- Les enfants
Trop souvent une enfance malheureuse est le prélude d'une maturité funeste. A. Vinet.
Dieu avait mis au coeur de Charles Moreillon une
grande compassion pour l'enfance
malheureuse.
Rien n'est plus triste, en effet, que la
misère et la souffrance des enfants
nés souvent dans des circonstances
douloureuses, victimes de tragédies
familiales ; enfants sans père connu,
ou orphelins seuls au monde, sans foyer, sans
soins, sans affection. Que de misères
physiques et morales, suite de l'inconduite de
parents indignes, pères ivrognes,
mères débauchées, exemples
déplorables qui contaminent les âmes
dès l'âge le plus tendre et les
contraignent parfois à faire le mal. Que de
péchés, de larmes, de souffrances et
que de résignation parfois chez ces petits,
faibles et sans défense, souvent plus
à plaindre qu'à blâmer,
frappés par l'inexorable loi de
l'hérédité.
Déchéance physique, intellectuelle et
morale, mensonge, vol, impureté ;
caractères difficiles, insensibles,
emportés, rebelles. Il y a cependant
d'heureuses exceptions et plus d'un est
animé de bonnes dispositions et du
désir de bien faire.
C'est aux plus
déshérités, aux plus
abandonnés, aux plus malheureux que La
Maison ouvre ses portes. Quel privilège pour
de si nombreux orphelins dont personne ne veut se
charger, d'y être reçus, de devenir un
« enfant de La Maison », de
trouver un foyer, une chaude affection
chrétienne, un home, home béni
où tant d'entre eux, soustraits à
leur triste milieu, ont retrouvé la
santé, ont appris à aimer le travail
et à marcher dans le chemin de
l'obéissance, de la vérité et
de la crainte de Dieu.
L'expérience faite à La
Maison a prouvé la nécessité
de soustraire les enfants, dès leur berceau
si possible, aux mauvaises influences de leur
milieu, car plus tard, leur éducation
deviendra de plus en plus difficile. Il ne faut pas
laisser échapper ces précieuses
années pour les conduire au Sauveur. Trop de
gens attendent un salut futur pour les enfants qui
leur sont confiés. Non, c'est une
bénédiction présente qu'il
faut demander et à laquelle il faut
croire.
L'enfant le plus réfractaire en
apparence a parfois un désir inavoué,
une aspiration secrète qui l'attire vers
Jésus. Il faut souvent bien peu de chose
pour qu'il s'ouvre à la grâce de
Dieu.
L'âme des petits n'est-elle pas le
terrain le plus propre à recevoir la bonne
semence de l'Évangile ? Même dans
le cas où elle resterait longtemps
cachée sans donner signe de vie, il viendra
un jour où l'enfant devenu grand se
souviendra de l'enseignement reçu et une
moisson pourra éclore encore.
Bien des enfants en quittant La Maison
s'en éloignent pour un temps, mais ils y
reviennent ensuite et sont toujours accueillis avec
amour. Le vent de l'épreuve, les
difficultés, les chagrins sont comme la
pluie fertilisante qui fait germer la graine
enfouie au tréfonds des coeurs.
- Que serais-je devenu, disait un
garçon d'une pauvre
hérédité, si je n'avais pas
connu La Maison !
- C'est quand on l'a quittée,
écrivait une des grandes filles, qu'on sent
combien on aime La Maison.
C'est une tâche immense que de
travailler à la transformation de ces
enfants.
L'hérédité est une
force terrible, enlaçant ses victimes par
des liens qui les rendent esclaves de la loi du
péché. Mais béni soit Dieu, il
y a en Christ une puissance plus forte que la loi
draconienne de l'hérédité, et
« là où le
péché a abondé, la grâce
a surabondé
(Rom.
5. 20). »
Dieu seul peut faire naître une
jeune âme à la vie divine, mais Il se
sert d'instruments humains pour qu'ils soient
ouvriers avec Lui. Le contact avec des âmes
qui possèdent la vie en elles et qui prient,
crée une atmosphère bénie de
vérité. d'humilité, de foi, de
sérénité, d'amour
désintéressé, de
fermeté aussi, qui pénètre les
coeurs. Car l'influence est une chose subtile,
insaisissable, inexplicable, qui agit sans qu'on
s'en doute. Le bien, comme le mal, est contagieux
et ceux qui s'occupent des enfants et des jeunes ne
seront jamais trop attentifs aux influences qui
s'exercent sur eux à l'âge le plus
réceptif de la vie.
L'amour sera toujours le plus puissant
levier pour attirer les âmes et les conduire
à Dieu. L'amour, c'est le don de soi aux
hommes, c'est le renoncement à soi. Cet
amour est de Dieu, car Dieu aime les ingrats et les
méchants et « celui qui aime est
né de Dieu et connaît Dieu
(1
Jean 4. 7). »
C'est cette atmosphère d'amour
que l'on respire à La Maison. Elle a
brisé bien des résistances dans les
coeurs souvent les plus
fermés, les plus réfractaires, les
plus hostiles au premier abord.
La Maison
La vie à La Maison est celle d'une grande
famille avec des enfants de tout âge, filles
et garçons.
À mesure que les demandes
d'admission se multiplièrent, La Maison
s'agrandit ; il fallut transformer l'immeuble
voisin et l'adjoindre au bâtiment primitif,
Ainsi, au cours des années, La Maison devint
une institution pourvue de tout le
nécessaire. Elle posséda ses classes,
ses dortoirs clairs et bien aérés,
l'appartement des petits, ses cuisines, sa grange,
ses écuries, sa porcherie, son poulailler,
ses greniers et même son four à
pain ! Elle possède des prés,
des champs, des vergers, des jardins potagers, tout
un petit domaine qui lui donne de précieuses
ressources.
Cette vie à la campagne est d'une
grande simplicité et l'on apprend à
se passer de bien des perfectionnements modernes.
Dans les premières années, il fallait
aller chercher toute l'eau à la fontaine et
c'était une tâche ardue pour les
aînés des garçons que de
remplir chaque jour le réservoir de 150
litres. Aussi ce fut un grand bienfait lorsqu'il
fut possible d'installer l'eau et de remplacer les
lampes fumeuses et les bougies par la
lumière électrique.
La loi de la plus stricte
économie préside à tout.
Comment pourrait-on gaspiller l'argent provenant
parfois de modestes donateurs, qui se privent
eux-mêmes de bien des choses pour venir en
aide aux orphelins ? Rien ne doit être
négligé, vêtements et
chaussures sont entretenus soigneusement ;
tout ce qui peut être utile est recueilli. plus
fermés, les plus
réfractaires, les plus hostiles au premier
abord,
La vie à La Maison est celle
d'une grande famille avec des enfants de tout
âge, filles et garçons.
À mesure que les demandes
d'admission se multiplièrent, La Maison
s'agrandit ; il fallut transformer l'immeuble
voisin et l'adjoindre au bâtiment primitif,
Ainsi, au cours des années, La Maison devint
une institution pourvue de tout le
nécessaire. Elle posséda ses classes,
ses dortoirs clairs et bien aérés,
l'appartement des petits, ses cuisines, sa grange,
ses écuries, sa porcherie, son poulailler,
ses greniers et même son four à
pain ! Elle possède des prés,
des champs, des vergers, des jardins potagers, tout
un petit domaine qui lui donne de précieuses
ressources.
Cette vie à la campagne est d'une
grande simplicité et l'on apprend à
se passer de bien des perfectionnements modernes.
Dans les premières années, il fallait
aller chercher toute l'eau à la fontaine et
c'était une tâche ardue pour les
aînés des garçons que de
remplir chaque jour le réservoir de 150
litres. Aussi ce fut un grand bienfait lorsqu'il
fut possible d'installer l'eau et de remplacer les
lampes fumeuses et les bougies par la
lumière électrique.
La loi de la plus stricte
économie préside à tout.
Comment pourrait-on gaspiller l'argent provenant
parfois de modestes donateurs, qui se privent
eux-mêmes de bien des choses pour venir en
aide aux orphelins ? Rien ne doit être
négligé, vêtements et
chaussures sont entretenus soigneusement ;
tout ce qui peut être utile est recueilli.
En été les enfants vont
glaner dans les champs ; chaque épi
tombé est précieux pour
préparer la nourriture de
l'année ; dans les bois c'est la
cueillette des baies. Les pives, le bois mort sont
aussi fort utiles pour alimenter les feux en hiver.
« Ramassez les morceaux qui restent afin
que rien ne se perde
(Jean
6. 12). » Cette
injonction n'est pas oubliée. Ainsi chacun
apprend de bonne heure à travailler et,
à côté des heures
d'étude, petits et grands ont une
tâche définie à remplir dans la
maison ou au jardin. Que d'occasions de se rendre
utile et de se mettre au service des
autres !
La nourriture est saine et abondante et
le pain, ce bon pain bis fait à la maison, a
une saveur toute particulière, preuve en est
ce qu'écrivait un des garçons
momentanément absent : - J'aimerais
tant qu'on m'envoie un pain, j'en ai ici tant que
je veux, mais ce n'est pas du pain de chez
nous.
Les classes ont lieu dans la maison
même, école enfantine, école
primaire. Quelle sagesse d'instruire les enfants en
dehors des écoles publiques, où tant
d'influences contraires peuvent contrebalancer les
enseignements reçus à La
Maison !
Les travaux de la campagne, si
salutaires au corps et à l'âme, sont
le lot des aînés et ce contact avec la
nature, dans ce riche et beau pays, est un bienfait
pour tous. S'il y a souvent de la fatigue, il y a
de la joie aussi dans ce travail utile et
fécond. Dans la suite, et selon leurs
aptitudes, les garçons entreront en
apprentissage : jardinier, charpentier,
boulanger, etc ; quelques-uns, les mieux
doués, deviendront instituteurs. Les
fillettes auront leur part dans le travail de la
maison, la cuisine, la lessive, le repassage, la
couture, l'entretien des chambres ; ainsi
elles formeront soit pour entrer
en service, soit pour devenir, si c'est là
leur part, d'utiles ménagères, des
mères de famille ou encore des
diaconesses.
De toutes les leçons que
reçoivent les enfants recueillis à La
Maison, il n'en est pas de plus utile pour la vie
entière que celle qui leur est donnée
par cette dépendance constante de la
sollicitude et de la fidélité de
Dieu. Il est évident qu'une situation
matérielle, qui oblige à tout
attendre de la grâce de Dieu, est bien faite
pour développer cette confiance - souvent
naturelle au coeur des jeunes enfants - mais qui
doit être fortifiée et
alimentée. Quelle bonne école pour
apprendre à connaître le Dieu vivant,
le Dieu qui entend la prière, le Dieu qui
nourrit les petits des oiseaux et qui revêt
l'herbe des champs, le Dieu qui s'appelle
Lui-même le Père des
orphelins !
« Recommande ton sort à
l'Éternel, mets en Lui ta confiance et Il
agira
(Ps.
37.5). » Voilà
la grande leçon apprise par
l'expérience faite à La Maison par
les petits comme par les grands.
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