« ... Je déclare, comme devant le tribunal de Jésus-Christ
où je m'attends à comparaître bientôt, que toutes mes recherches soit
de l'Ecriture, soit de l'histoire de l'Eglise, soit de mon propre
coeur, n'ont fait que me confirmer dans la conviction inébranlable que
quand l'Ecriture parle, c'est Dieu qui parle, et que quand elle
proclame Sa volonté, la voie du salut, les grandes doctrines du péché,
de la grâce, du Père, du Fils, du Saint-Esprit, ce qu'elle nous dit
n'est pas moins véritable et moins assuré que si le ciel s'entrouvrait
dans ce moment sur notre tête, et si la voix de Dieu retentissait,
comme autrefois en Sinaï. Il n'y a pas de bornes à la confiance et à
la soumission que nous devons aux Écritures, pas plus de bornes qu'on
n'en trouverait à la vérité et à la fidélité de Dieu...
Ainsi, l'Écriture est la Parole écrite de Dieu
comme Jésus-Christ est la Parole vivante de Dieu.
« Ceux qui s'appuient des caractères humains
de l'Écriture pour en méconnaître la divinité, raisonnent comme ceux
qui s'appuient sur la personnalité humaine de Jésus-Christ pour lui
refuser le titre de Dieu, faute de comprendre que la nature humaine et
la nature divine sont unies dans la personne de Jésus-Christ comme la
parole humaine et la parole divine sont unies dans les Écritures.
Quant à la manière dont se fondent les deux natures
dans un cas, et les deux voix dans l'autre, c'est le fond même de
l'objet de la foi sur ce point, mystère profond mais, nous dit St
Paul, « mystère de piété » et qui remplit notre âme de joie
et d'espérance ».
Adolphe MONOD,
Les Adieux (p. 166, 175).
Il nous paraît maintenant nécessaire d'aller au devant d'une très
grave objection qui immanquablement nous sera faite : Vous avez
établi, nous dira-t-on, que ni St Pierre, ni personne n'a été placé,
sur la terre, à la tête de l'Eglise. Il n'existe donc aucune autorité
ici-bas, aucune autorité réelle, divine, infaillible devant laquelle
on soit tenu de s'incliner ? Le désordre doit alors régner parmi
les, fidèles chrétiens !...
Non ! Nous sommes au contraire convaincu, tout
autant que nos frères catholiques, qu'une autorité extérieure,
concrète et indiscutée, est aussi nécessaire à l'Eglise, en matière de
foi, qu'elle est indispensable à une nation, en matière
sociale et politique. Pour l'une, comme pour l'autre, rejeter le
principe d'autorité, nous l'affirmons hautement, c'est se condamner à
sombrer dans l'anarchie et la mort.
La question est seulement de savoir où, et quelle
est, pour l'Eglise cette autorité.
Comme on l'a fort bien dit, il ne suffit pas de
parler de l'autorité pour faire de l'autorité. Il ne suffit pas
davantage d'en proclamer la. nécessité (1). Il
suffit encore bien moins, par un coup d'état, de se proclamer
infaillible. Il faut chercher l'autorité où elle se trouve.
L'autorité, comme la vérité, c'est Dieu.
Mais Dieu, Dieu, où trouver sur la terre
l'expression formelle de sa pensée et de sa volonté, c'est-à-dire de
son autorité ? Car il faut que l'homme se soumette. Il le faut,
par ce simple motif que l'homme n'est pas Dieu (passim. P. 90).
L'expression infaillible de l'autorité de Dieu pour
les hommes et pour l'Eglise, réside, pour les catholiques, dans le
chef suprême de la foi. l'Eglise romaine, le pape,
qui remplace à leurs yeux notre Seigneur Jésus-Christ sur la terre.
Pour le chrétien selon l'Évangile, cette autorité se trouve dans la
Parole écrite (2), norme
infaillible et suprême de la Foi, avec le Saint
-Esprit comme lumière, comme instructeur et comme guide.
Si nous croyons que Dieu s'est révélé, sa
révélation nous oblige (passim. P. 92). Et Il s'est révélé, à la
fois par son Fils, Jésus-Christ, et par sa Parole. Son Fils est
remonté au ciel, mais sa Parole nous reste, la Sainte-Écriture, la
Bible. Une fois reconnue pour divine, la Révélation n'est plus
soumise à notre tribunal. Nous ne la jugeons pas, elle nous juge
(passim P. 92). C'est cette vérité élémentaire que rejettent tous les
rationalismes, et que rejette l'Eglise de Rome, quand elle répond
qu'une telle autorité est un mythe, et ne peut conduire, à cause de la
diversité des opinions, chacun étant l'arbitre de sa croyance, qu'à la
multiplicité des sectes, c'est-à-dire au chaos. De même, dit-elle,
qu'il faut des juges et un tribunal pour interpréter les lois et les
appliquer, de même, il faut un Docteur suprême à l'Eglise pour
interpréter l'Écriture, loi de Dieu.
Elle cite en particulier, à l'appui de cette
opinion, le cas de cet Éthiopien, intendant des trésors de la reine
Candace. Comme il lisait, sur son char, le prophète Isaïe (Actes
VIII), Philippe, l'évangéliste, s'approcha et lui demanda :
« Comprends-tu bien ce que tu lis ? » - « Comment
le pourrais-je, répondit l'Éthiopien, si quelqu'un ne me
guide ? » Philippe lui expliqua alors le passage et le
conduisit à la foi.
- « Vous voyez, nous dit-on ; l'exemple
est typique. Comme cet Éthiopien, le simple fidèle est dans
l'impossibilité de comprendre les Écritures, à moins que quelqu'un,
instruit et qualifié par l'Eglise, ne lui en donne le sens... »
Un examen, tant soit peu approfondi, de ce récit entier
du Livre des Actes, découvre toute la faiblesse de l'argument. Bien
plus, il révèle que cet argument se trouve être une preuve frappante à
l'appui de la thèse des chrétiens évangéliques. Cela est bien facile à
comprendre :
Pour quelle raison, cet Éthiopien ne peut-il pas
saisir le sens du passage qu'il lit dans le prophète Isaïe ? -
Pour la raison unique et toute simple qu'il n'est pas un
« fidèle ». N'ayant pas encore la foi en Jésus, le
Saint-Esprit, par conséquent, n'est pas descendu dans son coeur pour
l'éclairer.
« L'homme naturel, dit St Paul, ne
peut connaître les choses de l'Esprit de Dieu, parce que c'est par
l'Esprit qu'on en juge... » (I
Corinth. Il. 14.)
Mais une fois que l'Éthiopien a cru, qu'il a
accepté Jésus-Christ de toute son âme, qu'il a été baptisé, une fois
qu'il est devenu un fidèle, enfin, qu'arrive-t-il ? -
Philippe ayant soudain disparu, l'Éthiopien, est-il dit, continue
tout joyeux son chemin (3). Une
seule chose, désormais, lui est nécessaire : obéir à la Parole de
Dieu et conserver précieusement dans son coeur le Saint-Esprit,
lumière et grâce divine. La promesse de Jésus va se vérifier pour
lui : « L'Esprit-Saint que mon Père enverra en mon nom,
Lui, vous enseignera toutes choses... Il sera en vous... Il vous
guidera dans toute la vérité ». (St
Jean XIV. 26 ; XVI.
7-14.) Et cette Vérité, c'est la Parole écrite, cette Parole
qui, pour le chrétien selon l'Évangile, est l'autorité infaillible,
suprême, indiscutée, cette Parole qui est, en même temps, la Parole
vivante, Jésus-Christ. (St
Jean I. 1-14.)
Et nous sommes ici en accord avec tous les anciens
Pères de l'Eglise. Oui, nous le disons bien haut, il n'en est pas un
seul qui démentirait cette affirmation. Tous n'invoquaient-ils pas exclusivement
l'Écriture, comme arbitre suprême, en cas de divergence ou de
contestation de doctrine ?
Est-il possible que pour vouloir s'attacher à les
imiter, on se trouve accusé de les renier ?
Mais comment justifier alors les théologiens
romains qui, lorsqu'ils prennent à partie la Réforme évangélique,
montrent que leur soin, leur souci principal, loin de faire appel à
l'autorité exclusive des Écritures sont, au contraire, d'en
écarter manifestement le témoignage ?
C'est la « tradition » (4)
qui apporte à peu près tout le fonds des raisons et
des preuves.
Ouvrons, par exemple, l'Étude sur le Protestantisme
de Mgr Freppel, ancien évêque d'Angers :
« Nous ne refusons pas, dit-il, la controverse
sur le terrain des Écritures, mais nous faisons observer qu'il est
plus simple et plus rationnel de suivre une autre voie, en cherchant
tout d'abord où se trouve la vraie Église de Jésus-Christ, car il est
évident que là se trouvent la vraie doctrine et la véritable
interprétation des Écritures. Outre l'avantage qu'elle possède de
trancher la question par un argument sans réplique, cette méthode
offre encore celui d'être à la portée de tous, de ceux-là même que le
défaut d'instruction rend incapables d'un examen approfondi du texte
sacré, car il est facile de reconnaître la véritable Église... »
(page 40.)
Mais, mesure-t-on bien la grave accusation que l'on
porte contre l'Escriture lorsque l'on affirme avec Mgr Freppel, que
l'interprétation de celle-ci « n'est pas à la portée de tous, de
ceux-là même que le défaut d'instruction rend incapables d'un
examen approfondi du texte sacré » ?
De quelle instruction s'agit-il ? L'Écriture
n'ouvrirait-elle donc ses pages qu'à une élite intellectuelle ou
religieuse ?
Ah ! que nous sommes loin de l'enseignement de
St Irénée, au IIe siècle, quand il affirmait :
« Le sens des Écritures est facilement
intelligible pour tout esprit droit et simple. S'il est des passages
obscurs, ils s'expliquent par d'autres plus clairs, de telle sorte
que l'Écriture s'explique par l'Écriture, et n'a besoin, pour être
interprétée, d'aucun secours étranger. » - « Sur les
grandes questions de la foi et du salut, disait-il encore, il n'y a
pas d'incertitude possible : la Bible est claire (5). »
Ne voit-on pas, d'abord, qu'à soutenir le point de
vue de Mgr Freppel, on frappe au coeur l'Écriture dans son universalité ?
Que l'on conteste ensuite, aux premiers chrétiens, la possibilité
d'avoir compris les Évangiles et, spécialement, les Épîtres des
Apôtres, bien qu'elles leur fussent destinées ? Car les membres
de l'Eglise primitive, ces Thessaloniciens, ces
Éphésiens, ces Colossiens, sortis la veille même des ténèbres de
l'idolâtrie, n'étaient, certes, ni érudits, ni même bien avancés sur
le chemin de la perfection chrétienne, et leurs connaissances
théologiques étaient des plus sommaires.
Et alors, à quoi bon leur écrire ces lettres, à
quoi bon leur en recommander la lecture, à quoi bon, si elles sont
au-dessus de leur portée ?
- « Je vous en conjure par le Seigneur,
dit St Paul, à la fin de l'une d'elles, que cette lettre soit lue
à tous les frères ! (1
Thess. V. 27 ; Coloss.
IV. -16.)
Et d'autre part, s'ils pouvaient les comprendre,
pourquoi les chrétiens d'aujourd'hui, même ignorants, mais sincères,
mais humblement attentifs et obéissants à la voix de l'Esprit,
seraient-ils moins capables de les entendre que ceux
d'autrefois ?
« Le génie, laissé à ses pauvres clartés
humaines, ne les comprendra pas, mais les âmes simples les entendront,
malgré leur sublimité ; et quiconque ouvre leurs pages doit se
souvenir de la parole du Maître : Bienheureux les coeurs
purs, ils verront Dieu » ; voilà ce que répond
le P. Didon dans son beau livre « Jésus-Christ »
(page 31).
Que devient-elle enfin cette parole de Jésus ?
« Je vous bénis, Père, Seigneur du ciel et
de la terre, de ce que vous avez caché ces choses aux sages et aux
intelligents et les avez révélées aux petits. Oui, Père, je vous
bénis de ce qu'il vous a plu ainsi ! »
Les théologiens romains donnent une autre raison pour contester que
le simple fidèle puisse recevoir directement, par l'assistance du
Saint-Esprit, la faculté de comprendre l'Écriture : c'est la
variation des croyances. L'histoire des Églises séparées de
Rome, disent-ils, n'est autre que « l'histoire de leurs
variations ». C'est le mot de Bossuet.
Il est vrai qu'il existe un émiettement infiniment
regrettable, de dénominations évangéliques. Mais, ne voyons pas
seulement ce qui divise, voyons et qui unit.
Bossuet n'a pas su reconnaître qu'en dehors des
variations propres aux théologies des différentes confessions de la
chrétienté nominale, subsiste le patrimoine commun
aux chrétiens vivants de tous les siècles. Et par ce patrimoine, nous
entendons l'ensemble des grands faits et des grandes doctrines de la
Foi, la Foi biblique. Or, ce patrimoine, ou cette très
sainte Foi, donnée aux saints une fois pour toutes, dit St Jude,
a été conservé bien autrement plus pur et plus intact dans les Églises
de chrétiens évangéliques que dans l'Eglise romaine.
Et lorsqu'avec un esprit averti et éclairé, et dans
la largeur chrétienne, on compare entre elles ces multiples
dénominations, - celles demeurées fidèlement attachées à la Parole de
Dieu - on est étonné de constater que dans la plupart des cas, leurs
divergences sont très superficielles et simplement de modalité
ecclésiastique. On peut même dire que beaucoup se différencient
infiniment moins encore que les Franciscains des Dominicains, par
exemple, ou les Sulpiciens des Jésuites (6). Autorité
unique et suprême, pour les uns comme pour les
autres Mais pour les uns, autorité extérieure et humaine :
le pape. Pour les autres, autorité intérieure et divine : le
Saint-Esprit parlant par l'Écriture.
Oui, nous affirmons qu'il existe, en dehors et
au-dessus de Rome, un solide front évangélique, composé d'une
multitude de croyants étroitement unis et soudés, et dont les âmes se
rejoignent, en dépit de toutes les barrières ecclésiastiques, sur les
trois principes fondamentaux et essentiels de la Foi chrétienne :
Autorité absolue des Saintes Écritures :
Divinité de Jésus-Christ ;
Sacrifice expiatoire et rédempteur du Fils de Dieu, et salut gratuit par la foi.
Le symbole des apôtres conserve, aux yeux de ces croyants, la
même autorité qu'il avait aux temps où il fut formulé.
Si l'unité de ce bloc évangélique est en
profondeur, au lieu d'être en surface, a-t-elle pour cela moins de
valeur ?
D'autre part, que constate-t-on, lorsque l'on suit,
pas à pas, l'histoire de l'Eglise romaine et son évolution à travers
les siècles ? - Que cette histoire n'est pas autre chose que
l'histoire de ses variations.
Consultons les annales des Conciles, ouvrons
n'importe quel précis de dogmes catholiques, que voyons-nous ?
L'Eglise romaine en perpétuelle variation.
En veut-on des preuves ? En voici
quelques-unes !
Vers le milieu du IXe siècle, Paschase Radbert,
abbé de Corbie, imagine la doctrine de la Transsubstantiation.
Cette doctrine fut vivement combattue, comme hérétique, par les
docteurs catholiques les plus autorisés du temps, Scot Erigène, entre
autres. St Bernard de Clairvaux, au XIIe siècle, proteste contre la
théorie de la manducation corporelle, disant que Jésus-Christ nous est
offert dans la Sainte-Cène : spiritualiter, non carnaliter.
Mais sa protestation ne fut pas entendue.
Enfin, cette doctrine fut officiellement et
définitivement érigée en dogme au grand Concile oecuménique de Latran,
en 1215, sous Innocent III. (F. Bonifas. Histoire
des Dogmes.) Peut-on contester que ce soit là une variation ?
Jusqu'à l'époque du Concile de Constance
(1414-1418) où il fut décidé, session 21e, que la coupe serait
supprimée pour les fidèles, à la sainte communion, celle-ci s'était
prise sous les deux espèces du pain et du vin.
Cette mesure ne devint effective qu'après le
Concile de Trente, où la question fut résolue en faveur de la
suppression de la coupe. Les anciennes coutumes du tube, et du
pain, ou de l'hostie, trempés, sont définitivement abandonnées, et la
participation à la coupe partout supprimée pour les laïques.
Peut-on contester que ce soit là une
variation ?
Jusqu'en 1870, on pouvait être un bon catholique
romain sans être obligé de croire à l'infaillibilité du pape. « L'infaillibilité
est, le privilège de l'Eglise » enseignaient les
théologiens catholiques. Bossuet fut l'un des plus fermes et des plus
éloquents défenseurs de ce point de vue.
Lors du Concile du Vatican, en 1870, cette position
était abandonnée. Les catholiques devaient croire, désormais, que
l'infaillibilité était le privilège, non plus de l'Eglise, mais du
pape.
Peut-on contester que ce soit là une
variation ?
Il n'y a donc pas lieu de s'étonner si, à bien des
reprises, les papes se sont trouvés en désaccord, non seulement avec
les décisions des Conciles, mais les uns avec les autres, annulant,
par exemple, tel décret de leurs prédécesseurs. L'une des plus
fameuses de ces contradictions fut la sentence du pape Pie VII
rétablissant, en 1814, dans tous ses droits et tous ses privilèges,
l'ordre des Jésuites dont le pape Clément XIV avait prononcé, en 1773,
par son fameux bref Dominus ac Redemptor, la suppression. Et en
remontant plus loin dans l'histoire, on sait que les Jésuites furent
chassés de France en 1595 ; mais que l'intercession du pape
Clément VIII les fit rappeler en 1603.
Rappelons encore que le pape Clément IX, en 1668,
faisait rétablir solennellement les Religieuses de Port-Royal des
Champs, accusées de jansénisme, et qu'environ
quarante ans plus tard, en 1709, sans qu'aucun fait nouveau justifiât
cette mesure, le pape Clément XI, à l'instigation des Jésuites,
signait la bulle d'anéantissement de la célèbre abbaye et du
monastère. On pourrait multiplier les exemples (7).
L'infaillibilité ne devrait-elle pas avoir, comme
logiques corollaires, la cohérence et la pérennité ?
Malgré cela, Bossuet n'a pas hésité à affirmer,
parlant de Rome : L'Eglise ne varie jamais.
Il est incontestable que le poids d'une affirmation
dépend beaucoup de la notoriété de la personne dont elle émane. Et la
personnalité de Bossuet a pesé puissamment sur la pensée religieuse du
XVIIe siècle, et des suivants. Il y a pourtant une force plus grande
encore que l'autorité d'une personne, quelle qu'elle soit, c'est
l'autorité d'un fait. Lorsqu'un fait contredit une affirmation,
dira-t-on : Tant pis pour le fait ? Un esprit droit a vite
résolu la question.
Quelque tranchante que soit donc l'affirmation de
Bossuet : l'Eglise ne varie jamais, cette affirmation se
trouve démentie par des faits aussi nombreux que faciles à contrôler.
Elle ne peut faire impression que sur des esprits insuffisamment
informés.
Nous concluons : la conception de l'autorité
suprême, en matière de Foi, que se fait l'Eglise romaine, est loin de
l'avoir gardée exempte de variations.
Cette conclusion nous conduit à deux autres :
La Foi chrétienne trouve, dans l'Écriture seule, la garantie de l'immutabilité ;
La seule autorité absolue, la seule infaillibilité en matière de Foi, c'est la Parole de Dieu.
Hors de là, tout est illusion, déception, confusion, chez les
Catholiques aussi bien que chez les Protestants.
C'est autour de cette Parole bénie que se sont
rassemblés, et que continueront à s'unir, les croyants authentiques de
tous les temps, rachetés et lavés par le sang du Calvaire, régénérés
et scellés par le Saint-Esprit, à quelque dénomination, à quelque
Église qu'ils appartiennent. Comme aussi, c'est par le moyen de cette
Parole que la communion des saints, dont parle le Symbole des
Apôtres, trouve sa signification précise.
Pour l'interprétation de cette Parole, le secours,
le viatique du Saint-Esprit a été garanti à tous les enfants de Dieu
par la promesse sacrée du Sauveur, faite la veille de sa mort :
« Il vous guidera dans toute la vérité ».
À ces paroles de Jésus, nous croyons de toute notre
âme, comme l'enfant croit à la parole de son père. Nous n'admettrions
jamais qu'une telle promesse ne fût qu'une mystification.
Et c'est enfin le rassemblement spirituel de tous
les enfants de Dieu autour de Jésus et de sa Parole de Vie qui
constitue le corps mystique du Christ, la
véritable Église, une, catholique (ou universelle) et
apostolique (Symbole de Constantinople, 380), celle dont Jésus
est à la fois le Fondement éternel, le Chef suprême et l'Époux divin,
la seule Église contre laquelle les puissances de l'enfer ne
prévaudront jamais !
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