Par celui-ci, George Müller demandait
que l'Oeuvre des Orphelinats et les autres branches
de l'Institut biblique continuassent avec les
mêmes principes qui avaient
présidé à leur fondation, et
il nommait M. Wright seul directeur. Il le
désignait aussi comme héritier, lui
léguant ce qu'il possédait en
propre : meubles, linge, livres, argent, etc.
[Le tout, y compris l'argent, un peu plus de quinze
cents francs, fut estimé à quatre
mille francs, à la mort du donateur]. Ce
document se termine par ces
ligues :
« En achevant
d'écrire ce dernier testament de ma propre
main, je ne puis m'empêcher d'admirer la
merveilleuse grâce de Dieu qui m'amena
à la connaissance du Seigneur Jésus
à l'âge de vingt ans et cinq mois,
alors que je ne me souciais pas de lui, et qui m'a
gardé dans sa crainte et sa
vérité jusqu'à ce jour,
c'est-à-dire pendant soixante-neuf ans et
quatre mois, me permettant ainsi de le servir
durant tout ce temps. Et maintenant en face de
l'éternité, je déclare que ma
seule espérance de salut est basée
sur ma foi dans les mérites du Seigneur
Jésus-Christ, mon adorable Sauveur, et en sa
mort expiatoire. Je signe ce testament de ma propre
main, devant deux témoins, ce 16 mars mil
huit cent quatre-vingt-quinze (1895) George
MÜLLER ».
Il nous est impossible de transcrire ici les
appréciations nombreuses et
élogieuses qui furent publiées
à l'époque de la mort de George
Müller. Voici quelques
extraits :
« M. Müller
laisse derrière lui une vie toute
consacrée aux Orphelins. La
piété, l'humilité, l'amour de
cet homme, resteront longtemps dans le souvenir des
églises... Unissons-nous silencieusement
dans un acte solennel d'actions de grâce pour
bénir Dieu qui l'a donné au monde. Ce
don-là est le plus précieux qu'Il
puisse faire à
l'humanité. » (Séance du
Synode National des Églises libres
évangéliques).
« Les
résultats
obtenus par M. Müller sont sans
précédent... Cependant, loin d'aimer
à paraître, il était d'un
tempérament timide et retiré, et
redoutait la publicité. Il y a bien des
années, on lui offrit cinq cents livres
sterling (au pair douze mille cinq cents francs)
s'il voulait se laisser photographier ; il le
refusa énergiquement (1)... Bien
des visiteurs de marque
allèrent à Ashley : Comte de
Derby, Lord Salisbury, Lord Hampton,
etc... » (Le Times).
« On se
souviendra de
George Müller comme de l'homme qui ne fit
jamais d'appels ni de réclame...
Son oeuvre fut la
meilleure des
réclames... Sa foi était de celle qui
soulève les montagnes... Il ne se lassa pas
de faire le bien. » (St-James'
Gazette).
« M. Müller
occupe une place unique parmi les philosophes du
XIXe siècle. En ce temps d'agnosticisme et
de matérialisme, il mit à
l'épreuve des théories sur lesquelles
la plupart des hommes se contentent d'avoir
d'inutiles controverses. Même ceux qui
élaborent des discours sur les lois
naturelles et ne partagent pas les vues de M.
Müller sur la puissance de la prière,
ne peuvent s'empêcher d'admirer la foi et la
persévérance extraordinaires de cet
homme qui fonda une colonie d'Orphelins, et
reçut jusqu'en mai dernier pour son oeuvre
et les autres branches de l'Institut biblique plus
de trente-cinq millions de francs. »
(Bristol Evening News).
« ... Comment
ce
miracle fut-il accompli ? - Par la
prière, dit M. Müller. »
Cette réponse ne peut manquer d'exciter les
sarcasmes et les railleries du rationalisme. Mais
les faits demeurent ; qu'on les explique. Il
n'est pas scientifique de diminuer des
événements historiques qu'on trouve
trop difficiles à expliquer. Quant à
escamoter les Orphelinats qui
s'élèvent à Ashley, la chose
semble bien impossible, et tous les tours de
passe-passe n'y suffiraient pas..., (Liverpool
Mercury).
« George
Müller
est mort, et le monde est appauvri par son
départ... La vie de cet homme touche
à ce point au merveilleux qu'elle semble
difficilement croyable. Avec lui, comme le veut
l'adage, la vérité est plus
étrange que la fiction. L'étudiant
prussien à la vie tapageuse est devenu le
philanthrope le plus âgé et le plus
avisé de son pays d'adoption. Sans amis,
sans influence, sans argent, sans situation
sociale, avec un passé de dissipation, cet
homme s'est attiré par
l'intégrité et la noblesse de sa vie
le respect et l'amour de ses contemporains. Il a
enlevé au trottoir des milliers de victimes,
aux prisons des milliers de criminels, aux maisons
de pauvres des milliers de malheureux parias. Et
tout cela, il le fit « en maniant
l'Épée de l'Esprit », pour
employer son propre langage. Sa vie et son exemple
ont une beauté touchante et émouvante
qui ne peuvent qu'impressionner vivement,
même en ce siècle sceptique et
utilitaire... » (Daily Telegraph).
Il faudrait plusieurs volumes pour la seule
publication des dons que recevait chaque jour
George Müller. Beaucoup ont une histoire
intéressante. « Nos fonds sont
déposés à une banque qui ne
peut faire faillite, avait dit une fois la
directrice de l'un des orphelinats à un
visiteur. » Réponse concise et
juste. En apparence, il pouvait y avoir des jours
sombres, Dieu intervenait toujours en temps
voulu.
« Ce n'est
pas de
temps à autre que Dieu pense à nous,
écrivait G. Müller, mais toujours.
Quelle que soit la chose dont nous avons
besoin : de l'argent, des provisions, des
habits, il l'envoie immanquablement. »
Quatre-vingt-dix-huit pour cent des donateurs
étaient des inconnus. Certains
léguèrent à leur mort des
milliers de livres sterling sans avoir
jusque-là donné aucun signe de vie.
Parfois la cloche de la porte d'entrée
retentissait, et
lorsqu'on venait ouvrir, au lieu de visiteurs ou
trouvait un paquet sur le seuil. Une fois, M.
Müller prenant au portemanteau son chapeau et
ses gants pour sortir, trouva dans l'un de ces
derniers un billet de cinq livres sterling (cent
vingt-cinq francs). C'était là un
exaucement remarquable : quelques secondes
avant, il était à genoux demandant
à Dieu d'envoyer du secours.
Les dons en nature
sont des plus
variés : un jour c'est un monsieur qui
envoie une bibliothèque de valeur ; un
autre jour on reçoit des autographes de
George IV, Sir Robert Peel, Lord Melbourne, une
autre fois une voiture, une cage et huit canaris,
deux boeufs vivants, à tuer et à
détailler pour les orphelins, des chars
chargés de légumes, etc...
Nous relevons parmi
les dons en
nature de l'année 1897, 7.203 pains de
quatre livres qui représentent 296 dons, 306
gâteaux, près de 44.699 pommes et de
4.238 poires, 40 sacs de pommes de terre, 20
caisses de savon, un sac de pois, 9 tonnes de
charbon, 26 cuissots de venaison, 112 lapins, 312
faisans, 1 lièvre, 8 oies, 8 grands
fromages, 5 sacs de gruau d'avoine, huit sacs de
farine, 16 morues, du saumon salé, 30 livres
de thé, 44 de miel, des oeufs, du chocolat,
des figues, des bonbons, des caisses d'oranges, des
dattes, des raisins secs, etc.... des bijoux, des
habits, et de multiples objets destinés
à être vendus pour que le produit en
fût attribué aux Orphelinats.
Quelques-uns des donateurs envoient le produit
d'une pièce de terre qu'ils ont mise
à part pour l'Orphelinat ; d'autres une
part sur la vente de poules, de porcs, de vaches,
de moutons, de fruits. de légumes, de
fleurs, d'abeilles, de raisins, de fougères,
etc...
Les rapports ne
donnent que les
initiales des donateurs, et
souvent les détails du don. Nous voyons
ainsi que les uns ont pris l'habitude du don
systématique, les autres donnent à
l'occasion d'une délivrance, d'un
exaucement, d'une bénédiction,
d'autres en se refusant un voyage, une voiture de
première classe, du sucre avec le
thé, un dessert ; un armateur renonce
à assurer ses navires et donne pour les
orphelins le montant de la police
d'assurance ; un prince renonce à aller
à une soirée de gala et envoie
l'économie réalisée de ce
chef, ce qui suffit à payer le dîner
de cent enfants ; le fils d'un baron se passe
de beurre et d'oeufs pendant six semaines, et
ajoute à l'argent reçu de ce chef
celui qu'il gagne en chassant les rats et les
souris
Voici un don de trente
francs
qu'envoie une couturière, prix du premier
travail fait avec une machine à coudre
qu'elle vient de recevoir ; quarante francs
économisés en supprimant le champagne
à un déjeuner de noces ;
vingt-neuf francs d'une couturière qui les a
amassés en donnant vingt centimes par robe
faite ; cent francs d'un mécanicien
pour acheter des puddings aux orphelins le jour de
Noël ; la moitié du montant des
prix obtenus à des expositions, par un
fermier, pour ses moutons ; deux cents francs
réunis en donnant trente centimes par
agneau. « Trois mille sept cents francs
pour payer la pension d'un nombre d'orphelins
égal à celui de mes
enfants » (onze cette
année-là), etc., etc...
Cinq cents francs
économisés en ne fumant pas pendant
un an ; - douze cent soixante-quinze francs
parce que j'ai fait de grandes pertes, et que Dieu
a permis que je pusse continuer mes affaires quand
même ; - dix francs d'une veuve, la
première semaine de gages de mon
enfant ; - douze mille cinq cents francs
d'Irlande avec ces
mots : « Je vous ai envoyé
six francs vingt-cinq il y a quelques
années ; c'était alors une
grosse somme pour moi. Depuis lors, je me suis
considéré comme l'administrateur
des biens que Dieu me donne et je vous envoie
bien plus facilement cette seconde somme que la
première. »
Un octogénaire envoie
cent francs de Californie et écrit :
« J'ai compris en lisant votre dernier
rapport que j'étais un figuier qui n'avait
que des feuilles et pas de fruit, bien que je fasse
profession d'être chrétien depuis
longtemps. Je vous envoie le montant de
l'économie faite en supprimant le verre de
grog auquel j'étais
habitué. »
En 1865, M. Müller est
à Ilfracombe, il est accosté dans la
rue par un monsieur qui lui demande s'il est bien
M. Müller ? Sur une réponse
affirmative, son interlocuteur explique qu'il vient
de M. et lui apporte de l'argent pour les
Orphelins. « Je suis un homme d'affaires,
continua-t-il en se présentant, ce qu'on
nomme « un bûcheur ».
L'un de vos rapports m'est tombé sous la
main : je l'ai lu et je dois vous confesser
que cela m'a laissé sceptique. Je ne pouvais
croire que vous obteniez le nécessaire en
priant. Toutefois, cette question revenait souvent
en ma pensée ; M. Müller
reçoit-il vraiment ces fortes sommes
d'argent uniquement par la foi, et en
réponse à la prière ? Sur
ces entrefaites, j'entendis parler d'une
propriété à vendre et que je
désirais acheter. J'allai la voir et je la
fis évaluer par un homme d'affaires
compétent qui l'estima un certain prix.
Sceptique, je me dis alors : « Et
maintenant nous allons voir si Dieu est avec M.
Müller ; si le prix de vente ne
dépasse pas un prix inférieur et que
je stipulai, je donnerai cent livres sterling
à M. Müller.
Je donnai des ordres à
une tierce personne pour qu'elle se rendît
à la vente aux enchères et
achetât pour mon compte. Ceci se passait en
un endroit assez éloigné ; mais
ma curiosité était excitée
à un si haut point, et je désirais
tellement savoir l'issue de cette affaire, que je
pris le train suivant pour être
renseigné sans délai. À ma
grande surprise, j'appris que j'étais
l'acquéreur au prix inférieur que
j'avais stipulé. Alors je me mis à
réfléchir sur les principes qui
réglaient votre manière de
faire : ils étaient éminemment
évangéliques, avais-je le droit en
tant que chrétien de mettre en doute les
exaucements à la prière ? Plus
je vais, plus je comprends que vous êtes dans
le vrai, et me voici »
Le 5 juillet 1880,
George
Müller recevait une lettre de
Nouvelle-Zélande avec cent vingt-cinq
francs, Voici un extrait de la lettre :
« L'année dernière, nous
étions à Bristol et nous demeurions
en face de vos maisons d'orphelins dont la vue
renouvelait sans cesse notre foi. À cette
époque, j'ai été huit mois
sans travail, ne recevant qu'un secours de 8,75 par
semaine pour ma famille et moi, mais Dieu n'a pas
permis que nous manquions du nécessaire.
Quand les choses semblaient aller au plus mal, vos
mille fenêtres éclairées dans
la nuit me paraissaient comme autant de promesses,
comme disait ma femme, et je puis ajouter qu'elles
ont été le moyen d'un millier
d'exaucements... »
Si quelqu'un me demandait ce qu'il faut faire
pour lire la Bible avec profit, je
répondrais d'abord : comprendre que
seul Dieu peut l'illuminer par son Esprit ; et
puisque Dieu veut que nous lui demandions ce qui
nous est bon, il convient que nous implorions sa
bénédiction avant de la lire et
pendant que nous la lisons.
Le Saint-Esprit est le meilleur des
maîtres et un
maître suffisant ; mais il ne
s'ensuit pas qu'il réponde
immédiatement à nos
requêtes ; nous pouvons avoir à
demander bien des fois l'explication d'un passage
avant d'être exaucé, mais l'exaucement
est certain si nous cherchons patiemment la
lumière dans le but de glorifier
Dieu.
Il est extrêmement
important de lire chaque jour et en suivant une
portion de l'Ancien et du Nouveau Testament :
1° parce que cela aide
à la compréhension du texte. Choisir
un chapitre préféré ici
et là empêche de comprendre
grand'chose aux Écritures.
2° Aussi longtemps que
nous
habitons ce corps, le changement nous est
nécessaire, même dans les choses
spirituelles. Dieu y pourvoit par la grande
variété que nous trouvons dans sa
Parole.
3° Lire la Bible
entièrement glorifie Dieu : En laissant
ici et là quelques chapitres, nous disons en
fait sinon en paroles que certaines parties sont
meilleures que d'autres, ou bien qu'il y a des
pages inutiles.
4° Lire l'Écriture
régulièrement et d'un bout à
l'autre peut nous donner une vue d'ensemble, donc
aider à sa compréhension. Cela
empêche de donner trop de valeur à
certaines conceptions que nous chérissons.
Les Écritures
contiennent
tout ce qu'il a plu à Dieu de nous
révéler de sa volonté. Nous
devons donc faire notre possible pour lire
complètement le document qui l'exprime. Je
crains que de nos jours il y ait bien des
chrétiens qui n'ont jamais lu
entièrement la Bible ; et cependant ils
pourraient le faire en quelques mois, en en lisant
quelques chapitres chaque jour.
Il est nécessaire de
méditer durant la journée sur ce que
nous avons lu, soit sur une partie de notre
lecture, soit sur le tout...
Quant aux
Commentaires, ils
remplissent la tête de toutes sortes de
notions et aussi de la Parole de Dieu ; mais
lorsque le Saint-Esprit lui-même nous
enseigne en réponse à la
prière et à la méditation,
c'est le coeur qui est touché et
pénétré. Or la connaissance
intellectuelle enfle, et puis elle est
essentiellement variable. Que de fois nous
délaissons quelque théorie, quelque
opinion reçue, pour de nouvelles, lorsque
nous lisons quelque commentaire qui nous semble
meilleur ; quitte à les abandonner
aussi par la suite pour d'autres. Ce que le coeur a
saisi rend généralement humble,
joyeux, et conduit plus près de Dieu. La
connaissance acquise de cette
manière-là ne se laisse pas
ébranler par quelque raisonnement que ce
soit, et comme elle a pris racine dans notre coeur,
nous l'utilisons en l'appliquant à notre
vie...
Au commencement de notre activité
à Bristol, frère Craik et moi,
quelques frères et quelques soeurs, nous
nous réunîmes à
Béthesda. Aucun règlement à la
base de nos
réunions ; la Parole écrite
était notre unique Code. Dès le
début, il fut entendu qu'avec l'aide de
Dieu, nous éprouverions toutes choses
à la lumière de sa Parole, et que
nous n'introduirions et ne garderions
énergiquement que ce qui pourrait soutenir
victorieusement cette épreuve. Ce fut
vraiment « dans la
faiblesse », mais d'un coeur droit,
que le 13 août 1832 nous nous
réunîmes pour la première fois
et prîmes ces décisions devant Dieu.
C'est pour cela que nous-mêmes nous ne
savions pas alors ce qu'il y avait lieu de
décider au sujet de l'admission des nouveaux
membres : fallait-il n'admettre que ceux qui
avaient été baptisés
après avoir cru au Seigneur Jésus, ou
bien pouvait-on admettre tous ceux qui croyaient en
Jésus ? La question restait donc
ouverte, et rien, ne fut décidé
à l'origine.
Nous nous sentions
libres de
prendre la sainte Cène avec ceux qui
n'étaient pas baptisés, nous pouvions
donc travailler en toute bonne conscience à
« Gideon Chapel » où la
majeure partie des « saints »
n'étaient pas baptisés ; au
début en tout cas. Mais au fond de nos
coeurs, nous avions le secret désir,
frère Craik et moi, de ne voir que les
chrétiens baptisés se joindre
à nous à Béthesda. Nous avions
été les témoins en Devonshire
de pénibles divisions dans
l'Assemblée, entre ceux qui étaient
baptisés et ceux qui ne l'étaient
pas ; ce que nous attribuions alors au fait
des divergences de vue sur ce point particulier.
Donc, et sans ériger en règle que
l'église de Béthesda devait
être une église de plus intime
communion, nous veillions à ce que ceux qui
demandaient à y être reçus
fussent soigneusement instruits sur la question du
baptême.
Durant plusieurs mois,
aucune
difficulté ne surgit.
Il n'y eut que des
chrétiens baptisés qui
demandèrent à être reçus
parmi nous, ou des chrétiens qui
désiraient l'être, ou d'autres enfin
qui furent convaincus du caractère
scripturaire du baptême des croyants,
après avoir étudié le sujet
avec nous.
Mais un jour, trois
soeurs qui
n'avaient pas été baptisées
demandèrent à être
reçues parmi nous, et leur façon de
voir ne fut pas modifiée après que
nous eûmes étudié le sujet avec
elles. Cependant, comme frère Craik et moi
nous les savions véritablement
chrétiennes, et que nous n'étions pas
au clair nous-mêmes sur la pensée du
Seigneur en cette affaire, nous
décidâmes de les recevoir, toutefois,
afin que la décision fût prise
à l'unanimité comme c'était
alors la coutume parmi nous pour les actes
concernant l'Eglise, nous portâmes la
question devant nos frères, disant que ces
trois soeurs ne considéraient pas comme
scripturaire le baptême des croyants. Y
avait-il quelque objection à ce qu'elles
fussent admises ?
Plusieurs protestèrent
aussitôt, et deux ou trois réunions
s'ensuivirent, durant lesquelles la question fut
examinée à fond, nous-mêmes
essayant de connaître la pensée de
Dieu. Plusieurs jours se passèrent ; et
avant que nous ne fussions arrivées à
aucune décision, l'une des soeurs vint nous
trouver pour nous remercier de ne pas l'avoir
admise, avant qu'elle fût baptisée,
car elle voyait maintenant que c'étaient la
fausse honte et la crainte du qu'en-dira-t-on qui
l'avaient empêchée de demander le
baptême ; mais avec le secours du
Seigneur elle avait décidé de le
faire et venait nous voir dans ce but.
Cette circonstance ne
fit que
fortifier les frères qui tenaient le
baptême pour nécessaire avant
l'admission ; et frère Craik et moi
nous ne pûmes que nous demander derechef si,
après tout, ces frères n'avaient pas
raison ? En conséquence il nous parut
difficile de nous opposer plus longtemps à
eux. Nous reçûmes donc dans l'assemblée, la soeur qui avait
demandé le baptême ; mais pas les
deux autres.
Nos consciences ne
protestèrent pas ; car tous pouvaient
participer à la sainte Cène à
Béthesda, sans toutefois être
reçus dans le groupe le plus intime qui
s'était constitué au sein de
l'Eglise. Quant à l'Eglise de Gideon Chapel,
non seulement tous les membres pouvaient communier,
qu'ils fussent ou non baptisés, mais encore
ils pouvaient faire partie de l'Assemblée.
s'ils en faisaient la demande [c'est-à-dire
du groupement auquel étaient soumises toutes
les affaires concernant l'Eglise].
Car, à cette
époque, nous n'avions pas encore compris que la Bible ne fait pas
de distinction entre
l'assemblée des frères et la
réunion de ceux qui prennent ensemble la
sainte Cène.
Les choses en
restèrent
là pendant plusieurs mois. Les croyants
étaient reçus à la sainte
Cène, même à Béthesda,
sans être baptisés ; mais ils
n'étaient pas admis à tous les
privilèges de l'assemblée
fraternelle. Au mois d'août de l'année
1836 j'eus une conversation avec frère R. C.
au sujet de cette admission des chrétiens
non baptisés à la Communion, chose
qui me préoccupait depuis longtemps
déjà. Et voici comment frère
R. C. m'exposa sa pensée :
« Ou bien les
croyants
non baptisés ont une conduite qui n'honore
pas le Seigneur, et en ce cas nous devons nous
éloigner d'eux
(Il
Thess. III : 6), on bien
leur conduite l'honore. Si un croyant ne se conduit
pas comme il faut, non seulement nous devons nous
séparer de lui pour la communion, mais aussi
en toute autre occasion.
Or ceci n'est manifestement pas l'attitude des
croyants baptisés vis-à-vis de leurs
frères non baptisés. Le Saint-Esprit
ne le permet pas. An contraire il rend ce
témoignage que le fait pour eux de
n'être point baptisés n'implique pas
qu'ils suivent une mauvaise voie ; aussi
peut-il y avoir une communion bénie entre
des croyants baptisés et les croyants non
baptisés. Le Saint-Esprit ne permet pas que
nous refusions de nous joindre à eux pour la
prière, l'étude de la lecture des
Écritures ; il ne permet pas que nous
nous éloignions d'eux, ou que nous les
éloignions de nous dans notre vie
quotidienne, ou nos relations d'amitié, non
plus que dans notre activité
chrétienne ; et cependant il faudrait
qu'il en soit ainsi s'ils avaient une mauvaise
conduite. »
Le passage que frère
C.
avait cité : 2
Thess III : 6, fut le moyen
dont Dieu se servit pour m'amener à
comprendre sa pensée, qui est QUE NOUS
DEVONS RECEVOIR « TOUS CEUX QUE CHRIST A
REÇUS » (Rom. XV : 7), SANS
NOUS LAISSER ARRÊTER PAR LES DEGRÉS
DIFFÉRENTS DE GRÂCE ET DE CONNAISSANCE
AUXQUELS ILS SONT PARVENUS.
Peu de temps après
cette
conversation, en mai 1837, nous eûmes
l'occasion, frère Craik et moi (car il avait
aussi saisi la vérité que j'avais
enfin comprise), de manifester la lumière
reçue : une soeur qui n'avait pas
été baptisée et ne voyait
pas la nécessité de l'être,
demanda à être admise parmi nous. Nous
eûmes avec elle plusieurs entretiens sur
divers sujets, et particulièrement celui du
baptême ; bien que nous ne fussions pas
arrivés à la convaincre, nous
proposâmes à l'assemblée
de l'admettre. Ceci provoqua un nouvel examen de la
question. Nous donnâmes nos raisons pour
recevoir parmi nous cette soeur non
baptisée, et lui accorder
tous les privilèges des enfants de
Dieu ; mais un grand nombre de membres, le
tiers à peu près,
élevèrent des objections
sérieuses ; ils y voyaient des
difficultés. On rappela très
particulièrement que les premiers croyants
furent baptisés après avoir fait
profession de croire. Mais le Seigneur nous
assista, nous aidant à montrer aux
frères, la vérité à ce
sujet ; de sorte que le nombre de ceux qui
considéraient que seuls les croyants
baptisés pouvaient être reçus
parmi nous, décrut de jour en jour. À
la fin, le 28 août 1837, il n'y eut plus que
quatorze frères et soeurs sur cent
quatre-vingts qui crurent devoir se séparer
d'avec nous. [Je suis heureux de pouvoir ajouter
que le plus grand nombre de ces quatorze virent
leur erreur et revinrent à nous].
Depuis, le fait
d'accorder
à tous ceux qui aiment le Seigneur
Jésus, baptisés ou non, tous les
privilèges de l'assemblée des
frères, n'a plus jamais causé de
divisions. Or les faits que je viens de raconter
remontent à plus de cinquante-sept ans.
I. Les premiers disciples communiaient chaque
dimanche
(Actes
XX : 7).
Il. Ceux qui
communient
affirment leur participation à tous les
bienfaits acquis par la mort du Seigneur, et leur
communion mutuelle
(I
Cor. X : 16, 17). La plus grande
liberté doit régner durant ce service
pour l'exercice des dons d'enseignement et d'exhortation,
pour la
prière et l'action de grâces
(Rom.
XII : 4, 8 ; Ephés.
IV : 11-16).
Comment les dons de chacun pourraient-ils s'exercer
pour l'utilité de tous, si une seule
personne faisait ce service ?
III. Le pain doit-il
être
rompu par l'un des anciens, ou chacun des
assistants doit-il le rompre pour
soi-même ? - Nous ne trouvons pas dans
l'Écriture de déclaration explicite
à ce sujet. Cependant 1
Cor. X : 16, 17, semble
préconiser la dernière manière
de faire, qui met en évidence que le corps
du Seigneur a été rompu pour nos
péchés...
J'ai souvent remarqué qu'il est funeste
de faire une chose parce que d'autres l'ont faite,
ou parce que c'est la coutume, ou parce que l'on
s'est laissé persuader d'accomplir tel acte
de renoncement apparent, alors que le coeur ne
s'est pas donné. L'acte doit être le
résultat de l'action intérieure et
puissante du Saint-Esprit, de la communion avec le
Père et le Fils.
Ayons la terreur de ce
qui n'est
que formalisme, habitude, coutume, dans les choses
divines. C'est la vie, la puissance, la
réalité, qu'il faut rechercher. Ce
n'est pas du dehors, mais du dedans que doit venir
notre inspiration.
Que doivent être MES
VÊTEMENTS, ma maison, mes meubles ? Pour
répondre à ces questions, je ne
regarderai pas à ce que font les autres, ni
a ce que font généralement mes
frères et soeurs en Christ... Tout ce qui
est don, renoncement, mort à l'égard
du monde, doit être un fruit de la joie que nous
expérimentons en
Dieu, parce que nous savons que nous sommes ses
enfants, et que, par la foi, nous sommes
entrés dès ici-bas dans notre
héritage éternel... Autrement,
tôt ou tard, se produisent le regard en
arrière et les regrets... Quiconque n'agit
que sous l'action de la joie qu'il trouve en Dieu,
se gardera de considérer avec condescendance
ceux qui ne sont pas arrivés au même
point que lui ; mais bien plutôt il
priera pour eux... Nous avons peut-être plus
de lumière et de force qu'eux sur certain
point, mais sur tel autre ils peuvent avoir plus de
lumière ou de grâce que nous.
Le coeur naturel est toujours prêt à raisonner quand il faut croire, à travailler quand il faut se reposer, à choisir son propre chemin quand il faut suivre avec persévérance celui que Dieu veut, si pénible que cela puisse être.
Chapitre précédent | Table des matières | - |