Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

Valdo sort de l'Eglise romaine.

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Première dispersion

Les Vaudois se trouvaient désormais, vis-à-vis de l'Eglise romaine, au même point que les Apôtres devant le Sanhédrin, quand il leur eut défendu de ,parler au nom de Jésus. Comme ceux-ci se détachèrent graduellement du temple et de la synagogue, ceux-là se détachèrent de l'Eglise, à leur corps défendant.

 

De retour à Lyon, Valdo réorganisa l'envoi de ses fidèles collaborateurs, qui parcouraient,, deux à deux, les campagnes, accueillis avec joie par les populations.. Après la mort de Guichard, un nouvel archevêque, Jean de Belles-Mains, fut installé à Lyon, en 1181. Il reçut du pape Lucius III, qui avait succédé à Alexandre III, l'ordre de faire taire ces prêcheurs laïques, « car la prédication de la Parole de Dieu ne convient pas à des hommes grossiers et illettrés ». Valdo, cité devant l'archevêque, répéta la parole des apôtres, eux aussi méprisés comme étant du bas peuple et illettrés : « Il nous faut obéir à Dieu plutôt qu'aux hommes. »

Ce fut la rupture définitive.

Le prélat chassa les Vaudois de Lyon et de son diocèse; ils étaient au nombre de plus de huit mille, s'il faut en croire l'Italia Sacra. L'élection du pape Lucius 'étant de la fin de 1181, il faut probablement placer en 1182 l'expulsion des Vaudois du Lyonnais.

On est frappé par un nouveau point de ressemblance entre eux et les chrétiens primitifs, en considérant les voies de Dieu dans l'expansion de son Eglise. Comme la persécution, en dispersant les fidèles de Jérusalem, leur avait fourni l'occasion de répandre l'Evangile en Samarie et plus loin encore, de même les Pauvres de Lyon, chassés de leur ville, allaient ça et là annonçant la Parole de Dieu dans les contrées environnantes et de préférence dans l'Est et le Midi de la France, l'Alsace, la Lorraine, le Dauphiné, la Provence et le Languedoc.

Ce refus d'obéissance et le retentissement croissant de leur prédication alarmèrent le souverain pontife. Un nouveau concile fut tenu à Vérone à la fin de 1183, sous les auspices de l'empereur Frédéric Barberousse, le nouveau pape ayant aussi été chassé de Rome par le peuple de la ville. L'excommunication, prononcée au concile de Latran, fut renforcée et rendue plus explicite, La voici: « Par le présent décret nous condamnons toutes les hérésies. C'est pourquoi nous anathématisons d'abord les Cathares, et les Patarins, ainsi que ceux qui assument faussement le nom d'Humiliés ou de Pauvres de Lyon, les Passagins, les Joséphites et les Arnoldistes. Et comme quelques-uns, avec une certaine apparence de piété, mais niant le sens réel des paroles :de l'Apôtre, s'attribuent le droit de prêcher bien que le même apôtre dise: Comment prêcheront-ils s'ils ne sont envoyés? nous comprenons sous le même anathème perpétuel tous ceux qui, malgré notre défense et sans être envoyés par nous, oseront prêcher, tant en particulier qu'en public, contrairement à l'autorité représentée par le siège apostolique et par les évêques. »

 

Parmi les mouvements de réformation de l'Eglise, que ce décret associe aux Vaudois, notons les Humiliés, qu'il identifie presque avec eux, et que nous avons vus entrer en relations avec Valdo, probablement aussitôt après le concile de Latran. Lès Passagins et les Joséphites n'ont laissé que peu de traces. Les Arnoldistes, disciples d'Arnaldo de Brescia, avaient surtout des préoccupations politiques. Ils auraient voulu que le pape laissât au peuple de Rome le gouvernement civil de la Ville Eternelle, capitale de l'Empire, et qu'il se bornât à s'occuper des intérêts de la religion. Le supplice, que leur chef avait subi à l'instigation du pontife, les avait rendus irréconciliables avec la Papauté et, partant, prêts à 5 s'associer à d'autres adversaires de la Cour de, Rome. Ils se trouvaient surtout en Italie.

 

Un autre mouvement avait agité les esprits et les consciences en Dauphiné et dans tout le Midi de la France, celui de Pierre de Bruis et de son disciple, Henri de Lausanne. L'un avait péri sur le bûcher; on avait imposé silence à l'autre en l'enfermant pour l'a vie dans un couvent. Mais eux aussi avaient laissé des disciples, appelés Pétrobrusiens et Henriciens, tout prêts à fraterniser avec les Pauvres de Lyon dans la lutte contre le clergé romain.

Les Cathares étaient plus anciens. Originaires de l'Orient, ils mélangeaient au christianisme les doctrines du dualisme persan, rejetaient l'Ancien Testament et une partie du Nouveau. Mais leur vie exemplaire et l'austérité de leurs moeurs, si différentes de celles du clergé, frappaient en leur faveur l'imagination des foules, qui les avaient en grande considération. En Italie, où on les appelait Patarins, au nom du quartier de Milan, où ils se réunissaient, ils avaient subi de féroces persécutions, qui leur avaient valu l'auréole du martyre.

En France, ils étaient surtout nombreux en Provence e Languedoc, où on leur avait donné le nom de Vallenses, de la ville de La Vaur, et celui d'Albigeois, de la ville d'Albi, où résidait peut-être leur grand maître. Ceux-ci avaient été persécutés avant le concile de Latran, qui les avait condamnés' une fois de plus. Bien que leurs croyances ne s'accordassent qu'en partie, les Pauvres de Lyon étaient pour eux des auxiliaires dans leur lutte contre l'Eglise. Au reste, ils avaient l'appui de la puissante famille des comtes de Toulouse, dont le chef, Raymond, partageait leurs idées; tandis que la femme et la soeur du comte de Foix adhérèrent à celles des Vaudois, comme étant plus évangéliques.

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