Car celui qui voudra sauver sa vie la perdra mais celui qui perdra sa vie à cause de moi et de l'Évangile, la sauvera. |
Je vais vous dire aujourd'hui quelques mots de la vie et de la
mort.
Nous savons tous que la mort ne veut pas dire la fin. La mort ne peut
être la fin. La justice exige qu'elle ait une suite. Il y a tant de
choses ici-bas que nous ne comprenons pas, que même nous trouvons
injustes, voire insensées. Un enfant meurt accidentellement, un jeune
homme se tue dans une chute... Pourquoi ? Pourquoi Dieu le
permet-Il ? Comment peut-Il admettre que des gens s'entre-tuent
et se fassent souffrir au cours d'un clair dimanche d'hiver ?
Mille questions se posent ainsi à nous.
Nous devons nous souvenir que nous ne voyons pas le déroulement de
l'action tout entière. On ne peut pronostiquer le résultat d'une
partie de foot-ball lorsqu'elle n'a duré que quelques secondes. On ne
sait pas, après les premiers dix mètres, qui gagnera la course de fond
sur cinquante kilomètres Il peut se passer tant de choses durant un
concours Or, ce n'est qu'à long terme que se manifeste la justice.
En comparaison de la vie éternelle, notre vie sur cette terre n'est
que de quelques secondes. Donc, ce que nous voyons ici-bas d'une vie
humaine, doit être regardé à la mesure de la vie éternelle ! Car,
écrit l'Apôtre Paul : « les souffrances
du temps présent ne sont rien en comparaison de la gloire qui nous
sera révélée » (Rom.
8 : 18)
Nous ne comprenons la vie terrestre qu'à la lumière de l'éternité. La
vie ici-bas est infiniment courte, comparée à celle qui nous attend
après la mort.
Non pas que notre vie terrestre soit sans importance. Un aviateur sait
que l'instant le plus court peut avoir une valeur incalculable dans
certaines circonstances. Une seconde paraît longue et s'avère
décisive. C'est ainsi, pensons-nous, qu'il convient d'apprécier, à la
mesure de l'éternité, notre vie terrestre si brève.
La vie sur cette terre est une école. Quand l'école est finie, vient
l'examen. Ou son résultat est bon ou il est insuffisant. Celui qui a
bien profité de ses classes, réussit, en général, son examen ;
l'autre échoue.
Nous aussi, nous avons un examen à passer à la fin de notre vie. De
son résultat dépend soit le succès, soit l'échec. Et nous ne savons
pas s'il y a une troisième possibilité - une promotion après un cours
de répétition. Nous savons seulement que la décision est prise par le
Dieu d'amour et nous croyons que l'amour divin dispose de possibilités
qui sont, pour nous, insondables. Nous ne pensons pas toutefois
qu'amour et faiblesse soient synonymes. Dieu le Père, c'est l'amour
vrai, qui ne tolère ni faiblesse, ni paresse. Cet amour est bien plus
sévère que nous ne le croyons - mais sans doute aussi plus riche de
possibilités que nous ne l'imaginons. L'amour de Dieu est un amour
saint. Il nous brûle, nous, les êtres non sanctifiés. Mais il peut
aussi nous arracher à nos péchés et nous sanctifier.
Nous ne pouvons pas, aujourd'hui, nous entretenir de la vie et de la
mort sans donner nos pensées à nos camarades tombés au champ
d'honneur.
Nous n'avons pas à nous prononcer sur leur vie.
Laissons Lui ce soin, à Lui qui est le Grand Recteur de toute vie
humaine. Il le fait mieux que nous, plus équitablement que nous, avec
une compréhension bien plus grande que nous ne serions à même de le
faire. Mais nous pouvons Le remercier de nous les avoir donnés.
Nous voyons en eux des modèles qui ont suivi le chemin du devoir,
autant qu'un homme est à, même de le faire. En ceci, ils suivirent
notre Maître, et se montrèrent, comme Lui, « fidèles jusqu'à la
mort ». Louons et remercions Dieu de ces exemples. Nous voulons
les suivre, nous les suivrons sur le même chemin, sur ce chemin
splendide du devoir et de l'obéissance qui, à travers la mort, va à la
résurrection et à la gloire. Amen.
Le soir de la Mi-Carême, le 6 février, l'aumônier célébra, quelque
part au front, un service divin qui fut radiodiffusé.
Le plus long des Psaumes est le Psaume 119. Il n'est pas seulement
long, il est aussi immensément riche. Je le relisais hier soir, dans
ma Bible. Et, parmi ses cent soixante-seize versets, je n'en trouvai
que six que je n'avais pas soulignés. Plusieurs versets ne sont pas
seulement soulignés, ils ont encore un trait en marge. Deux
d'entre-eux retinrent mon attention. Je crois qu'ils nous apportent
aujourd'hui un message.
Voici ce qu'ils nous disent :
Ils s'approchent, ceux qui poursuivent le crime Ils s'éloignent de la loi. |
« Mes persécuteurs s'approchent ». Pensons donc à nos
ennemis. Nous entendons leurs mensonges, nous connaissons leur haine,
nous savons ce qu'il adviendrait de nos femmes et de nos enfants s'ils
venaient à triompher.
« Mes persécuteurs s'approchent ». Nous avons des
persécuteurs tout près de nous, dans nos rangs. Des camarades ignobles
- peu importe qu'ils soient directement au service de l'ennemi, ou
commettent indirectement leurs actes abominables - essaient et
s'efforcent d'annihiler notre courage et d'effrayer nos bien-aimés,
là-bas, au pays, en répandant de fausses et tendancieuses nouvelles.
Ceux-là sont « loin de Ta loi ».
« Mes persécuteurs s'approchent ». Nous avons des
persécuteurs plus près encore. Il y a dans nos propres poitrines des
forces mauvaises qui s'appellent la haine, la colère, la vengeance.
Elles sont là, tout près.
Mais un Autre aussi est près de nous, et c'est avec jubilation que
nous lisons la fin ;
« Tu es près de moi et tous Tes Commandements sont vérité.
Seigneur, Tu es près de moi » et plus nous nous approchons du
front, plus Tu te rapproches de nous !
« Seigneur, Tu es près de nous », et Tu prends Ta place dans
nos coeurs, pour en chasser la peur, la haine et tous autres péchés.
C'est pourquoi nous répétons avec le Psalmiste :
« Mes persécuteurs s'approchent !... Seigneur, Tu es près de
nous et Tes Lois sont toute vérité. » Amen.
Entre temps le Groupe I a pris ses quartiers à Rovaniemi.
Et le vendredi 9 février, l'aumônier célèbre un service de
Sainte-Cène avec la troupe qui attend d'une heure à l'autre l'ordre
de départ pour le front.
Nous possédons une source de force qui n'est pas encore
épuisée : la Sainte-Cène.
Au Nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit. Prions Dieu :
« Seigneur ! Tu vois ici une petite troupe de Volontaires.
Nous sommes réunis pour nous recommander nous-mêmes, comme nous
recommandons aussi nos bien-aimés restés au pays, à Ta puissante
protection. Nous désirons intensément que Tu sois notre Chef suprême,
que Tu nous conduises tous sur le bon chemin ; peu importe qu'il
mène à la vie ou à la mort ! Mais, Seigneur, nous savons aussi
que nous ne sommes pas dignes d'être près de Toi. Tu es pur et saint
et nous sommes de pauvres pécheurs et des impurs. Mais nous venons
maintenant à Toi, comme les blessés viennent au médecin. À qui donc
irions-nous qu'à Toi ? Pardonne-nous nos défaillances,
délivre-nous du péché et donne-nous de vivre ou de mourir près de Toi.
Car, Seigneur, quand Tu es près de nous, nous ne craignons ni la vie
ni la mort et chaque jour est pour nous une fête. Amen. »
L'Apôtre écrit :
Car nous n'avons pas un souverain sacrificateur qui ne puisse compatir à nos faiblesses, puisqu'il a été tenté comme nous en toutes choses, sans commettre aucun péché. |
Notre souverain sacrificateur, c'est Jésus-Christ. C'est devant son
trône que nous aurons tous, un jour, à rendre compte de notre vie.
Alors, tout viendra au grand jour - tout, c'est-à-dire le mal que nous
avons fait, mais, principalement sans doute : tout le bien que
nous avons omis de faire. Car (et ceci, chacun de nous doit le
reconnaître), nous pourrions être, aujourd'hui, meilleurs que nous ne
le sommes. Nous n'avons pas toujours agi de notre mieux. Nous n'avons
pas toujours été serviables, comme nous eussions dû l'être. Nous
n'avons pas agi, vis-à-vis des autres, comme nous eussions désiré
qu'ils agissent vis-à-vis de nous. Oui ! Nous nous sommes montrés
orgueilleux de ce que nous sommes partis comme Volontaires, alors que
d'autres étaient trop poltrons et lâches et qu'ils se terraient à la
maison.
Évidemment, nous avons aussi un compte actif. Nous savons, dans le
secret de nous-mêmes, que parfois nous nous sommes maîtrisés et que
nous avons vraiment fait quelque chose de bien. Mais, considérons-le
sérieusement : le peu de bien que nous avons pu faire n'était que
notre devoir de chrétien, et il n'y a rien d'extraordinaire à ce qu'un
chrétien fasse son devoir. Plus nous envisageons la vie avec sérieux,
plus nous nous rendons compte que nous l'avons défigurée et corrompue.
C'est là tout le péché : Avilir les grandes et saintes intentions
de Dieu à notre égard. Dieu nous avait tous désignés pour être des
lumières, mais ces lumières ne sont que de petites flammes fumeuses et
vacillantes.
Jésus exige beaucoup. Il exige le maximum. Le chemin
du Christ n'est pas un chemin facile. C'est au contraire un chemin
difficile et fatigant. C'est pourquoi il y a si peu de chrétiens
véritables. C'est pourquoi la plupart ne le sont qu'à moitié,
exactement comme nous. Jésus exige beaucoup - mais Il a pitié de nous.
Il a, lui-même, été homme et Il sait combien vivre est difficile.
Parce qu'il a été homme, il nous comprend entièrement.
Approchons-nous donc avec assurance du trône de la grâce, afin d'obtenir miséricorde et de trouver grâce pour être secourus dans nos besoins. |
Aucun de nous n'a besoin de simuler l'humilité, car il apparaît avec
évidence que Jésus nous est indiscutablement supérieur. Il est pur,
fort et bon, alors que nous sommes inférieurs, impurs, faibles et
égoïstes.
Maintenant, c'est sur son ordre que nous venons à Lui. Aucun de nous
ne saisit entièrement le sens de la Sainte-Cène. Mais nous en
comprenons tout de même assez pour savoir qu'il s'agit d'une rencontre
avec le Sauveur ; qu'il s'agit d'une rencontre personnelle entre
Lui, qui a dit : « Faites ceci en mémoire de moi » et
quiconque prend part à la Sainte-Cène. Cette rencontre, c'est pour
nous une consécration. Lui, qui donna Sa vie pour sauver le monde,
vient au devant de nous et nous donne à chacun Sa bénédiction. C'est
pourquoi la célébration de la Sainte-Cène est une vraie fête.
C'est pourquoi nous sommes heureux et confiants. Nous savons que Jésus
s'occupe des pécheurs qui veulent être changés. Nous croyons, nous
savons qu'Il ne nous méprise pas, mais qu'Il descend jusqu'à nous et
partage Son repas avec nous, ainsi qu'Il le fit avec les premiers
disciples.
Et nous allons maintenant, suivant notre bonne et vieille coutume, Lui
demander tout d'abord le pardon de nos offenses, en prononçant les
paroles, restées si expressives, de notre antique confession des
péchés...
Peu de temps après, l'aumônier rentra à Tornea, où un autre
contingent avait, entre temps, pris ses quartiers d'attente.
Le dimanche 11 février, il prononça devant le Groupe Il
l'exhortation suivante :
Aujourd'hui, dimanche, se joue à Stockholm le grand tournoi de hockey
sur glace.
Pour le monde chrétien, ce dimanche est, avant tout, le premier des
dimanches de Carême. Il nous apporte un message tout spécial : il
nous parle de la tentation. Relisons donc un des textes réservés à ce
dimanche. Voici ce que nous dit la Parole, au Nom du Seigneur :
Dès lors, Jésus commença à montrer à ses disciples qu'il fallait qu'il allât à Jérusalem, qu'il y souffrît beaucoup de la part des anciens, des principaux sacrificateurs et des scribes, qu'il fût mis à mort, et qu'il ressuscitât le troisième jour. Alors Pierre, l'ayant pris à part, se mit à lui faire des remontrances et à lui dire : À Dieu ne plaise, Seigneur, cela ne t'arrivera point ! Mais Jésus, se tournant, dit à Pierre : Arrière de moi, Satan, tu m'es en scandale ; car tes pensées ne sont pas les pensées de Dieu, mais celles des hommes. |
Ce texte nous parle d'un homme qui avait un grand et noble but devant
lui, un but pour lequel il était prêt à donner sa vie. Mais il
contient encore autre chose : il nous montre de quelle manière la
tentation s'y prit pour essayer de détourner cet homme de son devoir.
Le texte nous raconte comment il affronta cette tentation, et comment
il la vainquit.
Combien nous le comprenons ! Nous aussi nous avons un grand but
devant nous ! Nous aussi, nous sommes prêts à donner notre vie,
si elle nous est demandée ! Et la tentation nous vient également
de déserter. Que Dieu nous fasse la grâce de vaincre cette tentation,
comme notre Maître l'a vaincue.
N'est-il pas singulier de voir avec quelle vigueur Jésus
intervient ? N'était-ce pas son premier disciple qui,
certainement dans la meilleure intention, lui conseillait d'être
prudent ? Nous aurions attendu plus de compréhension de la part
de Jésus. Nous aurions voulu qu'Il répondît à peu près comme
ceci :
« Mon cher ami, c'est fort gentil à toi de penser à ce qui serait
préférable pour moi. Mais, je crois cependant que mon chemin me
conduit ailleurs... ».
Mais non, Jésus ne répond pas ainsi. Il dit : « Arrière de
moi, Satan. Tu m'es en scandale ! »
Pourquoi Jésus s'irrite-t-il ainsi ?
N'est-ce pas parce qu'Il connaît l'attrait diabolique de la
tentation ? Jésus était homme, pas uniquement homme, mais homme
tout de même. Il sentait en lui quelque chose qui l'entraînait à
approuver ce que lui disait Pierre. Il y avait chez Jésus une sorte
d'instinct de la conservation, qui veut que chacun voit en soi-même
son prochain. C'est ce côté humain de Jésus que les paroles de Pierre
avaient touché. Jésus connaît la force de la tentation. C'est pourquoi
il se défend si énergiquement. Il s'arrache à son emprise et nous
comprenons, à la violence de ses paroles, que ce fut douloureux. Mais
il eut le dessus.
Si donc Jésus, qui était fort et bon, dut se défendre si sérieusement
contre la tentation, combien plus est-il prudent pour nous de ne pas
jouer avec elle ! Nous le faisons pourtant souvent. Et quand la
tentation s'approche de nous, il est bien rare que nous disions :
« Arrière de moi, Satan »
Nous préférons dire
« Nous pourrions bien causer de cette affaire... »
Et puis, nous succombons.
On résiste à la tentation en disant : NON.
« Une fois ne compte pas ! » Quel diabolique
mensonge ! C'est le contraire qui est exact. Une première fois,
une seule fois inaugure la série.
Chacun de nous est appelé à lutter contre la tentation. La plupart
comprennent par le mot « tentation », une tentation d'un
caractère tout spécial.
Je n'ai pas besoin de dire son nom. Les sincères me comprennent. Et
ils savent aussi qu'on ne résiste pas à une tentation en jouant avec
elle. La seule chose à faire est de suivre l'exemple de Jésus :
rompre de façon abrupte et résolue.
Et je voulais dire encore quelques mots d'une autre tentation. De la
tentation dont parle le texte de ce jour : celle de déserter.
Cela peut commencer de façon si innocente. Cela petit provenir de
notre âme : une inclination toujours plus forte à nous prendre
nous-mêmes en pitié. Nous désirerions, par exemple, une position moins
exposée ! La tentation peut venir du dehors, par la voix d'un
ami, d'une épouse, d'une fiancée. Cette voix nous dit :
Pourquoi te sacrifier, justement toi - ta vie a bien trop de
prix !
Quelques-uns de nos camarades ont déjà cédé à cette tentation et sont
rentrés chez eux. D'autres sont travaillés par des pensées analogues
et de plus en plus ils succombent en route. Emportons de ce culte
cette conviction que la meilleure méthode pour se défendre contre de
telles pensées est celle du Christ :
« Arrière de moi, Satan, car tu m'es en scandale ! »
Souvenons-nous que si la tentation est grande, Jésus est encore plus
fort qu'elle. Jamais Il ne fut vaincu. Et Il donna la Force à ses
disciples.
Suivre Jésus est souvent chose ardue, mais c'est le chemin de la
victoire. Amen.
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