Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

JOUR DE PAYE

Luc 10: 17 ; Jean 4: 36 ; Mat. 20: 16.

J'ai été admis à aider à la batteuse chez M. le juge. En ce temps-là je n'étais pas d'un bien grand secours. Debout au haut de la machine, à côté de l'engreneur, je ramassais les liens qu'il rejetait et les serrais en petits paquets de vingt-cinq pièces. Moitié jeu et moitié travail. Excellent apprentissage pour des enfants d'agriculteur.

Après deux jours de travail, vers le soir, la machine arrêta son vacarme. On appela pour la paye. C'était là pour moi un mot nouveau et mystérieux. Mais pas pour moi seulement, car lorsque tout le personnel, secouant la poussière et respirant à pleins poumons l'air frais, se réunit devant le pont de grange, ces hommes me parurent tous étrangement changés. Même le machiniste, qui d'ordinaire restait silencieux, prononça quelques paroles en riant, ce qui fit briller ses dents blanches dans son visage noirci.

Levant fièrement la tête, je suivis toute la troupe dans la chambre, car je savais faire partie, moi aussi, de l'équipe des hommes de la batteuse. Du vin, du pain et du fromage nous attendaient et bientôt la salle retentit de la joyeuse conversation des hommes. Ils semblaient vouloir se rattraper du long silence que la poussière et le bruit leur avaient imposé.

Le maître était assis au haut de la table, sa bourse grise, bien gonflée, ouverte devant lui. L'un après l'autre, les ouvriers furent appelés par leur nom et chacun reçut son salaire en écus et en francs bien sonnants. D'abord le machiniste, puis l'engreneur, ensuite le lieur. Es-tu d'accord ? demandait le maître à chacun à son tour, et chacun d'acquiescer. Quand la paye commença, le silence se fit aussi grand dans cette chambre que dans une église, on se serait cru à une cérémonie religieuse.

Tout à la fin, alors que la bourse était devenue bien plate, ce fut mon tour : je reçus une pièce de cinquante centimes toute neuve. Ma fierté était grande quand je rentrai en toute hâte à la maison, proclamant que j'avais eu la paye.

Ce souvenir lointain remonta à ma mémoire la semaine dernière, comme je lisais la parabole des ouvriers dans la vigne, tandis que le bruit sourd d'une batteuse retentissait dans mon voisinage et pénétrait par la fenêtre dans mon cabinet de travail. Il me semblait revoir le vieux maître en blouse bleue, les ouvriers graves et solennels empochant leur salaire et le garçonnet serrant fort entre ses doigts sales la pièce neuve, pour ne pas la perdre en rentrant à la maison.

Jour de paye ! Salaire ! Ç'avait été alors la première fois que j'éprouvai le charme de ces mots et cela profondément en mon coeur d'enfant. J'ai dès lors, et d'année en année plus clairement, constaté combien le monde au sein duquel je vivais était soumis à la puissance magique de ces mots.

La batteuse ronronne en vue d'un salaire. Mais elle n'est pas la seule. Les machines de la fabrique aux cent fenêtres de notre village font comme elle. Les roues des chars de campagnards qui passent le mardi matin devant notre maison roulent pour un salaire, l'auto du docteur qui s'arrête devant chez nous en fait autant. Quand les cent quatre-vingt-dix-neuf ouvriers de la fabrique se sont groupés devant ses portes et ont établi des postes de grève, on a dit que c'était pour une question de salaire. Et quand l'Auguste du cirque Knie faisait ses tours, nous arrachant des larmes tant il nous faisait rire, il criait avant que les jeunes filles passent avec leurs tirelires à travers les rangs des spectateurs : « Mesdames, Messieurs, l'ouvrier est digne de son salaire ». Ainsi le salaire m'apparut de plus en plus comme étant le vrai moteur du monde autour de moi.

Ce n'est que beaucoup plus tard que je me rendis compte que les paroles entendues pour la première fois au cirque Knie étaient des paroles de notre Maître, et que lui aussi parle de salaire et même fréquemment. Dans la parabole des dix talents, chacun reçoit son salaire. Il déclare, une fois, bienheureux les persécutés et les opprimés, car, dit-il, leur récompense est grande dans le ciel. Au jeune homme riche, il donne ce conseil : Vends tout ce que tu as et suis-moi, et tu auras un trésor dans les cieux. Le Maître ne parle jamais d'un renoncement, d'un sacrifice, d'un travail ou d'un service gratuit et sans salaire.

Tout l'enseignement biblique aboutit à un jour de paye, où tous les comptes seront révisés. C'est le règlement de comptes des siècles, le jugement dernier. Alors le Maître du monde bouclera le compte et payera chacun comme il le voudra,

Le fait que Jésus, comme le monde des affaires, parle de salaire et de jour de paye, a exposé les hommes pieux de tous les temps à un gros danger. Nous commençons si aisément à établir en face de Dieu le compte de nos bonnes oeuvres, un livre de comptes par doit et avoir. Nous lui exposons la valeur de notre actif auprès de lui et nous nous prévalons de chaque nouveau service que nous lui rendons. Ce qui est un sujet de grande joie pour le diable.

Le Maître nous a mis en garde d'une manière tout à fait merveilleuse contre l'obéissance que nous lui témoignerons pour en obtenir une récompense. Pierre lui demanda un jour - : « Nous avons tout quitté et nous t'avons suivi, qu'avons-nous donc à attendre ? » Jésus lui répondit : « Quiconque aura quitté maisons, ou frères ou soeurs, ou père, ou mère, ou femme ou enfants, ou champs, recevra cent fois plus et héritera la vie éternelle ».

Mais ce n'est pas toute la réponse de Jésus. Au questionneur, il raconte encore l'histoire que voici :
Un vigneron a besoin d'ouvriers pour sa vigne. Il se rend sur la place du marché et engage des travailleurs pour une journée. Celle-ci commence à six heures du matin et se termine à six heures du soir, le salaire journalier valant environ un franc de notre argent actuel. À neuf heures, il loue d'autres ouvriers encore, ainsi qu'à midi, à trois heures et une dernière fois à cinq heures, soit une heure avant la fin de la journée.
À six heures c'est la paye. Arrêtons ici le récit et voyons comment les ouvriers devront être payés. Pour une journée entière un franc, pour trois quarts de journée septante-cinq centimes, pour une demi-journée cinquante centimes, pour un quart de journée vingt-cinq centimes et on arrondira à dix centimes pour une heure de travail. Si le maître de la vigne avait compté et payé selon cette norme, l'affaire était régulière et personne n'aurait réclamé. À chaque ouvrier son salaire.

Mais Jésus poursuit son récit tout autrement. Ceux qui n'ont travaillé qu'une heure sont appelés les premiers, ce qui remplit déjà les autres de stupéfaction. Qu'est-ce que cela veut dire ? Leur stupéfaction s'accroît en voyant que pour cette seule et unique heure ces ouvriers reçoivent un franc, le salaire de toute une journée. Et les voilà qui se livrent à un rapide calcul ! Comment ? Est-ce possible ? Mais non ! Si une heure est payée un franc, cela va faire trois francs pour trois heures, six pour six heures et douze pour douze heures ! Quelle splendide idée que celle de ce maître !

Mais le maître remet aussi un franc à celui qui a travaillé trois heures, une demi-journée, trois quarts de journée, la journée entière. Ces derniers seuls ont reçu leur salaire normal, tous les autres ont reçu plus qu'il ne leur était dû. Et pas un cri de joie, pas un mot de reconnaissance. Au contraire, ces hommes murmurent, la jalousie est tombée sur eux comme la fièvre jaune et ils ne cachent pas au maître leur mécontentement.

Celui-ci prend à l'écart celui qui récrimine le plus. « Mon ami, lui dit-il, je ne te fais aucun tort. N'as-tu pas convenu avec moi que tu recevrais un franc ? Prends ce qui est à toi et va-t'en. Vois-tu d'un oeil jaloux que je sois bon ? Ainsi les derniers seront les premiers et les premiers seront les derniers. »

Ce jour de paye, qui nous est décrit ici, est unique en son genre et étranger à notre manière de voir. Si le paysan à la blouse bleue que j'ai évoqué tout à l'heure, m'avait payé le même salaire qu'au machiniste, à l'engreneur et au lieur, quel beau tapage se serait élevé dans la chambre ! On l'aurait peut-être conduit à l'asile d'aliénés pour avoir perdu l'esprit. Et pourtant il n'aurait fait que ce qu'a fait le Maître dans la parabole des ouvriers dans la vigne.

Les lois du royaume de Dieu sont absolument différentes des nôtres, nous parlons de salaire dans un tout autre esprit que Jésus. Il ne calcule pas d'après notre table de multiplication et il a d'autres tarifs que nous. Nous pouvons refaire ses calculs, nous ne pourrons jamais lui prouver qu'il nous fait tort. Mais nous ne pouvons pas lui apprendre à calculer et nous nous exposerions à des désillusions en tentant de compter et de spéculer avec lui. Il accorde son salaire comme il l'entend et comme il le veut, et non pas comme nous l'entendons.

Ce qui nous frappe tout d'abord dans cette parabole c'est l'infinie bonté du Seigneur. Une bonté qui dépasse de nouveau nos pensées. Les uns reçoivent ce qu'ils ont gagné. Personne ne reçoit trop peu, la plupart reçoivent bien plus qu'ils ne méritent, trois fois, six fois et même neuf fois plus. Dieu fait descendre sa bénédiction même sur celui qui, d'après notre pauvre jugement, ne le mérite pas. Il est le Dieu qui fait luire son soleil sur les justes et sur les injustes et qui envoie la pluie sur les bons et sur les méchants. Voilà la bonté incompréhensible de Dieu.

L'automne a disparu. Vous avez ensemencé le dernier champ de seigle et mis en cave les dernières carottes. L'automne est le jour de paye du paysan. N'avons-nous pas, d'automne en automne, l'impression que le Créateur bénit la terre plus que nous ne le méritons et nous a accordé trois fois, six fois, neuf fois plus que nous ne serions en droit d'attendre ?

Jour de paye de l'agriculteur. Ne jalouse pas ton frère parce que ses greniers et ses caves sont aussi remplis. Il n'y a que la bonté de Dieu qui compte. La jalousie est le plus coupable de tous les péchés. Elle fait le poing à Dieu parce que sa bonté dépasse toute intelligence.

Automne, jour de paye. Que Dieu garde ton oeil du regard jaloux.




LE JOURNAL PRÉFÉRÉ

Jér. 22: 29 ; Hébr. 4: 12.

Dans une Bible de famille du XVIIe siècle, on lit, à l'intérieur de la couverture, cette notice : Cette Bible m'appartient, à moi Benoît Schwab, à Siselen, et elle m'est chère, sinon je ne l'aurais pas emportée la première hors de la maison, le jour du grand incendie.

Voilà un paysan du Seeland, un paysan du temps jadis, qui emporte hors de sa maison en flammes, comme le premier, le plus précieux de tous ses trésors, la Bible. Avant l'arche aux séchons, avant le bas de laine, avant de détacher la vache et la chèvre à l'écurie, il met sa Bible en sécurité.

Aujourd'hui, un homme aux cheveux plus blancs que la neige, âgé de quatre-vingt-un ans, s'est plaint à moi que sa vue a bien baissé ces derniers temps. Il y a un an, il pouvait lire encore sans lunettes, aujourd'hui il n'y a plus de verres assez puissants pour lui. La vie est ennuyeuse, surtout quand on est vieux et qu'on ne peut plus lire le journal. Cet homme a un pied dans la tombe et il se plaint surtout de ne plus pouvoir lire le journal.

Le type de l'homme du XXe siècle n'est pas le paysan qui lors de l'incendie a emporté tout d'abord la Bible hors de la maison, mais le vieillard qui se plaint de ne plus pouvoir lire le journal. Je n'accuse pas, je déclare seulement que le journal préféré a pris la place de la Bible.

Sans doute, il existe aujourd'hui quantité de journaux religieux, de calendriers, qui sont encore lus où on ne lit plus la Bible. Un rayon dans la nuit. Mais gardons-nous de croire qu'ainsi tout soit en ordre. Une feuille religieuse, même excellente, n'est pas la Bible. Partout où la lecture des feuilles religieuses n'accompagne pas celle de la Bible, mais la remplace, on s'accoutume, pour employer une image, à des fruits stérilisés, qui ont perdu leurs vitamines, leur jus et leur force, et on ne connaît plus du tout le goût bien différent du fruit fraîchement cueilli sur l'arbre. Celui qui pendant toute une vie se nourrit exclusivement de journaux religieux ne doit pas s'étonner s'il perd finalement tout à fait le goût de la Bible. Et l'on comprend fort bien qu'un homme très sérieux se plaigne, et il s'en excuse, de devoir avouer nettement qu'il n'éprouve aucun plaisir à la lecture de la Bible. C'est pour lui un devoir sacré, bien plus un devoir pénible, mais pas un besoin de son coeur. Ces versets et les pensées qu'ils expriment lui sont trop étrangers; avec la meilleure volonté du monde il n'y comprend rien.

Que ces voix soient devenues étrangères à notre oreille d'hommes modernes est chose toute naturelle. Ce serait un miracle qu'il en fût autrement. Il n'en va pas de même avec le journal. Nous le lisons volontiers et sans peine, c'est une lecture qui nous plaît et nous intéresse. Elle ne nous coûte aucun effort, nous attendons avec impatience que la journée soit finie pour que nous puissions prendre notre journal et nous plonger dans sa lecture. Qu'est-ce donc en définitive qui nous rend la Bible si étrangère et qui, d'autre part, nous attire au journal ? Peut-être trouverons-nous une explication en essayant une bonne fois de nous rendre compte de ce qu'est le journal et de ce qu'est la Bible.

Le journal est une affaire. Les abonnés sont les clients de cette affaire, les acheteurs. L'éditeur du journal est un homme d'affaires et un homme d'affaires à la hauteur sait que les clients ont toujours raison. C'est-à-dire qu'on ne contrarie pas un client. C'est pourquoi il va de soi que le journal dise ce qui plaît à la majorité de ses lecteurs, ce qui leur donne raison, ce qui leur est agréable, ce qui les soutient et les fortifie dans leurs pensées, leurs sentiments et leurs volontés. Malheur au rédacteur qui dit ce que ses lecteurs n'aiment pas à entendre et dont le chiffre d'abonnés diminue ! Malheur au rédacteur en opposition avec sa clientèle et dont les lecteurs saisissent leur crayon bleu et écrivent refusé ! Il perdra rapidement sa place quoique ses intentions aient toujours été droites. Le parfait rédacteur doit ressembler à un râteau qui retient et efface, avant de le servir aux lecteurs, tout ce qui pourrait les irriter. Et c'est là une des raisons qui expliquent que le journal, le journal préféré, nous en impose autant. Les ciseaux du rédacteur l'ont taillé à notre mesure, si bien qu'il nous va comme un habit que nous mettons avec plaisir.

Il y a encore une autre raison. Le journal est la scène de ce monde, la revue qui nous fait connaître ce qui s'y passe. Il parle de l'homme et de ses actions. L'homme est le centre de toute cette littérature journalistique. Notre monde est la planète autour de laquelle gravite tout journal. C'est là le vrai secret de son succès actuel. Une humanité orientée vers ce monde ne peut qu'aimer et désirer le journal. Je n'accuse pas, je constate seulement. À toi de réfléchir !

Il en va tout autrement de la Bible. Elle parle clair et net, elle ne ferme pas les yeux pour ne pas voir. Elle n'a pas égard à l'honorable confrérie des lecteurs et à celle des clients payants. Elle va jusqu'à souffrir qu'une génération la refuse.
Elle parle et rend témoignage de Dieu et de ses actions. Elle le place sur le trône et au centre. Elle ne fait pas cas de l'homme tel qu'il est. Elle est un feu qui brûle, un marteau qui frappe, une épée qui transperce.

Il est vrai qu'elle est aussi lumière, consolation, force, pain et baume. Mais seulement pour celui qui a passé par le feu, qui a été sous le marteau et a ouvert son coeur à l'épée sainte. Elle n'est un baume que pour celui qui saigne, du pain que pour l'affamé, force et consolation que pour l'affligé qui confesse : « Il n'y a pas de force en nous, nous ne savons ce que nous devons faire, nos yeux se tournent vers toi ».

Mais nous voulons rester tels que nous sommes. Nous ne voulons pas changer. Nous demandons de n'être pas frappés, brûlés ou transpercés. Nous ne voulons être troublés ni dans nos pensées ni dans nos actions. C'est pour cela que la Bible nous offusque, que notre génération la refuse et qu'elle est recouverte de poussière.

Ne soyons pas injustes. Il existe des journaux où l'on perçoit quelque son émanant de la Bible. Mais ils sont peu nombreux et ont de la peine à vivre aujourd'hui. Ils ont peu de lecteurs et d'acheteurs, ils doivent compter d'année en année, tellement que le souffle leur manque. je n'accuse pas, je constate seulement. À toi de réfléchir !

C'est ainsi que nous vivons, nous, hommes du XXe siècle, notre journal préféré à la main, nous vivons, nous vieillissons et nous mourons. Ici et là, nous en voyons qui laissent glisser le journal sur leurs genoux et qui regardent au loin, pleins d'inquiétude. Et voici que leur âme éprouve comme une crainte et que dans leurs yeux angoissés nous lisons une question : « Notre journal nous aurait-il peut-être mal conseillés ? Y a-t-il donc quelque chose qui cloche chez nous ? Quel mystérieux roulement de tonnerre tout là-bas ! Allons-nous finalement au-devant d'un Niagara, notre journal préféré à la main ? »

Les Réformateurs avaient-ils donc raison en déclarant, il y a quatre siècles : « Il faut laisser la Parole debout » ? La Parole qui donne à Dieu seul la gloire et déclare heureux qui se soumet à elle dans la foi ? je n'accuse pas. Réfléchissez vous-mêmes ! Quel immense espoir deviendrait possible




LYDIE

Es. 40: 25-31.

C'est avec un soupir de soulagement que d'année en année la paysanne voit tomber du ciel la première neige. Dieu soit béni ! s'écrie-t-elle, une fois de plus les gros travaux sont achevés ! Pendant l'été, elle n'a appartenu qu'à moitié à son ménage. À cette époque, la paysanne, et surtout la femme d'un petit paysan, est une servante qui aide aux travaux du dehors, et qui est épouse et mère à la maison. Cette femme, je la tiens pour la plus à plaindre de toutes les créatures de Dieu en ce bas monde.

Dernièrement l'une d'elles, âgée déjà, me racontait pourquoi sa fille aînée s'appelait Lydie. Elle donnait une signification toute spéciale à ce nom. Alors qu'elle portait cette enfant dans son sein, elle avait dû apprendre ce que c'était que de souffrir. Chaque matin elle avait des nausées et devait, tout de même, poursuivre double besogne, au champ et à la maison. jusqu'au huitième mois, elle avait dû porter la nourriture aux porcs et s'il n'y avait pas eu par hasard alors un temps d'arrêt dans l'engraissement et l'élevage de ces animaux, elle aurait été obligée de continuer cette besogne jusqu'au tout dernier jour.

Une fois, en une heure de détresse, parce qu'elle souffrait tellement, elle décida que si l'enfant qu'elle attendait était une fille, elle s'appellerait Lydie (1).
Cette Lydie est aujourd'hui mariée, comme sa mère l'a été jadis, à un petit paysan qui habite au bas du village. Et elle fait richement honneur à son nom, au sens que sa mère lui a donné autrefois.

Nous sommes un samedi soir, tard. La mère de Lydie, toute grisonnante et voûtée, descend le chemin du village ; chacun sait où elle se rend. Elle va ainsi chaque jour chez Lydie. C'est demain dimanche et elle se réjouit de ce que sa « fille de douleur » viendra prendre le café chez elle. Mais la journée d'aujourd'hui a été particulièrement pénible. Il n'y a pas encore de lumière dans la maison de son gendre, mais oui bien à la grange. Pauvre Lydie ! Du haut du tas de foin, elle répond d'une voix fatiguée à sa mère : « Il faut encore décharger ce char, un autre encore et un troisième, mais plus petit, grâce à Dieu ! »

La mère entre dans la maison et allume une lampe. Les enfants dorment, mais la vaisselle du déjeuner, du dîner et du souper est là sur la table de la cuisine, attendant d'être lavée. Et voici les bouteilles et les verres des quatre heures, qui attendent aussi la venue de Lydie. Ah ah ! Une flamme compréhensive éclaire le visage de la vieille mère : elle connaît cela, elle l'a aussi vécu un jour. La voici qui s'attaque à la vaisselle et de vieux souvenirs remontent à sa mémoire.

Enfin, vers les dix heures, Lydie arrive, ses cheveux baignés de sueur, couverte de foin et de poussière. Elle se laisse tomber, fatiguée, sur une chaise. Mais elle se relève aussitôt : Non, elle ne doit pas, elle ne doit pas céder à la fatigue. Son Jean veut aller demain au tir de section. Il est bon, son Jean, et n'a pas une vie de seigneur. On peut bien lui accorder un plaisir après une pareille semaine. Mais il n'a pas de chemise repassée, elle y a pensé toute la semaine, sans trouver un moment favorable. Et nous voici au samedi, il faut que cela se fasse ! Si seulement le charbon du fer à repasser brûlait déjà !
Voilà ce qu'est la femme d'un petit paysan, servante et domestique-homme, épouse et mère, laveuse et repasseuse, elle est tout. Si Lydie voulait dire la Douloureuse, au sens que sa mère avait imaginé, toutes ces femmes devraient s'appeler Lydie.

L'été amène ainsi un travail après l'autre. Des vacances ? Il n'en est pas au royaume de Lydie. Combien souvent tard, le samedi soir, j'entends le bruit des portes qui se ferment ! Chacun de ces heurts résonne à mes oreilles comme un coup de verges sur le dos du Sauveur. Et je comprends que les bancs de l'église ne soient pas occupés le dimanche matin. Ce serait un miracle qu'il en fût autrement si tu songes à ce qu'est le samedi soir pour Lydie.

L'époque la plus dure pour nos femmes de petits paysans me paraît toujours être l'automne. Il introduit tant de terre dans les maisons ! De la terre aux roues des chars, aux souliers, aux habits. Et n'est-elle pas la seule laveuse ?

Les récoltes sont entassées sous l'avant-toit, il faut les rentrer pour pouvoir les vendre. jusqu'à ce que le gel et les tourmentes de neige y aient mis un holà définitif, je vois Lydie, tablier retroussé, dehors sous les pommiers, ou les mains bleuies de froid dans son champ de carottes ou de raves.

Et quand Lydie est parvenue à un certain âge, voilà les rhumatismes, comme chez sa mère et sa grand-mère. Pendant une ou deux dizaines d'années, chaque pas lui causera une douleur cruelle. Cette femme de petit paysan, je crois qu'aucune autre créature de Dieu ne te témoignera autant de reconnaissance pour une simple parole de sympathie et d'humanité que tu lui adresseras.

Mais voici venir l'hiver. Dieu en soit remercié et loué ! Maintenant Lydie peut s'en donner à coeur joie d'être mère. Une montagne de petits bas et de chemises, de chaussettes, de tabliers et de petits vêtements, s'amoncelle devant elle sur la table de famille. C'est aussi une moisson d'été, et maintenant Lydie est couturière. Les trous et les déchirures sont innombrables et de taille. La peine eût été moins grande si on y avait porté remède plus tôt. C'est ce qu'on leur a enseigné jadis à l'école d'ouvrages. Mais elle ne savait pas alors, et il en est en général bien peu qui savent qu'il y a des femmes de petits paysans qui n'ont pas de temps et qui devraient en avoir pour tout.

Voici une culotte de garçonnet déchirée au genou et derrière, à vous désespérer. Mais les ciseaux y pénètrent joyeusement, c'est maintenant l'hiver, la neige tourbillonne si doucement devant la fenêtre et Lydie a du temps. Du temps pour raccommoder, pour aller à l'église et vivre en créature humaine.

Une petite feuille qui lui est tombée récemment sous les yeux lui a appris qu'elle n'avait rien à faire, que le paysan passait l'hiver sur son poêle et avait bon temps ! Oui, Lydie a bon temps maintenant. Et son bon temps c'est qu'elle ose maintenant travailler comme une femme le peut sans risquer sa santé.

Comme elle est joyeuse et reconnaissante envers la destinée qui a créé l'hiver ! Les flocons tombent et recouvrent jardins et plantations, qui peuvent se reposer. En regardant par sa fenêtre les plates-bandes sous leur manteau blanc, elle éprouve la sensation de l'enfant dont la mère recouvre, le soir, avec soin et douceur le petit lit. Ses mains courent infatigables, mais elle peut rester assise et se reposer, se reposer, se reposer.

Mais voici le retour du printemps - il se passe alors quelque chose d'étrange dans le coeur de Lydie. À peine le merle s'est-il remis à chanter sur le noyer du voisin que tu ne la reconnais presque plus. Elle court de-ci de-là, les joues rouges, fredonnant un air comme une fiancée ; elle ne changerait pas son sort contre celui de la plus riche de ses soeurs. À peine le soleil a-t-il libéré de leur manteau de neige les premières plates-bandes de son jardin, qu'elle sort en hâte munie de sa bêche et de son râteau. Elle s'empresse comme si elle avait des ailes aux pieds et prépare des nids pour ses pois. Et elle est si joyeuse et si contente que nulle part au monde vous ne rencontrerez créature humaine plus heureuse qu'elle. On se dit en la voyant : Il faut qu'il y ait quand même quelque chose d'unique dans ce métier de paysan, quelque chose de mystérieux et d'infiniment héroïque.

Quelque fatiguée, écrasée de travail que Lydie ait été en automne, quand elle s'est assise à sa table de raccommodages, les premiers beaux jours de printemps l'attirent irrésistiblement au dehors. C'est là le miracle du miséricordieux Créateur, qui a appris au merle à supporter le froid en hiver et à chanter au printemps.




LE SEL DE LA GALILÉE

Mat. 5: 13 ; 13: 33 ; Marc 16: 15.

Le sel n'est pas article de luxe, mais bien de première nécessité. Que ce soit sous forme de beau sel de table blanc, ou sous d'autres aspects que nous autres laïques ne connaissons pas, nous avons besoin de sel comme d'air, de lumière et d'eau.

Dès les plus anciens temps, c'est l'État qui fournit le sel au pays. Il en est fait mention dans d'anciens traités de commerce. Selon une convention entre la France et la Suisse, la France était autorisée à lever des mercenaires en Suisse et assurait en retour des livraisons régulières de sel à notre pays.

Le sel peut même provoquer des désaccords dans la vie des peuples. On n'a pas oublié le dernier conflit, dû au sel, qui avait dressé l'Inde contre ses maîtres anglais. Du temps des baillis, il est arrivé que l'autorité supérieure qui fixait le prix du sel, en abusait pour opprimer ses sujets. Le coup était particulièrement sensible aux paysans qui, surtout en hiver, avaient besoin de sel à la cuisine aussi bien qu'à l'étable. On sait aussi combien, pendant les guerres des Huguenots, la privation du sel a parfois grandement gêné nos frères en la foi de France.

La salière, le plus petit des ustensiles sur la table du dîner ! Elle disparaît complètement derrière la grosse soupière et est invisible sous le rebord du plat de légumes. Nous constatons pourtant combien le sel peut influencer d'une manière sensible l'histoire des peuples.

On ne parle pas du sel dans la vie de chaque jour, il ne figure pas sur les cartes de menus. Il se trouve simplement caché et anonyme en chaque mets. Et malheur quand il fait défaut ! Il a déjà coûté sa place à plus d'un cuisinier.
Là-haut, sur les collines galiléennes, le Maître dit à ses disciples : « Vous êtes le sel de la terre ».

Seulement le sel ! Sur la table du monde, vous n'êtes pas un rôti de veau, pas même du potage, vous n'êtes que du sel. Dans le ménage des nations, le Maître n'aurait vraiment pas pu attribuer aux siens une place plus petite. S'il leur avait au moins dit : Vous êtes le sucre qui adoucit l'amertume de la vie ! quelques gourmands auraient alors fait claquer leur langue. Mais non ! Vous êtes le sel, qui est là, obscur, anonyme, dont on ne parle pas.

« Vous êtes le sel de la terre. » Pas davantage, mais pas moins non plus ! Petite troupe cachée dans les montagnes de la Galilée, pêcheurs et péagers, vous êtes les administrateurs du sel sur la terre. C'est vous qui possédez le sel de la terre. Il est vrai qu'il ne vous appartient pas et que vous n'en êtes que les dépositaires. Un autre vous l'avez fourni, mais maintenant vous le possédez et vous en êtes responsables. Vous portez en vous la vie et la mort des nations. Non seulement parce que l'homme a besoin d'une certaine quantité de sel, mais encore pour un tout autre motif : Où le sel ne parvient pas, le monde se décompose avec toute sa magnificence.

Novembre, décembre, bientôt le moment sera là où mes voisins feront boucherie. Ils savent pourquoi ils salent leur porc avant de le suspendre dans la cheminée. Ils savent qu'il faut peu de chose pour qu'au printemps le jambon sente. Le sel empêche la putréfaction, sans le sel toute chair devient la proie des vers.

« Vous êtes le sel de la terre. » C'est la mission infiniment importante des disciples. Ils doivent répandre le sel dans la chair du monde, empêcher la terre de devenir la proie des vers et de la perdition.
Et aujourd'hui le sel fait défaut, celui de la Galilée, dont le Maître parle sur la montagne. Il y a assez de viande, de belle viande. Mais le sel manque et le ver s'approche. Il s'attaque à tout, à la jeunesse, à la vieillesse aussi. Il ronge les grands et les petits parce que le sel fait défaut...

Hélas ! voilà pourquoi les relations entre maris et femmes, jeunes et vieux, maîtres et serviteurs, citoyens et autorités, nos relations sociales sont si tendues. Le sel de la Galilée fait défaut, qui tue le ver et empêche la putréfaction.

Trouverait-on un boucher ou un paysan qui oublierait de saler la chair de la bête qu'il a abattue ? Qui observerait toutes les règles de l'abattage sauf celle-ci, la plus importante de toutes ? Et qui, un jour, au lieu du parfum aimé de la choucroute et des côtelettes, respirerait l'odeur de la viande gâtée ? Et qui se rendrait compte alors avec effroi de son oubli : Grand Dieu ! nous avons soigné la viande et oublié de la saler !
Non ! Dans tout le pays on ne trouverait ni paysan ni boucher aussi insensé. Mais je connais tout un peuple qui l'est. Tu le connais aussi.

Depuis des dizaines d'années nous nous préoccupons de nous organiser selon les prescriptions de la soi-disant hygiène, selon la science des spécialistes des dents, des pieds, des mains, de la peau, des cheveux et du corps. Nos oreilles sont remplies de l'évangile des apôtres du vêtement, du logement et de l'alimentation. Les prophètes du corps ont raison tant que la chrétienté, par une fausse spiritualité, dénature le véritable évangile du Sauveur du corps et de l'âme. Ils ont raison pour autant qu'ils nous font souvenir de la sainteté du corps.

Et pourtant... longtemps nous n'avons rien voulu voir. Mais lentement nous devons finir par nous convaincre que, en dépit de tous ces soins des dents, des pieds, des mains, des cheveux, de la peau et du corps, une mauvaise odeur se répand dans la demeure confortable, quelque part derrière la tapisserie fleurie. Il ne sera bientôt plus besoin d'un nez particulièrement délicat pour s'en apercevoir. Un jour la lumière éclatera sur la plus grande folie qu'un peuple aura commise à son détriment. Nous avons pris soin de la chair et oublié le sel, le sel de la terre ! La corruption a envahi la maison. Son odeur pénètre partout et fait de la vie, de la vie moderne aussi, un indescriptible tourment.

O toi, chair du XXe siècle, à la belle peau brunie au soleil ! Aucun fard, aucune crème ne parviendra à tuer le ver qui est caché en toi. Et contre la corruption plus profonde encore, il n'est qu'un seul remède : le sel de la terre. Le sel de la Galilée, qui empêche la corruption et fait mourir le ver.




LE PÈRE VA VOTER... ET LA MÈRE ?

Eph. 5: 22-33 ; Prov. 31:10-31.

Comme citoyens actifs, nous sommes souvent appelés à prendre part à des votations. Nous élisons nous-mêmes nos autorités communales et déléguons nos représentants aux conseils. Ce qui montre que, Dieu soit béni, nous habitons encore un pays qui n'est pas soumis comme ailleurs à un régime d'autorité, où il faut obéir en esclaves. Et cette liberté politique qui est la nôtre, constitue un privilège qui, comme tous les biens de ce monde, engage notre responsabilité. La liberté de choix peut être funeste aux hommes d'une maturité insuffisante. L'enfant irréfléchi ne cueille pas les fraises, trop modestes ; il tend ses menottes vers la belladone tentatrice et brillante, mais qui donne la mort.

Nous ne sommes pas électeurs seulement à l'occasion de votations politiques, le bulletin de vote à la main, c'est-à-dire aux jours fixés officiellement, où nous allons aux urnes le chapeau bien brossé, les souliers astiqués et le cigare à la bouche. Nous le sommes, en un sens plus grave, chaque jour et à chaque heure. Il y a des votations officielles et d'autres que nous pourrions appeler domestiques. Si les hommes, chez nous du moins, prennent part aux premières, c'est aux femmes qu'il appartient de présider aux autres.

Chaque jour, la femme doit prendre des décisions d'importance vitale. Jour après jour, elle décide des repas de toute une famille. Celle-ci choisira un menu attrayant, qui flatte le palais. Cette autre, dont le mari souffre depuis trente ans d'une maladie d'estomac, s'efforcera de lui préparer un plat qui lui soit agréable. Une troisième se préoccupe moins de l'apparence ; la valeur du contenu lui importe plus que sa saveur ; elle ne choisit pas de l'extra-fin, mais ses enfants ont de belles joues rouges.

Le garçon a besoin d'un pantalon. Le père propose une solide milaine, mais la mère n'est pas d'accord : Rien de ça ! je ne veux pas de milaine, je ne veux pas avoir honte quand j'irai avec lui à Berne ! Et on choisit un joli drap, selon la volonté de la maîtresse de maison. Elle choisit les rubans de cheveux de ses filles et leur genre de coiffure. Elle choisit la prière des repas et celle du soir pour ses petiots. Elle choisit, elle choisit pour ses enfants et chaque fois elle prépare ainsi un tout petit peu le goût et le futur caractère de ceux qui grandissent à ses côtés. La manière dont la mère choisit décidera des sentiments d'après lesquels le fils votera, quand il aura vingt ans. C'est pourquoi nous faisons appel aux mères : Élevez-nous des électeurs ! Choisissez à la maison de manière qu'un jour vos garçons sachent choisir !

Il y a sans doute des parents qui ne choisissent pas du tout. On rencontre des pères qui sont fiers de leur droit de vote officiel, qui ont forte voix et qui, à la maison, devant leurs enfants, emploient des expressions que les oreilles de ceux-ci ne devraient pas entendre. Des parents laissent leurs enfants choisir depuis leur plus petite enfance, de sorte qu'on ne sait presque plus qui ordonne et qui obéit. Ce n'est nulle part plus évident qu'à table. Quand les enfants décident : je veux de ceci, mais pas de cela ! on sait alors qui est le maître.

Dans la règle, les enfants ne commencent à choisir en pleine indépendance qu'après avoir atteint une certaine maturité. Il s'agira d'abord du choix de leur vocation, les parents conseillent et le jeune homme choisit. Et le garçon pour lequel, il y a des années, la mère a préféré le drap fin à la milaine, méprisera aujourd'hui le métier paternel et souvent son père lui-même, Il ne sera jamais un joyeux paysan il tendra ses mains vers quelque chose de « supérieur », à ce qu'il croit du moins. Il en sera de même quand le garçon devra prendre une autre décision encore, la plus importante de toutes, je veux dire quand il « s'engagera pour l'année éternelle », selon votre jolie expression pour désigner le choix de la compagne du voyage de la vie. Là aussi les parents n'ont plus aujourd'hui que voix consultative. Tant mieux pour eux si assez tôt ils ont appris à leurs enfants à bien choisir.

Cet apprentissage doit se faire à la maison. Une mère qui élève pour le pays un fils qui sait choisir, fait oeuvre plus utile que celle, toujours hésitante, à laquelle ses garçons ne ressemblent que trop. Et quand il s'agit d'une demi-douzaine de garçons qui savent choisir, leur mère a accompli une oeuvre qui dépasse d'une demi-douzaine de fois celle d'un quelconque rond-de-cuir officiel.

Nous n'ignorons pas que de nombreuses femmes ne possèdent pas de foyer et qu'elles n'ont pas d'électeurs à élever. La justice exige que le droit de vote politique soit accordé à ces soeurs prétéritées. Mais elles peuvent bien voir que cela ne suffirait pas. Les vraies décisions ne proviennent pas des urnes. Le bulletin de vote n'est pas l'idéal le plus grand, il n'est qu'une infime et fugitive partie de l'ensemble des réalités de la vie. Les femmes obtiendront peu de chose si le droit de vote en matière politique leur est accordé.


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En dialecte lyde signifie souffrir. (Trad.)
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