Quand on songe aux âmes à sauver, c'est pour le coup que tout le reste parait petit. Avoir le droit de travailler tant qu'on veut, tant qu'on peut au salut de ses frères ! Je ne connais rien de plus beau. Henri Rusillon.
Une flamme intérieure dévorait
cette âme ardente, et le salut des âmes
était la pensée dominante de Ch.
Moreillon. Il ne voulait qu'une chose, sauver les
perdus. Aucun effort, aucun sacrifice ne pouvait
l'arrêter. Dans ses visites ou dans ses
lettres, jamais il ne perdait de vue le but
à atteindre ; il osait blesser les
consciences, dévoiler le
péché, mettre les êtres au pied
du mur, mais avec quel amour, quelle
humilité, quelle persuasion ! Il savait
s'associer aux peines et aux joies de tous et
partager leurs soucis.
Il écrit :
- Il n'est que trop vrai que beaucoup de
coeurs sont aigris ou brisés, malades et
perdus. Beaucoup souffrent de ne pas se sentir
aimés. Il en est à qui personne n'a
jamais témoigné d'affection, ni
parlé de l'amour de Dieu comme de l'amour
d'un père. Nous devons penser aux
souffrances des autres, même s'ils sont
ingrats ou insensibles à notre amour.
- Jusqu'où va votre amour, votre
oubli de soi pour le prochain ? Les gens que
l'on n'aime pas, les aimez-vous ? et si vous
les aimez, jusqu'où va votre
amour ?
Si ce sont des pauvres spirituellement,
que leur donnez-vous ? Si ce sont des riches
matériellement, que leur donnez-vous ?
On peut donner son argent : ce
n'est rien.
On peut donner un peu de son
temps : c'est déjà
mieux.
On peut donner un peu de ses conseils et
de ses prières : ce n'est pas
tout.
On peut donner son coeur : c'est
beaucoup. L'idéal c'est de donner tout son
coeur, toute sa vie et de tout son coeur, à
la condition de demeurer en Christ qui seul savait
aimer de la bonne manière.
Notre amour ne vaut que ce qu'il nous
coûte. Aimer ceux qui ne nous aiment pas,
ceux qui ne veulent ou ne peuvent rien nous rendre,
cet amour-là seul vaut quelque
chose.
- Oh ! les âmes ! Qui
les voit, qui les comprend, qui les aime, qui se
donne pour elles ? Notre Seigneur seul a
aimé les âmes et son amour l'a
amené, pour leur donner la vie, à
donner la sienne.
- Il faut beaucoup prier, afin que Dieu
nous rende capable d'aimer de l'amour dont Il nous
aime.
- Combien d'âmes avons-nous
conduites au pied de la croix ? Y a-t-il eu,
une seule fois, de la joie dans le ciel pour un
seul pécheur amené à la
repentance à cause de notre amour pour lui
en Christ ?
- Que Dieu nous donne d'être les
agents de la rédemption de beaucoup
d'âmes, par la croix et la puissance de
Christ.
- Puisez dans le Père tout ce
qu'il faut, et donnez-le ensuite à ceux qui sont
sur votre
chemin, sans distinction. Autrefois vous alliez
chez vos parents ou vos amis pour jouir d'eux et
des plaisirs qu'ils vous offraient ;
maintenant vous devez aller à eux non plus
pour jouir, mais pour leur apporter ce que le
Seigneur vous dira de sa part. Faites toutes choses
avec amour et avec une joie parfaite. Je sais qu'il
est difficile, hors de Christ, d'être en
même temps sanctifiant et joyeux, mais si
vous demeurez en Christ vous pourrez trouver en Lui
une joie sanctifiée et la répandre
autour de vous. Un grand sérieux dans le
fond peut parfaitement s'associer à une joie
pure et sainte.
- Il faut sauver tous ceux que l'on peut
sauver ; il ne faut pas s'inquiéter
s'ils sont riches matériellement. il n'y a
plus pour vous qu'une seule richesse, celle de
l'Esprit ; il n'y a qu'une seule
pauvreté, celle de l'âme où
Christ n'est pas le pain de vie, et il se trouve
que beaucoup de riches matériellement sont
pauvres spirituellement. Donnez-leur votre
affection, celle qui vient de Christ. Je sais qu'il
faut du courage pour parler et pour vivre autrement
avec ceux qu'on a toujours vus, mais quand il
s'agit de vie ou de mort, il ne faut pas
hésiter.
Voyez le Seigneur : Il a
accepté de dîner chez Simon le
pharisien ; mais Il n'y perd pas son temps, il
y trouve l'occasion de donner des leçons
capitales à ceux qui, par leur rang
extérieur ou leur fortune, se croient les
grands de la terre. Or, vous savez que la vraie
grandeur est ailleurs : elle n'est que dans le
dépouillement de soi-même. Que sert-il
de quitter le monde si l'on ne renonce pas à
soi-même ?
- Soulager la misère
matérielle, c'est soulager l'effet d'un
grand mal, mais ce n'est pas en supprimer la cause.
Et la cause de la misère matérielle
c'est la misère spirituelle, l'absence de
l'Esprit de Dieu dans les âmes et dans les
familles. Il faut combattre l'égoïsme de chacun,
des parents et des enfants. Il faut pour cela les
amener tous à Jésus-Christ.
- Pourquoi Dieu permet-il une telle
inégalité entre les hommes ? Ce
qui frappe, ce sont les écarts qu'il y a
entre les deux extrêmes. Mais cette
inégalité n'est réellement
qu'extérieure, et devant Dieu nous sommes
égaux. Car Dieu ne fait point de
différence entre les hommes ; tous sont
égaux devant ses promesses et ses
bénédictions ; tous sont libres
de prier, tous peuvent faire l'expérience
que quiconque demande reçoit.
Aux yeux de Dieu les vraies richesses
sont celles de l'âme, ce sont les
grâces divines, l'invitation de demeurer en
Christ, et de posséder la vie
éternelle.
L'égalité des hommes entre
eux est établie aussi par le fait du
jugement dernier où nous serons jugés
selon cette loi : « Il sera beaucoup
redemandé à qui il a
été beaucoup
donné ».
- Le monde pense rendre la vie belle par
l'abondance de la richesse, de la gloire, de la
santé ou de l'indépendance, tandis
que la beauté de la vie chrétienne se
trouve dans son unité, son harmonie, sa
pureté et l'excellence du sacrifice de
soi-même. Ce sacrifice consiste d'une part
dans le renoncement intérieur complet
à ce qui est grandeur extérieure,
telle que le monde la comprend, et qui n'est que
dans le nom, la fortune, le rang. Ce n'est pas
qu'il faille changer de nom, de milieu social ou
jeter sa fortune, mais il faut savoir être,
dans son esprit, pauvre de toutes ces choses. Le
seul vrai titre de noblesse, c'est de pouvoir
être appelé, non un enfant de noble,
de prince ou de roi, mais un enfant de Dieu, car
Dieu est le Roi des rois et en même temps le
Père de tous ceux qui font sa
volonté.
- Or, ceux qui méritent
d'être appelés enfants de Dieu, ce sont ceux qui
procurent la
paix,
la paix entre les hommes, et entre les hommes et
Dieu. Il n'y a de vraie grandeur que celle dont
Christ nous a donné l'exemple en s'abaissant
jusqu'à nous. « Le plus petit
parmi nous c'est celui-là qui est grand
(Luc
9. 48). »
Ceux qui ont été au
bénéfice des ferventes prières
de leur pasteur, de sa vie d'amour et de foi,
rendent aujourd'hui grâce à Dieu en se
souvenant de celui qui les a conduits au Sauveur et
leur a annoncé la Parole de Dieu.
Avec saint Paul il pouvait dire en
vérité : « Vous savez
que je n'ai rien caché de ce qui pouvait
vous être utile, et que je n'ai pas craint de
vous prêcher et de vous enseigner
publiquement et dans les maisons, la repentance
envers Dieu et la foi en notre Seigneur
Jésus-Christ. » Il pouvait aussi
ajouter : « Je ne fais pour
moi-même aucun cas de ma vie, comme si elle
m'était précieuse, pourvu que
j'accomplisse ma course avec joie, et le
ministère que j'ai reçu du Seigneur
Jésus, d'annoncer la bonne nouvelle de la
grâce de Dieu
(Actes
20. 20-21, 24). »
Mais une vie aussi semblable à la
vie de Jésus, dont elle tirait sa
sève, ne peut que susciter bien des
oppositions et, certes, Charles Moreillon ne fut
pas toujours compris. « C'est un
illuminé, disait-on, il va trop loin, son
oeuvre ne subsistera pas, elle s'écroulera.
Vivre par la foi, sans rien devant soi, c'est une
utopie, c'est insensé », et tant
de propos qui sortent de la bouche de ceux qui ne
connaissent pas le Dieu vivant.
Il ne cherchait pas à se
justifier. L'humilité, cette grâce
toujours inconsciente chez celui qui la
possède, a caractérisé son
ministère.
Il écrit : - C'est toujours
l'humiliation, l'abaissement qui aplanissent le
chemin du Seigneur. Humilions-nous donc de plus en
plus, mettons-nous à chaque instant à
la dernière place, jusqu'au jour où
le Seigneur nous dira dans sa grâce.
« Mon ami, monte plus
haut ».
Il ne voulait pas qu'on l'appelât
« Directeur » car, disait-il,
vous n'avez qu'un seul directeur qui est le Christ.
Il ne voulait être que le pasteur de La
Maison et paître les brebis confiées
à sa garde, se disant le serviteur de
tous.
Il évita le danger des discours
séduisants de la sagesse humaine ; son
ministère a été le
témoignage de l'expérience, une
démonstration d'Esprit et de
puissance.
- Permettez-moi l'expression d'une
conviction qui ne doit cependant pas être
prise pour un jugement porté sur
d'autres : Nous croyons que ce qui paralyse
beaucoup d'Eglises ou d'institutions, c'est
qu'elles se laissent aller à croire que
l'homme peut glorifier le Père en se servant
de Christ. Christ : n'est ainsi qu'un aide, un
second, une force ou une lumière dont on
peut disposer en cas de besoin. Ce n'est pas
là sa place, sa place est la
première. « Ce n'est pas vous qui
m'avez choisi, mais c'est moi qui vous ai choisis,
afin que vous alliez, et que vous portiez du fruit,
et que votre fruit demeure
(Jean
15.16). »
Christ veut que rien ne se fasse dans La
Maison sans que ce soit Lui qui en donne le conseil
et la force.
Christ Lui-même n'a
été sur la terre qu'un instrument -
mais absolument parfait - par lequel Il a
glorifié le Père. Nous ne sommes donc
que des instruments dans sa main. Rien de plus,
rien de moins.
Le sentiment de sa faiblesse, de son
indignité, de son entière
dépendance de Dieu, le ramena sans cesse au
pied de la Croix dont il a su parler avec tant de
puissance.
- Si je ne vous ai pas encore
écrit au sujet de l'efficacité du
sang de Christ, c'est que je n'ai pas encore
réalisé moi-même toutes les
grâces cachées dans la Croix ; je
ne saisis pas, dans toute leur étendue, les
richesses divines et rédemptrices que le
Saint-Esprit veut nous faire trouver dans le sang
de Jésus. Je suis loin d'avoir fait, dans
cette voie divine, les expériences
personnelles par lesquelles le Seigneur veut nous
conduire.
- Nous pénétrons dans une
vie de communion avec Dieu par la contemplation de
Jésus-Christ crucifié, en demeurant
corps et âme sous l'aspersion de son sang.
« La volonté du Père est
que quiconque voit le Fils et croit en Lui ait la
vie éternelle.
(Jean
6. 40) »
Cette contemplation humble et adorative
doit se prolonger jusqu'à ce qu'elle
devienne humiliante pour nous, car le sang du
Sauveur est l'oeuvre du péché de
l'humanité, l'oeuvre de mon
péché à moi, mais il est
aussi, à cause de celui qui le verse dans
l'obéissance de l'amour, la preuve
impérissable et confondante et à
jamais consolatrice de l'amour
miséricordieux de notre Père
céleste.
À mesure que cette contemplation
du sang de Christ s'accentue, le monde perd son
attrait, Satan se retire honteux et vaincu ;
nous ne voyons, nous ne savons plus qu'une seule
vérité - Jésus mort pour nous
donner la vie. Alors se réalise ce qui
s'était réalisé pour saint
Paul : « Le monde est
crucifié pour moi, comme je le suis pour le
monde
(Galates
6.14). »
La voix du monde que le mondain a peur
de ne plus entendre est étouffée par
la voix du sang de Christ. La voix du sang d'Abel
criait le triomphe du mal, de la haine et de la
mort, mais la voix du sang de Christ crie le
triomphe de la délivrance, de la paix et de
la vie.
C'est devant le crucifié, c'est
sous l'aspersion du sang de Jésus que
l'homme redevient enfant du Père, parce que
c'est là qu'il avoue son
péché, qu'il avoue être
impuissant, perdu, mais aussi qu'il reçoit
Christ comme son Sauveur.
Dans la contemplation de la Croix nous
goûtons l'exquise et douce étreinte du
Père qui embrasse son enfant
retrouvé, Combien nous sommes indignes d'une
si grande grâce, mais combien elle est
précieuse et adorable pour nous.
Lettre adressée aux soeurs. Le
Ried, 1902 je ne puis dire à chacune de vous
que la même chose : Tenez votre vieil
homme, votre homme de péché
crucifié avec Christ sur la Croix, et
laissez Jésus prendre toute la place en
vous. C'est Lui qui veut être le nouvel
homme, le nouvel Adam quand le premier, le mauvais
est mort.
Je me réjouis de rentrer pour
vous annoncer tout à nouveau
Jésus-Christ et Jésus-Christ
crucifié
(1
Cor. 2. 2). C'est à sa
personne que nous voulons sans cesse
revenir.
Ce qu'il faut dans le monde, et
particulièrement dans La Maison, ce sont des
âmes qui ne vivent, ne connaissent, n'adorent
et ne proclament que Jésus, le Seigneur et
Sauveur.
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