Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

VII

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À partir de 1934 les choses sont allées à fond de train.
Je n'ai pas retenu avec exactitude les détails et ce qui s'est passé chaque mois. Plus de deux ans se sont écoulés jusqu'à ce que tout ait pris nettement tournure et des gens comme moi n'embrassent pas les choses d'un coup d'oeil comme fait le pasteur.

S'il ne s'agissait que de retracer la suite des événements, ce ne serait pas trop difficile. Dans un village, on est tout près les uns des autres, on regarde dans la marmite du voisin, on sait ses opinions et ses habitudes, on aurait pu dire que, somme toute, il n'y avait là qu'une querelle entre le nouveau maire et le pasteur et que ça finirait, comme ça devait finir, par la victoire du plus puissant.
Mais tant de choses du dehors sont venues jouer leur rôle, qu'on ne s'en rend pas bien compte après coup ;cependant ça a eu tout de même de l'influence sur les affaires.
Par exemple ceci : les chrétiens-allemands voulaient tout uniformiser et faire aussi vite que possible des différentes Églises régionales une grande Église nationale, qui n'aurait pas grand'chose de chrétien, mais que l'État commencerait par mettre au pas.

Un jour, enfin, le président régional a été destitué. Un pasteur des chrétiens-allemands, dont jusqu'alors on n'avait jamais entendu parler, a pris sa place, c'est-à-dire qu'il s'est dépêché de se faire lui-même « évêque » et qu'il a casé ses amis aux autres postes du gouvernement de l'Eglise. Il n'y avait plus qu'à tirer l'échelle.
Dans la suite, notre pasteur Grund a reçu lui aussi une lettre de ses nouveaux supérieurs ; ils écrivaient que maintenant enfin tout était au point, que l'ancien président et les conseillers de l'Eglise étaient des ennemis de l'État, qu'ils avaient semé la méfiance entre les pasteurs et leurs paroisses et ne voulaient pas donner leur appui au renouvellement religieux de notre peuple selon l'esprit du national-socialisme.
Le pasteur nous a montré ce décret et il a dit :
- Je ne m'inclinerai naturellement pas devant ce gouvernement illégal de l'Eglise.

Et nous étions tout à fait de son avis.
On disait que dans un grand nombre d'autres Églises cela se passait comme chez nous.
Pourquoi cela nous touchait-il plus que le revirement politique ? Pourquoi toute la paroisse y prenait-elle une telle part ? Il y avait à cela des causes dont tout d'abord nous ne nous sommes pas rendu compte. Il a fallu que le pasteur éclaire notre lanterne.

Autrefois, un renouvellement des cadres supérieurs de l'Eglise ne nous aurait pas troublés. Mais le pasteur a dit :
« Le peuple a un flair de renard quand il y a du louche quelque part. Aujourd'hui, on ne cherche pas à détruire la religion. On est peut-être encore plus religieux que jamais, mais à rebours : alors que l'Eglise a enseigné que Dieu est le créateur du ciel et de la terre et qu'à lui seul sont dues gloire et adoration, aujourd'hui on adore la création et on lui rend gloire.
« Dieu, c'est le Seigneur ; nous n'avons aucun pouvoir sur lui, nous ne pouvons pas le saisir.
« Ceci, à ce qu'on dit, ne doit plus durer. Nous voulons être les maîtres nous-mêmes et tout ce qui rappelle encore le Seigneur et le créateur véritable doit disparaître.

« Peut-être que les chrétiens-allemands n'ont pas d'aussi funestes intentions, peut-être que pour eux Dieu a encore quelque valeur. Mais ils ne veulent pas convenir qu'il s'est révélé uniquement dans sa Parole, c'est-à-dire dans son fils Jésus-Christ. Dieu doit se révéler également dans la nature et dans l'histoire. Surtout quand des merveilles se produisent comme, à présent, l'essor du Troisième Reich, cela doit nécessairement être une révélation de Dieu ; plutôt supprimer tout le Christianisme que d'admettre que ce n'est pas une révélation de Dieu.
« Mais, mes amis, vous le savez, vous aussi : il n'y a de révélation de Dieu que là où il y a rédemption, délivrance complète de l'homme et de la terre, renouvellement total. Et nous ne sommes pas assez orgueilleux pour prétendre que la nouvelle révolution allemande est une rédemption pour le monde entier, malgré ce que certains affirment.

« Pourquoi donc êtes-vous tellement opposés à cette réorganisation de l'Eglise ? C'est parce que vous remarquez qu'avec cela quelque chose d'étranger pénètre dans l'Eglise. Quand bien même vous n'étiez pas des piliers d'église, vous saviez que notre président régional avait de la piété. Avec lui, vous étiez sûrs qu'il ne cherchait pas à supprimer Dieu et à mettre l'homme à sa place. Et maintenant qu'on a retranché cet homme vénérable, vous sentez que quelque chose menace ruine. Ah ! nous sommes tous des drôles de gens. Ce que nous possédons, nous ne l'apprécions que lorsqu'on nous l'a enlevé. »

Puisque notre pasteur ne se soumettait pas, comme je l'ai dit, à l'évêque des chrétiens-allemands et qu'il n'exécutait pas tous ses ordres - car maintenant il ne recevait que des ordres, - les réprimandes et les punitions pleuvaient dru sur lui. En général, on lui retenait une partie de son traitement, de sorte que, certains mois, il lui restait tout juste quelques sous pour le lait.
Alors la paroisse intervenait et prenait sur elle le soin de remplir le garde-manger du presbytère et de tenir notre pasteur à l'abri du besoin.

Le facteur, qui était des nôtres, connaissait déjà les enveloppes jaunes qui venaient de la part du nouvel évêque et il disait alors au pasteur : « Je vous apporte de nouveau un billet doux ». Et il y avait toujours un nouvel oukase, un nouveau savon. Quand c'était trop fort, il nous lisait de ces documents au conseil presbytéral et ce Christianisme d'un nouveau genre nous aurait fait éclater de rire, si l'affaire n'avait pas été si sérieuse.

Je me rappelle encore deux événements :
Une fois, on parlait du Mythe de Rosenberg. Je n'ai jamais lu ce livre, ni personne d'autre au village. Mais toutes les fois qu'un orateur venait, il en débitait des passages et nous en avions plus qu'assez, puisque dans ce bouquin il n'était jamais question d'autre chose que de sang. En tout cas, ni le livre ni son auteur n'avaient rien à faire avec le Christ et précisément ce Rosenberg était le grand pontife parmi ceux qui voulaient supprimer le Christianisme dans le peuple allemand.
Puis est venu un décret de l'évêque des chrétiens-allemands disant que personne ne devait faire la critique d'une oeuvre comme celle de Rosenberg et qu'il était défendu de diffamer son livre dans les réunions pastorales, car il était interdit de critiquer les chefs nationaux-socialistes.
Nous étions bien reconnaissants au pasteur de ce qu'il le faisait quand même et de ce qu'il nous expliquait, précisément en conséquence de ce décret, ce qu'il avait à objecter à Rosenberg. Dans l'Eglise, il y avait encore un brin de liberté.

Et je me rappelle cette autre fois où un décret est venu nous intimer l'ordre de débarrasser l'Eglise de l'esprit juif : il n'était plus permis de chanter les cantiques et les passages de la liturgie avec des expressions telles que Sebaoth, Hosanna, semence d'Abraham, Jéhovah, salut d'Israël, Sion, etc.
Alors, le pasteur nous a expliqué qu'il ne s'agissait pas là de simples expressions que l'on pouvait changer à son gré, mais que Dieu y mettait un sens tout particulier quand il se faisait appeler le Dieu d'Abraham, d'Isaac et de Jacob. Pendant un millénaire d'histoire allemande, toutes les générations avaient supporté ce vocabulaire sans devenir juives ; bien plus, elles ne l'avaient pas seulement supporté, mais elles y reconnaissaient la volonté du Dieu sauveur ; nous pouvions donc bien, à notre tour, le supporter. Il faudrait d'ailleurs, pour obéir à cette interdiction, faire encore d'autres suppressions. Par exemple, une partie de nos prénoms allemands étaient d'origine biblique.




Ce qui était beau dans ce temps-là, c'était la façon dont les pasteurs du voisinage s'entr'aidaient. Eux non plus n'avaient pas donné dans le piège du nouvel évêque ; les chrétiens-allemands n'avaient du reste pas beaucoup de partisans, ils faisaient surtout du bruit avec leurs grandes bouches.
Dès lors, on pouvait voir souvent chez le pasteur Grund un de ses collègues des environs, le pasteur de Niederzell. Il venait en vélo et ils échangeaient les nouvelles. Parfois, ils faisaient tour à tour des conférences ou des sermons chez nous et à Niederzell.
Ainsi, on restait en contact avec d'autres chrétiens.

Le matin, quand j'allais au travail et que j'étais descendu de la montagne, j'avais encore un petit bois à traverser, puis le clocher de Niederzell se dressait dans le vallon et toutes les fois que je le voyais, je me disais : Voilà encore des gens qui veulent rester fidèles à l'Évangile.
Nous tous, nous ne sommes que des hommes imparfaits, chacun a des fers aux pieds qui l'empêchent de monter directement au ciel ; mais quelle vie différente, si l'on a la certitude que le monde avec toute sa beauté et toute sa boue, que toute cette hâte et cette bousculade, même autour des choses importantes, n'est pas tout. Que nous reste-t-il de tout ça ? une parcelle de terre assez grande pour s'y allonger. Et même ces quelques pelletées de terre, nous ne les avons pas pour longtemps. Bientôt, on déterre nos os et d'autres prennent notre place.
Nous n'avons pas ici-bas de cité permanente, mais nous cherchons celle qui est à venir.

À mes yeux, l'Eglise retirait un fruit de cette lutte sur cette terre il faut tenir bon la rampe, mais sans crisper les doigts, en sachant ce que nous faisons et en prenant garde de nuire à notre salut. Si quelqu'un s'attaque au domaine où Dieu seul a droit à notre obéissance, que ce soit un puissant personnage ou bien l'État, que ce soit même ton propre frère qui le fasse, il faut crier : Bas les pattes !
Ainsi, j'ai toujours souhaité que la lutte qu'on mène chez nous en Allemagne porte des fruits, même dans les autres pays.
Dans cette Allemagne, nous ne pouvons plus faire beaucoup, on nous a tout pris.

Aucun journal d'Eglise n'a plus le droit d'écrire ce qui lui semble juste et ce qu'on devrait dire aux gens, mais ils sont forcés de faire croire que nous vivons encore à la façon d'il y a cinquante ans, quand chacun dormait doucement sur son coussin.
Tout ce qui est contre notre conscience, tout ce contre quoi un chrétien devrait se défendre franchement devant le monde, toutes les injustices qui se commettent, tout ce qui viole les dix commandements en secret et en public, nous devons avaler tout cela et personne ne peut plus s'y opposer.

Nous sommes devenus des sournois, parce que nous avons donné dans le piège d'où nous ne pouvons plus sortir.
Et maintenant, on nous enlève même nos enfants et on les confie aux mains de ce Rosenberg, on leur remplit le coeur de haine contre le Seigneur Jésus-Christ et on les soustrait aussi à la surveillance de leurs parents. « Honore ton père et ta mère », cela n'existe plus chez nous. Les parents, ce sont des « réactionnaires », ils n'ont plus rien à vous dire, c'est vous l'avenir, c'est vous les héros !
Et je me demande seulement quel air aura un jour une Allemagne où il n'y aura plus de crainte de Dieu ?

J'ai pensé que, chez nous, le Christianisme a été obligé de se cacher sous le manteau. Dans nos coeurs, nous pouvons croire ce que nous cachons, mais sur les maisons, sur l'hôtel de ville et même sur le clocher flottent les drapeaux du paganisme, la croix et ses griffes qui a remplacé la croix du Sauveur.
Mais je crois que les chrétiens, dans le monde entier, devraient en tirer une leçon.

Mon coeur se remplit de joie et je me sens réconforté, quand je vois le clocher de Niederzell, parce que je peux me redresser à l'idée que nous autres chrétiens de Lindenkopf, nous ne sommes pas seuls ainsi, tous ceux qui ont encore une petite église où ils peuvent se rassembler devraient penser à leurs frères et soeurs dans le monde entier.
Il me revient souvent un verset d'un cantique que nous avons parfois chanté à la fin d'une réunion biblique :

O Jésus ! tu nous appelles
À former un même corps ;
Tu veux que, saints et fidèles,
Nous unissions nos efforts.
Allume en nous, tendre maître,
Un amour toujours nouveau
Alors, tous pourront connaître
Que nous sommes ton troupeau.



Un soir, en rentrant, j'ai rencontré le pasteur Grund qui montait de la gare avec sa petite valise.
- Tiens, Stefan ! je dis, tu as été en voyage ?

Il sourit :
-Oui, j'ai fait un petit voyage au pays de Souabe tu en entendras parler. Je ne veux encore rien dire, cela doit être une surprise.

Bientôt après, le vieux Schmelzer est venu chez moi et il m'a annoncé ceci :
- Je dois convoquer pour ce soir à huit heures à l'église.

Je demande :
- Qui donc ?

Il me montre une liste.
- Seuls les gens qui sont inscrits là.

C'étaient les conseillers presbytéraux et tous ceux qui venaient régulièrement aux réunions bibliques.
Puis le sacristain a dit :
- Heinrich Kohler m'a rencontré en route et il m'a demandé quelle commission importante j'avais à faire. Je lui ai répondu qu'il s'agissait des réunions bibliques.

Nous étions naturellement très curieux de savoir ce que le pasteur allait nous dire.
Eh bien ! il a dit qu'il nous avait rassemblés pour nous faire part de quelque chose, que dorénavant il en prendrait l'habitude ; que les événements dans l'Eglise s'aggravaient de plus en plus et qu'il était nécessaire de tenir la paroisse au courant.
Il a affirmé que ce qu'il avait à dire n'était pas un secret, mais cela ne regardait pas tout le monde, rien que la paroisse.

Puis il a ajouté ceci :
- Je passerai sur les détails, voici les faits l'évêque d'empire veut mettre notre Église évangélique sous la botte de l'État. Aucun de nous ne tient à ce que les différentes Églises régionales, telles qu'elles existent à présent, soient conservées à tout prix. Nous sommes prêts à accepter une Église évangélique unie. Mais on ne peut pas procéder de la sorte : tout détruire et dresser la dictature de l'évêque d'empire. En ce cas, nous serions obligés de nous soumettre à une hérésie et l'Évangile tomberait en morceaux.
« Là où il y a des Églises régionales qui retiennent encore la véritable foi, nous nous opposons à leur destruction. Mais les chrétiens-allemands ont déjà mis le grappin sur une série d'Églises régionales et, au lieu de faire l'union, ils sont cause que des querelles ont éclaté dans ces Églises avec plus de violence encore, puisque tous les pasteurs et tous les membres de l'Eglise qui se rangent fidèlement du côté de l'Évangile se révoltent contre cette tyrannie.

« La semaine dernière enfin, l'évêque d'empire a essayé d'ébranler une des grandes Églises de l'Allemagne du Sud ; il a reproché à l'évêque régional du Würtemberg d'avoir détourné de l'argent appartenant à l'Eglise et il a déclaré que cet évêque avait la plupart des pasteurs contre lui.
« Vous pouvez bien croire qu'il n'y a rien de vrai là-dedans ; l'évêque du Würtemberg est un homme honnête qu'on ne pouvait pas toucher sans un coup de Jarnac.
« Les paroisses du Würtemberg se sont tout de suite rangées du côté de leur évêque légitime ; ainsi le plan des chrétiens-allemands y a complètement échoué jusqu'à présent.
« Je viens d'arriver d'Ulm, où beaucoup de chefs de l'Eglise, beaucoup de pasteurs, ainsi que des représentants des paroisses opprimées de toute l'Allemagne, étaient réunis.
« Vous auriez dû en être !
« Il y avait rassemblées dans la cathédrale d'Ulm de huit à neuf mille personnes bien d'accord et je peux vous l'assurer : nous ne sommes pas seuls, nous autres chrétiens évangéliques de Lindenkopf. Dans toute l'Allemagne, on se remue.
« Malgré tout le bien que le nouvel État nous a apporté, nous ne voulons pas échanger l'Évangile contre l'ordre nouveau.

« En général, je ne fais pas grand cas des masses, surtout pas dans les affaires d'Eglise. Mais, comme nous étions réconfortés d'apprendre qu'il y a d'autres hommes encore qui ne se laissent pas arracher leur foi !
« À Ulm, on a rédigé un message qui marque un tournant dans la lutte pour l'Eglise.
« Dans ce message, « l'Eglise confessante » déclare qu'elle est l'Eglise évangélique légitime et elle engage tous ceux qui prennent l'Eglise au sérieux à se ranger de son côté et à résister par leur foi aux chrétiens-allemands.
« Dès qu'il sera publié, je ferai polycopier ce message d'Ulm, pour que vous puissiez le lire.
« Mais nous ne sommes pas encore au bout. Comme l'État a pris le parti des chrétiens-allemands, le danger est encore très grand.
« Nous soutiendrons la lutte contre la force et l'injustice, mais rien qu'avec des armes spirituelles.

« Je vous rappelle une fois de plus ce que je vous ai dit de la pauvreté de l'Eglise :
« Nous ne possédons rien, nous n'avons pas de moyens puissants comme l'État, nous n'avons que l'Évangile, c'est notre seule arme.
« Prions Dieu qu'il reste avec sa parole auprès de nous ! »

Il y avait une lumière sur toutes les figures.
Les mois précédents nous avaient unis et préparés. Notre Église nous était devenue chère et nous ne pouvions plus l'abandonner.
Autour de nous, le pouvoir terrestre avait grandi et voulait nous posséder, corps et âme. Et cela a eu pour conséquence que Dieu a grandi d'autant plus à nos yeux. Nous étions encore loin d'être à la hauteur de ceux auxquels le Christ, s'il était venu chez nous, aurait pu dire : « C'est bien, bons et fidèles serviteurs ! »

Ce n'était chez nous que l'aube. Des gens humbles comme nous ont la tête dure et ça prend un bon moment jusqu'à ce que quelque chose y entre.
Mais cela nous a amenés à craindre Dieu, à aimer et à avoir confiance, nous y avons trouvé un appui, nous avons vu clair dans ce bluff où on nous a plongés ; l'État pouvait toujours se vanter de son pouvoir, nous savions maintenant que cela ne durerait pas plus que Dieu ne le voulait et que tout s'écroulerait, si Dieu y touchait avec son doigt.
Et maintenant, nous n'étions plus à Lindenkopf un petit groupe de gens à part qui s'étaient mis des choses pareilles dans la tête, mais le pasteur nous a bien dit que nous avions des frères dans toute l'Allemagne qui pensaient comme nous, et cela nous rendait heureux.

Après les paroles du pasteur, nous avons ouvert nos cantiques et nous avons chanté :
Ne crains donc point, petit troupeau.
Au beau milieu du chant, tout à coup, nous avons entendu un bruit sur la tribune.
Nous avons tous levé les yeux, mais nous n'avons rien vu. Cependant, on a su après que le nouveau maire et le garde-forestier étaient entrés tout doucement dans l'église pour entendre ce qui se passait et Kohler avait probablement laissé tomber sa canne, ce qui avait fait ce bruit.

Quelques jours après, notre pasteur a reçu une lettre de l'évêque chrétien-allemand. L'évêque lui reprochait d'avoir fait de la propagande contre lui, son supérieur reconnu par l'État, et qu'il lui donnait un dernier avertissement ; si cela arrivait encore une fois, il serait obligé d'agir en conséquence.
Cela nous a montré que le Kohler avait fait un rapport sur notre réunion à l'évêque.
Mais notre pasteur ne se souciait pas le moins du monde de tout ça.

Dans la suite, il annonçait les nouvelles, non seulement dans les réunions bibliques, mais encore au vu et au su de tout le monde après le sermon.
Ainsi, le village entier était mis au courant et tous, même ceux qui n'étaient pas d'accord, pouvaient y réfléchir.

On ne pouvait pas non plus reprocher au pasteur d'agir en dessous. Il disait tout franchement, nommait les choses par leur nom et tout le monde était étonné de l'audace de cet homme qui ne cachait pas son opinion quand pourtant cela pouvait lui coûter cher.




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