Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

CHAPITRE III

Le secret de la persévérance

-------

« Et Daniel persévérait. » (Dan. 1,21).

« Gardés par la puissance de Dieu.» (1Pierre 1,5).


Nous sommes arrivés sur la hauteur ; jetons maintenant un coup d'oeil d'ensemble sur les étapes successives que nous venons de parcourir. Tout d'abord, nous avons vu que pour prétendre à la sainteté, il fallait être d'une honnêteté absolue avec notre Dieu et ne rien lui cacher de notre état. Chaque jour, à chaque heure, notre vie toute entière doit être comme un livre ouvert devant Dieu. Nous avons vu ensuite qu'en présence d'un péché, quel qu'il fût, nous devions aussitôt le confesser, et y renoncer - et pour le reste nous mettre avec abandon sans réserve entre les mains de Jésus-Christ. Nous avons vu enfin que cette oeuvre de purification n'était pas la nôtre, mais la sienne - et que par conséquent rien ne s'opposait à ce qu'elle fut complète, purification immédiate. Purification complète, purification immédiate : voilà ce qui se passe dans nos coeurs, à l'instant même où nous nous abandonnons, corps et âme, sans la moindre arrière-pensée, à notre Seigneur Jésus-Christ. Arrêtons-nous ici un moment. Quelle chose solennelle, quelle chose ineffable que cet abandon complet ! Il marque une crise dans la vie d'un homme. Quand je m'abandonne, je me donne tout entier, avec tout ce que j'ai et tout ce que je suis. Je gis comme une offrande sur l'autel, et alors le feu d'en Haut descend sur l'autel pour consumer le péché et purifier l'offrande. Après cette expérience, je ne peux plus être le même homme.

Reçois mon sacrifice, il est sur ton autel

Esprit, Esprit, descends ; j'attends le feu du ciel

Il y a, je le sais, bien des chrétiens qui ont connu cet abandon complet d'eux-mêmes, et c'était alors comme une immense vague de bénédictions qui passait sur eux. Heures bénies que celles-là ! Ils goûtaient une joie, une paix inconnues jusqu'alors. Ils tenaient écrasés sous leurs pieds leurs ennemis spirituels. Ineffable ravissement, mais de bien courte durée, hélas ! Car après la première fièvre d'enthousiasme, des questions se posaient anxieuses à leur esprit : cela durera-t-il ? Est-ce là une expérience d'un jour ou de tous les jours que je dois faire ? Cette paix, cette joie, si sensibles à mon âme, quand je m'abandonne à Dieu, puis-je les posséder toujours, et tous les jours ?

Oui, lecteur, cela est possible. Vous pouvez marcher avec Dieu, jour après jour, année par année. Que devez-vous faire pour cela ? C'est ce que nous allons examiner.

Bien des chrétiens traversent, dans leur vie, des heures spéciales de bénédiction : près de la table de communion, à une époque de réveil ou de grandes assemblées de croyants. Oh ! dans ces moments-là, ils ont des ailes d'aigle qui les transportent bien vite au-dessus des soucis et des misères d'ici-bas vers les sommets où brille le soleil. Malheureusement ils en redescendent pour y remonter plus tard, il est vrai, à une prochaine occasion, mais leur vie chrétienne n'est qu'une série d'accès spirituels, et le niveau en est généralement bas. Bouillants un jour, froids un autre jour, enthousiastes, puis découragés, tout feu, tout flamme pour le service et la gloire de Dieu, puis se demandant s'il vaut vraiment la peine de faire tant d'efforts. Leur vie est une suite de victoires et de défaites, surtout de défaites. Savez-vous ce qui arrive alors ? C'est que ces chrétiens s'imaginent que c'est l'état normal et qu'une vie spirituelle boiteuse est tout ce que nous pouvons rêver d'atteindre, au moins de ce côté-ci du tombeau.

Et portant Jésus n'a-t-il pas dit : « Demeurez en moi et moi en vous » (Jean 15,4) ? N'a-t-il pas promis des choses étonnamment merveilleuses à l'âme qui demeure en Lui ? (1Jean 3, 6.) Arrière donc cette idée que le chrétien est condamné à pécher ! Comme quelqu'un l'a dit : « Tout acte ou pensée coupables, toute orientation d'esprit ou de sentiments déplaisant à Dieu, est la négation même des premiers principes de l'Evangile ».

Mais, direz-vous, s'il en est ainsi, comment se fait-il que je succombe si souvent en face de la tentation ? Probablement parce que votre abandon au Seigneur Jésus n'a pas été complet - ou bien encore parce que votre abandon n'a pas été suivi d'une attitude d'absolue dépendance vis-à-vis du Sauveur. Si nous sommes appelés non seulement à entrer, mais à marcher dans le chemin de la sainteté, la foi agissante, par laquelle nous avons reçu l'esprit de purification doit être suivie de la foi confiante qui se repose sur Jésus, lequel seul peut nous mettre en état d'être vainqueur. Une vie sainte, avec ses victoires continues sur les tentations, sa certitude de toute la présence de Dieu, sa paix toujours renouvelée, son pouvoir conquérant, ne peut être réalisé seulement par des actes de consécration, si grands et si profonds qu'ils soient ; il faut les faire suivre d'une attitude journalière, continuelle de dépendance complète à l'égard de Jésus, notre Gardien.

Une foi confiante, voilà le secret de la victoire continuelle. « Il vous sera fait selon votre foi », a dit Jésus. Après une telle promesse, nous devons nous attendre à être gardés, gardés même à tel point que nous ne trouvions plus naturel de succomber à la tentation. C'est pour avoir douté de cette promesse que bien des chrétiens, et des chrétiens consacrés, comptent si peu de victoires dans leur vie. Ils se sont abandonnés dans une certaine mesure, mais ils ne peuvent pas comme l'apôtre, s'écrier : « je sais qui j'ai cru et je suis persuadé que celui-là a le pouvoir de garder mon dépôt jusqu'au grand jour » (2 Tim.1,12.) Eprouvez-vous vous-même, cher lecteur. Je suppose par exemple que votre plus grande difficulté jusqu'ici ait été votre caractère irascible. Eh bien ! vous ne pourrez le vaincre, ce caractère, tant que vous ne l'aurez pas placer comme un dépôt entre les mains du Seigneur Jésus. Ce matin vous avez fait votre prière ; vous avez dit à Dieu : Seigneur, garde-moi aujourd'hui ! Mais qu'est-il arrivé ensuite ? Avez-vous conservé pendant la journée, à travers vos soucis, vos travaux, vos difficultés cette attitude humble et confiante ? N'avez-vous pas craint de céder à l'irritation, à la mauvaise humeur, à la colère, au lieu de vous en remettre à Celui seul qui peut garder ? Ne voyez-vous pas que cette crainte est précisément une preuve que votre confiance en Jésus n'est pas complète ? Et alors votre paix ne peut pas être complète non plus. La moindre incrédulité à l'égard de la puissance de Dieu éloigne de nous ses plus précieuses bénédictions.

Si vous voulez vivre une vie vraiment sainte et marcher de progrès en progrès sur le chemin de la sainteté, permettez-moi de vous donner ces quelques conseils :

1° D'abord croyez absolument que la puissance du Seigneur peut vous garder. Bannissez de votre coeur le moindre doute à cet égard. Des milliers de chrétiens sont tombés parce qu'ils n'ont pas eu cette foi-là. Ils n'ont pas cru que Christ pût les garder. Pour eux la vie exempte de soucis et de peines, débarrassée complètement de l'amour de l'argent, de la gloire, la vie morte à l'égoïsme et vivante pour Dieu, est devenue un idéal qu'il faut se résigner à ne pouvoir atteindre. Ils n'ont cru qu'à une idée médiocre, agitée, incertaine ; et que pouvaient-ils attendre puisqu' « il vous sera fait selon votre foi » a dit Jésus ?

Ah ! cher lecteur, voulez-vous honorer Dieu ? Croyez que rien ne lui est impossible. Vous pouvez être désespérément faible, avoir perdu tout ressort moral, n'avoir même plus de volonté à votre service ; vous pouvez être esclave de vos appétits au milieu de circonstances particulièrement pénibles ; quel que vous soyez, quelles que soient vos circonstances, Jésus peut vous préserver de toute chute. Etes-vous perdu ? « Il peut sauver parfaitement » (Héb. 7, 25). Etes-vous tenté ? « Il est prompt à secourir » (Héb. 2, 18). Etes-vous sur le point de sombrer ? « Il peut vous relever » (Rom. 14, 4). Quel que soit votre besoin actuel, il peut y subvenir. « Dieu peut vous combler de toutes ses grâces, de sorte qu'ayant toujours et en tout votre suffisance, vous avez encore du superflu pour toutes les bonnes oeuvres » (2Cor 9, 8). « Tout pouvoir m'a été donné dans les cieux et sur la terre » (Matth. 28, 18). « Il peut faire pour nous beaucoup plus infiniment plus que tout ce que nous demandons ou pensons » (Eph. 3, 20).

2° Croyez ensuite que le Seigneur veut vous garder. Ici, le moindre doute peut être fatal. Certaines gens osent prétendre que Dieu permet parfois que nous tombions : Il lâche notre main ; ainsi ferait une mère avec son enfant, pour lui apprendre à marcher seul. Oui, certainement, mais il faut faire une distinction entre péché et infortune. Dieu, dans ses desseins mystérieux et miséricordieux, peut nous envoyer des épreuves - mais il ne peut pas vouloir que nous péchions. Sa volonté nous est révélée par ses commandements et il nous dit : « Soyez saints, car je suis saint. » Jésus ne nous permet aucune compromission avec le péché. Il est venu pour sauver son peuple de ses péchés (Matt. 1, 21). Alors pourquoi n'accomplirait-il pas jusqu'au bout cette mission ? Cher lecteur, cessez de répéter le « Si tu veux » (Matt. 8, 2), mais pensez au « Je le veux » (Matt. 8, 2), qui résonne, à travers les âges, aux oreilles de tous ceux qui cherchent en Dieu la toute-puissance.

3° Remettez-vous au Seigneur pour être gardés. C'est là l'orientation que votre vie doit avoir. Tout s'y attache. Si votre dépôt dans les mains de Christ n'est pas complet, votre foi ne vous sert de rien. La certitude que le Seigneur est puissant pour délivrer doit être accompagnée de confiance. Vous avez cru qu'il pouvait vous purifier, et il vous a purifié :croyez qu'il peut et qu'il veut vous garder pur, et il le fera. Si vous voulez ne jamais regarder en arrière et garder vivante dans votre âme la flamme de l'amour de Dieu, confiez-vous en lui et en lui seul. Sans cette confiance absolue, la vie « consacrée » n'est pas plus possible que la vie «  pardonnée .» Il y a des chrétiens qui disent : « Dieu a purifié notre coeur, nous allons maintenant avec son secours lire plus souvent notre Bible, prier avec plus de ferveur, être plus judicieux dans le choix des livres que nous lisons, des personnes que nous fréquentons, plus actifs au service de notre maître ; et nous ferons tout cela pour ne pas reculer, pour avancer, au contraire sur le chemin de la sainteté ». Ce sont là d'excellentes résolutions, mais si excellentes qu'elles soient, tout dépend de l'orientation d'esprit qui les anime. Si, au-dessus d'elles nous plaçons Jésus, très bien ! mais si elles nous le cachent et ramènent nos regards sur nous-mêmes, sur ce que nous faisons, ce que nous ressentons, elles deviennent impuissantes. Beaucoup font cette expérience, et en face de leur zèle qui diminue, de leur ferveur qui se refroidit ils se mettent à prier davantage, à lire la Bible davantage, à agir davantage, jusqu'au jour où ces exercices deviennent pour eux un fardeau insupportable. Cher lecteur ne mettez rien à la place de Jésus. Regardez à lui et à lui seul.

Est-ce à dire que nous ne devions pas lire la Bible, que nous puissions négliger la prière et les bonnes oeuvres ? Loin de moi une telle pensée ! Tout cela ne nous en deviendra que plus cher ! Savez-vous quel est le premier résultat d'un abandon complet ? C'est la joie que nous avons à de prier, de lire, de nous consacrer plus que jamais au service de Dieu. Mais ces choses ne sont plus pour nous le but, qui est et qui ne saurait être que Jésus, mais le moyen ; le moyen de maintenir et de fortifier notre communion avec le Sauveur, sur lequel seul nous nous reposons pour vaincre le péché, être saints et remplis d'amour pour Dieu. Cette communion ne se maintient pas d'elle-même. Comme la plante, elle demande un terrain pour se développer, et ce terrain, c'est précisément la prière, la lecture de la parole de Dieu, une vie chrétienne active. N'est-il pas vrai de dire que le sentiment que nous avons du Dieu-Amour s'évanouit bien vite chez celui qui ne prie pas, qui n'apprend pas dans la Bible comment il faut aimer se dévouer ? La vie de foi n'est donc pas inerte et passive. Ici, comme ailleurs, on n'a rien sans effort.

Au fond, il n'y a que deux vies possibles ici bas : la vie de celui qui veut soulever des fardeaux avec ses propres muscles et la vie de celui qui les soulève avec l'aide d'une machine puissante. Dans les deux cas il y a effort. Mais entre les deux efforts quelle différence ! Et entre les deux résultats quel abîme !Cher lecteur, cessez de regarder à vous pour avoir la victoire, mais placez-vous tout entier en face de votre avenir, entre les mains victorieuses du Seigneur Jésus.

Pour illustrer ce que nous venons de dire, lisons cette merveilleuse histoire qui est racontée au chapitre quatorze de saint Matthieu. Nous sommes transportés sur le lac de Galilée. La nuit est noire, le vent souffle en tempête, la mer est tourmentée. Au milieu des flots, nous apercevons une barque. Elle porte les disciples au Sauveur. Ceux-ci, pour obéir à l'un de ses ordres, veulent gagner l'autre rive, mais au prix de quels efforts ! Le vent est contraire, les vagues sont hautes et Jésus n'est pas là. Ils se fatiguent à ramer et ils n'avancent que lentement. Et ils croient que cela va durer ainsi jusqu'au terme du voyage. Mais voici qu'à travers l'obscurité, ils aperçoivent tout d'un coup une forme humaine s'avançant sur les flots. Ils sont effrayés tout d'abord, mais ce sentiment de crainte disparaît bien vite lorsqu'ils reconnaissent la voix de leur maître : « Rassurez-vous, c'est moi, n'ayez point de peur ! » La vue de Jésus marchant sur les eaux fut pour eux une révélation. Ce qu'ils n'avaient jamais cru possible se réalisait. L'un d'eux même rempli du désir de faire comme son maître, s'écria : « si c'est toi, Seigneur, commande que je vienne à toi sur les flots ! » Jésus ne le lui défendit pas. Il ne lui dit pas non plus que marcher sur les eaux n'était possible qu'au seul Fils de Dieu. Au contraire, il lui donne l'ordre : « Viens !» Et Pierre descendit de la barque, et voici « il marcha sur les flots et alla vers Jésus » (Matt. 14, 29).

Ce miracle n'est-il pas aussi une parabole ? N'y a-t-il pas des milliers et des milliers de chrétiens qui rament péniblement sur l'océan de la vie, se fatiguant à accomplir la volonté de leur Maître ? Tout d'abord ils s'imaginent qu'il n'y a de possible ici-bas qu'une existence de difficultés et de luttes. Puis, à mesure qu'ils étudient la vie du Sauveur, il reconnaissent en lui celui marcha un jour sur les eaux, celui qui put toujours dire : « Ta volonté fait mes délices, ô mon Dieu ; oui Ta loi est dans mon coeur »(Ps. 40, 9). Alors ils sont, comme Pierre tout pleins du désir de faire comme Jésus. Ils soupirent après cette paix et cette joie qui, au travers d'une vie tourmentée, n'ont jamais quitté le Seigneur. Ils lui disent : «  Seigneur, commande que je vienne à toi sur les flots ! » Et Jésus leur répond : « Venez ! »

Lecteur pensez-y bien. Le Christ vous dit que votre vie peut être ce qu'elle doit être, c'est-à-dire la sienne. Vous voyez donc ce qu'il faut faire. Pour marcher sur les flots, Pierre avait besoin d'une absolue confiance en la puissance du Seigneur. Il  savait que le Seigneur pouvait et voulait l'empêcher de s'enfoncer dans la mer ; dès lors, il ne craignait pas d'exposer sa vie en descendant de la barque.

Voilà ce que vous devez faire. Si vous voulez vivre une vie sainte, débordante de paix, de joie et de triomphes, appuyez-vous sur Jésus. Descendez donc de la barque. Christ vous appelle. Si vous le faites, vous sentirez sous vos pieds la mer dure comme un rocher - et quelle que soit la furie des vagues, si vous tenez toujours les yeux fixés sur le Maître, si votre main est toujours dans la sienne, vous marcherez victorieusement sur les eaux jusqu'au jour béni où vous aborderez au céleste rivage.


Chapitre précédent Table des matières Chapitre suivant