Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

CHAPITRE VI

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« Et ce sont ici les commandements, les statuts, et les ordonnances que l'Éternel, votre Dieu, a commandé de vous enseigner, afin que vous les pratiquiez dans le pays dans lequel vous passez pour le posséder ; afin que tu craignes l'Éternel, ton Dieu, pour garder, tous les jours de ta vie, toi, et ton fils, et le fils de ton fils, tous ses statuts et ses commandements que je te commande, et afin que tes jours soient prolongés. Et tu écouteras, Israël ! et tu prendras garde à les pratiquer, afin que tu prospères, et que vous multipliiez beaucoup dans un pays ruisselant de lait et de miel, comme l'Éternel, le Dieu de tes pères, te l'a dit. Écoute, Israël : L'Éternel, notre Dieu, est un seul Éternel » (Chap. 6, 1-4).

Ici nous est présentée cette grande vérité cardinale, que la nation d'Israël était spécialement responsable de retenir et de confesser, savoir l'unité de la divinité, vérité formant la base même de l'économie judaïque, le centre autour duquel le peuple devait se rallier. Aussi longtemps qu'ils la maintenaient, il y avait pour Israël, bonheur, prospérité et fertilité ; mais cette vérité une fois abandonnée, tout disparaissait. C'était, pour ainsi dire, le grand rempart national qui les séparait de tous les autres peuples de la terre ; ils étaient appelés à confesser cette glorieuse vérité à la face d'un monde idolâtre, et de ses « plusieurs dieux et plusieurs seigneurs » (voyez 1 Cor. 8, 5).

Leur père Abraham avait été appelé hors du centre de l'idolâtrie païenne, pour devenir le témoin du seul Dieu vivant et vrai, se confier en Lui, marcher avec Lui, s'appuyer sur Lui, et Lui obéir.

 

Le lecteur trouvera dans le dernier chapitre de Josué, une expression très frappante de l'importance que l'Éternel attache à ce fait, lorsqu'il s'adresse pour la dernière fois au peuple : « Josué assembla toutes les tribus d'Israël à Sichem, et il appela les anciens d'Israël, et ses chefs, et ses juges, et ses magistrats ; et ils se tinrent devant Dieu. Et Josué dit à tout le peuple : Ainsi dit l'Éternel, le Dieu d'Israël : Vos pères, Terakh, père d'Abraham et père de Nakhor, ont habité anciennement au delà du fleuve, et ils ont servi d'autres dieux ; et je pris votre père Abraham d'au delà du fleuve, et je le fis aller par tout le pays de Canaan, et je multipliai sa semence : je lui donnai Isaac » (Josué 24, 1-3).

Ici Josué rappelle au peuple que leurs pères ont servi d'autres dieux - fait très solennel et dont le souvenir leur aurait rappelé le profond besoin qu'ils avaient de veiller sur eux-mêmes, de peur d'être entraînés de nouveau dans l'idolâtrie, hors de laquelle Dieu, dans sa grâce souveraine, avait élu et appelé leur père Abraham. C'eût été sagesse de leur part de considérer que, même ce mal dans lequel leurs pères avaient vécu autrefois, était justement celui dont ils se rendraient coupables eux-mêmes.

Après avoir présenté ce fait au peuple, Josué retrace avec une force remarquable tous les principaux événements de leur histoire, depuis la naissance de leur père Isaac, jusqu'au moment où il s'adresse à eux, puis il résume son discours par l'appel suivant : « Et maintenant, craignez l'Eternel, et servez-le en intégrité et en vérité ; et ôtez les dieux que vos pères ont servis de l'autre côté du fleuve, et en Égypte, et servez l'Éternel. Et s'il est mauvais à vos yeux de servir l'Éternel, choisissez aujourd'hui qui vous voulez servir, soit les dieux que vos pères qui étaient de l'autre côté du fleuve ont servis , soit les dieux de l'Amoréen, dans le pays duquel vous habitez. Mais moi et ma maison, nous servirons l'Éternel » (Josué 24, 14, 15).

Remarquez cette allusion répétée au fait que leurs pères avaient adoré des faux dieux ; et, en outre, que le pays dans lequel l'Éternel les avait amenés avait été souillé, d'une extrémité à l'autre, par les abominations de l'idolâtrie païenne.

Ainsi, ce fidèle serviteur de l'Éternel, évidemment inspiré par le Saint-Esprit, cherche à représenter au peuple le danger qu'il court d'abandonner la grande vérité, fondamentale d'un seul Dieu vivant et vrai, pour retourner au culte des idoles. Il insiste sur la nécessité urgente pour eux d'une décision absolue. « Choisissez aujourd'hui qui vous voulez servir ». Rien n'égale une décision du coeur franche et complète pour Dieu ; c'est ce que nous lui devons en tout temps. Quant à Israël, Dieu lui avait donné des preuves évidentes que Lui-même était pour eux, en les rachetant de la servitude d'Egypte et en les conduisant à travers le désert pour les établir au pays de Canaan ; pour cette raison, une consécration complète à l'Éternel n'était de leur part qu'un service raisonnable.

Les paroles de Josué prouvent combien il en sentait profondément l'importance pour ce qui le concernait : « Mais moi et ma maison, nous servirons l'Eternel ». Précieuse décision, qui nous montre que, quelle que soit la déchéance de la religion nationale, celle de la famille, et l'âme individuellement peuvent, par la grâce de Dieu, être maintenues en tout temps et en tous lieux.

Puissions-nous ne pas l'oublier ! « Moi et ma maison » est la réponse claire et précieuse de la foi à ces paroles de Dieu : « Toi et ta maison ». Quelle que puisse être, en un temps donné, la condition du peuple de Dieu ostensible et professant, tout homme de Dieu sincère et fidèle possède le privilège de pouvoir adopter ce principe : « Mais moi et ma maison, nous servirons l'Éternel », et d'y conformer tous ses actes.

Il est vrai que cette sainte résolution ne peut être mise en pratique que par le secours incessant de la grâce de Dieu ; mais nous pouvons être assurés que, si notre coeur est déterminé à suivre entièrement le Seigneur, toute grâce nécessaire nous sera fournie jour après jour, car ces paroles seront toujours vraies : « Ma grâce te suffit, car ma puissance s'accomplit dans l'infirmité » (2 Cor. 12, 9).

Considérons maintenant l'effet apparent produit par l'émouvant appel de Josué à la congrégation ne semble-t-il pas devoir être considérable ?

« Et le peuple répondit, et dit : Loin de nous que nous abandonnions l'Éternel pour servir d'autres dieux ! Car l'Éternel, notre Dieu, c'est lui qui nous a fait monter, nous et nos pères, du pays d'Égypte, de la maison de servitude, et qui a fait devant nos yeux ces grands signes, et qui nous a gardés dans tout le chemin par lequel nous avons marché, et parmi tous les peuples, au milieu desquels nous avons passé. Et l'Éternel a chassé de devant nous tous les peuples, et l'Amoréen qui habitait dans le pays. Aussi nous, nous servirons l'Éternel, car c'est lui qui est notre Dieu » (Jos. 24, 16-18).

Tout ceci sonnait très bien et donnait grand espoir, car le peuple paraissait avoir une claire intelligence du fondement moral des droits de l'Éternel à une obéissance implicite de leur part. Ils étaient en état de faire un récit exact de toutes ses oeuvres de puissance à leur égard, de protester sérieusement, en toute sincérité, contre l'idolâtrie, et avec tout cela de promettre l'obéissance à l'Éternel, leur Dieu.

Cependant, il est évident que Josué n'avait pas une confiance particulière en cette profession, puisqu'il dit au peuple : « Vous ne pourrez pas servir l'Éternel ; car il est un Dieu saint, il est un Dieu jaloux : il ne pardonnera pas votre transgression et vos péchés. Si vous abandonnez l'Éternel, et si vous servez des dieux étrangers, alors il se retournera et vous fera du mal et vous consumera après vous avoir fait du bien. Et le peuple dit à Josué : Non, car nous servirons l'Éternel. Et Josué dit au peuple : Vous êtes témoins contre vous-mêmes que c'est vous qui vous êtes choisi l'Eternel pour le servir. Et ils dirent: Nous en sommes témoins. Et maintenant, ôtez les dieux étrangers qui sont au milieu de vous, et inclinez votre coeur vers l'Eternel, le Dieu d'Israël. Et le peuple dit à Josué : Nous servirons l'Éternel, notre Dieu, et nous écouterons sa voix » (Josué 24, 19-24).

Arrêtons-nous ici pour méditer sur l'aspect sous lequel Josué présente Dieu à la congrégation d'Israël, puisque notre but en nous occupant de ce passage est de montrer la place éminente assignée dans le discours de Josué, à la vérité de l'unité de la divinité ; vérité à laquelle, comme nous l'avons vu, Israël était appelé à rendre témoignage devant toutes les nations de la terre, et dans laquelle se trouvait leur sauvegarde morale contre les influences séductrices de l'idolâtrie.

Or cette vérité même fut celle qu'ils abandonnèrent la première, de la manière la plus signalée. Les promesses, les voeux et les résolutions prises sous l'influence des paroles de Josué, se trouvèrent être semblables à une rosée du matin qui s'en va (Osée 6, 4). « Et le peuple servit l'Eternel tous les jours de Josué, et tous les jours des anciens dont les jours se prolongèrent après Josué, et qui avaient vu toute la grande oeuvre de l'Éternel, qu'il avait faite pour Israël. Et Josué, fils de Nun, serviteur de l'Éternel, mourut, âgé de cent dix ans... Et toute cette génération fut aussi recueillie vers ses pères ; et après eux, se leva une autre génération qui ne connaissait pas l'Eternel, ni l'oeuvre qu'il avait faite pour Israël. Et les fils d'Israël firent ce qui est mauvais aux yeux de l'Éternel, et servirent les Baals. Et ils abandonnèrent l'Éternel, le Dieu de leurs pères, qui les avait fait sortir du pays d'Égypte ; et ils marchèrent après d'autres dieux, d'entre les dieux des peuples qui étaient autour d'eux, et se prosternèrent devant eux ; et ils provoquèrent à colère l'Éternel, et abandonnèrent l'Éternel, et servirent Baal et Ashtaroth » (Juges 2, 7-13).

Quel avertissement solennel pour nous tous!

Une vérité si grande, d'une telle importance, sitôt abandonnée ! Se départir du seul Dieu vivant et vrai, pour suivre Baal et Astarté ! Tant que Josué et les anciens vivaient, leur présence et leur influence avaient gardé Israël d'une apostasie ouverte, mais à peine ces digues morales sont-elles ôtées, que le sombre courant de l'idolâtrie les envahit et emporte le fondement même de la foi nationale. L'Éternel, le Dieu d'Israël, était remplacé par les divinités mâles et femelles. L'influence humaine est un pauvre appui, une faible barrière ; il nous faut être soutenus par la puissance de Dieu, autrement, tôt ou tard, nous succomberons. La foi, maintenue simplement par la sagesse des hommes et non par la puissance de Dieu, sera sûrement démontrée faible et sans valeur ; elle ne résistera pas au jour de l'épreuve, ne supportera pas la fournaise, et défaillira inévitablement.

 

En second lieu, la foi ne suffit pas, il doit y avoir un lien vivant entre l'âme et Dieu. Nous devons avoir affaire avec Dieu pour nous-mêmes, individuellement, autrement lorsque le temps de l'épreuve surviendra nous succomberons. L'exemple et l'influence de l'homme sont bons à leur place ; il était bon de considérer comment Josué et les anciens suivaient le Seigneur ; cette parole est vraie : « Le fer s'aiguise par le fer, et un homme ranime le visage de son ami» (Prov. 27, 17). Il est très encourageant d'être entouré de coeurs réellement dévoués ; très doux d'être soutenu par le courant d'une fidélité collective à Christ, à sa Personne et à sa cause. Mais si c'est tout, si la source profonde d'une foi et d'une connaissance personnelles n'existe pas ; s'il n'y a pas lien formé et maintenu en Dieu dans une communion individuelle avec Lui, lorsque le courant de l'influence humaine décline, que les appuis humains manquent, lorsqu'en un mot, la décadence générale commence, alors, en principe, nous serons semblables à Israël qui suivait l'Éternel, tous les jours de Josué et des anciens, et qui finit par abandonner la confession de son Nom, pour retourner aux folies et aux vanités de ce présent siècle - choses nullement meilleures, en réalité, que Baal et Ashtaroth.

Mais, d'un autre côté, quand le coeur est fermement établi dans la vérité et la grâce de Dieu ; quand nous pouvons dire - et c'est le privilège de tout vrai croyant « Je sais qui j'ai cru, et je suis persuadé qu'il a la puissance de garder ce que je lui ai confié, jusqu'à ce jour-là » (2 Tim. 1, 12), alors même que tous se détourneraient de la confession publique de Christ, que tout secours humain viendrait à manquer, « le fondement de Dieu » demeurerait aussi solide que jamais pour nous, et le sentier de l'obéissance aussi distinct devant nous que si des milliers d'âmes le foulaient avec décision et une sainte énergie.

Nous ne devons pas perdre de vue le fait que, selon les décrets divins, l'Église professante de Dieu doit retirer de profondes et saintes leçons de l'histoire d'Israël, « car toutes les choses qui ont été écrites auparavant, ont été écrites pour notre instruction, afin que, par la patience et par la consolation des Écritures, nous ayons espérance » (Rom. 15, 4).

Cependant il n'est nullement nécessaire, pour retirer cette instruction des écrits de l'Ancien Testament, que nous nous occupions à rechercher des analogies fantastiques, des théories extraordinaires ou des illustrations hasardées. Combien d'âmes, hélas ! en faisant ainsi, ont été entraînées à de folles et vides conceptions, sinon à de mortelles erreurs, au lieu de trouver « la consolation des Écritures ».

C'est avec les faits réels rapportés par les pages de l'histoire inspirée, que nous avons affaire ; il faut les étudier avec soin, puisque de grandes leçons pratiques peuvent en être retirées. Ce fait, par exemple, que nous venons de faire ressortir dans l'histoire d'Israël, savoir l'abandon de la vérité même qu'ils avaient été spécialement appelés à maintenir et à confesser, au sujet de l'unité de la divinité, ce fait, dis-je, est pour nous un avertissement de la plus grande importance. L'existence même d'Israël, comme nation, dépendait de cette vérité glorieuse, et ils l'abandonnèrent. L'eussent-ils retenue fermement, ils auraient été invincibles, mais en l'abandonnant, ils perdaient tout et devenaient pires que les nations qui les environnaient, en tant qu'ils péchaient contre la lumière et la connaissance, ayant les yeux ouverts, en dépit des plus solennelles exhortations, et ajoutons encore, malgré leurs protestations et leurs promesses d'obéissance souvent répétées.

 

Oui, lecteur, Israël abandonna le culte du seul Dieu vivant et vrai, l'Éternel Elohim, le Dieu de leur alliance ; non seulement leur Créateur, mais leur Rédempteur ; Celui qui les avait retirés d'Égypte, conduits à travers la mer Rouge, le désert et le Jourdain, pour les établir triomphalement sur l'héritage qu'il avait promis à Abraham, leur père : « Pays ruisselant de lait et de miel, qui est un ornement entre tous les pays » (Ezéch. 20, 6). Ils se détournèrent de Lui et s'adonnèrent au culte des faux dieux. « Ils le provoquèrent à colère par leurs hauts lieux, et l'émurent à jalousie par leurs images taillées » (Ps. 78, 58). Combien cela paraît étonnant, qu'un peuple qui avait autant vu et connu de la bonté et de la grâce de Dieu, qui avait été témoin de ses actes de puissance, de sa fidélité, de sa majesté, de sa gloire, ait pu en venir à se prosterner devant une bûche de bois ! Leur histoire entière, depuis les jours du veau d'or, au pied du mont Sinaï, jusqu'au temps où Nébucadnetsar réduisit Jérusalem en ruines, toute cette histoire est marquée par un esprit d'invincible idolâtrie. Ce fut en vain que l'Éternel, dans sa patiente miséricorde, leur suscita des libérateurs pour les soustraire aux terribles conséquences de leur péché et de leur folie. Plusieurs fois, dans sa bonté inépuisable, il les délivra de la main de leurs ennemis, leur suscitant un Othniel, un Ehud, un Barak, un Gédéon, un Jephthé, un Samson, tous ces instruments de sa puissance et de sa miséricorde, témoins de son tendre amour et de ses compassions envers son peuple rebelle. A peine chacun de ces juges avait-il disparu de la scène, que la nation se plongeait de nouveau dans l'idolâtrie.

 

Au temps des rois, nous voyons la même affligeante histoire. Nous découvrons, il est vrai, quelques points brillants, quelques étoiles lumineuses à travers les tristes ténèbres de l'histoire d'Israël ; nous avons un David, un Asa, un Josaphat, un Ezéchias, un Josias, - autant d'exceptions bénies et rafraîchissantes à la funeste règle. Mais ces hommes même ne purent extirper du coeur de la nation, cette racine d'idolâtrie. Au milieu des splendeurs sans pareilles du règne de Salomon, cette racine produisit des rejetons sous forme de hauts lieux, élevés à Ashtaroth, déesse des Sidoniens, à Milcom, l'abomination des Ammonites ; et à Kemosh, l'abomination de Moab.

Arrêtez-vous un instant, lecteur, et représentez-vous l'écrivain de l'Ecclésiaste et des Proverbes, se prosternant dans le temple de Moloch ! Est-il possible de se représenter le plus sage et le plus glorieux des monarques d'Israël, brûlant de l'encens, et offrant des sacrifices sur l'autel de Kémosh? N'y a-t-il pas là, pour nous, quelque instruction à retirer ? Le règne de Salomon fournit une des preuves les plus frappantes du fait qui nous occupe maintenant, savoir l'apostasie complète d'Israël quant à l'unité de la divinité - leur esprit invincible d'idolâtrie. La vérité qu'ils auraient dû maintenir avant tout, fut abandonnée la première.

Nous ne voulons pas rechercher d'autres preuves, ni nous arrêter à l'épouvantable description du jugement de la nation, conséquence de son idolâtrie. La condition actuelle de ce peuple est celle dont parle le prophète Osée : « Car les fils d'Israël resteront beaucoup de jours sans roi, et sans prince, et sans sacrifice, et sans statue, et sans éphod ni théraphim » (Osée 3, 4). « L'esprit immonde d'idolâtrie est sorti d'eux » pendant ces « beaucoup de jours », pour retourner bientôt avec « sept autres esprits plus méchants que lui-même » (Luc 11, 24-26) - la perfection même de la méchanceté spirituelle. Et alors surviendront des jours de tribulation incomparable pour ce peuple si longtemps égaré et révolté, « le temps de la détresse pour Jacob » (Jér. 30, 7).

Mais, Dieu soit béni, la délivrance viendra. Des jours de bonheur sont réservés à la nation restaurée, - « jours du ciel sur la terre », - comme nous dit aussi le prophète Osée : « Ensuite, les fils d'Israël retourneront, et rechercheront l'Éternel, leur Dieu, et David, leur roi, et se tourneront avec crainte vers l'Éternel et vers sa bonté, à la fin des jours » (Osée 3, 5). Toutes les promesses de Dieu à Abraham, Isaac, Jacob et David, s'accompliront; toutes les brillantes prédictions des prophètes, d'Esaïe à Malachie, auront un glorieux accomplissement, car « l'Ecriture ne peut être anéantie » (Jean 10, 35). A la longue nuit, succédera le plus glorieux jour qui ait jamais brillé sur la terre ; la fille de Sion se réchauffera aux rayons du « soleil de justice » ; et « la terre sera pleine de la connaissance de la gloire de l'Éternel, comme les eaux couvrent le fond de la mer » (Hab. 2, 14).

Il serait fort intéressant de reproduire ici les beaux passages des prophètes, concernant l'avenir d'Israël ; mais notre désir était seulement d'attirer l'attention sur l'application pratique du fait solennel de l'abandon si prompt et si complet que fit Israël de cette vérité : « Écoute, Israël : L'Eternel, notre Dieu, est un seul Éternel ».

On demandera peut-être : «En quoi ce fait peut-il intéresser l'Église de Dieu ? » Notre conviction est qu'il a pour elle une portée des plus solennelles ; et nous croirions manquer à notre devoir envers Christ et envers son Église, en négligeant de signaler cette application.

En considérant l'histoire de l'Église de Dieu, comme témoin public de Christ sur la terre, nous voyons qu'à peine établie dans toute la plénitude des bénédictions et des privilèges qui ont marqué le début de sa carrière, elle commença à laisser échapper les vérités mêmes que le chrétien était spécialement responsable de maintenir et de confesser, et qui devaient caractériser le christianisme et le distinguer de tout ce qui avait précédé. Comme Adam au jardin d'Eden, comme Noé sur la terre restaurée, comme Israël en Canaan, l'Église, à peine établie comme dispensateur responsable des mystères de Dieu, commença son déclin et sa chute. Sous les yeux mêmes des apôtres, des erreurs et des maux surgirent, travaillant à miner les fondements mêmes du témoignage de l'Église.

Les preuves de ce fait abondent. Écoutez les paroles de l'apôtre, qui a répandu plus de larmes sur la ruine de l'Église qu'aucun autre homme : « Je m'étonne », dit-il, « de ce que vous passez si promptement de celui qui vous a appelés par la grâce de Christ, à un évangile différent, qui n'en est pas un autre ». « 0 Galates insensés, qui vous a ensorcelés, vous devant les yeux de qui Jésus Christ a été dépeint, crucifié au milieu de vous ? » « Mais alors, ne connaissant pas Dieu, vous étiez asservis à ceux qui, par leur nature, ne sont pas dieux : mais maintenant, ayant connu Dieu, mais plutôt ayant été connus de Dieu, comment retournez-vous de nouveau aux faibles et misérables éléments auxquels vous voulez encore derechef être asservis ? Vous observez des jours, et des mois, et des temps, et des années » ; fêtes soi-disant chrétiennes, très imposantes devant la nature religieuse, et satisfaisant la chair ; mais dont la signification, d'après le jugement de l'apôtre et celui du Saint-Esprit, était simplement d'abandonner le christianisme pour retourner au culte des idoles. L'apôtre ajoute : « Je crains quant à vous », (et quoi d'étonnant, quand ces Galates avaient pu si promptement se détourner des grandes vérités caractéristiques d'un christianisme céleste, pour s'occuper d'observances superstitieuses ?) « que peut-être je n'aie travaillé en vain pour vous ». « Vous couriez bien, qui est-ce qui vous a arrêtés pour que vous n'obéissiez pas à la vérité ? La persuasion ne vient pas de celui qui vous appelle. Un peu de levain fait lever la pâte tout entière » (Gal. 1, 6 ; 3, 1 ; 4, 8-11 ; 5, 7-9).

Tout ceci se passait au temps même de l'apôtre. L'abandon de la vérité fut encore plus rapide que dans le cas d'Israël ; car ils avaient servi l'Éternel tous les jours de Josué, et tous les jours des anciens qui lui survécurent ; mais, dans la triste et humiliante histoire de l'Eglise, l'ennemi réussit presque immédiatement à introduire du levain dans la farine, de l'ivraie parmi le blé. Avant même que les apôtres eussent disparu de la scène, une semence avait été jetée, qui continuera dès lors à produire ses fruits pernicieux, jusqu'à ce que des moissonneurs angéliques viennent nettoyer le champ.

 

Cherchons des preuves de la chose dans l'Écriture. Écoutons le même témoin inspiré, épanchant, à la fin de son ministère, son coeur dans celui de son bien-aimé fils Timothée : « Tu sais ceci, que tous ceux qui sont en Asie, du nombre desquels sont Phygelle et Hermogène, se sont détournés de moi ». Et encore : « Il y aura un temps où ils ne supporteront pas le sain enseignement ; mais, ayant des oreilles qui leur démangent, ils s'amasseront des docteurs selon leurs propres convoitises, et ils détourneront leurs oreilles de la vérité et se tourneront vers les fables » (2 Tim. 1, 15; 4,3-4).

Tel est le témoignage de l'homme qui, en sage architecte, avait posé les fondements de l'Église. Et quant à ses propres expériences personnelles, qu'en était-il ? Comme son Maître, il avait été abandonné, délaissé par ceux qui, une fois, s'étaient rassemblés autour de lui, dans toute la fraîcheur et l'ardeur, des premiers temps. Son coeur large et aimant avait été brisé par des docteurs judaïsants, qui cherchaient à renverser les fondements mêmes du christianisme et la foi des élus de Dieu. Il pleurait sur les voies de ceux qui, tout en faisant profession, étaient néanmoins « ennemis de la croix de Christ ».

En un mot, l'apôtre Paul, de sa prison à Rome, prévoyait la décadence et la ruine du corps professant, et un sort pareil à celui du vaisseau dans lequel il avait fait son dernier voyage.

 

Rappelons ici que nous ne sommes occupés maintenant que de la question de l'Église, dans son caractère de témoin responsable pour Christ sur la terre ; il importe d'être au clair là-dessus, pour ne pas laisser nos pensées s'égarer à ce sujet. On ne saurait être assez exact à faire la distinction entre l'Église comme corps de Christ, et l'Église comme luminaire ou témoin de Christ dans le monde. Dans ce premier caractère, il ne peut y avoir de déchéance, tandis que dans le dernier, la ruine est complète et sans espoir.

L'Eglise, comme corps de Christ, unie à sa Tête vivante et glorifiée dans les cieux, par la présence et l'habitation du Saint-Esprit, ne peut jamais, par aucun moyen faillir, - jamais être brisée, comme le vaisseau de Paul, par les orages et les flots d'un monde hostile ; l'Église, dis-je, est aussi à l'abri que Christ lui-même. La Tête et le corps sont un - indissolublement liés. Aucune puissance sur la terre ou dans l'enfer ne pourra jamais toucher ou attaquer le plus faible ou le plus obscur des membres de son corps. Tous les membres ont la même position devant Dieu, tous sont sous son oeil miséricordieux dans la plénitude, la beauté et l'acceptation de Christ lui-même. Telle qu'est la Tête, tels sont les membres - tous les membres ensemble - chaque membre en particulier. Tous ont droit aux pleins résultats éternels de l'oeuvre accomplie sur la croix. Il ne peut être question ici de responsabilité. La Tête s'est rendue responsable pour les membres, a parfaitement répondu à toutes les obligations, et nous a déchargés de toute responsabilité. Il ne reste rien qu'amour, - un amour aussi profond que le coeur de Christ, parfait comme son oeuvre, invariable comme son trône. Toute question qui aurait pu être soulevée contre quelque individu, ou collectivement contre tous les membres de l'Église de Dieu, a été définitivement réglée, entre Dieu et son Christ sur la croix.

Tous les péchés, toute la culpabilité de chaque membre individuellement, et de tous les membres collectivement, - oui, tout, et cela de la manière la plus entière et la plus absolue, a été mis sur Christ et porté par Lui. Dieu, dans son inflexible justice, et sa sainteté infinie, a ôté tout ce qui pouvait s'opposer au plein salut, et à la bénédiction parfaite de chacun des membres du corps de Christ, de l'Assemblée de Dieu. Chaque membre du corps subsiste par la vie de la Tête. Tous sont unis ensemble par la puissance d'un lien qui ne peut jamais être dissout.

Comprenons bien, en outre, que l'unité du corps de Christ est absolument indissoluble ; c'est là un point essentiel qui doit être fidèlement maintenu. Mais évidemment, si l'on ne croit pas cette vérité, on ne peut ni la maintenir, ni la confesser ; et à en juger d'après certaines opinions émises à ce sujet, on est tenté de se demander si cette belle vérité de l'Unité du corps de Christ, - unité maintenue sur la terre par l'habitation du Saint-Esprit, - a jamais été saisie dans son sens divin, par les personnes qui expriment ces opinions.

Par exemple, nous entendons parler de « diviser le corps de Christ », ce qui est une grave erreur, la chose étant complètement impossible. Les réformateurs furent accusés de rompre ou de désunir le corps de Christ, lorsqu'ils tournèrent le dos au système romain. Cela revenait simplement à la monstrueuse présomption que cette vaste masse de mal moral, d'erreurs doctrinales, de corruption ecclésiastique et de superstition avilissante, devait être reconnue comme le corps de Christ ! Comment, avec le Nouveau Testament en main, aurait-il été possible de considérer la soi-disant église de Rome et ses abominations sans nom et sans nombre, comme étant le corps de Christ ? Comment, avec la plus faible idée de ce qu'est la vraie Église de Dieu, quelqu'un penserait-il jamais à accorder ce titre au Romanisme, sombre amas de méchanceté, le plus grand chef d'oeuvre de Satan que le monde ait jamais contemplé ?

Non, lecteur ; il ne faut jamais confondre les systèmes ecclésiastiques de ce monde, - anciens ou modernes, grecs, latins, anglicans, nationaux ou populaires, établis ou dissidents, avec la vraie Eglise de Dieu, le corps de Christ. Il n'existe de nos jours et n'exista jamais un système religieux, comme qu'il se nomme, qui possède le moindre droit d'être appelé « l'Eglise de Dieu » ou « le corps de Christ ». Par conséquent, on ne peut à juste titre et intelligemment appeler schisme ou division du corps de Christ, la séparation d'avec de pareils systèmes ; au contraire, le devoir de toute âme qui désire maintenir fidèlement et confesser la vérité de l'unité du corps est de se séparer avec décision de tout ce qui s'appelle faussement une église. On ne peut appeler schisme que l'acte de se séparer de ceux qui, indubitablement et infailliblement, se rassemblent sur le terrain de l'Assemblée de Dieu.

 

Aucun corps de chrétiens ne peut maintenant revendiquer le droit au titre de corps de Christ, ou d'Eglise de Dieu. Les membres de ce corps sont dispersés partout ; ils se trouvent dans toutes les diverses organisations religieuses du jour, excepté dans celles qui nient la divinité de notre Seigneur Jésus Christ, car impossible d'admettre l'idée que quelque vrai chrétien que ce soit, puisse continuer à fréquenter un endroit où son Seigneur est blasphémé. Mais quoique aucun corps de chrétiens n'ait droit au titre d'Assemblée de Dieu, tous les chrétiens sont responsables de se réunir sur le terrain de cette Assemblée et sur aucun autre.

Et si l'on nous demande : « Comment reconnaître et où trouver ce terrain ? » nous répondrons : « Lorsque ton oeil est simple, ton corps tout entier aussi est plein de lumière » (Luc 11, 34). « Si quelqu'un veut faire sa volonté, il connaîtra de la doctrine si elle est de Dieu » (Jean 7, 17). Il y a un sentier, - Dieu en soit béni, - « que l'oiseau de proie ne connaît pas et que l'oeil du vautour n'a pas aperçu ». La vue naturelle la plus pénétrante ne peut voir ce sentier ; le lion ne l'a pas traversé. Où est-il donc ? A l'homme, à chacun de nous, Dieu dit : « Voici la crainte du Seigneur, c'est là la sagesse ; et se retirer du mal est l'intelligence » (Job 28, 7, 28).

Il y a une autre expression dont se servent assez souvent des personnes desquelles on pourrait attendre plus d'intelligence, savoir « retrancher les membres du corps de Christ » (1). Ceci aussi est impossible. Pas un seul membre du corps de Christ ne peut être séparé de la Tête, ou même ôté de la place dans laquelle le Saint-Esprit l'a incorporé, d'après les desseins éternels de Dieu, et en vertu de l'expiation accomplie par notre Sauveur. Les trois personnes divines en une, sont le gage de l'éternelle sécurité du plus faible des membres du corps, et la cause du maintien de l'unité indissoluble du corps tout entier.

En un mot, il est aussi vrai aujourd'hui que lorsque l'apôtre inspiré écrivait le 4 ème chapitre de son épître aux Ephésiens, que « il y a un seul corps», dont Christ est la tête, dont le Saint-Esprit est la puissance créatrice, et dont tous les vrais croyants sont les membres. Ce corps a été sur la terre depuis le jour de la Pentecôte ; il est encore sur la terre et continuera d'y être, jusqu'au moment qui approche rapidement, où Christ viendra l'introduire dans la maison de son Père. Il en est de ce corps dans la succession continue de ses membres, comme, par comparaison, d'un certain régiment de l'armée de la Reine ayant été à Waterloo, maintenant en garnison à Aldershot, et qui ne reste pas moins le même régiment, quoique pas un des hommes dont il est composé aujourd'hui n'ait existé lors de la mémorable bataille de 1815. Le lecteur éprouve-t-il encore quelque difficulté à comprendre tout ceci ? Il se peut qu'il trouve difficile, en présence de la condition actuelle si affligeante des membres de ce corps, de croire et de confesser l'unité inviolable du corps. Il peut être tenté de limiter l'application de Eph. 4, 4, aux jours où l'apôtre écrivait ces mots, lorsque les chrétiens étaient manifestement unis ; lorsqu'il ne pouvait être question d'être membre de telle ou de telle église, parce que tous les croyants étaient membres de la seule Eglise (2) de Dieu.

En réponse à cette objection, nous devons protester contre l'idée de limiter ainsi la parole de Dieu. Quel droit avons-nous de séparer un membre de phrase d'Eph. 4, 4-6, et de dire qu'il s'applique seulement aux jours des apôtres ? Si une clause peut être limitée,' pourquoi pas toutes ? N'y a-t-il pas encore « un seul Esprit, un seul Seigneur, une seule foi, un seul baptême, un seul Dieu et Père de tous ? » Quelqu'un mettra-t-il cette vérité en question ? Sûrement pas. Eh bien donc, il en résulte qu'il y a aussi sûrement un seul corps et un seul Esprit, qu'il y a un seul Seigneur et un seul Dieu. Tous sont intimement liés ensemble, et vous ne pouvez toucher à l'un sans les toucher tous. Nous n'avons pas plus le droit de nier l'existence de ce corps, que de nier l'existence de Dieu, en tant que le même passage qui nous déclare une de ces vérités nous déclare l'autre aussi.

Quelqu'un, sans doute, nous demandera encore « Où peut-on voir ce seul corps ? N'est-ce pas une absurdité de parler d'une telle chose que l'unité, en face des innombrables dénominations de chrétiens ? » Nous répondons ceci : « Conviendrait-il d'abandonner la vérité de Dieu, parce que l'homme a manqué de la maintenir et cela d'une manière aussi signalée ? Israël n'a-t-il pas complètement manqué à maintenir et à confesser la vérité de l'unité de la divinité ? et cette glorieuse vérité a-t-elle été, en quelque manière, atteinte par ces manquements ? N'était-il pas aussi vrai qu'il n'y avait qu'un Dieu, lorsque les, autels idolâtres étaient aussi nombreux que les rues de Jérusalem, et que de chaque toit de maison, un nuage d'encens était envoyé à la reine des cieux, que lorsque Moïse prononça aux oreilles de la congrégation entière, ces paroles : « Écoute Israël : L'Éternel, notre Dieu, est un seul Éternel ? » Grâce à Dieu, sa vérité ne dépend pas des voies infidèles et insensées des hommes ; elle demeure dans sa propre intégrité divine ; elle brille de son propre éclat céleste, en dépit des manquements les plus grossiers de l'humanité. S'il n'en était pas ainsi, que ferions-nous ? Où nous tournerions-nous, et qu'en adviendrait-il de nous ? De fait, cela revient à ceci que, si nous ne croyions que la faible mesure de vérité pratiquée par les hommes dans leurs voies, nous l'abandonnerions avec désespoir, et serions de tous les hommes les plus misérables.

Mais comment cette vérité de l'unité du corps peut-elle être maintenue pratiquement ? En refusant de reconnaître aucun autre principe de communion chrétienne, aucun autre terrain de rassemblement que Christ. Tous les vrais croyants devraient se réunir sur le simple terrain de communion du corps de Christ, et sur aucun autre. Ils devraient se réunir le premier jour de la semaine autour de la table du Seigneur et rompre le pain, comme membres d'un seul corps, suivant ce que nous lisons en 1 Cor. 10, 17 : « Car nous qui sommes plusieurs, sommes un seul pain, un seul corps, car nous participons tous à un seul et même pain ».

Cela est aussi vrai et aussi pratique aujourd'hui que lorsque l'apôtre s'adressait à l'assemblée de Corinthe. Il est vrai qu'il y avait des divisions à Corinthe, comme il y en a dans la chrétienté ; mais cela n'altérait en aucune manière la vérité de Dieu. L'apôtre blâmait les divisions : il les déclarait charnelles. Il n'avait aucune sympathie pour cette misérable idée émise quelquefois, que les divisions sont une bonne chose pour exciter l'émulation. Il croyait au contraire qu'elles étaient une très mauvaise chose - le fruit de la chair une oeuvre de Satan.

L'apôtre n'aurait pas non plus, nous en sommes certains, accepté cette explication populaire que les divisions dans l'Église sont comme autant de régiments avec des drapeaux divers, mais combattant tous sous le même chef. Cela ne saurait être vrai d'aucune manière. Cela ne peut avoir aucune application quelconque, mais est plutôt en contradiction flagrante avec ce fait distinct et emphatique : « Il y a un seul corps ».

Lecteur ! c'est une vérité glorieuse et qui demande toute notre attention. Examinons la chrétienté à sa lumière, ainsi que notre propre position. Est-ce que nous marchons d'une manière conforme à cette vérité ? Est-ce que nous la proclamons à la table du Seigneur, chaque premier jour de la semaine, comme c'est notre devoir sacré et notre précieux privilège de le faire ? Ne disons pas qu'il se présente des difficultés de toute espèce, des pierres d'achoppement, des faiblesses chez ceux qui font profession de se réunir de la manière dont nous venons de parler. Tout cela, hélas ! n'est que trop vrai, et nous devons nous y attendre. Satan met tout en oeuvre pour nous aveugler, afin que nous ne percevions. pas la grâce de Dieu envers son peuple ; mais n'écoutons pas ses suggestions. Il y a toujours eu et il y aura toujours des difficultés à surmonter pour agir d'après la précieuse vérité de Dieu ; l'une des principales se trouve peut-être dans la conduite inconsistante de ceux qui font profession de la pratiquer.

Mais il importe de faire une distinction entre la vérité et ceux qui la professent ; entre le terrain et la marche de ceux qui l'occupent. Ils devraient être d'accord, mais ils ne le sont pas ; et, par conséquent, nous sommes appelés à juger la conduite par le terrain et non le terrain par la conduite. Si nous voyions un agriculteur travailler d'après des principes que nous savons être excellents, tout en étant un mauvais agriculteur, que ferions-nous ? Nous rejetterions sa manière de travailler, tout en maintenant les principes.

Il n'en est pas autrement relativement à la vérité qui nous occupe. Il y avait à Corinthe des hérésies, des schismes, des erreurs, du mal sous toutes les formes. Eh bien ! la vérité de Dieu devait-elle être abandonnée comme un mythe, comme quelque chose de tout à fait impraticable ? Fallait-il y renoncer ? Les Corinthiens devaient-ils se réunir sur quelque autre principe ? Devaient-ils s'organiser sur quelque nouveau terrain ? Devaient-ils se grouper autour d'un autre centre ? Non, Dieu en soit béni ! Sa vérité ne devait pas être abandonnée un seul instant, quoique l'église de Corinthe fût déchirée par mille sectes et son horizon assombri par mille hérésies. Le corps de Christ était un, et l'apôtre déploie simplement à leurs yeux la bannière portant cette inscription bénie : « Vous êtes le corps de Christ, et ses membres chacun en particulier » (1 Cor. 12, 27).

Or ces paroles ne s'adressaient pas seulement à « l'assemblée de Dieu qui est à Corinthe », mais aussi « à tous ceux qui en tout lieu invoquent le nom de notre Seigneur Jésus Christ, et leur Seigneur et le nôtre ». Par conséquent, la vérité de l'unité du corps est permanente et universelle. Tout vrai chrétien est appelé à la reconnaître et à la pratiquer, et toute assemblée de chrétiens, en quelque lieu que ce soit, devrait être l'expression locale de cette grande et si importante vérité.

On demandera, peut-être, comment on pouvait dire à une assemblée : « Vous êtes le corps de Christ ? » N'y avait-il pas des saints à Ephèse, à Colosses et à Philippes ? Sans doute, et si l'apôtre leur eût écrit sur ce même sujet, il aurait pu leur dire de même : «Vous êtes le corps de Christ », en tant qu'ils étaient l'expression locale du corps, et non seulement cela, mais en s'adressant à eux, il pensait à tous les saints jusqu'à la fin de la carrière terrestre de l'Église.

Mais nous devons nous rappeler que l'apôtre ne pouvait donner ce titre à aucun ordre de choses humain, ancien ou moderne ; et, si même toutes ces diverses organisations, quel que soit le nom qu'on leur donne, étaient fondues en une, il ne pourrait les appeler « le corps de Christ». Ce corps est formé par tous les vrais croyants du monde entier. Si tous ne sont pas réunis sur ce terrain, seul divin, c'est à leur perte et au déshonneur de leur Seigneur. La précieuse vérité : « Il y a un seul corps », subsiste tout de même, et c'est à cette mesure divine que doivent se mesurer toutes les associations ecclésiastiques et tous les systèmes religieux sous le soleil.

Il nous semble nécessaire d'étudier à fond le côté divin de la question de l'Église, afin de sauvegarder la vérité de Dieu, et aussi afin que le lecteur comprenne clairement que lorsque nous parlons de la ruine complète de l'Église, nous avons en vue le côté humain du sujet. C'est à celui-ci que nous revenons.

Il est impossible de lire le Nouveau Testament avec attention et de ne pas voir que l'Église, en tant que témoin responsable pour Christ sur la terre, a totalement et honteusement manqué à sa mission. On remplirait un volume si l'on voulait citer tous les passages à l'appui de cette assertion. Mais examinons les chapitres second et troisième de l'Apocalypse, où l'Église est vue sous le jugement. Nous avons, dans ces chapitres solennels, ce que nous pouvons appeler une histoire divine de l'Église. Sept assemblées sont choisies comme symboles des diverses phases de l'histoire de l'Église, depuis le jour où elle fut placée sur la terre avec sa responsabilité, jusqu'au moment où elle sera vomie de la bouche du Seigneur, comme quelque chose de parfaitement intolérable. Si nous ne discernons pas que ces deux chapitres sont prophétiques aussi bien qu'historiques, nous nous privons d'un vaste champ de précieuses instructions. Aucun langage humain ne pourrait exprimer toutes les richesses que nous avons recueillies dans ces chap. 2 et 3 de l'Apocalypse, considérés sous leur aspect prophétique.


1) L'expression « retrancher les membres du corps de Christ», s'applique en général aux cas de discipline, ce qui est une fausse application. La discipline de l'assemblée ne peut jamais toucher à l'unité du corps. Un membre du corps peut manquer quant à la moralité, ou s'égarer de telle manière quant à la doctrine, que l'assemblée soit appelée à agir, en le privant de la Cène; mais cela n'a rien à faire avec sa place dans le corps. Les deux choses sont parfaitement distinctes.

2) L'unité de l'Église peut être comparée à une chaîne jetée à travers une rivière ; nous la voyons aux deux bords, mais elle plonge au milieu. Quoique cachée dans l'eau, elle, n'est pas rompue, et sans voir l'union du milieu nous y croyons néanmoins. L'Église a été vue dans son unité au jour de la Pentecôte; elle sera vue dans !son unité dans la gloire; et, quoique ne voyant pas cela maintenant, nous y croyons néanmoins fermement.
Souvenons-nous aussi que l'unité du corps est une grande vérité pratique fondamentale, dont une déduction très importante et pratique aussi, est celle-ci, que l'état et la marche de chaque membre affectent tout le corps : « Si un membre souffre, tous les membres souffrent avec lui » (1 Cor. 12, 26). Un membre de quoi? De quelque assemblée locale? Non; mais un membre du corps. Il ne faut pas faire du corps de Christ une question de géographie.
Mais, nous demandera-t-on peut-être, une chose que nous ne voyons ni ne connaissons, peut-elle nous affecter? Oui, assurément. Pouvons-nous limiter la grande vérité de l'unité du corps avec toutes ses conséquences pratiques, à la mesure de notre connaissance et de notre expérience personnelles? Loin de nous cette pensée ! C'est la présence du Saint-Esprit qui unit les membres du corps à la Tête et les uns aux autres ; de là vient que la marche et les voies de chaque individu affectent tout le corps. Même dans le cas d'Israël, dont l'unité n'était pas de corps mais nationale, lorsqu'Acan pécha, il est dit : « Israël a péché » ; et la congrégation tout entière eut à souffrir une humiliante défaite à cause d'un péché qu'elle ignorait.
Il est des plus étonnants de voir combien le peuple de Dieu paraît peu comprendre cette glorieuse vérité de l'unité du corps, et les conséquences pratiques qui en découlent.

 

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