Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

CIEL ET TERRE

V

UNE TERRE... ET DES SOURCES

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(Pour les catéchumènes au début de leur instruction)

Tu m'as donné une terre, donne-moi aussi des sources d'eau.
(Juges I, 15.)

Notre patrie est le pays des sources. Deux fleuves considérables, le Rhône et le Rhin prennent naissance au pied de nos glaciers étincelants. Après avoir arrosé nos modestes cantons, ils s'en vont, grossis d'affluents généreux, féconder les plaines du Midi et celles du Nord et voient s'épanouir sur leurs rives deux des plus grandes civilisations humaines. En dehors même de ces fleuves, il est dans nos régions verdoyantes tant de torrents, de rivières et de lacs, qu'il nous est difficile d'accorder leur pleine signification aux images bibliques qui évoquent tour à tour la désolation des déserts arides, et la joie du voyageur qui découvre enfin un puits où étancher sa soif ; il nous est difficile de saisir l'intensité religieuse des accents du Psalmiste :

« Comme un cerf altéré brame après le courant des eaux,
« Ainsi soupire mon âme, Seigneur, après tes ruisseaux ».

À l'heure où Israël renonce à l'existence nomade d'un peuple de bergers et s'établit dans la terre promise pour y faire l'apprentissage de la vie sédentaire, une jeune mariée, Acsa, fille de Caleb, monte un jour sur son âne pour retourner auprès de son père et lui présenter une juste réclamation :

« Tu m'as donné, lui dit-elle, une terre... Donne-moi aussi des sources d'eau ». Et son père lui donna aussi les sources, celles qui étaient en bas, et celles qui étaient en haut du champ.


I

Chers jeunes amis, Dieu vous a donné une terre. En vous appelant à l'existence, il vous a confié une parcelle de son trésor infini, et de cela déjà vous êtes reconnaissants. La vie n'est-elle pas un bien merveilleux ? Vous possédez, à votre âge, la joie de vous sentir vivants et pleinement vivants, et de respirer dans l'atmosphère de votre jeunesse le parfum de la beauté du monde. Aujourd'hui, le petit jardin que Dieu vous a ouvert peut vous paraître immense. L'heure viendra où vous en mesurerez plus exactement l'étendue, et où vous ouvrirez les yeux sur ses limites étroites ; où vous vous sentirez les voyageurs rapides sur le petit coin de terre qui vous a un instant appartenu, et o vous rejoindrez la méditation du poète où

« D'autres vont maintenant passer où nous passâmes ;
Nous y sommes venus, d'autres vont y venir...
Dieu nous prête un moment les prés et les fontaines,
Les grands bois frissonnants, les rocs profonds et sourds,
 
Et les cieux azurés, et les lacs et les plaines
Pour y mettre nos coeurs, nos rêves, nos amours.
Puis il nous les retire, il souffle notre flamme
Et dit à la vallée où s'imprima notre âme
D'effacer notre trace et d'oublier nos noms » (1).

Aujourd'hui il vous apparaît vaste et suffisant à loger pour longtemps l'essaim serré de vos espérances, ce jardin que vous vous réjouissez de parcourir.

La vie ! Nul sans doute parmi vous n'est assez sot pour la considérer comme un pare de plaisance dans lequel vous n'auriez qu'à promener votre paresse insouciante. Elle est le champ qu'il faudra ensemencer et cultiver afin qu'y croissent un jour non point les épines et les ronces, mais bien les moissons dorées du bonheur et du travail.

Ne voulez-vous pas dire à Dieu, au début de votre instruction religieuse : « Tu m'as donné la vie, donne-moi aussi la science de la vie ! Tu m'as donné une terre ! Donne-moi aussi les sources d'eau auxquelles nous irons puiser pour que nos jeunes existences s'épanouissent dans la beauté ».

Oui, c'est là votre prière à Dieu. L'éducation reçue au foyer vous a déjà indiqué les chemins qui conduisent aux sources pures, et nous voulons croire qu'il n'en est aucun parmi vous, dont la triste enfance ait végété dans l'ombre maudite d'une famille où règnent le mensonge et le vice. Mais, au sortir d'une période où vous vous êtes laissés, matériellement et moralement, nourrir par d'autres, vous sentez s'approcher le jour où ce sera à vous de faire valoir personnellement ce que vous avez reçu de Dieu. Et quel que soit le sérieux de la tradition chrétienne à laquelle vos parents sont demeurés attachés, vous avez besoin de vous adresser, au delà des parents, à l'Eglise, à l'Évangile, au Père céleste - pour vous diriger vers les vraies sources de la vie.


II

Car il est des sources illusoires et trompeuses.
« Mon peuple a commis un double péché, dit un jour l'Éternel au prophète Jérémie ; et cette plainte de Dieu n'a rien perdu de sa triste actualité :
Ils m'ont abandonné, moi, l'Éternel qui suis une source d'eau vive, pour se creuser des citernes, des citernes crevassées qui ne retiennent point l'eau ! (Jér. II, 13) ».

Auprès de vous des jeunes vous inviteront à oublier Dieu et chercheront à vous persuader que ce n'est qu'en méprisant sa parole et sa loi que vous vous engagerez sur la route du bonheur. Ne les écoutez point. Quoi donc ? Les prendriez-vous pour les temples du vrai bonheur, ces maisons où habitent la folie et l'ivresse, et le faux luxe, ces lieux où tout est apparence, artifice et fragilité, ces lieux de plaisirs faciles, brillants ou grossiers, que notre civilisation se plaît à rendre étincelants d'une lumière qui fascine, alors que se poursuit en leur sein l'oeuvre de la nuit qui s'étend sur les âmes vaincues pour effacer en elles jusqu'au souvenir de l'idéal, et jusqu'à l'image même du Dieu qui les a créées ?

Gardez-vous des sources illusoires. Le mal ne vous apparaîtra pas toujours sous un masque répugnant, propre à susciter l'immédiate réaction de votre santé morale. Si le diable ne se présentait dans notre humanité qu'avec cette figure hideuse que lui prêtent d'anciennes gravures, nous n'aurions pas besoin de vous mettre en garde contre ses ruses. Mais les crevasses des citernes mensongères qui laissent s'échapper l'onde du bonheur ne se découvrent point toujours au premier regard, et tel a pu boire à quelque source empoisonnée qui n'en a ressenti que plus tard l'amertume fatale. Il est des pays qui semblent arrosés et fertiles comme un jardin de l'Éternel, et qui sont maudits, comme cette terre de Sodome, que Lot (Gen. XIII.) se félicitait d'avoir choisie pour résidence, parce que la vie semblait devoir y couler facile, douce et prospère. Il ne vit point qu'il allait demeurer parmi les tentes de la méchanceté, dans une cité marquée du signe de la mort par le jugement de l'Éternel.

Vous êtes encore des enfants. Devrions-nous réserver à plus tard la révélation des abîmes du péché ? Ah ! chers catéchumènes : je ne puis oublier les aveux de certaines jeunes filles qui, l'année même de leur instruction religieuse, nous ont dit la manière dont leurs compagnes, élèves de nos écoles secondaires, parlaient en plaisantant de Dieu et de l'Eglise, entre deux conversations frivoles, ou même grossières ! je songe à tant de vos aînés qui ont avant tout désiré peupler leurs jeunes années de joies vulgaires, de creuses vanités, et que l'amour des choses qui paraissent et qui brillent a tout doucement conduits à l'esclavage du péché. Les plus faibles ont été saisis par les démons de la paresse, de la sensualité, du vol. Les plus résistants se sont arrêtés sur la pente ; mais quand ils ont regardé plus tard ce qu'il leur restait des belles années de leur jeunesse, ils n'ont plus trouvé dans leur main qu'un peu de poussière et de cendre, et dans leur coeur le regret de n'avoir pas plus véritablement écouté Dieu, à l'heure de leurs seize ans.

Les vraies fleurs de la vie ne se sont point ouvertes pour eux, parce que préoccupés uniquement de gagner, de rire et de jouir, ils ne s'étaient point soucié de l'étroit sentier qui conduit aux vraies sources.


III

« Caleb donna à son enfant les sources d'en bas et celles d'en-haut ».
S'il est ici-bas des sources trompeuses, il en est aussi de véritables ; l'âme humaine a ses sources saintes, et parmi elles, Dieu vous demande avant tout de saisir le prix de ces deux trésors : une volonté qui sache agir - un coeur qui sache aimer.

« Ceux qui vivent, ce sont ceux qui luttent ». Vos parents et vos aînés, en vous demandant de devenir des énergiques, des vaillants, acharnés au labeur, décidés et résolus, ne font pas que vous répéter l'exhortation morale qu'eux-mêmes sont heureux d'avoir reçue dans leur jeunesse. Ils sont convaincus que si l'homme a toujours eu besoin de savoir vouloir, ce mot d'ordre est plus que jamais celui de l'heure présente. Le mot d'ordre pour tous ! Pour vous aussi, jeunes qui avez connu une enfance sans soucis dans un milieu heureux et aisé. Beaucoup dont les parents eurent une carrière facile, auront eux aussi, dans l'ébranlement social qui s'annonce et s'accuse, de la peine à se frayer une route. Et il ne faut pas qu'à l'heure où l'on parle chômage et misère, troubles et révoltes, la nouvelle génération se prépare aux lendemains périlleux, en énervant ses énergies dans le plaisir et la paresse, en tournant le dos aux responsabilités qui l'attendent. La volonté ! La femme aussi en a besoin, en face de sa vocation domestique, comme en face des difficultés matérielles et morales qui peuvent l'accabler un jour... Ah ! si nous trouvons dans l'Évangile de Jésus l'inspiration de la pitié, de l'amour pour tous les faibles, pour tous les vaincus - nous n'en avons pas moins le devoir de lire - inscrit en lettres de flamme, au dessus des détresses du présent, l'appel de Dieu à ceux qui veulent vivre : Sois fort et Sache vouloir !

Un coeur qui sache aimer. « Garde ton coeur, dit le sage d'Israël, plus que toute autre chose, car de lui viennent les sources de la vie (Prov. IV, 23).

Invitation simple et grave. Oui, les sources de la vie, vous les possédez dans ce coeur qui, un jour s'éveillera aux émotions puissantes de l'amour humain. Pierre sainte du foyer, ciment du bonheur intime, le coeur qui aime est aussi la source de cette vie fraternelle qui doit un jour faire refleurir le désert de la vie sociale, aujourd'hui balayé par les vents desséchants de la haine !

Gardez votre coeur pour l'amour véritable - celui que ne connaîtront plus ceux qui auront usé les ressources de leur vie sentimentale dans mille aventures légères ou éphémères. Gardez votre coeur pour le ministère de la bonté - ouvert à chacun - joie permanente promise à ceux qui n'ont pas laissé s'endurcir leur jeune vie dans la prison sans fenêtre de l'égoïsme. Garde un coeur capable d'aimer.


IV

Mais il y a aussi les sources d'En-haut. Vos pasteurs ne vous présenteront pas la terre et le ciel séparés par une infranchissable distance. Entre Dieu et l'homme, l'Évangile a jeté le pont ; le Christ a voulu faire de la terre une province du Royaume de Dieu. De même que les savants ont reconnu que les éléments qui composent les corps terrestres se retrouvent identiques dans la composition des étoiles lointaines, de même Jésus-Christ a défini les éléments qui unissent la vie de nos âmes sur la terre et la vie même de Dieu. La foi et l'amour sont des sources universelles de la vie, de la vie d'ici-bas et de la vie d'En-haut. Elles jaillissent du coeur de l'enfant, mais elles jaillissent aussi du coeur du Père qui est dans les cieux.
Quel réconfort de le savoir, à l'heure où les sources d'en-bas, même les plus pures, ne vous suffisent plus !

Votre volonté, vous voulez la garder ferme et droite. Mais ne la sentez-vous pas souvent faible, hésitante, et lâche, si insuffisante parfois à vous assurer même une de ces petites victoires sur un défaut bien connu ?

Votre coeur, vous désirez le conserver sensible et pur. Hélas ! ne l'avez-vous pas plus d'une fois déjà senti partagé entre le bien et le mal, et prêt à se laisser gagner par les mauvais conseils de l'orgueil et de l'impureté ?
Et alors, parce que vous voulez être des chrétiens, vous saurez dire : Seigneur, conduis-moi jusqu'aux sources divines, jusqu'aux sources d'En-haut !

Les sources supérieures... Vos pasteurs chercheront cet hiver, à vous les faire découvrir. Vous les devinez déjà, et je voudrais vous en citer au moins trois :

La prière - La contemplation de Jésus-Christ - L'attachement à votre Église.
La prière. Dès votre première enfance, vous avez appris une prière ; aujourd'hui, vous avez à apprendre la prière. Il y a derrière le devoir qui vous sollicite, et derrière la vie qui vous appelle, un Quelqu'un qui vous cherche. « Approchez-vous de lui, et il s'approchera de vous ! » (Jacques IV, 8).

Qu'elle est émouvante la déclaration d'un chrétien : « Toutes les fois que Dieu s'est éloigné de moi, j'ai reconnu que c'était ma faute !... ». Que d'absences de Dieu s'expliquent par l'absence de la prière. Priez-le avec simplicité et ferveur, à l'heure surtout où la route semble ardue, le devoir délicat, la tentation prenante. Priez-le encore au jour de la joie, ouverts à cette reconnaissance qui élargit l'existence, en saluant la perpétuité de la présence adorable de Dieu.

La véritable histoire de l'Eglise de Dieu n'est pas rapportée dans les livres. qui nous présentent, hélas ! à côté des grandes oeuvres des chrétiens, leurs misères, leurs divisions et leurs guerres. Elle est surtout dans ces miracles inconnus des hommes, mais bien connus du Père, qu'a opérés, âge après âge, dans le secret de milliers d'existences ignorées et modestes, cette source cachée, la prière de l'âme chrétienne. Elle est dans ces mille victoires de l'esprit sur la matière, de la bonté sur la haine, de la confiance sur le découragement, qui ont été remportées à genoux.

Et si, à cause de votre péché ou à cause des obscurités du monde, la face du Dieu d'amour semble un instant se voiler pour vous, vous vous souviendrez qu'il en est un aux yeux de qui le visage du Père ne s'est jamais voilé, et vous reviendrez à la contemplation du Christ.
Vous êtes, chers jeunes amis, catéchumènes de Jésus-Christ. À vous s'adresse l'appel du poète :

Tiens-toi toujours debout, pour celui-là qui vient
Et dont sur les chemins les pieds gravent l'exemple...
(2)

Oui, Il vient à vous, le Sauveur des hommes, qui a cheminé sur nos routes terrestres, semées d'obstacles et d'épreuves, et qui marche devant vous comme le berger devant son troupeau. Y aurait-il de notre part attachement superstitieux à quelqu'ancienne tradition périmée, dans l'insistance avec laquelle nous vous demanderons de fixer vos yeux sur le Christ ? Vous le comprendrez bientôt, en Jésus-Christ nous ne voyons pas seulement un splendide exemplaire de la race humaine, un grand héros du passé auquel nous accorderions notre admiration enthousiaste. Le Christ est bien davantage encore. Il est la grande source de la vie divine ; celle qui distribue aux coeurs croyants l'eau qui jaillit jusqu'en vie éternelle ; il est le don suprême du Dieu d'amour.

Vous attacher au Christ qui a terrassé le péché, et vaincu la mort, et montré le Père, c'est vous attacher à l'étoile de la victoire.
Que demain vous vous sentiez faiblir, et soyez amenés à gémir sur vous-mêmes, où trouverez-vous une source de purification qui vous rende et l'espoir et la paix ? Dans l'Évangile du pardon.
Que demain, vous ne parveniez plus, au sein de l'épreuve, à proclamer la bonté de Dieu, ou que vous reculiez devant les renoncements nécessaires ou devant l'appel au sacrifice, où donc irez-vous puiser le courage dans la souffrance, la grâce d'être consolé ? Dans l'Évangile de la Passion et de la Résurrection.

Quand tout devrait un jour être obscur en vous et autour de vous, vous vous retournerez vers Lui, pour vous écrier avec l'apôtre Pierre : « Seigneur ! À qui d'autre irions-nous, si ce n'est à toi ? Tu as les paroles de la vie éternelle » (Jean VI, 68). Et vous mettrez vos doutes et vos misères à l'abri de ses certitudes et de sa richesse, et vous sécherez vos larmes - celles de la douleur et celles du repentir - au pied de sa Croix qui domine l'océan des siècles.

Le monogramme du Christ J H S rayonne au-dessus des armes de la cité de Genève, fille de notre Église. Il y a de l'humain, donc de l'imperfection, dans toute église, et dans la nôtre aussi. Mais vous apprendrez cet hiver, à la considérer comme elle mérite de l'être.

N'oubliez jamais ce que vous devez à l'Eglise. Elle vous a accueillis à l'aurore de votre vie, à à l'heure de votre baptême, elle vous transmet l'appel de Dieu, elle vous enseigne le Notre Père, elle vous place en face de Jésus. Quand les fidèles s'assemblent, groupés autour de la parole divine, se reproduit le mystère de la fraternité des âmes. Celui qui n'ose plus prier et qui ne sait plus prier, se sent soulevé au-dessus de son incrédulité par les ailes déployées de la prière des frères ; celui qui chemine, errant comme la brebis sans berger, se sent reconduit, par la voix fidèle de l'Eglise, jusque vers le Sauveur, dont le regard le retrouve, le ranime et le redresse. Le faible s'enrichit de la force du fort ; et le fort s'enrichit par l'amour qu'il porte au faible.

La cathédrale domine toujours la cité, du haut de la vieille colline, où retentirent jadis les accents de la Réforme religieuse qui devaient fonder la grandeur de Genève et ébranler au loin le monde, en faisant retentir la parole de Dieu, retrouvée dans sa primitive pureté.
Au pied de cette colline, sacrée pour nos coeurs de patriotes et de croyants, dans les rues de notre Genève actuelle, grandit une génération, la vôtre, à qui beaucoup veulent faire oublier le nom de Jésus-Christ, Sauveur des hommes. Et au loin, dans le vaste monde, s'agite une humanité fiévreuse et troublée, qui soupire après la paix et la justice, mais qui rêve d'un Paradis sans Dieu, d'un ciel sans étoiles, d'une cité sans temples.

Ah ! vous voudrez, au terme de cet hiver, entrer joyeusement dans l'Eglise du Christ, pour en devenir des pierres vivantes. Puissiez-vous connaître, dès cette année. le bonheur de boire aux sources d'En-Haut, et la soif de Dieu vous accompagnera votre vie durant, et dans la patrie et dans le monde, vous en voudrez aider d'autres à connaître la joie du Salut.

Chers catéchumènes, Dieu n'a pas été à votre égard semblable au père insouciant qui aurait dit à son enfant : « Tu cultiveras ce champ », sans lui ouvrir les sources des eaux qui fertilisent. Dieu vous a fait naître dans un peuple où l'Évangile est proclamé, Il vous a introduits dès votre enfance dans l'Eglise, Il vous a adressé à chacun personnellement sa promesse : « Je te conduirai aux sources de la vie ! »
Il y a peu de jours, je rencontrai sur la crête du Salève des ouvriers qui accompagnaient de lourds attelages tirés par des boeufs robustes et chargés d'engins mécaniques, de tubes et de poulies.
« Nous sommes montés ici, me dirent-ils, pour chercher de l'eau, et nous allons faire un sondage ; nous trouverons de l'eau à cent mètres sous terre. » Voilà la persévérance de l'industrie humaine, qui veut faire jaillir les sources dans les terres arides.

Dans toutes les âmes, même dans la plus ignorante, dans la plus faible, il y a, à une certaine profondeur, une source cachée. Les sources de Dieu, elles ne sont pas seulement dans le ciel lointain, dans l'infini inaccessible ; elles sont aussi dans ces régions intimes de votre être, où l'âme plonge ses racines dans l'invisible, où réapparaît dans la créature l'image du Créateur. Les sources supérieures, ce sont aussi les sources profondes.

Jeunes gens, ne vivez pas à la surface de vous-mêmes, de la vie légère de celui qui refuse de se connaître, de réfléchir, d'écouter Dieu. Vivez de cette vie intérieure, à laquelle nous nous efforcerons de vous initier. Et vous apprendrez alors à compter les bienfaits de l'Éternel ! Ceux de la famille qui vous a appris à vouloir, à aimer, ceux de l'Eglise qui vous instruit et vous aide à découvrir les sources les plus précieuses, sources de la prière qui vous ouvre le coeur même de Dieu, sources de la communion avec Jésus-Christ, qui vous assure la présence perpétuelle d'un guide et d'un Sauveur.

Et votre âme deviendra le jardin arrosé, où mûriront au soleil de l'avenir des fruits abondants à la gloire du Dieu d'amour.

1931.


1. V. HUGO. 

2. E. VERHAEREN. 
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