentis, nous choisîmes ce
village comme centre de nos opérations.
C'était l'hiver et un frère nous
conduisit en traîneau de village en village.
Nous passions en chantant par les rues et quand
nous avions
groupé un certain nombre de curieux, nous
invitions chacun à la réunion du
lendemain.
Un soir, nous arrivons à une isba
très misérable. La chambre
était petite et il y régnait une
puanteur horrible, car deux gorets et un veau
partageaient le local avec les humains. Les
villageois y entrent pleins de curiosité,
attirés par nos chants, et pour voir qui
rend visite à ces pauvres gens.
Bientôt la petite chambre est pleine à
craquer. Sur le sol et sur les bancs de bois,
hommes, femmes et enfants ont pris place, et aux
fenêtres basses se pressent les nombreux
curieux qui n'ont pu entrer. Sur le grand
poêle russe sont assis plusieurs vieillards
à grande barbe qui attendent avec
intérêt ce qui va se passer. C'est un
étrange auditoire.
Notre petit quatuor chante de son mieux,
puis je lis le chapitre VI des
Éphésiens. Quand j'arrive au
passage : « Saisissez le casque du
salut et l'épée de
l'Esprit », un des vieux
grands-pères s'écrie du haut de son
poêle :
- Arrêtez donc ! Qu'est-ce que
ça veut dire, l'épée de
l'Esprit ?
Cette question fut le point de départ
d'une nouvelle vie pour cet homme et pour plusieurs
autres. Car les gens commencèrent à
nous presser de questions concernant le
salut ; le vieillard et d'autres encore, parmi
lesquels le secrétaire de commune, se
convertirent le même soir.
Après la réunion, nous nous
couchâmes pleins de joie à
côté des habitants de l'isba. L'air
était si pestilentiel qu'on y
étouffait presque, mais cela ne faisait
rien. La joie d'avoir amené tant de
pécheurs au salut faisait facilement
accepter ces incommodités. La communauté de ce
village
devint plus tard le centre d'un mouvement
étendu.
Quand nous repartîmes, quelques
traîneaux se joignirent à nous. On
voulait nous accompagner dans notre tournée
missionnaire. Nos chants résonnaient joyeux
dans l'air hivernal, les, clochettes des chevaux
les accompagnaient de leur tintement, les
traîneaux glissaient allégrement sur
la neige profonde, et parfois tout
l'équipage versait doucement dans cette
couche molle et fraîche.
Dans le village voisin, pendant notre
allocution, un vieillard se jette le visage contre
terre, comme le font souvent les Russes. Il se met
à pleurer amèrement et
s'écrie :
- Je suis un misérable voleur ;
ce que j'ai volé de choses dans ma
vie ! ! Dieu, aie pitié de
moi !
Un autre vient se joindre à lui et
s'écrie pareillement :
- Moi aussi, je suis un voleur. Ç'a
été mon principal métier
jusqu'il y a peu de temps. Chez toi aussi, voisin
E., j'ai volé des choses. J'en ai encore des
tas chez moi.
À l'ouïe de telles confessions
et pendant la prière que je
prononçai, tous se mirent à pleurer.
Ce soir-là plusieurs trouvèrent la
paix en Dieu. La Parole sainte avait un effet si
direct que c'était merveilleux. Vraiment la
Russie était mûre pour recevoir
l'Évangile, pour entendre le joyeux message
de la délivrance des péchés
par le sang de Jésus. Tout l'arrondissement
fut peu à peu
évangélisé et des
communautés florissantes y furent
fondées en mainte localité.
Voici encore un cas qui montre l'action
immédiate de la Parole de Dieu.
C'était à la station de K., à 150 kilomètres
environ de
chez nous. Il n'y avait là encore aucune
communauté de croyants, et cela ne me
laissait pas de repos. Nous résolûmes
d'y commencer un travail
d'évangélisation. Nous nous y
rendîmes et nous tînmes une petite
réunion dans une maison russe. je lus dans
l'Apocalypse, au chapitre XXII, le passage :
« Et je tombai aux pieds de l'ange pour
l'adorer. Mais il me dit : Garde-toi de le
faire. Je suis ton compagnon de service. Adore Dieu
seul ! » Comme je relisais ce
verset, une dame distinguée se leva et
dit :
- Écoutez ! écoutez donc
ce qu'il lit. Veuillez répéter !
Il est écrit : L'ange dit :
Garde-toi de le faire. Adore Dieu seul. Et nous,
nous prions les icônes, nous adorons tout au
monde. Nous sommes perdus. Que faut-il que nous
fassions ?
Ce fut une grande joie pour nous quand cette
dame se convertit. Lorsque je revins pour la
seconde fois à K., il y avait d'autres
personnes qui désiraient aussi commencer une
nouvelle vie. Dans cette localité, il se
forma une petite communauté qui fut
bientôt la lumière et le sel de son
entourage.
Devant la foi et la simplicité de ces
gens ignorants, devant les exaucements que Dieu
donnait à leurs prières enfantines,
nous nous sentions humiliés. Nous
eûmes aussi deux guérisons par la
prière. Car pour les Russes, il est tout
naturel que le Sauveur des âmes soit aussi le
médecin des corps. Voici l'une de ces
guérisons. Un jour, nous arrivons dans un
village et un grand nombre de personnes se
réunissent pour entendre nos cantiques et la
Parole de Dieu. Le pope de l'endroit est aussi
présent. Nous rendons notre joyeux
témoignage au Dieu puissant qui pardonne aux pauvres
pécheurs. La
réunion se tenait dans la maison d'un Russe
dont la femme était paralysée d'un
côté et alitée depuis quelque
temps. Elle ne pouvait prononcer que quelques mots
indistincts. À notre grande joie, le
Seigneur se révèle à plusieurs
personnes. Tout à coup on m'appelle
auprès de la malade qui, de la chambre
voisine, a suivi la réunion. Saisie de ce
qu'elle a entendu, elle me fait dire par son
mari :
- Ce sont des saints de Dieu ; il faut
qu'ils supplient Dieu et le guérirai.
Avant même que j'aie pu commencer ma
prière, elle se met à louer le
Seigneur et à le remercier à haute
voix. Puis elle se lève, se met à
marcher et dit :
- Maintenant, je suis guérie ;
non seulement mon corps, mais mon âme est
revenue à la santé.
La guérison était bien
réelle, comme on le vit par la suite. Tous
les assistants sont profondément
touchés, le pope aussi. Mais quand on
commence à nous vanter, nous ne voulons pas
rester plus longtemps. Nous chantons encore
quelques cantiques en guise d'adieu, et nous
partons pour le village voisin.
Quand nous avons rejoint la grande route,
j'entends en mon coeur comme une voix me
dire :
- Arrête-toi devant cette
maison ! Nos frères et soeurs s'en
étonnent, mais ne me retiennent pas. je
prends quelques traités religieux et j'
entre dans la cour ; je n'y rencontre
personne. Je parcours la maison ; elle semble
déserte. je pose quelques Évangiles
sur la table et veux remonter en voiture. Comme je
sors de la maison, une voix de femme dit
derrière moi
- Que voulez-vous ?
- Nous sommes un groupe de bons chanteurs et nous
allons de village en
village
pour faire entendre nos chants,
répondis-je.
Elle s'approche et nous invite à
descendre chez elle bientôt la chambre est
pleine. Notre choeur de cinq personnes entonne le
cantique :
- Écoutez tous une bonne nouvelle ;
- C'est pour sauver que Jésus-Christ est mort...
Cela produit une profonde impression sur tous
les assistants. Plusieurs ne peuvent retenir leurs
larmes, et la maîtresse de maison nous
demande :
- D'où venez-vous donc ? Vous
apportez le message que mon coeur attend depuis
longtemps.
Sa fille se tenait à
côté d'elle, la tête
appuyée sur son épaule.
C'était une famille cultivée. On nous
permet de lire un passage de l'Écriture et
de l'expliquer. Puis nous nous agenouillons et
presque chacun suit notre exemple. Quelques-uns se
signent, d'autres prient, d'autres encore se
tiennent debout devant les icônes. Puis nous
chantons encore :
- Rien ne peut de nos coeurs effacer la souillure,
- Rien que le sang de Christ sur la Croix répandu ;
- Source toujours ouverte où l'âme devient pure,
- Pardon toujours offert à tout pécheur perdu.
Le pope avait appris que nous étions dans
son village et que nous y propagions une doctrine
étrangère. Il vient en toute
hâte avec son diacre ; nous l'entendons
rôder et jurer autour de la maison, mais les
assistants ne se laissent pas troubler. Ils sont
profondément remués quand nous les
quittons, et ils nous prient de revenir leur parler
de Jésus.
Nos tournées ne se passaient pas
toujours aussi paisiblement, et
plus d'une fois nous n'avons échappé
que tout juste à de grands dangers. Un jour,
nous nous rendons à R., où nous avons
fait distribuer des prospectus et nous voulons nous
mettre à évangéliser.
C'était déjà à
l'époque de la révolution. Dans notre
ville, à M., les Allemands étaient au
pouvoir. Mais leur puissance ne s'étendait
qu'à 25 kilomètres à la ronde
et R. était au-delà. Nous ne le
savions pas, mais le pope ne l'ignorait pas.
Après la réunion, quelques convertis
nous avaient invités à dîner.
Nous venions de nous mettre à table quand
arrivent soudain sept cavaliers qui, sur la plainte
du pope, ont été envoyés d'un
village cosaque voisin où réside le
chef de la police. Ils ont ordre de nous
arrêter et ils nous contraignent avec menaces
à les suivre.
Encadrés par les cosaques, nous nous
rendons avec nos voitures au village voisin
auprès du chef de police, et environ
cinquante Russes qui ont assisté à la
réunion y sont amenés à pied.
Quand nous arrivons dans la cour du bâtiment
de police les cosaques demandent à leur
colonel la permission de donner à chacun
vingt-cinq coups de
nagaïka.(1) Il l'accorde, et les
cinquante
personnes à la file, hommes et femmes,
reçoivent leurs vingt-cinq coups. Ils
poussaient des cris affreux et se tordaient de
douleur ; seul un jeune homme récemment
converti serrait les dents. Cela met le colonel en
fureur ; il ordonne de lui en donner
vingt-cinq supplémentaires. Le jeune homme
se débat tant, qu'il réussit à
se dégager et essaie de s'enfuir. Le colonel
donne l'ordre de l'abattre à coups de fusil.
Alors je cours vers l'officier et lui dis :
- Vous n'en avez pas le droit. Et cessez de
faire battre les gens, sans quoi il pourrait vous
en coûter !
Plein de rage, le colonel fait administrer
encore vingt-cinq coups au jeune homme et on
l'emporte sans connaissance. Bientôt
cependant il reprend ses sens. Les assistants,
indignés, se chuchotent l'un à
l'autre :
- Jusqu'ici, nous ne savions pas ce que
c'était que les Stundistes. Mais maintenant
nous voulons en être.
Pour nous, cette scène était
horriblement pénible. Je retourne vers
l'officier et je lui dis de cesser ce supplice.
« C'est moi le coupable, dis-je ;
c'est moi qui ai organisé la
réunion. » Alors il me
répond :
- À toi, on te réglera ton
compte à part.
On enferme une partie des Russes, on laisse
courir les autres. Alors vient notre tour, à
nous frères et soeurs de la
communauté évangélique. On
veut nous faire passer un à un de la cour
dans la salle de police, mais nous nous donnons le
bras en nous serrant très fort pour subir
ensemble notre peine. Cinq cosaques nous attendent
le fouet levé. Je dis encore une fois au
colonel :
- Aujourd'hui, vous avez le droit de
frapper ; mais dès que je serai en
liberté, vous ne garderez pas longtemps
votre charge ; car j'ai plus facilement que
vous accès auprès du gouverneur.
Cela paraît lui faire impression,
ainsi que sur ses cosaques. Leurs coups perdent
leur assurance et dès qu'ils lèvent
le bras, nous esquivons leurs nagaïkas.
Ils renvoient ensuite nos voitures et nos
chevaux à M. et nous sommes
incarcérés tous les cinq, moi dans
une cellule à part, mes compagnons ensemble
dans une autre. Bientôt ils entonnent un
cantique ; je me joins à eux et les chants les
plus
joyeux
retentissent dans ces sombres murailles. Les
geôliers y trouvent tant de plaisir, qu'ils
nous mettent tous dans la même cellule. On
ouvre les portes de toutes les cellules et peu
d'instants après, nous tenons réunion
dans la prison. Cela vient aux oreilles du chef de
police. Il donne ordre de fermer bien vite les
portes et nous interdit de chanter.
Dans la localité se trouvait une de
nos bonnes connaissances. Un gardien se charge de
lui apporter un billet de ma part. Tôt
après notre ami vient à la prison
trouver le colonel. Il le menace de le faire
destituer ; il exige notre mise en
liberté immédiate et
représente au colonel qu'il s'est rendu
gravement coupable. L'officier change du tout au
tout. Plein de déférence et
d'amabilité, il lève aussitôt
l'écrou, et nous demande si on nous a bien
traités et bien servis, si on m'a
donné un lit.
- Oui, le lit que vous m'avez fait donner,
le voilà, dis-je en montrant le sol nu.
Le prêtre aussi a pris peur ; il
nous invite à dîner il nous sert un
excellent rôti et nous prie de lui pardonner
sa méprise. Bientôt nous sommes bons
amis. Montés dans d'excellentes voitures et
escortés par les cosaques, nous regagnons
notre domicile en chantant.
Les prêtres orthodoxes ne nous montraient
pas tous autant d'aversion et d'hostilité.
J'ai vu des prêtres profondément
remués par la Parole de Dieu,
reconnaître les grands torts dont ils
s'étaient rendus coupables. Souvent
c'était par ignorance que ces aveugles
étaient devenus conducteurs d'aveugles.
Quand la parole divine touchait leur coeur, ils
étaient épouvantés et
s'inclinaient devant la vérité. Mais
leur changement d'attitude ne rendait pas leur
situation bien facile. L'ancienne Église
orthodoxe supportait que ses prêtres fussent
ivrognes, blasphémateurs, immoraux, mais non
qu'ils cherchassent en Dieu les sources de la vraie
vie.
Avant la guerre mondiale, nous eûmes
à installer non loin de Z. un moulin
à cylindres, dont un prêtre russe
était copropriétaire. je m'y rendis
pour préparer le montage et le pope vint
m'attendre à la gare. Il m'emmena chez lui
et m'invita à dîner. On était
en temps de carême ; néanmoins la
table était garnie de toutes sortes de
viandes. À la porte se tenait une servante
pour empêcher les intrus de voir qu'on
servait des mets défendus par
l'Église. J'avais comme commensaux un
prêtre des environs et sa femme. Je mangeai de
tout, mais je ne
pris
pas de boisson alcoolique. Les quatre autres
convives, les deux popes et leurs femmes,
s'enivrèrent et eurent une tenue peu
édifiante.
Le soir, on me donna une chambre dans la
maison du pope. De bon matin, je fus
réveillé par des coups frappés
à la fenêtre voisine.
- Petit père, batiouchka, disait une
voix suppliante, venez vite ! Mon enfant est
à la mort, venez le bénir !
- On ne peut pas même vous laisser
tranquille pendant la nuit, grommela le pope, et il
se retourna dans son lit et se rendormit. On revint
frapper à la fenêtre. Alors il
cria :
- Je ne peux pas venir.
Le silence se fit pour quelques instants,
puis on frappa de nouveau avec tant d'insistance
que le prêtre ne put faire autrement que de
se lever. Encore tout chancelant, il sortit enfin.
À neuf heures, il était
déjà de retour.
Six mois plus tard, quand l'installation fut
achevée, je reçus un
télégramme du pope m'invitant
à assister au baptême du moulin.
À mon arrivée, le prêtre me
demande de prendre une part active à la
fête. Je lui réponds que j'y suis tout
disposé, à condition qu'il me
permette aussi de baptiser le moulin à ma
manière.
- Comment ferez-vous ça ? me
demande-t-il, étonné.
- Très simplement, et cela aura les
plus heureux effets.
- Quoi ?... Comment ?...
- Je lirai l'histoire de gens qui
bâtissent leur maison sur le roc et d'autres
gens qui la bâtissent sur le sable. Puis
j'expliquerai cette histoire et vos paysans y
prendront grand
intérêt. Ce sera une
bénédiction pour votre affaire. Vous
en aurez grand profit et vos ouailles cesseront de
vous voler.
- Ça, c'est magnifique ! Oui, je
suis d'accord, je vous donne l'autorisation de dire
tout ce que vous voudrez.
- Mais j'y mets encore une condition.
- Quoi donc ?
- C'est que vous ferez sonner les cloches
demain à neuf heures pour rassembler les
gens du village, afin qu'ils prennent part à
la cérémonie et entendent ce que j'ai
à leur dire.
Ainsi fut fait. Le lendemain matin, les
cloches se mettent en branle ; les paysans
accourent avec femmes et enfants. Le pope du
village voisin est aussi là, ainsi que le
diacre et le psalomtchik (chantre).
Revêtus de leur costume d'apparat, les
prêtres parcourent le moulin en psalmodiant
leurs litanies. je viens derrière. Munis de
grands balais de rameaux feuillus, ils aspergent
d'eau bénite le moulin, les sacs et les
machines. Ils chantent : Seigneur, aie
pitié de nous ! Seigneur, aie
pitié !
Après le banquet, le prêtre dit
à la foule :
- Maintenant, M. Martens va vous dire
quelque chose de très
intéressant.
Je lis au chapitre
VII de l'Évangile de
saint Matthieu, du verset 13 à la fin,
et je parle du roc qui est
Jésus-Christ : Tout ce qui n'est pas
fondé sur ce roc est bâti sur le sable
et appartient au royaume des
ténèbres. Mais tous ceux qui sont
fondés sur ce roc reçoivent une vie
nouvelle, la vie éternelle, le pardon de
leurs péchés et la certitude de la
félicité à venir. Mon
allocution dure longtemps. Au milieu de mon discours,
le pope
m'interrompt et
s'écrie tout tremblant :
- Arrêtez, j'ai quelque chose à
dire. Il lève les mains et dit,
profondément ému :
- Mes chers paroissiens, tout ce que cet
homme nous dit est la vérité. Ni moi
ni d'autres, nous ne vous l'avons jamais
enseigné, et si nous ne nous fondons pas sur
le Roc, nous serons tous perdus. Ne pensez pas,
dit-il en levant les bras, que ces larges manches
fassent que celui qui les porte soit meilleur que
vous, ni que mes cheveux longs, disait-il en les
montrant, me rendent différent de vous.
(2) Si
nous ne
nous convertissons pas, nous serons tous perdus.
Nos rites ne sont que cérémonial mort
et ne peuvent produire que la mort. Notre
Église est ceinte d'une muraille branlante,
avec une foule de brèches par où
pénètrent les voleurs, les ivrognes,
les débauchés et les criminels. Nous
sommes impuissants à y porter remède
et nous courons à notre ruine, Si nous ne
bâtissons sur le vrai roc qui est
Jésus-Christ.
Le diacre et l'autre pope l'interrompent et
le font taire. Je reprends mon allocution et
termine l'inauguration par une prière.
Si je suis bien informé, le pope fut
déplacé et perdit sa paroisse.
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