Il est écrit: TA PAROLE EST LA VERITE(Jean 17.17)... cela me suffit !

CHAPITRE IV

La vie en abondance

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«  Je suis venu pour qu'ils aient la vie, et pour qu'ils l'aient même en abondance. » (Jean 10, 10).

« Que nous marchions dans une vie nouvelle.» (Rom. 6, 4).


Nous avons vu dans les pages précédentes que pour atteindre la sainteté il faut tout d'abord faire un examen sérieux et complet de nous-mêmes, puis renoncer à l'instant même à tous les péchés dont nous avons conscience, enfin nous soumettre entièrement à Jésus, seul capable de nous purifier et de nous garder. Dans ce chapitre, nous voudrions énumérer quelques bénédictions spéciales qui nous paraissent être la conséquence nécessaire de cet abandon complet.

Si nous nous donnons à Jésus sans réserve et sans partage, comptant sur Lui et sur Lui seul pour toutes choses, nous aurons toujours la force de résister au mal, de vaincre une mauvaise habitude, etc., et cette force même nous étonnera, tant elle sera puissante et efficace. Etre consacré ne signifie pas être délivré de la tentation. C'est bien plutôt le contraire qui est vrai, car notre complet abandon à Jésus est un prétexte nouveau aux attaques de l'ennemi. C'est quand nous lui échappons qu'il nous attaque avec le plus de furie. N'oublions pas que le Fils de l'homme, celui qui était sans péché, fut constamment tenté (Héb. 4, 15), et qu'immédiatement après son baptême, quand le Saint-Esprit descendit sur lui il fut conduit dans le désert pour y être tenté (Marc 1, 12). Une vie sainte n'est pas une vie inerte, passive ; c'est une vie de combat. Mais c'est le combat de la foi(1Tim. 6, 12), et ce combat est une victoire. Nous ne pouvons échapper à la tentation, mais béni soit Dieu de ce que nous pouvons échapper à la défaite ! Quoique facilement irascibles, il nous sera possible de vaincre notre caractère et de rester calmes au milieu des circonstances les plus épouvantables, quoique portés à l'ennui, à la tristesse que causent les mille tracasseries de l'existence, nous nous trouverons possesseurs d'une paix qui surpasse tout entendement. Quand nous serons tentés d'envier le succès des autres, notre confiance en Jésus fera que nous nous en réjouirons ; quand nous serons tentés de porter des jugements peu aimables sur notre prochain, la même confiance élargira nos coeurs et augmentera notre amour.

La conséquence immédiate de notre abandon complet à Dieu, est que le péché n'a plus de pouvoir sur nous (Rom. 6, 14) ; le résultat de la vie selon l'Esprit est que nous n'accomplissons plus les désirs de la chair (Gal. 5, 16). Lorsque nous tombons, ce n'est pas parce que Jésus ne peut ou ne veut nous garder, c'est parce que notre confiance en Lui n'est pas entière. Quand donc apprendrons-nous qu'il n'y absolument aucune nécessité à ce que nous péchions ?

Il y a deux méthodes bien différentes qu'on peut employer pour faire face aux tentations qui nous environnent. La première consiste à prendre en nous tout ce qu'il y a de volonté et d'énergie et à appeler ensuite Dieu à notre aide. J'attaque ainsi la tentation en face, avec la détermination de la surmonter ; et pour fortifier cette détermination, je me sers de tous les moyens possibles : le raisonnement, la prière, la lecture de la Bible. La seconde méthode consiste, au contraire, dès que la tentation m'assaille, à me mettre entre les mains de Jésus, lui disant : « Seigneur, voici la tentation, je me repose sur Toi, garde-moi ! » C'est ainsi qu'au lieu de dresser mes énergies en face de la tentation, je les emploie à me réfugier en Jésus.

Comme on le voit, dans les deux cas, il y a effort. Mais, tandis que dans le premier tout l'effort consiste à vaincre la tentation, dans le second, tout l'effort consiste à réaliser et à maintenir la communion avec le Seigneur.

La première méthode pourrait être appelée méthode morale. Elle est enseignée par les philosophes, par un grand nombre de prédicateurs et suivie par la plupart de ceux qui font profession de christianisme. Son résultat, nous le connaissons : c'est l'âme en détresse qui s'écrie avec un accent désespéré : « Ah ! misérable que je suis, qui me délivrera de ce corps de mort ! »

La seconde pourrait être appelée méthode spirituelle. Son résultat, c'est l'âme qui enfin a trouvé la paix et qui chante ce beau cantique : « Il n'y a plus aucune condamnation pour ceux qui sont en Jésus-Christ ; la loi de l'Esprit de vie qui est en Jésus-Christ m'a affranchi de la loi du péché et de la mort (Rom. 8, 2) ».

Ai-je besoin maintenant de dire quelle méthode je recommande ?

Comme on le voit, les victoires du chrétien ne sont pas ses victoires à lui. Elles sont l'oeuvre de la puissance de Dieu. L'orgueil spirituel est donc une chose impossible, et ce qui doit exister dans le coeur du croyant, c'est bien plutôt la plus profonde humilité. Plus il se repose en effet sur Jésus, plus il devient conscient de son impuissance. Plus aussi il apprend à se connaître et à découvrir dans sa vie de nouveaux péchés qui ne lui avaient pas encore été manifestés. A la lumière et dans la communion de l'Esprit Saint, nous reconnaissons qu'il manque toujours quelque chose à notre sainteté.

On voit combien nous sommes loin de prêcher cette doctrine, d'ailleurs si contraire à l'Ecriture, de la perfection absolue. On a toujours des progrès à faire dans la voie de la justice et de l'amour… mais on voit aussi quelle puissance merveilleuse de pureté et de vie Dieu met à notre disposition ! On a dit : la sainteté est une chose impossible ; ceux qui la prêchent n'ont qu'une vue superficielle du péché et de son redoutable empire. Nous répondrons que nous sommes plus que quiconque pénétrés de ce que le péché renferme de tragique et de terrible. Mais ce sentiment est loin de nous écraser, car nous savons que là où « le péché a abondé, la grâce surabonde» (Rom. 5, 20). Nous savons que le péché est une puissance extraordinaire, invincible pour nous pauvres pécheurs, mais nous savons aussi que la puissance de Christ ressuscité des morts est encore plus forte. Nous croyons que le péché plonge en nous de profondes racines, mais nous croyons aussi que le Saint-Esprit peut aller plus profond encore. Souvenons-nous donc que plus nous avancerons dans le chemin de la sainteté, plus nous aurons le sentiment de nos péchés ; mais n'oublions pas que pour avancer, il faut que s'augmente aussi notre confiance en Jésus, seul capable de sauver et de garder, même à la dernière extrémité, tous ceux qui s'approchent de Dieu par lui.

Un autre résultat de l'abandon complet est que nous n'aurons plus peur de tomber. Quelle bénédiction que celle-là ! Etre débarrassé de la peur, ce sentiment qui au fond déshonore Dieu et qui de plus nous rend déjà les esclaves du péché. Le soldat qui a peur est à moitié battu. Le chrétien qui a peur est à moitié vaincu. Que de chrétiens dans cette terrible situation ! Le tentateur s'est efforcé de leur faire croire que le péché est irrésistible, et malheureusement il n'y a que trop bien réussi. En les pressant de se garder avec soin de cette erreur : l'absolue perfection, il les fait tomber dans une autre erreur plus dangereuse : le péché inévitable. Il leur a fait croire que, parce que l'homme est condamné jusqu'à son dernier soupir à garder en lui la tendance au mal, cette tendance doit nécessairement se traduire au dehors par des pensées impures, des paroles mauvaises, des actes coupables. Alors ils se sont levés pour combattre mais sans espoir de succès, se sentant déjà vaincus d'avance et… ils sont tombés.

Ah ! quand une âme se repose en Jésus, quel changement de situation ! Quand notre confiance est en lui, nous n'avons plus peur. Quand nous sentons que ce n'est pas nous qui combattons, mais que c'est Lui, nous n'avons plus le moindre doute sur l'issue de la bataille. Nous savons qu'en toutes choses, nous sommes « plus que vainqueurs par celui qui nous a tant aimés » (Rom. 8, 37). C'est ainsi que nous voyons disparaître du ciel ce nuage noir qui l'assombrissait et qui s'appelle : la frayeur.

Un autre fruit de la vie consacrée, c'est la paix. La paix est la marque caractéristique de la sainteté ; c'est elle qui ressort d'une manière toute particulière dans la personne de notre sauveur. Cette paix, il veut la communiquer à tous ses disciples. Ne leur a-t-il pas dit : «  je vous laisse la paix, je vous donne ma paix ! » (Jean 14, 27). Et pourtant combien peu la possède ! La vie de beaucoup d'enfants de Dieu est tout aussi pleine d'ennuis et de soucis que celle des enfants du monde. Ils n'ignorent pas ce qu'est la paix avec Dieu (Rom. 5, 1), mais ils ne savent rien ou presque rien de la paix de Dieu (Phil.4, 7). Ils gémissent, courbés sous leurs fardeaux, toujours inquiets, toujours agités, si bien que les incrédules se demandent ce que peuvent bien valoir leur religion et leur Sauveur. Et il ne peut en être autrement, puisque ces chrétiens n'ont pas encore remis tous leurs ennuis et tous leurs soucis entre les mains de Jésus. Ils n'ont pas encore compris que la paix n'est possible qu'à cette condition : s'abandonner complètement.

En effet, il est facile de voir que lorsque nous nous sommes donnés entièrement à Dieu, que notre regard est constamment tourné vers Lui, nous sommes sans inquiétude en face de l'avenir. La volonté divine est d'une clarté merveilleuse pour celui qui ne recherche pas la gloire de Dieu. Il se laisse conduire jour après jour, et il apprend à vivre au jour le jour, comme un enfant du Père céleste, sans s'embarrasser ni se tourmenter du lendemain. N'a-t-il pas mis toutes choses sous la garde de son Sauveur ?

Avec la paix, nous avons la joie. Je ne parle pas ici de cette première joie qui accompagne notre naissance spirituelle et qui est celle du pardon. Je parle d'une autre joie, d'une nouvelle joie, qui est le résultat d'une vie de consécration et qui ne se manifeste que chez le chrétien consacré. Savez-vous quel est un des plus grands obstacles au triomphe de l'évangile ? C'est l'absence de cette joie chez la plupart des chrétiens. Persuadons-nous bien que nous ne pouvons jamais amener des indifférents à Christ, source de bonheur, s'ils ne voient pas ce bonheur rayonner sur notre visage et pénétrer notre vie. Mais pour cela il faut que notre abandon soit complet. Et alors quelle joie débordante remplira notre coeur, joie pleine de gloire (1 Pierre 1, 8) et qu'aucune parole humaine ne peut décrire ! Elle ne nous dispensera pas des épreuves, mais elle sera plus grande encore que les épreuves. Ce sera la joie de Christ lui-même ; quand nous demeurons en lui, sa joie demeure en nous et notre joie est parfaite (Jean 15, 11).

Paix et joie, cela est beaucoup et pourtant à mon avis, il y a encore quelque chose d'infiniment précieux que nous apporte une communion complète avec Jésus : c'est une nouvelle conception de sa personne. A mesure que nous le connaissons, il grandit à nos yeux ; il nous apparaît comme un transfiguré. Bien des disciples du sauveur ont fait cette expérience et se sont écriés : nous avons trouvé un nouveau Christ, voulant ainsi exprimer toute leur admiration et tout amour pour leur maître. Pour eux Christ n'est plus extérieur, mais intérieur. Ils lui ont ouvert la porte de leur âme ; il y est entré et, y a fait resplendir une gloire qu'ils n'avaient jamais connue jusque-là. Alors toute une révolution s'est accomplie dans leur vie spirituelle.

Cette nouvelle conception de Jésus est fertile en conséquences.

D'abord elle fortifie notre foi en lui. Quand, éclairés par le Saint-Esprit, nous avons salué en Jésus la puissance de Dieu même, nous ne mettons plus de bornes à son pouvoir et nous osons lui demander des choses qu'auparavant nous n'aurions jamais espérées, par exemple : être délivrés du péché, croître dans sa grâce, porter beaucoup de fruits à son service.

Elle fortifie aussi notre amour pour lui. C'est le Saint-Esprit qui nous révèle l'amour de Jésus, en le répandant dans nos coeurs. Cet amour, senti avec une puissance nouvelle, allume le nôtre et le fait brûler avec intensité. L'amour répond à l'amour. Celui de l'homme ne peut naître ni se développer que dans la révélation de celui de Dieu. Or, c'est seulement à l'âme qui s'est abandonnée complètement, que se manifeste par le Saint-Esprit, tout l'amour du Christ (Eph. 3, 19).

Elle nous donne une faim et une soif nouvelles de sa parole. La bible nous est précieuse dans la mesure où Jésus nous est précieux. Plus nous connaissons un Christ glorieux, plus nous désirons connaître cette parole dans laquelle il s'est révélé. Voici une règle absolue et universelle : un peu de foi Jésus, n'engendre que peu de zèle dans la lecture de la bible ; beaucoup de foi en lui la fait étudier avec passion.

Elle nous fait trouver de nouvelles délices dans la prière. La même raison qui nous pousse à écouter Dieu dans sa parole, nous porte à lui parler dans la prière. La vie sainte est par-dessus tout une vie de prière, puisque l'essence de la prière c'est le contact par excellence avec Dieu.

Elle fait naître dans nos coeurs un amour nouveau pour le peuple de Dieu.

«  Quiconque croit que Jésus est le Christ est né de Dieu ; et quiconque aime Dieu qui l'a engagé, aime aussi celui qui est né de lui  » (1 Jean 5, 1). Nous refaisons ainsi l'expérience de l'apôtre Jean. Nous nous sentons tous « unis en Jésus ». Plus nous aimons Jésus, plus nous aimons ses disciples. Un amour intense pour lui crée inévitablement un amour égal pour son peuple.

Enfin cette nouvelle conception de Christ développe et approfondit en nous le sentiment de sa présence. Il est peu de points sur lesquels le contraste soit plus frappant entre la vie consacrée et celle qui ne l'est pas. Lorsque l'abandon n'est pas complet, ce sentiment ressemble à une lumière fumeuse, vacillante, prête à s'éteindre : de là ce manque d'harmonie, ces nombreuses défaillances dans la vie de bien des chrétiens. Leur expérience religieuse est superficielle ; Dieu n'est pas dans toutes leurs pensées et ils éprouvent je ne sais quelle fatigue à l'y faire entrer. Ils ne prient pas sans cesse : ils ne demeurent pas en Christ. Alors quand la tentation se présente, ils sont pris à l'improviste et sont obligés de capituler.

Quel contraste lorsque le don de nous-mêmes est complet ! Nous ne perdons jamais le sentiment de la présence de Dieu. C'est quelque chose de continu qui va s'élargissant, s'approfondissant toujours. La nouvelle vision du Christ glorieux ne s'efface jamais de notre coeur. Sa présence nous devient aussi certaine que le fait même de notre existence. Nous marchons avec lui. Nous vivons avec lui. Notre vie et la sienne, vie humaine et vie divine, n'en forment plus qu'une : la vie sainte, «  Je suis crucifié avec Christ, et je vis, non plus moi-même, mais Christ vit en moi ; et si je vis encore dans ce corps mortel, je vis dans la foi au fils de Dieu, qui m'a aimé, et qui s'est donné lui-même pour moi » (Gal. 2, 20).

Cher lecteur, telle est la vie que vous pouvez vivre par un acte de complet abandon : vie de victoire, vie de paix, vie de joie parfaite. Telle est la vie à laquelle Dieu nous appelle. Avez-vous répondu à cet appel ? Avez-vous une vie sainte ? Etes-vous complètement au Seigneur ? Pouvez-vous chanter de tout votre coeur ces paroles du cantique :

Je suis à toi , gloire à ton nom suprême
O mon sauveur, je fléchis sous ta loi !
Je suis à toi, je t'adore, je t'aime !
Je suis à toi, toujours à toi !


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