L'histoire des premiers siècles de l'Eglise Vaudoise a été
écrite à la lueur des bûchers, et les données sur Pierre Valdo et
l'oeuvre des anciens Barbes sont presque toutes dues à leurs
adversaires. Ce n'est que vers la fin du Moyen Âge, qu'un anonyme
essaya de retracer les origines du mouvement vaudois en écrivant, dans
son langage alpestre, le traité intitulé : Ayczo es la causa
del departiment de la gleysa romana.
Mais ce furent les persécutions à main armée et les massacres
de Provence et de Calabre qui firent naître les premiers historiens
vaudois. Il faut peut-être attribuer cet honneur à l'illustre écrivain
Sleidan qui, dans son « Histoire de la Monarchie et de
l'Empire », a fait une large place au récit, détaillé et précis,
de l'hécatombe de 1545, que résument les noms de Mérindol et
Cabrières.
La seconde place revient au « Livre des martyrs », de
Jean Crespin, oeuvre colossale, qui eut, de 1555 à 1618, plusieurs
éditions, chacune desquelles était enrichie de nouveaux récits sur les
vicissitudes de la Réformation dans les différents pays. On retrouve
aussi mainte donnée intéressante dans l'« Histoire
Ecclésiastique », de Théodore de Bèze.
Mais il appartenait à des personnes qui auraient vécu sur les
lieux de nous raconter les faits dont ils avaient été les témoins
oculaires. Dans cette série, la première place revient à Scipione
Lentolo.
Originaire de Naples ou de Gallipoli, Lentolo avait été arrêté
par l'Inquisition et envoyé à Rome. Il y aurait certes fini ses jours
sur l'échafaud ou dans une longue captivité, s'il n'avait été libéré
par l'émeute populaire, qui brisa les portes des cachots de
l'Inquisition, à la mort du féroce Paul IV. Lentolo put s'enfuir à
Genève, où il devint un ardent disciple de Calvin. Celui-ci l'envoya
aux Vallées pour remplacer le martyr Varaglia, comme pasteur à
Saint-Jean et Angrogne. Il ne tarda pas à assumer une position en vue
par la doctrine avec laquelle il sut rabattre les
raisons du jésuite Possevino et par son ardeur comme chapelain des
combattants au cours de la guerre du comte de la Trinité.
Au milieu de cette existence agitée, il envoya à Genève une
lettre sur les événements, que Léger a insérée plus tard dans son
Histoire.
Mais Lentolo fit plus. Il exposa les faits dans un récit
détaillé et précis, sous le titre de: Histoire des persécutions et
guerre faites depuis l'an 1555 jusque en l'an 1561 contre le peuple
vaudois.
Cet ouvrage, rédigé en italien, parut au lendemain du traité de
Cavour, dans une traduction française, sans nom d'auteur. Une
traduction latine, due à Christophe Richard, réfugié de Bourges à la
Sarraz, fut publiée à Lausanne. L'une et l'autre sont devenues des
raretés bibliographiques.
Mais cet écrit ne représente qu'une partie de l'ouvrage de
Lentolo, qui écrivit aussi longuement sur les persécutions de Provence
et de Calabre. Son travail aurait sans doute vu le jour, si l'auteur
n'avait été sans relâche tracassé par Castrocaro, qui réussit enfin à
le faire expulser des Vallées. Il se retira en Valteline, où il eut
une grande influence sur le développement de la Réformation chez les
Grisons Italiens. C'est peut-être là qu'il acheva d'écrire son
histoire,
Lentolo mourut vers la fin du XVIe siècle et son manuscrit,
inédit, fut conservé par ses enfants, établis à Berne. L'historien
Perrin essaya en vain de l'obtenir, et il retomba dans l'oubli,
jusqu'à ce que le regretté Théophile Gay réussit à le copier et à
l'imprimer, aux frais de la Vén. Table, en 1906. C'est ainsi que
l'ouvrage du premier historien vaudois n'a été connu du public
qu'après trois siècles et demi. Il reste une source précieuse de
renseignements de tous genres.
Un autre pasteur d'Angrogne s'efforçait en même temps de
recueillir de la bouche des vieillards le récit des invasions armées
des XIVe et XVe siècles. Cirolamo Miolo, de Pignerol, qui fut
successivement pasteur dans différentes vallées vaudoises et qui
connut aussi la prison pour sa foi, termina son ministère à Angrogne.
C'est là qu'il rédigea, en 1587, sa Breve, sommaria e vera
historia della Religione de' Valdesi, e delle loro persecuzioni
fatte nelle valli.
Cité par les écrivains du XVIIe siècle, ce manuscrit, qui
semblait avoir disparu, était conservé parmi les documents que
Morland, l'ambassadeur de Cromwell, déposa à l'Université de
Cambridge, en 1655. Nous l'avons publié avec une introduction et des
notes, au N° 17 du « Bulletin de la Société d'Histoire
Vaudoise », pour le mettre à la portée de chacun.
Jusque là, les écrivains d'histoire vaudoise s'étaient mis, de
leur propre initiative, à écrire pour la postérité ce qui, dans les
vicissitudes de leur peuple d'adoption, leur avait paru le plus digne
d'échapper à l'oubli.
Au sortir d'une longue période de troubles, les Autorités de
l'Eglise Vaudoise prirent la chose en mains, pour lui donner un
caractère officiel et plus complet.
Quand le temps des persécutions violentes sembla passé, les synodes
voulurent profiter d'une période de calme pour mettre entre les mains
du public le récit de l'héroïsme et des souffrances des pères. Une
autre raison les y poussait ; c'est que les adversaires
reprochaient aux Églises Évangéliques leur nouveauté, à laquelle ils
opposaient l'ancienneté de l'Eglise Romaine. D'où le désir de prouver
que l'Eglise Vaudoise datait du XIIe siècle et que même avant Valdo,
il y avait eu des champions de la vérité qui avaient lutté contre les
envahissements de Rome.
La question intéressait le protestantisme tout entier auquel on
demandait : « Où étiez-vous avant Luther et
Calvin ? ». Aussi l'initiative d'une histoire officielle des
Vaudois ne vint-elle pas des Vallées, mais des Églises de France.
Daniel Chamier, pasteur distingué, auteur de nombreux ouvrages
polémiques et autres, avait entrepris, dès 1602, de recueillir des
documents dans ce but, se mettant en correspondance avec les
principaux connaisseurs de l'histoire du moyen âge, en particulier
avec l'illustre Scaliger.
Le synode provincial, du Dauphiné qui s'ouvrit, le 2 juillet
1603, à Embrun, en terre vaudoise, encouragea Chamier à poursuivre
son travail, qu'il prit à sa charge par cet acte :
M.M. les pasteurs et église de Grenoble, M.M. Perrot père et
fils, M.r Anastaze, M.M. de Rottier et Videl sont particulièrement
chargés d'envoyer au premier jour à M.r Chamier toutes les
instructions, mémoires, manuscrits et toute sorte de pièces qui
pourront servir pour l'histoire de l'estat, doctrine, vie et
persécutions des Albigeois et Vaudois, afin que le livre qu'on en
doit dresser se puisse au plus tôt mettre sous la presse.
Les Perrot étaient deux pasteurs d'Usseaux, en Val
Cluson ; Anastaze, d'Oulx, pasteur de la haute vallée de
Suse ; Rottier et Videl étaient du Briançonnais et fournirent
sans doute les documents concernant Freissinière et Vallouise.
Comme le synode national de France était convoqué pour le 1er
octobre à Gap, on s'empressa aux Vallées de recueillir, dit Gilles, un
grand nombre de livres des Vaudois, écrits à la main, que nous
recueillîmes principalement en la vallée de Luserne et Angrogne.
On retrouva, non sans peine, le mémoire de Miolo, que le pasteur
Vignaux traduisit en français, y ajoutant quelque chose du sien.
Un exemplaire du travail de Vignaux doit être resté aux Vallées, car
il est souvent cité par Léger et d'autres auteurs vaudois. La copie
officielle et les autres documents furent apportés à Gap par le
pasteur Vignaux, fils du traducteur.
Mais, soit qu'il trouvât l'entreprise plus difficile qu'il ne
l'avait cru, soit qu'il eût trop d'autres affaires par les mains,
étant pasteur, professeur, auteur, délégué des synodes à la Cour,
Chamier renonça à ce travail et obtint du synode de 1604, d'en être
déchargé. Les documents passèrent entre les mains du pasteur Cresson,
que l'assemblée pria de s'employer diligemment en cet oeuvre et de
le mettre au plus tôt en lumière. Mais, au synode de 1605, ce
fut à son tour d'y renoncer, vu qu'il ne comprenait pas le langage
vaudois des anciens manuscrits, et de demander qu'on choisît un autre
qui entende ce jargon. Le choix tomba sur le pasteur Perrin; ses
collègues Claude Perron, de Pragela, et Ripet, de Freissinière, furent
chargés de traduire en français les documents patois. Perrin devait
faire son devoir entre cy et le prochain synode de contenter
les églises en la composition de cette oeuvre désirée.
Mais le travail était de longue haleine ; aussi le synode
de 1606 revient-il à la charge pour que Perrin porte le livre, si
possible, à l'assemblée prochaine qui le fera examiner.
De nouvelles pièces en bon nombre furent trouvées au Val
Pragela, qui n'avait pas subi les saccagements et incendies de la
guerre de 1560-61.
Le synode national, de la Rochelle, de mars 1607, prit la chose
en mains, exhortant Perrin à achever son Histoire, et tous ceux qui
avaient quelques données, à les lui fournir. Le synode de 1608 presse
un pasteur des Cévennes de prêter à Perrin les manuscrits qu'il
possède ; de même pour diverses personnes du Briançonnais. De son
côté, l'auteur demande à être défrayé des dépenses qu'il devrait faire
pour se procurer les livres nécessaires ou pour aller les consulter
dans les bibliothèques.
Il présenta une partie du travail au synode dauphinois de 1609,
qui l'encouragea à l'achever et à le soumettre à Chamier, avant de
l'imprimer. Pour ses dépenses, il était renvoyé au synode national.
Celui-ci l'encouragea soit par de l'argent (150 livres), soit en lui
procurant de nouveaux matériaux. Perrin se représenta au synode de
1611, après que Chamier eut lu son écrit ; on l'en loua, tout en
le priant de le polir et de l'augmenter pour voir si ce n'était pas le
cas de le publier avant le synode national de 1612. Ce dernier le fit
examiner par cinq pasteurs et assigna 300 livres à l'auteur.
Les examinateurs furent d'avis qu'une révision était
nécessaire ; la décision si l'ouvrage pouvait être imprimé, fut
laissée au synode dauphinois. Celui-ci se réunit à Mentoulles, le 15
août, avant que Perrin eût pu retoucher son travail. L'assemblée
décida que les anciens livres en langage barbe appartiendraient à la
province, et donna en échange au propriétaire une Bible in folio. Le
synode national de 1614 assigna à l'auteur 300 autres livres, laissant
au Dauphiné de décider l'impression et d'envoyer un exemplaire à
chaque province.
Quatre pasteurs se rendirent expressément chez Perrin pour cet
examen. Le synode de 1615 en ordonna une nouvelle
lecture, de même celui de 1616. Enfin, celui de 1617, décida de
renvoyer l'histoire au synode et de lui faire entendre que le S.r
Perrin n'y peut rien faire davantage. La grande assemblée promit
quelque argent à l'auteur et résolut de soumettre l'ouvrage à l'examen
des pasteurs et professeurs de Genève, et ceux-ci prièrent M. Tronchin
de corriger quelques impropriétés qu'il a remarquées dans les mots.
Perrin vendit alors sa copie à l'imprimeur Berjon ; mais ce ne
fut que deux ans plus tard que le livre put enfin voir le jour.
L'ouvrage de Perrin, intitulé l'Histoire des Albigeois et des
Vaudois n'est pas sans mérite, surtout pour ce qui regarde la
doctrine de nos ancêtres. Par contre, la partie historique est
absolument défectueuse. Il put avoir entre les mains les procès faits
contre les Vaudois par les archevêques, d'Embrun, et qui furent saisis
quand cette ville tomba entre les mains des Huguenots : mais les
extraits qu'il en publie sont peu de chose. Il est encore plus
insuffisant pour ce qui regarde les vallées piémontaises.
D'autre part, il inséra dans ses deux volumes plusieurs des
écrits, en prose et en poésie, des auteurs vaudois du moyen âge, qui
lui furent procurés avec beaucoup de diligence, comme on l'a vu.
Seulement, préoccupé avant tout de prouver l'antiquité de l'opposition
à Rome, c'est probablement lui qui a ajouté, au titre du catéchisme
des Barbes, la date de l'an 1100, et qui aurait gratté sur le
parchemin de la Nobla Leyezon la date Ben ha mil ecccc anz, en
corrigeant mil e cent.
Bref, le travail de Perrin, ne satisfit personne. Cependant, en
considération de la connaissance qu'il avait acquise du mouvement
réformé dans les Alpes, il fut un des deux pasteurs que le synode de
Briançon, de juin 1620, chargea de voir le récit de Denis Bouterone,
qui parut l'a même année sous ce titre: Bref discours des
persécutions advenues en ce temps aux Églises du Marquisat de
Saluces.
En octobre, Perrin se présenta au synode national pour rendre
compte de la publication de son Histoire des vaudois et offrir en même
temps d'écrire une Histoire Universelle de l'Eglise depuis le
commencement du monde ! Le synode le remercie pour la
première ; quant à la seconde, il s'en remet à la prudence de
l'auteur, sans lui en prescrire aucune nécessité ». Et, comme il
a un grand nombre d'enfants, la province du Dauphiné est exhortée à
lui accorder quelque subvention.
Mais comme on n'était pas content de son ouvrage, tandis que
les Vallées s'occupaient d'une nouvelle Histoire des Vaudois, le
synode national de 1623 chargea le pasteur de Sedan, du Tilloit,
d'écrire une nouvelle Histoire des Albigeois. La mort ayant fauché ce
savant pasteur, le synode de 1626 décida de demander ses manuscrits à
son église, en vue de l'impression. Il ordonna aussi de supprimer les
documents que Perrin avait consignés au synode, à moins que, comme il
est probable, il faille lire imprimer, ce qui ne serait qu'une des
nombreuses bévues, commises par Aymon dans son édition, des Synodes
nationaux, et dues en partie à la mauvaise écriture des secrétaires.
En quelles mains ces pièces passèrent-elles alors ? Le
fait est que, huit ans plus tard, Perrin se rendait coupable d'une
grave infidélité en vendant à l'archevêque anglican de Dublin, Usher,
la collection des manuscrits vaudois qui lui avaient été confiés, mais
qui ne lui appartenaient nullement. Déposés à la Bibliothèque de
l'Université de Dublin, ils échappèrent du moins à la dispersion et à
la destruction qui enveloppèrent la plupart des documents restés aux
Vallées.
Perrin n'ayant satisfait personne, les Vaudois du Piémont
prirent donc en mains la question d'une bonne histoire à faire
paraître. Trois mois après le synode de Briançon, celui des Vallées,
réuni à Pramol le 15 septembre 1620, prenait la délibération suivante:
E' ordinato che si ridurrà in scritto l'historia delle cose avenute
in le chiese di queste tre Valli dal 1600 in, qua, e è dato carigo a
Mr Pietro Gillio, con l'aiuto di Mr Appia e participatione di Mr
Gaio, e altii che potranno portare in ciò aiuto opportuno, e per
lopera si promette dalle Chiese che ne sarà data ragionevole ricompensa
; e parimente che si mettano in ordine e metodo li articoli della
disciplina, quali sono confusamente sparsi.
Ce dernier travail fut en effet accompli ; mais il fut
ravi en 1655 dans le pillage de la maison de Léger, à Saint-Jean.
Alexis Muston a pu le consulter à Pignerol, chez l'évêque
Charvaz ; mais il est introuvable depuis lors. J'en ai publié les
quelques extraits que j'en ai pu reconstituer, dans les
« Bulletins de la Société d'Histoire Vaudoise ». N° 20 à 23.
Le choix fait en la personne de Pierre Gilles était excellent.
Fils de Gille des Gilles, un des deux derniers Barbes, il l'avait
entendu raconter ses tournées à travers toute la péninsule, et même
hors d'Italie, la retraite de sa famille au Grand Doublon, la guerre
de 1560-61 pendant laquelle il avait été chapelain de la compagnie
volante, son emprisonnement à Turin, la guerre de la Radde au Val
Pérouse, l'enlèvement de son fils, et maints autres faits que
l'historien pourra rapporter avec la même exactitude que si lui-même
en avait été un témoin oculaire.
Né en 1571, aux Cervières, dans le presbytère de La Tour,
Pierre Gilles avait 17 ans à la mort de son père et, curieux comme il
l'était des choses du passé, il puisa sans doute largement à cette
source vivante.
Pasteur lui-même dès 1599 à Pramol, il y entendit le récit
exact de la conversion récente des habitants de ce vallon, et depuis
lors il fut sans cesse mêlé à tous les événements de cette époque,
ayant presque toujours été membre de la Table et la plupart, du temps
Modérateur.
Par son mariage avec Lucie Cima, réfugiée de Dronero, il fut
mis en relations avec les nombreux réformés du Marquisat de Saluces,
et il assista à la destruction violente de ces florissantes
congrégations.
Comme pour l'ouvrage de Perrin, le Dauphiné ne se désintéressa
pas de la nouvelle entreprise, et le synode de 1622 chargea le docte
pasteur Balcet de recueillir au Val Cluson des mémoires pour
l'histoire.
Mais il est impossible de suivre plus loin cette affaire, les
actes des synodes du Dauphiné étant perdus pour les années
suivantes. Nous savons cependant que le Bureau du synode de 1625
s'adressa à la famille Lentolo, à Berne, sans toutefois pouvoir
obtenir le manuscrit dont nous avons parlé une autre fois. Le synode
vaudois de la même année décida, que chaque église donnerait 3 écus
all'onorando Pietro Gillo, qui travaillerait à l'histoire.
Les temps étaient durs, la guerre, la famine et les épidémies
répandaient la désolation partout ; les églises trouvaient de la
difficulté à payer leurs pasteurs.
Néanmoins, le synode 1627 revint à la charge par cet acte: Non
essendosi effettuata l'ordinazione della precedente congregazione
(le synode de 1626, dont nous ne possédons pas l'acte) di qualche
soddisfazione donata da queste chiese al Rev. Mr Gillio per la
fatîca dell'Historia, si è ordinato che fra un mese le chiese più
potenti abbiano da dargli il compimento degli scudi 5, le altre dei
4, senza includervi fiorini 4 dati nel principio da ogni Chiesa a
contemplazione della carta e alcun'altre cose.
Gilles poursuivit son travail à travers les fléaux que nous
avons rappelés, aggravés, en 1630, par le pire de tous, la peste. Elle
lui avait déjà enlevé trois fils, et douze de ses quatorze collègues
dans le ministère, quand il écrivait, le 26 octobre : J'espérais
de pouvoir une fois mettre fin à l'histoire qu'on m'avait donné
charge d'écrire. Mais tant de diversions pour les affaires que nous
avons eues sur les bras, tant de supplications et de lettres qu'il
m'a fallu écrire pour les Églises depuis quelques années, ne me
l'ont encore permis. J'y ai toutefois employé autant d'heures que
j'ai pu dérober à d'autres occupations sachant bien que
difficilement un autre pourrait trouver la suite des affaires comme
moi, qui ai tant pris de peine à la chercher. Je suis arrivé à
l'année 1599, en laquelle je fus admis au St-Ministère, et depuis se
sont passées bien peu de choses importantes entre nous, que je ne
m'y soit trouvé, ou que je n'en aie les bonnes informations. Si Dieu
m'allonge la vie encore quelque temps, j'espère mettre hors la
matière en quelque disposition, donnant occasion à quelqu'autre, qui
le puisse mieux faire, d'y appliquer quelque lime plus délicate.
Nous avons vu que la langue officielle des synodes vaudois
était l'italien ; c'était aussi celle du culte public. C'est de
même en italien que Gilles avait reçu la charge de rédiger son
Histoire. Mais la peste avait plus que décimé la population des
Vallées, et enlevé tous les pasteurs, à l'exception de deux. On ne put
les remplacer qu'en recourant à Genève, à la Suisse et au Dauphiné.
C'est ainsi que le français devint peu à peu le langage ecclésiastique
des Vallées. Aussi, Gilles, bien qu'il eût commencé à écrire son
Histoire en notre langue commune italienne, fut-il amené à la
refaire en français, ce qui en retarda la publication.
Il put enfin la livrer à la presse en terminant sa préface par
ces mots : A La Tour, ce 27 de juin 1643 et de mon âge le
72.me.
Le volume parut l'année suivante à Genève, chez Jean de
Tournes. Et Gilles s'éteignit quelques mois plus tard, peu de jours
après avoir dicté son testament, qui est du 30 août 1645.
Comparé à ses prédécesseurs, - Miolo, Vignaux, Perrin, - Gilles peut
bien être appelé le premier historien vaudois. Scrupuleux dans ses
recherches, prudent dans ses affirmations, tempéré dans ses jugements,
clair dans l'exposition des questions et des événements, il a une
manière de raconter à la fois précise et vivante, qui vous laisse
l'impression d'avoir assisté aux scènes qu'il décrit. Amené - nous
avons vu par quelles circonstances - à écrire en français, et non
en nôtre langue commune italienne, comme on m'avait ordonné au
commencement, il emploie ce langage savoureux qui fait penser à
Calvin, Rabelais, Montaigne, d'Aubigné, et qu'il avait sans doute
appris à Genève au cours de ses études. Il ne craint pas de recourir à
l'ironie et à l'humour, surtout lorsqu'il s'agit de moinerie, selon
son expression. Par contre, le langage de ses publications italiennes
est assez lourd et rappelle celui de Rorengo et confrères; aussi n'y
a-t-il pas à regretter que nous ayons son ouvrage tel qu'il est.
Le plan qu'il trace dans sa préface est fidèlement suivi au
cours de l'ouvrage. Renonçant aux lubies intéressées de Perrin, il
fait tout bonnement dériver de Valdo le nom et l'Eglise des Vaudois,
bien qu'il admette que les Pauvres de Lyon qui se réfugièrent aux
Vallées, y trouvèrent des Albigeois et d'autres chrétiens qui
n'avaient pas adopté les innovations du romanisme.
Au reste, Gilles avoue que les documents du moyen âge au sujet
des Vaudois sont en nombre fort réduit et regardent plutôt la doctrine
que les événements. Cependant, il conduit son lecteur à travers toute
la vaste Diaspora Vaudoise : Dauphiné, Provence, Marquisat de
Saluces, Calabre, Pouilles.
À partir de 1535, il devient de plus en plus précis et
intercale maint document officiel. C'est qu'il a pu disposer des
papiers du persécuteur Pantaléon Bersour, dont le fils embrassa
l'Évangile et s'établit aux Vallées. Pour la guerre de la Trinité et
années suivantes, en plus des souvenirs personnels de son père, il a
les mémoires du notaire Jean Reinier, possédés par son gendre
Barthélemy Coupin, paroissien de Gilles. Puis il a ceux de Miolo et
Vignaux.
À partir de 1599, il est le témoin, oculaire de ce qu'il
raconte ; aussi avons-nous vu qu'il avait d'abord été chargé de
commencer son histoire avec l'année 1600. Ici tout l'intéresse :
les événements politiques, dont les Vallées subissaient le
contre-coup, tout comme les phénomènes physiques : tremblements
de terre, avalanches, inondations, sécheresses et famines, invasion
d'insectes déposant sur les feuilles des gouttes couleur de sang,
présage de guerre pour la crédulité générale.
Au temps de Gilles, la théologie était encore populaire, et le
moindre de ses lecteurs, connaissant à fond sa Bible et la doctrine de
son Église, s'intéressait au dogme et aux débats polémiques, engagés
de vive voix ou par écrit, entre pasteurs et moines. Aussi notre
auteur leur fait-il une assez large part, que les lecteurs actuels
peuvent d'autant plus aisément laisser de côté, qu'elle est écrite en
italique.
C'est que, si Gilles est historien, il est aussi polémiste.
En 1635, il avait publié des Considerationi en réponse
au prieur Rorengo. C'est de même en italien que, l'année suivante, il
livrait à la presse sa Torre Evangelica, en réponse à la Turris
contra Damascum du moine Belvédère.
Cherchant en vain à lutter contre l'envahissement du français,
dû aux pasteurs dauphinois et suisses, il publia en 1644, peu de mois
avant sa mort, sa traduction des Cento Cinquanta Sacri Salmi,
ridutti in Rime volgari Italiane.
Au reste, ces ouvrages sont introuvables, sauf le dernier, dont
la Bibliothèque de S. M. le Roi possède un exemplaire.
Par contre, son Histoire, longuement attendue, fut toujours
très appréciée et continue à l'être. D'une lecture agréable, malgré
son langage vieilli, elle est une mine inépuisable de faits précis et
d'informations sûres.
Les massacres de 1655 ayant attiré sur les Vallées les regards
de toute l'Europe protestante, l'éditeur Remondet, de Genève, qui
avait en dépôt le fonds restant de l'Histoire de Gilles, la mit en
vente avec un nouveau frontispice et la date de l'année courante. En
Hollande on fit mieux : le pasteur Gillis van Breen traduisit
l'ouvrage de Gilles, y ajoutant un supplément qui amenait le lecteur
jusqu'aux Pâques Piémontaises.
Depuis lors, Gilles fut quelque peu oublié, et son ouvrage
devint de plus en plus rare, effacé probablement par celui de Léger,
dont nous parlerons prochainement. C'est ce qui décida le modérateur
P. Lantaret à le rééditer, en 1881, en 2 volumes in-16°, à Pignerol,
chez Chiantore et Mascarelli.
Bien, que répandue assez largement par voie de souscription,
cette édition est à son tour devenue assez rare, ce qui empêche cet
ouvrage d'être lu et connu comme il mérite de l'être.
Nous verrons pourquoi, à peine un an après la mort de Gilles,
le synode vaudois pense déjà à la préparation d'un nouvel ouvrage
historique.
La biographie de Léger est - ou devrait être - dans chaque famille
vaudoise, depuis que la Société d'Histoire Vaudoise l'a publiée en
abrégé, à l'occasion du 17 février 1925. Nous ne parlerons donc dans
ces colonnes ni du pasteur, ni du modérateur, ni de sa vie agitée et
cent fois menacée, à Genève, aux Vallées, en voyage dans l'Europe
protestante, enfin en Hollande.
Nous ne nous occuperons de lui que comme historien. d'autant
plus que son Histoire, bien qu'assez rare, est peut-être la
plus populaire de toutes, comme nous verrons ci-après.
Pierre Gilles était mort en 1645, et son récit s'arrêtait en
1644. Cependant, dès 1646, le synode des Vallées, par « un bel
article requiert instamment Jean Léger, pasteur de Saint-Jean, de
vouloir continuer l'Histoire de feu M. Gilles, de sainte
mémoire ». Cette résolution peut nous paraître étrange, après ce
qui a été dit touchant cet ouvrage. Voici quelle nous semble en être
la raison.
Perrin avait fait une large part aux manuscrits vaudois du
moyen âge, tout en n'en faisant pas toujours un usage scrupuleux.
Gilles, au contraire, n'en avait inséré aucun, sans doute parce que
les quelques personnes, curieuses de lire ce vieux langage, pouvaient
se procurer l'ouvrage de son prédécesseur. Le synode, dont les actes
ont péri, ne fut probablement pas de cet avis et exprima le désir que
ces documents vénérables vissent le jour, même en plus grande quantité
que dans Perrin, comme autant de preuves de l'antiquité des Églises
Vaudoises et de leur antériorité à celles qui étaient issues de la
Réforme.
Comme modérateur, Léger avait chez lui les archives de la
Table, entre autres les actes des synodes depuis 1563. Il s'attacha
sans doute à se procurer une riche bibliothèque historique, et le plus
possible de manuscrits de l'ancienne littérature vaudoise. mais, quand
l'armée de Pianesse envahit la vallée, les soldats ravagèrent sa belle
propriété des Appia ; ses livres et documents, enfouis dans des
sacs, furent transportés à Saluces, probablement à l'évêché. Néanmoins
Rorengo, prieur de Saint-Jean, cite à plus d'une
reprise et montre de posséder le volume des actes des synodes de 1563
à 1628. Au siècle dernier il était entre les mains de l'évêque
Charvaz, à Pignerol, où Alexis Muston a pu le consulter. Il a disparu
depuis lors.
Sur sa Bible italienne, conservée à Cambridge, Léger a écrit
que c'était le seul trésor qu'il avait pu sauver.
Morland, envoyé de Cromwell à Turin pour protester contre les
Pâques Piémontaises, provoqua une tournée au Val Luserne des notaires
Mondon et Bianqui, qui lui fournirent, en italien, une série de
témoignages concernant les victimes du massacre. Il recueillit sans
doute, de la main des pasteurs et des laïques, réfugiés aux vallées de
Pérouse et Pragela, ce qui avait échappé à la destruction et au
pillage.
En effet, des six manuscrits que Morland déposa à l'Université
de Cambridge, et dont la Bibliothèque Vaudoise possède le fac-similé,
grâce à la générosité du doct. Roxbugh, l'un porte la signature de
Léger ; un autre est dédié à Cromwell « par son très
obéissant serviteur Bellon ». C'était un dauphinois,
réfugié aux Clos, et oncle de Léger.
Un troisième appartenait, en 1656, à David Prin, de
Subiasc : Iste liber est meus qui vocor David Prinus,
Subiascensis origine. Un quatrième vient de Fénestrelles, un
cinquième porte cette mention : Benjamin Clemens
Valclusonnensis possessor. B. Clément était fils du pasteur du
Roure et beau-frère du pasteur David Léger. Le Nouveau Testament de
Zurich porte la signature de Jehan Jajmo de Laval di Pragella.
De son côté, Jean Léger se refit une collection de manuscrits, qu'il
déposa ensuite à la Bibliothèque de Genève, au nom des Églises
Vaudoises.
Tout cela a dû servir à Morland, qui revint à Genève en 1658
pour être plus près des sources, et qui publia la même année son
important volume, riche en documents originaux.
Léger avait probablement déjà rédigé et envoyé à Genève la
première partie de son histoire, avant le grand désastre, puisqu'il y
insère plusieurs pièces qu'il n'aurait pas facilement pu se procurer
plus tard.
Les événements qui survinrent ne lui permirent pas de l'achever
pour lors, et il fournit des matériaux à Morland, dont l'ouvrage
devait exciter l'intérêt de l'Angleterre en faveur des églises
désolées. Entre temps, il composa des récit des tristes événements de
1655 et une réponse aux mensonges des documents officiels.
Cromwell étant mort en 1658, les difficultés recommencèrent aux Vallées. Léger, devenu le point de mire des adversaires, fit approuver son Apologie et une Très humble remontrance par les synodes de 1661. Il ne dut pas moins s'exiler avant la fin de l'année, pour échapper à une triste condamnation et à des tentatives répétées d'assassinat. Élu pasteur de l'église française de Leyde, en Hollande, il se fixa dans cette ville où il passa le reste de ses jours. C'est là qu'il rédigea son Histoire.
Nous avons vu que le synode de 1646 avait chargé le modérateur Léger
de reprendre et compléter l'ouvrage récent de P. Gilles. De l'avis de
Léger, qui était peut-être aussi celui de ses mandataires, il
s'agissait de « prendre la chose de plus loin que n'avaient fait
Perrin, et Gilles » et d'insister sur la doctrine et la
discipline des anciens Vaudois, ainsi que sur leur antiquité et leur
succession véritablement apostolique, ces auteurs « n'ayant
jamais bien découvert la véritable origine des Vaudois, qu'ils ne font
descendre que de Valdo ». Léger se proposa donc de prouver que
tous les Vaudois sont originaires des Vallées dont ils ont pris le
nom, et de « faire toucher au doigt leur succession apostolique.
sans interruption ».
Dans ce but, il redoubla de diligence pour se procurer tous les
documents possibles, en même temps qu'il prenait note des événements
contemporains. Si bien qu'il avait déjà « ramassé grande quantité
de matériaux et, avec beaucoup de dépense, recueilli, au près et au
loin, tout ce qu'il avait pu recouvrer de titres, de mémoires et
d'originaux nécessaires ». Devant l'invasion des pillards
incendiaires de 1655, il dut quitter à l'improviste sa belle maison
des Appia, n'emportant que sa Bible italienne et les originaux des
concessions ducales de 1603 et 1620. Tout le reste fut détruit ou
enlevé.
Découragé par cette grave perte, il aurait renoncé à composer
son ouvrage, si les insistances de ses Collègues ne l'avaient décidé à
recommencer ses recherches. Il put remplacer en partie les documents
disparus, grâce à des recherches faites au Val Cluson et en Queyras.
C'est ainsi. qu'il put remplir un volume de plus de 200 pages,
in-folio, en commençant par une belle description des Vallées,
paroisse par paroisse. Il y adjoignit une carte, dressée par son
collègue défunt, Valère Gros, et déjà publiée par Morland. Ce travail,
dessiné avec le système des cônes, est d'une netteté remarquable pour
l'époque ; les connaisseurs le considèrent comme une des sources
de la cartographie piémontaise. Il est regrettable que nombre de noms
de localités aient été estropiés par les graveurs anglais, aux ordres
de Morland. Dans le chapitre sur l'origine des Vaudois, il considère
Valdo comme le premier pasteur des Vallées, à partir de Claude de
Turin, qui ait commencé à les détacher de la communion de Rome. Son
raisonnement ne persuade plus personne, et l'on apprécie d'autant plus
la prudente réserve que Gilles avait gardée sur cette question.
Il en vient ensuite à reproduire les manuscrits vaudois du
moyen âge, pour lesquels il accepte, sans discuter, la date de l'an
1100 que Perrin avait attribuée à quelques-uns. C'est dire que le sens
critique n'était pas très développé chez notre trop crédule auteur. On
peut en dire autant de ses recherches sur la continuité de l'Eglise
Vaudoise, à partir du VIII, siècle, où il considère comme autant de
barbes Pierre de Bruys, Henri de Lausanne, Arnaldo da Brescia, les
chefs des Cathares, des Lollards, etc.
Par contre, par sa profonde connaissance des lieux, ainsi que
des occupations et des moeurs de leurs habitants, Léger devient
intéressant et précieux lorsqu'il parle de l'arrivée aux Vallées des
réchappés de la croisade des Albigeois.
Le deuxième volume de ce grand ouvrage aurait dû contenir en
détail l'histoire des persécutions déchaînées contre les Vallées. Mais
on sent que l'auteur a hâte d'en venir à celle de 1655, qui devait
forcément occuper la place principale pour qui avait été le témoin
oculaire de ces terribles événements. Aussi passe-t-il rapidement sur
les faits qui vont de la croisade de Cattanée
jusqu'à la suppression de l'église de Pravillelm (1475-1633), pour
s'attarder sur les moyens imaginés par la Propagande pour nuire aux
Vaudois et en préparer l'extermination.
Ici le fil logique de la narration se perd, la matière déborde
l'écrivain, qui passe des faits aux justifications et apologies,
appuyées de nombreux documents, même bien antérieurs, pour revenir aux
faits. Aussi n'est-il pas facile de se retrouver dans cette partie
confuse et diffuse du livre. Mais c'est en même temps la plus
palpitante. C'est là que Léger atteint un haut lyrisme, qu'on oserait
presque comparer à celui de Jérémie, lorsqu'il s'écrie, devant la
désolation de son peuple : La plume me tombe des mains... et
ce qui suit. C'est là aussi qu'il dépeint au vif la scène épique de la
mort de Jahier, et qu'il exalte les exploits héroïques de Janavel.
C'est encore là que sont reproduites, d'après Morland, les
tailles-douces représentant les supplices qui avaient accompagné les
massacres. Quelques exemplaires du livre portent en outre, comme
frontispice du 2.me volume, d'autres gravures d'un travail beaucoup
plus fin, faites en Hollande. On a accusé Léger d'exagération. Dans
mon Histoire Populaire, à l'aide de documents des Archives
d'État, j'ai prouvé qu'il n'en était rien.
Léger dut quitter les Vallées en 1661. Il reconnaît lui-même
que, à partir de cette date, son récit manque d'exactitude et de
précision, particulièrement au sujet de la guerre des bannis
(1663-64). C'est que, ni officiellement, ni par voie privée, on ne
pouvait lui faire parvenir des nouvelles des Vallées, sauf à travers
mille dangers.
Les missives de son principal correspondant, son gendre le
pasteur Paul Bonnet, lui parvenaient sous le nom d'une dame française.
L'ouvrage termine par une autobiographie de l'auteur, pleine
d'intérêt et de coloris, et pétillante de verve.
Il est grand dommage que ce livre (deux tomes toujours reliés
en un volume) ait été composé en Hollande par des imprimeurs ignorant
le français ; aussi est-il criblé de fautes d'impression. Mais ce
défaut de forme n'empêche qu'il ne s'agisse d'un travail colossal, vu
surtout les circonstances dans lesquelles il a dû être écrit, et qu'il
y a là une mine précieuse d'informations et de
documents qu'on ne trouve nulle part ailleurs. L'oeuvre de Léger n'a
jamais été rééditée, mais une traduction allemande en a paru au XVIIe
siècle.
Quoique moins rare que la première édition de Gilles, l'Histoire
de Léger est beaucoup plus recherchée, moins semble-t-il, dans le but
de la lire, qu'à cause des gravures dont j'ai parlé. On la paye
couramment plusieurs centaines de francs.
Ce livre, publié à Leyde, sur un excellent papier, à gros
caractères, et muni d'une solide reliure en peau, vit le jour en 1669.
Léger ne survécut pas longtemps à la livraison de son oeuvre au
public, puisqu'il mourut l'année suivante, à l'âge de 55 ans, rassasié
d'épreuves plus que de jours.
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